jld/2004-2005/liberté et morale
http://caute.lautre.net
labeur desquels nous reconnaissons devoir beaucoup) qui ont écrit d'excellentes et nombreuses pages sur les justes
principes de la conduite et qui ont donné aux mortels des conseils pleins de sagesse ; mais personne, à ma connaissance,
n'a déterminé la nature et la force des Affects ni défini la maîtrise que, en retour, l'Esprit peut exercer sur eux (…). Je
veux donc revenir à ceux qui préfèrent haïr ou railler les Affects et les actions de l'homme, plutôt que les comprendre.
Sans doute leur paraîtra-t-il étonnant que je me propose de traiter des vices et des dérèglements, en l'homme, d'une
manière géométrique et que je veuille décrire selon une méthode rigoureuse et rationnelle ce qu'ils clament être contraire
à la Raison et n'être que vanité, absurdité et horreur. Mais voici mes raisons. Il ne se produit rien dans les choses qu'on
puisse attribuer à un vice de la Nature ; car elle est toujours la même, et partout sa vertu, sa puissance d'agir est une et
identique ; c'est-à-dire que les lois et les règles de la Nature selon lesquelles tout se produit et se transforme sont
toujours et partout les mêmes, et c'est aussi pourquoi, quelle que soit la nature de l'objet à comprendre, on ne doit poser
qu'un seul et même principe d'explication : par les lois et règles universelles de la Nature. C'est pourquoi les Affects
comme la haine, la colère, l'envie, etc., considérés en eux-mêmes, suivent de la même nécessité et de la même vertu de la
Nature que les autres choses singulières ; ils admettent ainsi certaines causes précises qui permettent de les
comprendre, et ils ont des propriétés particulières, aussi dignes d'être connues que celles de tout autre objet à la seule
considération duquel nous prenons plaisir. Je traiterais donc de la nature et de la force des Affects, puis de la puissance
de l'Esprit à leur égard, selon la même méthode que j'ai utilisée dans les parties précédentes pour la connaissance de Dieu
et pour celle de l'Esprit, et je considérerai les actions humaines et les appétits comme s'il était question de lignes, de
surfaces ou bien de corps. »
Spinoza, Éthique, 3ème partie, Préface.
2) Ce que nous sommes.
« Chaque chose, autant qu’il est en elle, s’efforce de persévérer dans sont être. » (Spinoza, EIII6)
« l'effort par lequel chaque chose s'efforce de persévérer dans son être n'est rien en dehors de l'essence
actuelle de cette chose » ( Spinoza, EII7).
« Le désir est l’appétit avec conscience de lui-même » (Spinoza, EIII9sc.)
« Le désir est l’essence même de l’homme, en tant qu’on la conçoit comme déterminée, par suite d’une
quelconque affection d’elle-même, à faire quelque chose » (Spinoza, EIII def des affects, I).
« J'entends donc par le terme de désir tous les efforts, impulsions, appétits, et volitions de l'homme, qui sont
aussi variés que les divers états d'un même homme, et qui, fort souvent, sont tellement opposés les uns aux
autres, que l'homme est tiré dans tous les sens, et ne sait pas vers où se tourner. » (Spinoza EIIIdef des
affects I, expl.)
3) Désir et liberté de la volonté.
« Les hommes se trompent en ce qu'ils pensent être libres; et cette opinion consiste uniquement pour eux à
être conscients de leurs actions, et ignorants des causes par lesquelles ils sont déterminés. L'idée de leur
liberté c'est donc qu'ils ne connaissent aucune cause à leur actions. » (SpinozaEII2sc.)
« La conscience est naturellement le lieu d’une illusion » (G. Deleuze, Spinoza, philosophie pratique).
4) Désir et libération : éthique et morale.
« Un affect qui est une passion cesse d'être une passion dès que nous en formons une idée claire et
distincte. » (Spinoza, EV3)
« (…) Chacun a le pouvoir de se comprendre lui-même et de comprendre ses affects d'une façon claire et
distincte, sinon totalement du moins en partie, et il a par conséquent le pouvoir de faire en sorte qu'il ait
moins à les subir. Aussi, ce à quoi nous devons principalement nous appliquer c'est à connaître autant que
possible chaque affect clairement et distinctement, de telle sorte que l'Esprit soit déterminé par l'affect à
penser avec clarté et distinction ce qu'il perçoit dans cet affect même, et ce en quoi il trouve une entière
satisfaction ; et que, par suite, l'affect soit séparé de la pensée d'une cause extérieure et soit joint à des
pensées vraies ; il suivra de là non seulement que l'Amour, la Haine, etc., seront détruits, mais encore que les