grecque qui nous occupe aujourd’hui, ce n’est pas l’homme – grec ou d’ailleurs – qui est au
centre, mais les revenus des banquiers ! Nous y reviendrons au cours de la discussion.
Cette place centrale accordée à l’homme a logiquement amené l’élaboration d’un système
politique auquel nous devons notre présence dans cet hémicycle : la démocratie. En posant les
fondements de ce régime politique, le peuple grec a nourri une ambition qui s’étend à toute
l’humanité. À travers les aléas de l’histoire, de la guerre d’indépendance contre l’Empire
ottoman, en 1821, à l’héroïque résistance contre les troupes de l’Axe tout au long de la
Deuxième Guerre mondiale, ce peuple est resté farouchement attaché à sa liberté et aux
principes de ses antiques ancêtres, pour lesquels l’harmonie ne pouvait être obtenue que par le
gouvernement du peuple pour le peuple.
Hélas, cette exemplarité a rencontré notre ingratitude. Ainsi, pendant la dictature des colonels,
de 1967 à 1973, la France comme l’Allemagne fédérale avaient choisi de maintenir leurs
relations diplomatiques avec le régime fasciste au pouvoir à Athènes ; pire, ils lui vendirent
des armes. Oui, chers collègues : il y a quarante ans, le gouvernement français soutenait une
junte meurtrière qui avait abrogé la Constitution et toutes les libertés publiques ; et,
aujourd’hui, nous nous vantons de réaliser un profit sur le dos d’un État et d’une population
déjà bien malmenés.
En fait de solidarité européenne, on a vu mieux ! Est-ce donc là votre vision de l’Union ? Est-
ce le message que vous voulez adresser à la jeune génération grecque, dite des « sept cents
euros » ? Cet épisode nous éloigne encore davantage d’une Europe politique, instrument de
progrès et de protection des peuples.
Par le plan que vous développez, vous allez monter la population grecque contre l’Europe.
Vous l’humiliez ! Vous persistez à vouloir construire une civilisation au rabais, empreinte
d’égoïsme et marquée par la seule recherche du profit à court terme, un modèle de société au
service des intérêts privés et des banques, négligeant l’émancipation humaine et le droit de
chacun à l’épanouissement.
Pourtant, une autre politique est possible, et je voudrais, madame la ministre, monsieur le
ministre, vous suggérer quelques pistes.
Tout d’abord, il faut associer financièrement les banques au redressement des finances
grecques. Il faut taxer les bénéfices, créer enfin la taxe Tobin – dont j’ai cru comprendre,
madame Lagarde, que, après quelques hésitations, vous étiez devenue une apôtre.
Vous devriez aussi réfléchir à l’interdiction des produits dérivés de type credit default swaps.
Il faut enfin créer une agence de notation publique et imposer aux banquiers la restructuration
de la dette grecque.
Demain, madame la ministre, monsieur le ministre, il faudra accepter, qu’on le veuille ou non,
de renégocier les traités européens dans un sens favorable aux peuples en luttant contre le
dumping fiscal et salarial. Car c’est déjà, concrètement, de cela qu’il s’agit.
Il faudra enfin restituer aux gouvernements la possibilité de s’affranchir de la tutelle des
marchés financiers en créant une sorte de Fonds monétaire européen sous contrôle politique et
en négociant directement avec les États dont les fonds souverains permettent de mettre les
banquiers hors d’état de nuire.
À ce propos, plusieurs de mes amendements ont été retoqués sans que je sache sur quel article
se fondait ce rejet – vous n’y êtes pour rien, madame la ministre. Il s’agissait de demander au
Gouvernement des rapports sur l’instauration de cette sorte d’homologue européen du FMI,
sur la création d’une agence de notation publique et sur l’établissement de relations avec des
États extérieurs à la zone euro qui disposent de fonds souverains.