Chapitre 7 : Intégration européenne et politiques économiques et sociales (d'après http://brises.org/) 1 / 11
CHAPITRE 7 : Intégration européenne et politiques économiques et
sociales
Introduction
Nous avons vu, dans le chapitre précédent, comment la mondialisation s'est développée. En particulier, la création d'Unions
régionales a favorisé le développement des échanges au sein d'une zone.
Vous vous souvenez sans doute aussi que ce libre échange est censé apporter un surcroît de croissance économique. C'est pour
cela que des Unions régionales ont vu le jour, comme la CEE devenue Union Européenne mais aussi comme d'autres Unions
régionales comme l'ALENA qui regroupe le Canada, les États-Unis et le Mexique), le MERCOSUR en Amérique Latine ou
l'ASEAN en Asie.. Vous n'avez pas oublié aussi que le libre échange s'est épanoui dans le cadre du GATT puis de l'OMC dans
lesquelles les négociations se déroulent entre États. Et, si un principe bien connu veut que l'union fait la force, cela peut être vrai
aussi dans les négociations économiques internationales. On peut en effet penser que lorsque des pays se regroupent pour
négocier, ils auront plus d'influence si ensembles ils représentent une part plus importante du commerce international, des IDE,
etc. C'est aussi un des aspects qui peut expliquer l'intégration poussée de l'Union européenne.
Cependant, l'Union européenne n'a pas été construite uniquement pour des raisons économiques et les raisons économiques ne se
résument pas aux bienfaits supposés du libre échange et de la spécialisation internationale. S'il est vrai comme le dit Montesquieu
que « partout il y a du commerce, il y a des mœurs douces », l'objectif de paix entre les Nations européennes, car c'était cela
l'objectif fondamental des « pères de l'Europe », pouvaient passer par des échanges plus libres pour rapprocher les peuples.
Mais il faut préciser que la construction européenne s'est faite aussi par une coopération entre États dans des domaines d'activité
clés à l'époque (énergie : charbon ; agriculture ; etc.) montrant la volonté des États européens de nouer des liens forts susceptibles
de rendre nécessaires leur bonne entente. Les politiques communes, vous l'approfondirez dans ce chapitre, ont donc accompagné
dès le début le développement de l'Union européenne. Aujourd'hui, les questions essentielles que posent ces politiques communes
concernent plus particulièrement les contraintes liées à cette coopération économique, les difficultés et les moyens de cette
coopération mais aussi les bénéfices possibles d'une coopération réussie. La paix étant une réalité au sein des pays de l'Union
européenne, l'économique de simple moyen est devenu l'enjeu principal des discussions européennes : quelles politiques
budgétaires, quelle politique monétaire, quelle politique de concurrence, etc. Avec bien sûrs tous les enjeux sociaux et politiques
qui en découlent !
1 - L'Union européenne et la dynamique de l'intégration régionale.
L’idée d’Union Européenne est ancienne, et avait souvent été invoquée comme remède aux sempiternelles guerres qui
ravageaient le continent. Elle s’est imposée avec plus d’évidence après 1945, quand l’Europe dévastée s’est retrouvée sous la
domination des deux super-puissances issues de la seconde guerre mondiale.
Mais la construction ex nihilo d’une fédération européenne s’est vite révélée trop difficile dans une Europe encore politiquement
divisée et travaillée par les méfiances entre nations, surtout après l’échec de la Communauté Européenne de Défense (1954). Les
partisans de l’unification européenne ont donc pris le parti d’une construction progressive et originale : initier des coopérations
entre les États, tout particulièrement au niveau économique elles sont mutuellement profitables, pour développer la solidarité
et rendre nécessaire la création d’institutions européennes, lesquelles constitueraient la base d’une future fédération européenne.
C’est ce processus que nous allons étudier maintenant, en examinant d’abord les différentes étapes de l’intégration économique
européenne, avec ses justifications économiques, pour ensuite étudier comment cette intégration suscite la création d’institutions
communautaires. Pour finir, nous essaierons de comprendre pourquoi l’étape finale de ce processus la création d’une Europe
politique est à la fois plus nécessaire que jamais et toujours aussi difficile à concrétiser.
1.1 - L'intégration économique en Europe : le choix de la libéralisation des échanges.
La coopération entre états européens a parfois pris la forme de projets industriels (on pense notamment à Airbus ou Arianespace),
mais l’intégration économique s’est surtout faite par la libéralisation des échanges économiques entre les nations d’Europe
c’est-à-dire par l’instauration progressive d’un libre échange presque total. Voyons d’abord les étapes de cette libéralisation et les
avantages que l’on en attendait.
1.1.1 - Les pays européens ont progressivement libéralisé leurs échanges économiques
Le premier pas de l’intégration économique fut la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier (CECA) : La RFA, la
France, l’Italie, les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg supprimaient toutes barrières douanières et toutes formes de
protections dans les secteurs du charbon et de l’acier secteurs symboliques s’il en était puisqu’à l’époque ces deux matériaux
constituaient le « nerf de la guerre ». Mais très vite, l’intégration européenne a gagné en profondeur et en envergure.
La Communauté Économique Européenne. Le traité de Rome de 1957 instaure une union douanière : suppression des
barrières tarifaires entre les pays signataires et instauration d’un tarif extérieur commun. Une entité internationale – la
Communauté Économique Européenne (CEE) est créée avec des institutions (Commission, Conseil et Parlement
européens) afin de piloter cette union. Elle reçoit en plus une compétence exclusive sur les politiques agricoles, des
transports et sur la politique commerciale extérieure, qui seront donc désormais des politiques européennes et non plus
nationales. La CEE passe de 6 membres en 1957 à 12 en 1986, en intégrant le Royaume-Uni, le Danemark et l’Irlande
(1973), la Grèce (1981, l’Espagne et le Portugal (1986).
L’Acte Unique et le Grand Marché. Adopté en 1986 par les pays membres de la CEE, l’Acte Unique est en fait l’ensemble des
règlements qui permettent la réalisation du Grand Marché, c’est-à-dire l’abolition définitive de toutes formes de barrières
entre les pays membres permettant une libre circulation des marchandises, des services, des capitaux et des hommes (les « 4
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libertés »). C’est en quelque sorte la base du droit européen qui va désormais s’imposer aux droits nationaux. Ce traité
élargit aussi les compétences de la CEE à trois autres domaines : Recherche et développement, Environnement et Politique
étrangère commune.
L’Union économique et Monétaire. Signé en février 1992, ce traité fonde l’Union Européenne et lance l’ambitieux projet d’Union
Économique et Monétaire : en 1999, les pays signataires adoptent une seule et même monnaie, l’euro, qui entre en circulation en
2002. Les banques centrales des pays sont fusionnées en une seule banque centrale indépendante : la Banque centrale
Européenne. Après 1992, l’Union Européenne s’élargit encore à la Suède, l’Autriche et la Finlande (1995), à l’Estonie, la
Lituanie, la Lettonie, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie, la Slovénie, la Hongrie, Malte et Chypre (2004), à la
Roumanie et à la Bulgarie enfin (2007). Cependant, tous les pays membres de l’UE n’adoptent pas l’euro : Royaume-Uni et
Suède choisissent de rester en dehors, tandis que parmi les pays ayant adhéré en 2004 et 2007, seuls Chypre, Malte et la Slovénie
ont intégré l’UEM.
1.1.2 - …dans l’espoir que le libre échange dynamisera leur croissance économique
La principale justification de cette libéralisation complète des échanges est, comme vous l’avez vu au chapitre 6, la stimulation de
l’efficacité économique et de la croissance. Nous allons rappeler brièvement ces arguments.
La libéralisation des échanges améliore la productivité des facteurs de production. C’est la thèse de D.Ricardo qui vous avez
découverte au chapitre précédent : le libre échange incite les économies nationales à se spécialiser en fonction de leur
avantage comparatif, ce qui permet une hausse globale de la productivité des facteurs de production, donc un accroissement
de la richesse produite.
L’accroissement de la taille des marchés et les économies d’échelle. C’est la deuxième grande justification du libre échange : la
constitution d’un vaste marché par l’ouverture des frontières commerciales accroît les débouchés des entreprises, et
l’accroissement de la production qui en résulte permet de réaliser des économies d’échelle. Le libre échange permet donc la baisse
des coûts de production et donc des prix, ce qui stimule le pouvoir d’achat des agents économiques.
Les effets de la concurrence sur les prix et la compétitivité. Enfin, l’intensification de la compétition entre les entreprises liée à
la libéralisation des échanges favorise encore la baisse des prix des biens et services. C’est pourquoi la Commission
Européenne mène une politique particulièrement active pour tenter de faire respecter la concurrence sur le Grand Marché
européen.
1.2 - L'intégration économique rend nécessaire des politiques communes.
Puisqu’un choix de libéralisation des échanges a été privilégié pour favoriser la croissance dans le cadre de l’intégration
économique européenne, il faut évidemment fixer un cadre commun de politiques économiques. En son absence, Il y aurait des
risques importants d'observer une concurrence « faussée » entre les différents pays membres. Les politiques communes de l'Union
Européenne portent alors principalement sur l’établissement de règles de commerce collectives et des politiques d’entraide, ce à
quoi il faut ajouter la gestion de la monnaie unique.
1.2.1 - Une politique commerciale commune est nécessaire puisqu’il n’y a plus de frontières
économiques à l’intérieur de l’Europe
Les frontières entre les pays membres de l'UE sont totalement ouvertes au commerce: cela signifie donc une liberté de circulation
de tous les biens et services en Europe. Dans ces conditions, une politique commerciale commune devient absolument
indispensable pour éviter les distorsions de concurrence entre pays.
En ouvrant totalement les frontières à la circulation des biens et services, des capitaux et des hommes, l’Europe ne peut plus
accepter l’existence de politiques commerciales indépendantes des États. En effet, comment pourrait-on avoir des droits de
douane moins élevés en France qu’en Allemagne pour un me produit, comme des écrans plasma venant de Corée, alors
qu’une fois importée en France, ces produits peuvent librement être expédiés en Allemagne? Il y aurait à l’évidence une
distorsion de concurrence entre le distributeur français et le distributeur allemand. La politique commerciale extérieure
commune consiste donc nécessairement à appliquer un seul tarif extérieur (ce qui revient à fixer des droits de douane
identiques) et une seule politique en matière de quotas.
Les 27 pays de l’Union Européenne, en appliquant cette règle, parlent donc d'une seule voix sur la scène internationale: ils ont
effectivement un tarif extérieur commun, et les mêmes barrières non tarifaires quand cela est nécessaire. C’est par ailleurs
désormais la Commission Européenne qui négocie directement avec l’O.M.C (Organisation Mondiale du Commerce)
l’application des règles du commerce international: les pays membres ne siègent plus à l'O.M.C. en tant que tels, ils sont
juste chargés de donner un mandat de négociation à la Commission et surveillent sa mise en œuvre. Cela donne évidemment
à l’Union Européenne plus de poids qu'à n'importe lequel des pays membres s'il siégeait individuellement.
Parallèlement, l'Union Européenne peut aussi décider d’accorder des préférences tarifaires donnant un accès privilégié au marché
européen à certains PED. L’objectif est ici un peu différent que de s’accorder sur un tarif commun. Il s’agit en fait de participer au
développement de ces pays en proposant une coopération économique, par l’intermédiaire d’une politique commerciale
commune. C’est notamment le cas des accords de Cotonou signés entre les 27 membres de l’UE et 79 pays d’Afrique, des
Caraïbes, et du Pacifique, connus sous le sigle ACP. Cet accord tarifaire permet de garantir une certaine stabilité des prix à l’achat
pour les produits agricoles ou miniers venant des pays ACP.
1.2.2 - Une politique commune de concurrence est nécessaire pour réguler les échanges
marchands au sein de l’Europe
La Commission européenne a toujours affirmé que l'organisation d'une concurrence libre et non faussée était une prérogative
exclusivement européenne et que les États ne pouvaient fixer leurs propres règles de concurrence. Trois séries d'arguments le
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justifient.
Une politique commune de concurrence est tout d'abord nécessaire afin d'éviter que les pays membres ne se fassent la guerre
économique via des subventions, officielles ou déguisées, qui avantageraient certains producteurs nationaux. Ce serait très
coûteux pour le budget des États, et au final inefficace, puisque tous les États seraient dans l’obligation d’apporter au
minimum le me montant de subvention que le pays voisin pour permettre à ses producteurs nationaux de survivre. Pour
éviter cela, la Commission Européenne dispose de pouvoir de police particulier: elle sanctionne le versement d'aides
gouvernementales indues. Elle précise aussi les conditions exceptionnelles auxquelles un soutien à des entreprises en
difficultés peut être acceptable. Ainsi, la commission européenne a accepté que l'État français verse une aide de près de 4
milliard de francs à la banque Crédit Lyonnais en 1997, à la condition express que la banque réduise de 20% le nombre de
ses agences et vende toutes ses filiales européennes. L'aide devait uniquement servir à sauver cette banque très endettée et le
Crédit Lyonnais ne pouvait donc pas utiliser la subvention pour se développer, bien au contraire.
De la même manière, il faut éviter que ne se constituent des entreprises géantes qui disposeraient de pouvoirs exorbitants sur
les marchés. En effet, la constitution de tels monopoles remet en cause l’existence même d’une concurrence favorable aux
consommateurs. Une firme en monopole dispose d’un «pouvoir de marché» qui lui permet de proposer des biens et services
de qualité moindre, ou de pratiquer des prix plus élevés que la normale. Pour éviter cela, l'Union Européenne, par la
Commission, contrôle les fusions-acquisitions entre entreprises, et interdit les ententes ou les cartels de producteurs. Cette
pratique s’apparente à la politique «antitrust» menée aux États-Unis. Les abus de position dominante sont elles aussi
combattues. C’est ainsi que la Commission a condamné lourdement la société Microsoft qui utilisait sa position de leader sur
les systèmes d’exploitation (avec XP ou Vista) pour imposer des logiciels associés comme Mediaplayer ou Windows
Messenger.
De même, les normes (de toutes sortes) sont de plus en plus souvent décidées au niveau européen: ces règles ou ces
appellations sont un moyen d'uniformiser relativement les standards de production des biens et services fabriqués en Europe.
Ainsi, on ne peut plus persuader les consommateurs que 2 produits équivalents sont en réalité de qualité très différente car
fabriqués selon des normes différentes. L'objectif est de limiter la concurrence monopolistique : les producteurs ne sont plus
en mesure de jouer sur la différenciation des produits pour justifier de prix plus élevés. Ainsi, dans le domaine alimentaire, il
n'y a pratiquement plus de normes nationales (par exemple, l'appellation «chocolat», jusqu'alors strictement réglementée en
France, dépend maintenant du droit européen qui autorise cette appellation pour des produits contenant autre chose que du
beurre de cacao). Toute une réglementation européenne s'est donc développée qui encadre les réglementations nationales et
qui s'impose à elles.
1.2.3 - Une politique d’aides structurelles est nécessaire pour aider les régions les plus pauvres à
se développer et rattraper le niveau de vie européen
La construction de l'Union Européenne, si elle est avantageuse économiquement parlant globalement, ne profite pas également à
toutes les régions. Certaines régions, en particulier parce qu'elles sont excentrées ou à tradition agricole, peuvent accumuler des
retards de développement. Il faut trouver les moyens de les réduire.
L'Union Européenne a donc tenté de lutter contre ces écarts par des aides financières importantes versées aux gions en
difficultés. La politique commune relève dans ces cas de l’équité entre les territoires : il n'est guère acceptable d'avoir un
marché commun unifié avec des zones délaissées où le niveau de vie est plus faible. C'est à ce titre que des régions
françaises comme la Lorraine ont reçu des fonds européen leurs permettant un développement économique. Après avoir
bénéficié principalement au Portugal, à l'Espagne et à la Grèce, cette politique d'aide sert désormais à promouvoir le
rattrapage des nouveaux États membres de l'est européen, en particulier en finançant le développement des infrastructures de
transport ou de télécommunications.
L'Europe dispose pour cela de fonds structurels dédiés au développement économique des régions. Ces fonds sont sormais
au nombre de deux : le fonds européen de développement régional (FEDER) et le fonds social européen (FSE). Le FEDER
finance des infrastructures, des investissements productifs pour créer de l'emploi, des projets de développement local et des
aides aux PME; alors que le FSE favorise l'adaptation de la population active aux mutations du marché de l'emploi ainsi que
l'insertion professionnelle des chômeurs et des groupes désavantagés, notamment en finançant des actions de formation et
des systèmes d'aide à l'embauche.
Pour la période 2007/2013, le budget total de ces fonds est estimé à plus de 300 Milliards d'euros. Ces fonds financent jusqu
50% des travaux d'infrastructure et représentent 40% du budget européen. Ils permettent d'assurer la nécessaire convergence des
économies, l'attractivité des régions et les coopérations transfrontalières. Il y a donc une vraie volonté européenne d'aider les
régions les plus pauvres à rattraper le revenu moyen de l'UE.
1.2.4 - Une politique monétaire commune est nécessaire puisqu’il n’y a plus qu’une seule
monnaie européenne dans l'UEM
La gestion de la monnaie unique est naturellement une prérogative européenne. La monnaie unique européenne, l'euro, a
consolidé les avantages de l’intégration économique, mais la conduite de la politique monétaire demeure un exercice très difficile.
Il est en effet indispensable d’avoir une politique monétaire commune pour asseoir la «crédibilité» de la monnaie - c’est à dire
la capacité à convaincre les agents économiques que les objectifs monétaires annoncés seront effectivement atteint -, et ce
alors que les situations économiques des États membres sont parfois très diverses. A titre d’exemple, l’inflation en Irlande
est en moyenne deux fois plus forte que dans la zone Euro sur la période 2002-2008, du fait d’une croissance plus forte. La
politique monétaire commune doit donc permettre de développer à la fois la croissance de la zone Euro dans son ensemble,
et ne pas altérer les conditions économiques d’un État en particulier. La Banque Centrale Européenne est chargée de
conduire cette politique monétaire commune, de manière totalement indépendante des pouvoirs politiques. Cette
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indépendance est la garantie que la politique menée ne sera pas influencée par un ou des États membres à leur seul avantage.
Ainsi le président de la BCE, une fois désigné, est totalement libre des décisions qu’il prend dans le cadre des missions de la
banque centrale. Il allait de soi lors de la constitution de l'euro que les décisions monétaires seraient du ressort d'une banque
centrale indépendante, mais qu'un organe de concertation serait maintenu: c'est l'Eurogroupe qui rassemble les ministres de
l’économie et des Finances des pays de la zone euro, auxquels s’ajoutent le président de la BCE et un représentant de la
Commission.
La mission principale de la BCE est de défendre la stabilité des prix, et donc d’éviter la propagation de l’inflation dans la zone
euro. Elle a notamment pour mandat de réagir à l’évolution de l’indice des prix de l’ensemble de la zone euro (indice des
prix à la consommation harmonisé construit par EUROSTAT). En fonction de l’évolution de ces prix, la BCE agit avec deux
instruments principaux : le contrôle de la masse monétaire et les taux d’intérêt. En particulier, en maintenant des taux
d’intérêt relativement plus élevés qu’ailleurs, la BCE peut limiter l’accès au crédit et la création monétaire (souvenez vous
de vos cours de Première sur la monnaie). La création monétaire est en effet une des sources importantes de l’inflation.
Certains estiment cependant que la politique monétaire commune privilégie davantage la lutte contre l’inflation que la
croissance économique de la zone (voir la question du pacte de stabilité et regardez bien la partie 212).
Le niveau de taux de change n’est pas un objectif particulier de la BCE. Cependant le niveau de l'euro face au dollar a
notamment des effets sur l’inflation, via la variation des prix des produits importés. L'Europe a donc implicitement intérêt à
s'accorder sur un taux de change qui serait «acceptable» pour l'économie européenne. Ainsi, si l'euro s’apprécie face au
dollar, les produits étrangers achetés en dollar paraissent après conversion en euro relativement moins chers : l’inflation
importée diminue. C'est en particulier intéressant pour les prix pétroliers.
Certaines politiques communes sont donc la contrepartie directe de l’intégration économique, quand d’autres sont le résultat
mécanique de la mise en place de la monnaie unique. Ces politiques communes montrent par ailleurs clairement, par leur
existence même, que l'Union Européenne est bien plus qu'une simple zone de libre-échange. Peut-on pour autant parler d'union
politique?
1.3 - L'intégration économique appelle-t-elle l'Union politique ?
Nous avons déjà souligné quand nous avons présenté les étapes de la construction européenne que l'intégration européenne n'était
pas seulement économique. Il faut maintenant revenir sur cet aspect en montrant comment, peu à peu, l'Union européenne a
construit des institutions qui emmènent sans doute les États membres de plus en plus vers la construction d'une Europe politique.
1.3.1 - Des institutions européennes supranationales sont nécessaires pour mener les politiques
communes.
Pour que des politiques communes puissent être décidées, financées puis appliquées, il est nécessaire qu'existent des institutions à
la légitimité reconnue par les États membres et dotées de compétences précises. Nous allons présenter d'abord ces institutions
communes.
Aujourd'hui, l'Union européenne dispose d'institutions politiques qui proposent et votent les décisions applicables dans l'ensemble
des pays membres. Elle dispose aussi d'institutions plus spécialisées dont les compétences sont clairement délimitées.
Les institutions politiques générales: on peut dire, qul'image d'un pays, l'Union européenne dispose d'un exécutif et d'un
législatif :
La Commission européenne est l'exécutif de l'Union européenne. Elle siège à Bruxelles. Au lendemain des élections
européennes de juin 2004, elle ne comprend qu’un seul commissaire par pays. Depuis l’adhésion de la Roumanie et
de la Bulgarie en 2007, elle est composée de 27 membres. C’est le maximum prévu par le traité de Nice qui prévoit
que désormais le nombre de commissaires sera inférieur au nombre d'États membres, un système de rotation devant
être mis en place dès 2009. Elle est actuellement dirigée par le commissaire Portugais José Manuel Barroso. Ses
membres sont désignés par les gouvernements des États membres pour cinq ans (au lendemain de chaque élection
européenne) et leur nomination doit être approuvée par le Parlement européen. Organe exécutif de l’UE, elle est
politiquement responsable devant le Parlement qui peut la démettre en votant une motion de censure. Elle remplit 4
fonctions : elle soumet des propositions au Parlement et au Conseil de l’Union (organes législatifs) ; gère le budget de
l’UE et applique les politiques décidées ; fait appliquer le droit européen ; représente l’Union sur la scène
internationale.
Le Conseil européen, à ne pas confondre avec le Conseil de l’Union européenne, est l’héritier des conférences des chefs d'État et
de gouvernement des pays de l’UE qui composent ce Conseil. Il fixe les grandes orientations, les priorités et donne l’impulsion
politique aux projets de l’Union. Il est donc le centre de décision politique de l’UE, il est présidé par le chef d'État ou de
gouvernement dont le pays exerce pour six mois la présidence du Conseil de l’Union européenne.
Le Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne exercent le pouvoir législatif. Le Parlement européen représente les
peuples, il est élu directement tous les 5 ans par les citoyens des différents pays. Le Conseil de l'Union européenne, que l'on
appelait autrefois Conseil des Ministres, représente les États membres, c'est-à-dire les gouvernements de chaque pays. Sa
présidence change tous les six mois et chaque pays de l’UE l’occupe à tour de rôle. Ces deux institutions, en collaboration,
examinent et adoptent toute la législation s'appliquant dans l'Union et approuvent le Budget européen. Le Conseil s'occupe aussi
de toutes les questions relatives à la coopération dans les domaines de la politique étrangère, de la sécurité et de la justice.
Les institutions spécialisées: elles ont un domaine de compétences particulier. On peut citer, de manière très limitative :
La Cour de Justice : elle règle les différends (c'est-à-dire les conflits) entre États membres quant à l'interprétation des
traités et de la législation européenne. Elle peut imposer des sanctions, par exemple des amendes.
La Banque centrale européenne (B.C.E.): elle a pour mission de gérer la monnaie unique, c'est-à-dire l'euro, par
exemple en fixant les taux d'intérêt, dans un objectif de stabilité des prix. Elle conduit donc la politique monétaire
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commune désormais des 15 pays membres de la zone euro depuis le 1er janvier 2008.
Le Comité des Régions compode représentants des autorités locales et régionales, permet de consulter ces autorités sur des
questions relatives à l'éducation, aux transports, par exemple, domaines qui sont souvent de compétence régionale plutôt que
nationale.
La Cour des comptes vérifie les recettes et les dépenses du budget de l’UE gérée par la Commission et s’assure de la légalité des
mouvements financiers. Cependant si elle donne un avis, elle ne possède aucun pouvoir juridique.
Le Comité économique et social est aussi un organe consultatif qui représente les syndicats de salariés, les employeurs, des
représentants de groupes d’intérêt. Il représente la société civile.
On voit que l'Europe a construit des organes qui lui permettent de prendre des décisions politiques, bien au-delà des aspects
économiques. Munie de ces institutions, l'Union européenne a pu mettre en place des politiques mais cela pose alors le problème
de la supranationalité : dans quelle mesure les États membres conservent-ils leur pouvoir national ? se soumettent-ils à un pouvoir
supranational ? Quel partage des tâches s’est mis en place entre l’UE et ses États membres ?
1.3.2 - Le partage des tâches entre l’Union et les États membres est normalement déterminé par
le principe de subsidiarité …
Le principe de subsidiarité, affirmé lors du Traité de Maastricht en 1992, permet de décider ce qui relève de compétences
communautaires quand il y a doute ou désaccord. En quoi consiste-t-il ? C'est l'affirmation que ne relèvent de la compétence
communautaire, que les domaines dans lesquels l'action de la Communauté sera plus efficace que l'action des États. Ce
principe évite ainsi que les États ne soient dessaisis de leur initiative et de leur responsabilité dans tous les domaines la
décision ne s’impose pas au niveau communautaire.
On peut penser, par exemple, que dans le domaine de la pollution, qui ne connaît pas les frontières nationales, très souvent,
l'efficacité sera plus grande si la lutte est menée au niveau européen plutôt qu'au niveau national. Il existe également de
nombreuses infrastructures, dont tout le monde bénéficiera mais dont le coût est tel que, s'il devait être supporté par des
États, elles ne seraient pas financées. C’est l’exemple du projet en cours de la liaison ferroviaire Lyon Turin passant par les
Alpes pour développer le ferroutage. Il est donc logique, par l'application du principe de subsidiarité, que ce soit l'Union
européenne qui le finance en partie.
1.3.3 - … Mais il est difficile de concilier les intérêts nationaux et l’intérêt général.
Le problème de la décision politique : pondération des voix et droit de veto.
Les modalités de prise de décision concernent le Conseil de l’Union. Elles varient selon le domaine concerné :
La majorité simple s’applique pour les décisions de procédure, tel le règlement intérieur, l’organisation du Secrétariat
général du Conseil …
La majorité qualifiée s’applique pour les décisions les plus nombreuses concernant le marché intérieur, les politiques
de visas, la coordination des politiques économiques, monétaires … Dans ce cas, chaque État dispose d’un nombre de
voix en rapport avec son poids démographique, c’est ce que l’on appelle une pondération de voix. Par exemple, la
France dispose de 29 voix (comme l’Allemagne, l’Italie et le Royaume-Uni) alors que Malte ne dispose que de 3
voix. Dans l’UE à 27, le total de voix s’élève à 345 : il faut 255 voix pour atteindre la majorité qualifiée (presque
trois quart des voix). Pour qu’il soit adopté, un texte doit recueillir au moins 62% de la population totale de l’UE.
Le vote à l’unanimité s’applique aux décisions concernant la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), la
coopération policière et judiciaire en matière pénale, pour amender une proposition de la Commission et pour toute
décision d’ordre constitutionnel (révision des traités, adhésion de nouveaux membres …). En fait, le Conseil affiche
une tendance à rechercher l’unanimité me quand elle n’est pas obligatoire comme sur la fiscalité pour
l’harmoniser, ou la politique sociale.
Chaque pays membre détient de fait un droit de veto quand le Conseil doit se prononcer à l’unanimité. Ce droit est ainsi
revendiqué par exemple par des pays sur la demande d’adhésion très controversée à ce jour de la Turquie à l’Union
européenne.
Pondération des voix et droit de veto sont l’objet de négociations intenses dans le cadre des traités et de leur évolution
nécessaire pour tenir compte de la réalité de l’élargissement de l’Union européenne : cette dernière à 27 ne peut fonctionner
sur les mêmes principes qu’à l’époque des six membres fondateurs. Cette question centrale a été prise en compte en
particulier dans le traité de Nice (2001), ainsi que le projet de traité constitutionnel européen en 2004, texte rejeté en 2005
par référendum en France et aux Pays Bas. Aujourd’hui le traité modificatif européen de Lisbonne en cours de ratification,
reprend cette question des modalités de décision.
L’intégration économique peut-elle se traduire alors par une plus grande intégration politique ?
L’évolution des traités montre une volonté de dépasser la simple coopération inter-étatique pour conduire à une véritable
intégration. Cela se remarque par l’extension de la codécision et du vote à la majorité qualifiée.
Le rôle mocratique du Parlement européen est élargi dès 1992 par la procédure de la codécision qui en fait un co-législateur à
égalité avec le Conseil de l’UE.
La capacité de décision est renforcée par la limitation des domaines l’unanimité est requise, extension qui conduit un État qui
n’a pas voté une décision, d’être tenu de l’appliquer.
Enfin l’Union européenne se dote de véritables représentants : un premier Président du Conseil européen, véritable Président de
l’Europe, est censé prendre ses fonctions le 1er janvier 2009.
Mais quelle définition donner de l’intérêt général dans l’Union européenne : intérêt commun ou intérêt supranational ?
En termes plus politiques, l'Union européenne devrait-elle tendre vers plus de fédéralisme ? Le fédéralisme supposerait que de
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