jld/2004-2005/liberté et morale
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Notions : la morale ; la liberté ; le devoir ; le bonheur ;le sujet ; la
conscience ; autrui ; le corps et l’esprit ; le désir.
Introduction ......................................................................................................................................................................... 1
I. La liberté : fondement de la morale.................................................................................................................................. 2
1) Morale et liberté naturelle : le devoir. ......................................................................................................................... 2
2) Le dualisme ................................................................................................................................................................. 2
3) L’autonomie et l’impératif catégorique. ...................................................................................................................... 2
II. La liberté, un postulat métaphysique .............................................................................................................................. 3
1)Le postulat de la liberté. ............................................................................................................................................... 3
2) Généalogie du postulat de la liberté et signification de la morale ............................................................................... 3
III. La négation de la liberté de la volonté comme condition de la vie éthique (dépassement du nihilisme). ...................... 4
1) Le rejet du présupposé de la dualité de la nature humaine .......................................................................................... 4
2) Ce que nous sommes. .................................................................................................................................................. 5
3) Désir et liberté de la volonté. ...................................................................................................................................... 5
4) Désir et libération : éthique et morale. ........................................................................................................................ 5
Conclusion ........................................................................................................................................................................... 6
Introduction
« 37. QUE LA PRINCIPALE PERFECTION DE L'HOMME EST D'AVOIR UN LIBRE ARBITRE, ET QUE C'EST CE QUI LE REND
DIGNE DE LOUANGES OU DE BLAMES.
La volonté étant, de sa nature, très étendue, ce nous est un avantage très grand de pouvoir agir par son moyen, c'est-à-dire
librement; en sorte que nous soyons tellement les maîtres de nos actions, que nous sommes dignes de louanges lorsque nous les
conduisons bien: car, tout ainsi qu'on ne donne point aux machines qu'on voit se mouvoir en plusieurs façons diverses, aussi
justement qu'on saurait désirer, des louanges qui se rapportent véritablement à elles, parce que ces machines ne représentent
aucune action qu'elles ne doivent faire par le moyen de leurs ressorts, et qu'on en donne à l'ouvrier qui les a faites, parce qu'il a
eu le pouvoir et la volonté de les composer avec tant d'artifice; de même on doit nous attribuer quelque chose de plus de ce que
nous choisissons ce qui est vrai lorsque nous le distinguons d'avec le faux par une détermination de notre volonté que si nous y
étions déterminés et contraints par un principe étranger. » Descartes, Principes de la philosophie, , art.37
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I. La liberté : fondement de la morale
1) Morale et liberté naturelle : le devoir.
« De tout ce qu’il est possible de concevoir dans le monde (…), il n’est rien qui puisse sans
restriction être tenu pour bon, si ce n’est seulement une VOLONTE BONNE »
KANT, Fondements de la métaphysique des mœurs, p.55 .
Mais il faut alors établir une distinction entre:
Agir par devoir, c’est-à-dire agir en soumettant son action au devoir.
Et agir seulement conformément au devoir, c’est-à-dire agir en apparente conformité avec le devoir, mais sans que ce
soit lui qui ait déterminé l’action, agir en faisant passer son intérêt « égoïste » pour le devoir.
La morale juge ce qui détermine intérieurement le sujet à agir : ce qu’il doit faire ( le devoir ), indépendamment de ce qu’il
est porté naturellement ( spontanément ) à faire. La loi juridique juge la conformité extérieure de l’acte avec la loi.
2) Le dualisme
3) L’autonomie et l’impératif catégorique.
« Agis uniquement d’après la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu’elle devienne
une loi universelle » (Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs, p.94).
L’impératif catégorique peut prendre la forme de l’impératif pratique:
« Agis toujours de telle sorte que tu traites l’humanité aussi bien en ta personne que dans la
personne de tout autre en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen. »
(Id., p.105 )
Ce qui a une valeur intrinsèque (en soi ), absolue, c’est la bonne volonté, la volonté d’un être en tant qu’il est rationnel: c’est
la personne humaine.
Ainsi, les choses ont un prix. Seule la personne humaine a une valeur, c’est-à-dire une dignité :
« Tout a un PRIX ou une DIGNITE. Ce qui a un prix peut être aussi bien remplacé par quelque chose
d’autre, à titre d’équivalent ; au contraire, ce qui est supérieur à tout prix, ce qui par suite n’admet
pas d’équivalent, c’est ce qui a une dignité. » ( Id. p.113 )
le mensonge pernicieux
« Prenons un acte volontaire, par exemple un mensonge pernicieux, par lequel un homme a introduit un certain
désordre dans la société, dont on recherche d’abord les raisons déterminantes, qui lui ont donné naissance,
pour juger ensuite comment il peut lui être imputé avec toutes ses conséquences. Sous le premier point de
vue, on pénètre le caractère empirique de cet homme jusque dans ses sources que l’on recherche dans la
mauvaise éducation, dans les mauvaises fréquentations, en partie aussi dans la méchanceté d’un naturel
insensible à la honte, qu’on attribue en partie à la légèreté et à l’inconsidération, sans négliger les
circonstances tout à fait occasionnelles qui ont pu influer. Dans tout cela, on procède comme on le fait, en
général, dans la recherche de la série des causes déterminantes d’un effet naturel donné. Or, bien que l’on
croie que l’action soit déterminée par là, on n’en blâme pas moins l’auteur et cela, non pas à cause de son
mauvais naturel, non pas à cause des circonstances qui ont influé sur lui, et non pas même à cause de sa
conduite passée ; car on suppose qu’on peut laisser tout à fait de ce qu’a été cette conduite et regarder
la série écoulée des conditions comme non avenue, et cette action comme entièrement inconditionnée par
rapport à l’état antérieur, comme si l’auteur commençait absolument avec elle une série de conséquences. Ce
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blâme se fonde sur une loi de la raison l’on regarde celle-ci comme une cause qui a pu et a déterminer
autrement la conduite de l’homme, indépendamment de toutes les conditions empiriques nommées. Et l’on
n’envisage pas la causalité de la raison comme une sorte de concours, mais comme complète en elle-même, alors
même que les mobiles sensibles ne lui seraient pas du tout favorables mais tout à fait contraires ; l’action est
attribuée au caractère intelligible de l’auteur : il est entièrement coupable à l’instant il ment ; par
conséquent, malgré toutes les conditions empiriques de l’action, la raison était pleinement libre, et cet acte
doit être attribué entièrement à sa négligence.
On voit aisément par ce jugement d’imputabilité que, dans ce jugement, on a dans la pensée que la
raison n’est nullement affectée par toute cette sensibilité, qu’elle ne se modifie pas (bien que ces phénomènes,
je veux dire la manière dont elle se montre dans les effets, se modifient), qu’il n’y a pas en elle d’état
antérieur qui détermine le suivant, que, par suite, elle n’appartient pas du tout à la série des conditions
sensibles qui rendent nécessaires les phénomènes suivant des lois naturelles. Elle est, cette raison, présente
et identique dans toutes les actions qu’accomplit l’homme dans toutes les circonstances de temps, mais elle
n’est pas elle-même dans le temps et elle ne tombe pas, pour ainsi dire, dans un nouvel état dans lequel elle
n’était pas auparavant ; elle est déterminante, mais non déterminable par rapport à tout état nouveau. »
Emmanuel Kant, Critique de la Raison pure,
trad. A. Tremesaygues et B. Pacaud, P.U.F., 1980
Ainsi, un acte ne peut être évalué moralement ( n’a de sens moral ) qu’à la condition d’être libre. Nier la liberté, contester
que l’homme soit libre en ce sens, c’est donc refuser d’accorder une signification morale à nos actions, c’est refuser la
responsabilité morale attachée à nos actes, dès lors que nous reconnaissons cette liberté.
Nier la liberté, c’est alors se « cacher » derrière son « caractère empirique », se refugier derrière ce qui le détermine,
pour fuir le risque du blâme : c’est faire preuve de pure « mauvaise foi » ( Sartre ) :
« Si nous avons défini la situation de l’homme comme un choix libre, sans excuses et sans secours,
tout homme qui se réfugie derrière l’excuse de ses passions, tout homme qui invente un
déterminisme est un homme de mauvaise foi »
Sartre, L’existentialisme est un humanisme, pp.80-81.
Mais qualifier ainsi de fuite, de refus, de mauvaise foi, toute contestation de notre liberté, c’est par là même affirmer, ou
présupposer que l’affirmation de la liberté de l’homme par rapport au déterminisme naturels est VRAIE. Cette affirmation
est-elle VRAIE ? Sommes-nous bien libres de nos actes ainsi que l’exige toute évaluation morale ? Et si ce n’est pas le cas,
quel est le sens de telles évaluations ?
II. La liberté, un postulat métaphysique
1)Le postulat de la liberté.
« Je dus abolir le savoir afin d’obtenir une place pour la croyance »
Kant, Critique de la Raison pure, Préface de la 2ème édition, p.24 .
2) Généalogie du postulat de la liberté et signification de la morale
La question qui se pose alors est celle de l'origine de ce postulat : d'où vient-il ? qui sert-il ?
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« Il ne nous reste aujourd'hui plus aucune espèce de compassion avec l'idée du "libre-arbitre" : nous savons
trop bien ce que c'est le tour de force théologique le plus mal famé qu'il y ait, pour rendre l'humanité
"responsable" à la façon des théologiens, ce qui veut dire : pour rendre l'humanité dépendante des
théologiens… Je ne fais que donner ici la psychologie de cette tendance à vouloir rendre responsable.
Partout où l'on cherche des responsabilités, c'est généralement l'instinct de punir et de juger qui est à
l'œuvre. On a dégagé le devenir de son innocence lorsque l'on ramène un état de fait quelconque à la volonté, à
des intentions, à des actes de responsabilité : la doctrine de la volonté a été principalement inventée à fin de
punir, c'est-à-dire avec l'intention de trouver coupable. Toute l'ancienne psychologie, la psychologie de la
volonté n'existe que par le fait que ses inventeurs, les prêtres, chefs de communautés anciennes, voulurent se
créer le droit d'infliger une peine ou plutôt qu'ils voulurent créer ce droit pour Dieu… Les hommes ont été
considérés comme "libres", pour pouvoir être jugés et punis, pour pouvoir être coupables : par conséquent
toute action devait être regardée comme voulue, l'origine de toute action comme se trouvant dans la
conscience. »
Nietzsche, Le Crépuscule des idoles, p.123, Mercure de France,
ou p.63, coll. « Idées »
« La révolte des esclaves dans la morale commence lorsque le ressentiment lui-même devient créateur et
engendre des valeurs : le ressentiment de ces êtres, à qui la réaction véritable, celle de l’action, est interdite,
et que seule une vengeance imaginaire peut indemniser. Alors que toute morale aristocratique naît d’un oui
triomphant adressé à soi-même, de prime abord la morale des esclaves dit non à un « dehors » et à un
« autre », à un « différent-de-soi-même », et ce non est son acte créateur. Cette inversion du regard posant
les valeurs la nécessité qui pousse à se tourner vers le dehors plutôt que vers soi-même cela relève
justement du ressentiment : la morale des esclaves a toujours et avant tout besoin pour prendre naissance
d’un monde hostile et extérieur, elle a physiologiquement parlant besoin d’excitations extérieures pour agir
son action est foncièrement une réaction. L’évaluation de type aristocratique procède à l’inverse : elle agit et
croît spontanément, elle ne recherche son antithèse que pour se dire oui à elle-même avec plus de joie et de
reconnaissance encore, son concept négatif de « bas », de « commun », de « mauvais », n’est qu’un tardif et
pâle contraste au regard de son concept fondamental, concept positif, pénétré de vie et de passion, « nous
les nobles, le bons, les beaux, les heureux ». »
Friedrich NIETZSCHE, La généalogie de la morale, I, §10,
III. La négation de la liberté de la volonté comme condition de la vie éthique
(dépassement du nihilisme).
« non ridere, non lugere, neque detestari, sed intelligere. »
« ne pas porter en dérision les actions humaines, ne pas les déplorer, ne pas les maudire, mais les
comprendre. »
Spinoza, Traité Politique,I,4 .
1) Le rejet du présupposé de la dualité de la nature humaine
« La plupart de ceux qui ont écrit sur les affects et sur les principes de la conduite semblent traiter non de choses
naturelles qui suivent des lois générales de la Nature, mais de choses qui sont en dehors de cette Nature. Il semble même
qu'ils conçoivent l'homme dans la Nature comme un empire dans un empire. Ils croient en effet que, loin de le suivre,
l'homme perturbe l'ordre de la Nature et que, dans ses propres actions, il exerce une puissance absolue et n'est
déterminé que par lui-même. Aussi attribuent-ils la cause de l'impuissance et de l'inconstance humaines non pas à la
puissance générale de la Nature, mais à je ne sais quel vice de la nature humaine sur laquelle, dès lors, ils pleurent, rient,
exercent leur mépris ou, le plus souvent, leur haine. Et celui qui sait accabler l'impuissance de l'Esprit humain avec le plus
d'éloquence ou le plus d'arguments passe pour divin. Ils n'ont certes pas manqué les hommes de valeur (au travail et au
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labeur desquels nous reconnaissons devoir beaucoup) qui ont écrit d'excellentes et nombreuses pages sur les justes
principes de la conduite et qui ont donné aux mortels des conseils pleins de sagesse ; mais personne, à ma connaissance,
n'a déterminé la nature et la force des Affects ni défini la maîtrise que, en retour, l'Esprit peut exercer sur eux (…). Je
veux donc revenir à ceux qui préfèrent haïr ou railler les Affects et les actions de l'homme, plutôt que les comprendre.
Sans doute leur paraîtra-t-il étonnant que je me propose de traiter des vices et des dérèglements, en l'homme, d'une
manière géométrique et que je veuille décrire selon une méthode rigoureuse et rationnelle ce qu'ils clament être contraire
à la Raison et n'être que vanité, absurdité et horreur. Mais voici mes raisons. Il ne se produit rien dans les choses qu'on
puisse attribuer à un vice de la Nature ; car elle est toujours la même, et partout sa vertu, sa puissance d'agir est une et
identique ; c'est-à-dire que les lois et les règles de la Nature selon lesquelles tout se produit et se transforme sont
toujours et partout les mêmes, et c'est aussi pourquoi, quelle que soit la nature de l'objet à comprendre, on ne doit poser
qu'un seul et même principe d'explication : par les lois et règles universelles de la Nature. C'est pourquoi les Affects
comme la haine, la colère, l'envie, etc., considérés en eux-mêmes, suivent de la même nécessité et de la même vertu de la
Nature que les autres choses singulières ; ils admettent ainsi certaines causes précises qui permettent de les
comprendre, et ils ont des propriétés particulières, aussi dignes d'être connues que celles de tout autre objet à la seule
considération duquel nous prenons plaisir. Je traiterais donc de la nature et de la force des Affects, puis de la puissance
de l'Esprit à leur égard, selon la même méthode que j'ai utilisée dans les parties précédentes pour la connaissance de Dieu
et pour celle de l'Esprit, et je considérerai les actions humaines et les appétits comme s'il était question de lignes, de
surfaces ou bien de corps. »
Spinoza, Éthique, 3ème partie, Préface.
2) Ce que nous sommes.
« Chaque chose, autant qu’il est en elle, s’efforce de persévérer dans sont être. » (Spinoza, EIII6)
« l'effort par lequel chaque chose s'efforce de persévérer dans son être n'est rien en dehors de l'essence
actuelle de cette chose » ( Spinoza, EII7).
« Le désir est l’appétit avec conscience de lui-même » (Spinoza, EIII9sc.)
« Le désir est l’essence même de l’homme, en tant qu’on la conçoit comme déterminée, par suite d’une
quelconque affection d’elle-même, à faire quelque chose » (Spinoza, EIII def des affects, I).
« J'entends donc par le terme de désir tous les efforts, impulsions, appétits, et volitions de l'homme, qui sont
aussi variés que les divers états d'un même homme, et qui, fort souvent, sont tellement opposés les uns aux
autres, que l'homme est tiré dans tous les sens, et ne sait pas vers se tourner. » (Spinoza EIIIdef des
affects I, expl.)
3) Désir et liberté de la volonté.
« Les hommes se trompent en ce qu'ils pensent être libres; et cette opinion consiste uniquement pour eux à
être conscients de leurs actions, et ignorants des causes par lesquelles ils sont déterminés. L'idée de leur
liberté c'est donc qu'ils ne connaissent aucune cause à leur actions. » (SpinozaEII2sc.)
« La conscience est naturellement le lieu d’une illusion » (G. Deleuze, Spinoza, philosophie pratique).
4) Désir et libération : éthique et morale.
« Un affect qui est une passion cesse d'être une passion dès que nous en formons une idée claire et
distincte. » (Spinoza, EV3)
« (…) Chacun a le pouvoir de se comprendre lui-même et de comprendre ses affects d'une façon claire et
distincte, sinon totalement du moins en partie, et il a par conséquent le pouvoir de faire en sorte qu'il ait
moins à les subir. Aussi, ce à quoi nous devons principalement nous appliquer c'est à connaître autant que
possible chaque affect clairement et distinctement, de telle sorte que l'Esprit soit déterminé par l'affect à
penser avec clarté et distinction ce qu'il perçoit dans cet affect même, et ce en quoi il trouve une entière
satisfaction ; et que, par suite, l'affect soit sépade la pensée d'une cause extérieure et soit joint à des
pensées vraies ; il suivra de non seulement que l'Amour, la Haine, etc., seront détruits, mais encore que les
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