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l'achat de blé par l'Union soviétique, ce qui, avec le premier choc pétrolier, fit baisser les réserves
et hausser les prix.
En même temps, cette crise est celle du système de production en série qui a atteint ses
limites tant à cause de la saturation des marchés
et de leur diversification que de l'inadéquation
de ce modèle de développement pour le tiers monde en plus de l'épuisement des matières
premières qu'il entraîne. De plus, on n'a pas su réaménager la structure institutionnelle pour faire
face à ces nouvelles réalités environnementales. En somme, la crise frappe surtout les pays qui
n’arrivent pas à s’ajuster aux nouvelles technologies, à relever les défis de l’économie
informationnelle et communicationnelle, ce qui a notamment été le cas de l’ancienne Union
soviétique (Castells, 1998 et 1999b).
En réalité, la crise économique, que l'on doit comprendre comme un problème
d'accumulation du capital, provient d'une double crise, l'une sur le plan de la demande et l'autre
sur le plan de l'offre (Leborgne et Lipietz, 1992; Lipietz, 1989). Sur le plan de la demande
d'abord, on peut relever deux phénomènes centraux : la concurrence internationale et la
diversification de la demande. D’un côté, la hausse de la compétition entre les États-Unis,
l'Europe et le Japon, et le relèvement des prix des matières premières, du pétrole surtout,
poussèrent les économies nationales à se tourner du côté de l'équilibre des exportations, ce qui les
força à adopter les normes internationales (Boyer, 1986). D'un autre côté, on a vu s'affirmer de
nouvelles demandes pour des biens de consommation plus diversifiés (Piore et Sabel, 1989) à
travers lesquels les individus cherchent de plus en plus à se différencier (Aglietta et Brender,
1984). De plus, de nouveaux groupes de pression et mouvements sociaux résistent à l'imposition
d'un modèle de consommation de masse (Bélanger et Lévesque, 1991).
Mais c'est sans doute du côté de l'offre que la crise se révèle à la fois plus complexe et
plus profonde. Elle apparaît d'abord sous la forme d'une baisse du taux de productivité, d'une
“chute de profitabilité” (Leborgne et Lipietz, 1992), donc de rentabilité du capital (Aglietta,
1982; Lipietz, 1989). Ces symptômes nous révèlent les limites du fordisme comme système de
production aussi bien que de consommation. Tout d'abord, les méthodes tayloristes et fordistes
d'organisation du travail ont atteint leurs limites techniques : la parcellisation poussée des tâches
Cette position a déjà été critiquée par Lipietz (1989) ainsi que par Leborgne et Lipietz (1992).