< 209 > CHAPITRE VII Le parallélisme entre la distribution des chromosomes et celle des facteurs génétiques. Nous avons attiré l'attention sur le fait que des facteurs appariés sont distribués de la même façon que des chromosomes homologues, et que des facteurs qui sont indépendants sont repartis comme des chromosomes non homologues. Le fait observé par Wilson chez un Metapodius avec trois chromosomes m-homologues fournit une preuve de l'exactitude de ce dernier point de vue. Il a constaté que le petit m supplémentaire se rend dans le gamète qui reçoit l'X aussi souvent que dans l'autre. Miss Carothers décrit en détail certains cas observés dans la spermatogénèse de Locustiens, où la distribution des paires de chromosomes formées de partenaires inégaux montre l'indépendance complète des paires chromosomiennes les unes vis-à-vis des autres. Les paires de facteurs sont non seulement assorties indépendamment comme le sont les chromosomes, mais chez Drosophila, où l'on a déterminé le nombre des groupes de facteurs indépendants, on a constaté que ce nombre correspond à celui des paires de chromosomes. Bien plus, les grandeurs relatives elles-mêmes des groupes, déterminées par < 210 > le nombre des facteurs qu'ils contiennent et par la fréquence de leurs enjambements, sont les mêmes que celles des chromosomes. Enfin, la distribution des facteurs à l'intérieur d'un groupe quelconque est précisément celle que réclame l'hypothèse chromosomienne. La fréquence de la séparation (ou de la combinaison) entre les différents facteurs d'un groupe peut s'inscrire comme s'ils étaient en relation linéaire l'un avec l'autre, et ce rapport est, de plus, spécifique d'un type (y compris les phénomènes d'inhibition) ; on pouvait s'y attendre, si les séparations entre facteurs résultaient d'un enjambement entre deux chromosomes enroulés l'un autour de l'autre - fait dont les données de la cytologie démontrent la possibilité d'existence. Même dans les cas où les chromosomes ne sont pas répartis de la façon habituelle, on a trouvé que les facteurs sont, eux aussi, répartis de façon inaccoutumée. Il existe, par exemple, chez les papillons, quelques cas présentant un intérêt extraordinaire parce que l'on peut retracer l'histoire des chromosomes jusqu'à et pendant la maturation des œufs de l'hybride. Certaines espèces de la noctuelle Pygæra qui possèdent des nombres différents de chromosomes, ont été croisées par Federley. Le nombre complet (calculé) et le nombre réduit de chromosomes dans les différentes espèces sont les suivants : P. anachoreta : Diploïde : 60 ; Haploïde : 30. P. cumula : Diploïde : 58 ; Haploïde : 29. P. pigra : Diploïde : 46 ; Haploïde : 23. < 211 > Chez les hybrides, le nombre complet représente le total des deux séries haploïdiques qui proviennent des parents. Ceci montre que les chromosomes gardent leur individualité à travers de nombreuses divisions cellulaires successives dans un cytoplasme étranger. Lors de la maturation, un petit nombre de chromosomes semblent parfois s'unir par paires, mais la plupart ne le font pas, de telle sorte que tandis que le nombre des chromosomes, lors de la première division de maturation, est légèrement moindre que le nombre complet, il est cependant très supérieur à la moitié de celui-ci. Les différents types d'hybrides se comportent de façon légèrement différente au point de vue du nombre de paires qui se forment. L'absence d'union indique que lors de la maturation normale, les chromosomes homologues s'unissent l'un avec l'autre ; ici, en effet, il n'y a pas de chromosomes, ou un petit nombre seulement, qui soient strictement homologues, et il y a pourtant tout autant de chances que dans la maturation normale, pour que se produise l'union des chromosomes non homologues provenant du même parent. Lorsque se produit chez l'hybride la division du spermatocyte de premier ordre, tous les chromosomes non appariés se divisent, mais le petit nombre de ceux qui se sont unis au préalable se séparent. Chacune des cellules-filles a, par conséquent, le nombre double de chromosomes (une série provenant de chaque parent), excepté les chromosomes qui se sont unis par paires. Lors de la seconde division de maturation, les chromosomes se < 212 > divisent à nouveau, de sorte que les spermatozoïdes reçoivent à peu prés le nombre double de chromosomes : une série provenant d'une espèce et l'autre provenant de l'autre. Si donc les facteurs sont contenus réellement dans les chromosomes, nous devons nous attendre (excepté pour les facteurs contenus dans les quelques chromosomes qui s'unissent et se séparent) à ce que l'hybride transmette à tous ses descendants les mêmes facteurs, puisque, à cette exception prés, chaque spermatozoïde reçoit tous les chromosomes contenus dans l'hybride (paternels et maternels). En croisant l'hybride avec l'un ou l'autre des parents, on constate que les descendants sont, en effet, très semblables entre eux, c'est-à-dire qu'ils ont tous reçu pratiquement les mêmes facteurs : ce résultat forme un contraste frappant avec ceux qu'on obtient d'habitude dans les rétrocroisements. Toutefois, en ce qui concerne un seul caractère (un dessin de la larve), il n'en fut pas de même, car il fut transmis suivant les proportions mendéliennes ordinaires ; ceci, à son tour, correspond au fait qu'un petit nombre de chromosomes ont subi une ségrégation. Quant aux autres caractères, les descendants sont non seulement semblables entre eux, mais ressemblent plus à l'hybride qu'à l'une ou l'autre des espèces pures, ce qui correspond au fait qu'ils contiennent les séries complètes des deux types. Mais ils ne ressemblent pas tout à fait à l'hybride F.1, ce qui s'explique parce que l'une des séries de chromosomes est en nombre diploïdique et l'autre, en nombre haploïdique. < 213 > Ils reçoivent, en effet, une série d'une espèce de chacun des parents, mais une série de l'autre espèce seulement du parent hybride. Federley montre également que lorsque la maturation se produit chez cet individu triploïdique, l'une des séries des chromosomes ne donne lieu à aucun appariement, tandis que les autres, probablement ceux qui proviennent des séries identiques, montrent l'appariement des chromosomes homologues. De sorte que le nombre total est réduit à une série bivalente plus une série monovalente. Si les chromosomes appariés se séparent et que ceux qui ne se sont pas appariés se divisent, ainsi que cela se produit chez l'hybride F.1, le nombre double de chromosomes (une série de chaque espèce) se retrouvera de nouveau dans le spermatozoïde, comme c'était le cas chez le premier hybride. En d'autres termes, il ne se produit de retour à aucun des types-parents, et lorsque l'hybride est rétrocroisé, il continue toujours à produire des hybrides. De plus, l'œuf ne semble exercer ni affaiblissement apparent ni autre influence sur les chromosomes étrangers, même au cours des générations successives. Les résultats d'élevage obtenus par Standfuss, qui rétrocroisa d'autres noctuelles pendant plusieurs générations, montrent le même phénomène : le même type d'hybride se reproduisant de façon constante à chaque génération. Un comportement semblable des chromosomes a été récemment décrit par Doncaster dans un croisement entre d'autres espèces de noctuelles. Le nombre complet de chromosomes chez la noctuelle Biston hirtaria est de vingt-huit, dont quatre < 214 > petits, ainsi que le montre la figure 48, a. Chez une autre espèce, Biston zonaria, il y a environ une centaine Fig. 48. - Biston hirtaria : a, chromosomes spermatogoniaux ; a’, chromosomes des spermatocytes de premier ordre (nombre réduit) ; Biston Zonaria ; b, chromosomes spermatogoniaux ; b', spermatocytes de premier ordre (nombre réduit). Hybride Zonaria X hirtaria ; c, chromosomes spermatogoniaux ; c', spermatocytes de premier ordre. (D'après Harrison et Doncaster.) [Figure non reproduite dans cette version] < 215 > de très petits chromosomes (fig. 48, b) ; le nombre réduit de chromosomes chez la première espèce est de treize (un grand étant accouplé avec un petit) et chez la seconde espèce, cinquante-six. La figure 48, c, montre le groupement des chromosomes de l'hybride (zonaria f hirtaria m). Il est difficile d'évaluer chez lui le nombre exact des chromosomes, mais il y en a quatorze grands et environ cinquante-six petits. Il se produit chez cet hybride un stade ressemblant au stade synapsis. Lorsque les chromosomes réapparaissent après ce stade (fig. 48, c'), le nombre des chromosomes se retrouve à peu près au complet, quoique Doncaster pense qu'un petit nombre d'entre eux se sont appariés ; il y a, en effet, maintenant (voyez la figure) douze ou treize grands chromosomes et cinquante ou cinquante et un petits, soit donc un peu moins que le nombre complet observé avant le stade synapsis. Dans ce cas cependant, nous ne possédons pas de données sur le comportement génétique des hybrides. Un autre cas de parallélisme entre des phénomènes chromosomiens et les résultats génétiques anormaux a été observé chez Œnothera lata et semilata par Lütz, Gates et Thomas. Chez Œnothera lamarckiana, le nombre normal des chromosomes est quatorze, mais la race lata en possède toujours quinze, ce qui veut dire qu'une “ espèce ” de chromosomes existe en nombre triploïdique. Ceci est vrai même pour des plantes de lata apparues indépendamment de la race ordinaire. Les mêmes résultats sont applicables à semilata, qui semble consti- [constituer] < 216 > tuer une variété de lata. Lata et semilata naissent parfois “ spontanément ” de lamarckiana où ils constituent un faible pourcentage des descendants d'un individu quelconque, et l'on peut s'expliquer ceci par le fait que parfois dans la gamétogénèse de lamarckiana, deux chromosomes appariés, au lieu de se séparer, passent tous deux au même pôle (non-disjonction), de telle sorte que les descendants auront trois chromosomes de ce type et posséderont quinze chromosomes en tout. Le comportement du chromosome supplémentaire chez les individus lata est également intéressant parce que lorsqu'au cours de la gamétogénèse, les chromosomes appariés se séparent, le chromosome supplémentaire ne se divise pas comme le font les chromosomes impairs chez les noctuelles, mais tend à passer à l'un des pôles. Il en résulte que la moitié des gamètes contiendra et transmettra le caractère lata, tandis que l'autre moitié sera normale. Très souvent toutefois, le chromosome s'attarde dans le fuseau et est ainsi exclu de l'une ou l'autre cellule-fille ou il peut même être fragmenté et rejeté, comme s'il subissait l'action de fibres appartenant à des pôles opposés. Par conséquent, moins de la moitié des gamètes (tout au moins, les spermatozoïdes, car la gamétogénèse n'a pas été étudiée dans les organes femelles) reçoivent le chromosome supplémentaire. La proportion en est très variable selon les individus. Ceci est conforme au résultat génétique : les individus lata croisés avec lamarckiana donnent des proportions variables de descendants lata, mais jamais plus de la moitié. < 217 > Un cas frappant de parallélisme entre les résultats génétiques anormaux et les phénomènes révélés par l'étude des chromosomes a été observé chez Primula et paraît constituer un solide argument en faveur de l'hypothèse chromosomienne, bien que l'auteur, Gregory, ait hésité à en tirer cette conclusion. Il a observé que deux races géantes de primevères (P. sinensis) possèdent deux fois le nombre des chromosomes caractéristiques des autres races cultivées. Les expériences de croisement avec ces plantes montrent qu'elles possèdent également une double série de facteurs, si on les compare aux mêmes facteurs existant chez les primevères ordinaires. Tandis que, chez les plantes ordinaires, chaque chromosome a son double et, par conséquent, chaque facteur est représenté deux fois par A et A, chez les plantes géantes, il y a quatre chromosomes pareils et, par conséquent, quatre facteurs AAAA. Si la race géante contient quelques facteurs ayant déjà subi une mutation, telle que Al par exemple, elle pourra contenir un, deux trois ou quatre facteurs mutants Al. Ces plantes seront du type AAAA1, ou AAA1A1, ou AA1A1A1, ou A1A1A1A1. Comme nous l'avons vu, les expériences de croisement montrent qu'il existe une quadruple série de facteurs, mais les faits sont encore insuffisants pour décider si un facteur mutant A1 possède comme partenaire un A bien déterminé parmi ceux qui restent, ou peut s'unir avec l'un quelconque des trois A. D'après l'hypothèse chromosomienne, nous devrions nous attendre à cette dernière alternative. Quelle que < 218 > soit celle de ces deux hypothèses qui se vérifie, le fait important est le parallélisme qui existe entre la double série de chromosomes et la double série de facteurs. Gregory le reconnaît, mais ajoute cette réserve : “ D'autre part, pourtant, le nombre tétraploïdique des chromosomes peut n'être rien de plus qu'un indice de la nature quadruple de la cellule elle-même considérée en son entier. ” Nous avons montré, dans les cas précédents, que les facteurs et les chromosomes se distribuent selon le même mode. Dans le cas du sexe et des facteurs liés au sexe, on peut même prouver qu'ils ont la même distribution que les chromosomes sexuels. Cette identité de répartition n'est pas seulement vraie pour les résultats de F.2 et F.3, mais se vérifie encore pour tous les cas de rétrocroisement. Le parallélisme se maintient de plus pour tous les facteurs liés au sexe actuellement connus, dont Drosophila nous offre plus de quarante exemples, et pour toutes leurs combinaisons. Ne pas interpréter ce fait en disant que les facteurs sont contenus dans les chromosomes et portés par eux revient à rejeter une base mécaniste dont nous connaissons l'existence dans la cellule. Il n'y a rien à gagner si, n'admettant pas les connexions frappantes qui existent entre l'hérédité des caractères et la transmission des chromosomes, nous admettons que quelque chose d'autre dans la cellule, peut-être une portion du cytoplasme, suive également la même distribution que celle des chromosomes sexuels. Un tel postulat ne fait qu'ajouter de l'in- [inconnu] < 219 > connu et de l'improbable et laisse la situation moins claire qu'auparavant. L'avantage de l'interprétation chromosomienne appliquée aux chromosomes sexuels ne peut être mieux illustrée que par l'histoire d'un phénomène découvert par Bridges et appelé non-disjonction. De plus, ce cas, basé sur des recherches expérimentales de croisements, étendues et précises, et sur des recherches cytologiques, nous fournit la preuve la plus évidente obtenue jusqu'à ce jour des relations entre certains caractères et certains chromosomes ; ici, en effet, une répartition anormale des chromosomes sexuels va de pair avec une distribution anormale et identique de tous les facteurs liés au sexe. Il se trouva que des femelles d'une certaine race de mouches à yeux blancs donnèrent par croisement avec une race étrangère, environ 5% de résultats inattendus. Par exemple, une des femelles à yeux blancs croisée avec un mâle à yeux rouges (type sauvage) produisit non seulement des femelles à yeux rouges et des mâles à yeux blancs, ainsi qu'il était prévu, mais aussi un petit nombre de femelles à yeux blancs et un nombre correspondant de mâles à yeux rouges. Le pourcentage approximatif de ces classes est le suivant f Rouges : 47,5%. m Blancs : 47,5%. f Blanches : 2,5%. m Rouges : 2,5%. Par conséquent, il y eut 95% de formes prévues et 5% de descendants qui en apparence, s'écartaient de ce que la théorie chromosomienne faisait prévoir. Un < 220 > examen plus attentif de ces résultats montra que les exceptions peuvent s'expliquer si l'on admet que, parfois, les deux chromosomes X ne se séparent pas lors de la division réductionnelle, passant tantôt tous les deux dans le globule polaire des œufs de la femelle à yeux blancs ou, inversement, restant tous deux dans l'œuf. Lorsque les deux X portant le facteur blanc restent dans l'œuf, celui-ci, fécondé par un spermatozoïde Y, donnera naissance à une femelle à yeux blancs. Pareillement, l'œuf dépourvu de X, fécondé par le spermatozoïde X d'un mâle à yeux rouges, donnera un mâle à yeux rouges. Les femelles à yeux blancs contiendront donc deux chromosomes X et un chromosome Y, tandis que les femelles ordinaires ne contiennent que deux X. Comme il y a chez ces femelles trois chromosomes sexuels au lieu de deux, lors de la division réductionnelle, deux passeront dans une cellule et le troisième, dans l'autre. Cette division peut se produire de quatre manières : XY/X X/XY Y/XX et XX/Y (représentant dans chaque cas l'œuf par la ligne du dessous et le globule polaire par celle du dessus). Les deux premiers types de réduction reposant sur un appariement plus symétrique des chromosomes, doivent être plus fréquents que les deux autres. Il y aura quatre types d'œufs : un grand nombre d'œufs X et XY et un petit nombre d'œufs XX et Y. Supposons qu'une femelle XXY à yeux blancs soit croisée avec un mâle à yeux < 221 > rouges, les descendants produits par les spermatozoïdes porteurs de X seront : [Diagramme non reproduit dans cette version] La même série d'œufs fécondés par les spermatozoïdes produisant le sexe mâle, qui contiennent un chromosome Y, donneront : [Diagramme non reproduit dans cette version] Si nous considérons ces huit sortes de descendants, nous voyons que les femelles exceptionnelles à yeux blancs (7) vont, selon toute attente, reproduire le même phénomène : c'est-à-dire que, chez elles, il n'y aura pas disjonction. Et c'est, en effet, ce qui se passe, car toutes les femelles à yeux blancs issues de ce croisement ne présentent pas de disjonction à la génération suivante. Les mâles à yeux rouges (4) constituent une classe exceptionnelle, mais ne donnent pas de résultats exceptionnels lorsqu'on les croise avec une femelle normale quelconque et il n'y a pas de non-disjonction chez leurs descendants : ce qui s'est vérifié. < 222 > Les femelles à yeux rouges ne sont pas de composition identique, la moitié d'entre elles (1) se comportera comme des femelles normales hétérozygotes pour blanc, tandis que l'autre moitié donnera des individus exceptionnels. Ces deux sortes de femelles à yeux rouges ont été en fait trouvées en nombres égaux. Les mâles à yeux blancs (5 et 6) ne sont pas semblables : les uns (5) sont normaux et les autres (6) possèdent deux chromosomes Y. Il était à prévoir que ces derniers donneraient naissance à quelques spermatozoïdes XY, qui produiraient des femelles, celles-ci n'étant pas elles-mêmes des exceptions : mais, ayant la formule XXY, elles produiraient des descendants exceptionnels. En fait, la moitié des mâles à yeux blancs (5 et 6) donnent des femelles présentant l'absence de disjonction. Les résultats confirment remarquablement l'hypothèse qu'ils sont dus à une non-disjonction des chromosomes sexuels causée par la présence chez les femelles d'un chromosome Y. L'hypothèse est susceptible d'être vérifiée, et Bridges a étudié les chromosomes des femelles non-disjonctionnelles. Il constata qu'elles contiennent un chromosome de plus, dont la grandeur, la forme et la position montrent qu'il s'agit d'un chromosome Y surnuméraire. La figure 2 montre le groupement normal des chromosomes chez la femelle de Drosophila et la figure 49, ce même groupement chez une femelle non-disjonctionnelle. Elle diffère par un chromosome, l'Y surnuméraire. Un autre fait doit être mentionné. Si une femelle XXY < 223 > est fécondée par un mâle XYY, il y aura production de quelques femelles XXYY, provenant de l'union d'un œuf XY avec un spermatozoïde XY ou d'un œuf XX avec un spermatozoïde YY. Une femelle de ce genre a été trouvée et possédait deux chromosomes X et deux chromosomes Y. Fig. 49. - Groupement des chromosomes d'une femelle XXY, ayant pour cause la non-disjonction. [Figure non reproduite dans cette version] Il s'agit donc ici d'un cas qui paraissait être d'abord en contradiction avec le schéma de l'hérédité liée au sexe basée sur l'hypothèse chromosomienne et qui, après un examen approfondi, ne put que donner une confirmation brillante de cette théorie, car on put non seulement se baser sur les résultats de la génétique, mais, de plus, la théorie sur laquelle ils reposaient fut directement confirmée par l'étude microscopique des chromosomes eux-mêmes. < 224 > Des cas de non-disjonction ont aussi été observés chez Abraxas par Doncaster. Ainsi qu'on l'a vu dans le chapitre relatif à l'hérédité du sexe, il a observé un élevage dans lequel les mâles possédaient cinquante-six chromosomes, c'est-à-dire le nombre normal, tandis que les femelles n'en avaient que cinquante-cinq. Il semble logique, par conséquent, de supposer que la formule chromosomiale dans les femelles résulte du passage des deux chromosomes sexuels ZZ à l'un des pôles du spermatocyte, l'autre pôle en étant dépourvu. Le spermatozoïde provenant de la cellule sans Z fécondant un œuf avec Z donnera un individu ZO qui sera une femelle à cinquante-cinq chromosomes. Tous les descendants femelles de celle-ci seront ZO et les descendants mâles, ZZ, et la race se perpétuera sans changements dans la suite. D'autre part, si le spermatozoïde ZZ produit par non-disjonction féconde un œuf W, il en résultera un mâle WZZ, correspondant à la femelle XXY de Drosophila. Ce mâle donnera naissance à quelques spermatozoïdes possédant à la fois Z et W, et si l'un de ces spermatozoïdes ZW féconde un œuf O provenant de la femelle à cinquante-cinq chromosomes, il en résultera une femelle à cinquante-six chromosomes. Une femelle de ce genre fut trouvée, en effet, par Doncaster parmi les individus produits par un croisement entre une femelle à cinquante-cinq chromosomes et un mâle du type sauvage, et il observa également les exceptions génétiques exigées par l'hypothèse donnant à ce mâle une formule WZZ. > > > CHAPITRE VIII Page 225 > > > RETOUR A LA TABLE DES MATIERES