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indispensable de trouver des modes d’interpellation entre
les deux volets.
Lille s’est donné une grille de lecture qui interroge
simultanément les politiques de solidarité et les
politiques de développement dans un rapport
dialectique. Développement et solidarité visent le
développement durable autour de trois valeurs phares :
L’excellence : la métropolisation
L’équilibre : la cohésion du territoire
La qualité : le respect de l’environnement
Orléans a une conception de l’intersection : c’est
le “ renouvellement urbain ” qui intègre développement
et solidarité.
Rennes développe une conception plus classique : la
valeur-solidarité est en arrière-fond du projet de
développement dans un processus d’ajustement et de
complémentarité (éviter les doublons et combler les
creux)
En quoi ces méthodes d’approche différentes
correspondent-elles à des enjeux territoriaux
différents ? En quoi les stratégies choisies sont-elles
pertinentes ?
Quels sont les enjeux du rapport entre
développement et solidarité ?
Pendant les trente glorieuses, la question du rapport entre
l’économique et le social ne se posait pas. L’effet
d’entraînement était spontané entre les deux. La diffusion
sociale et spatiale du développement relevait d’un effet
d’encastrement mécanique et l’action publique était en
seconde ligne. Les territoires sous-développés avaient un
avantage comparatif : bas coût du foncier et de la main
d’œuvre. La pauvreté provoquait de la richesse.
Le glissement du développement national au
développement local s’est réalisé dans les années 1970
sur le constat que la locomotive économique nationale
n’était plus suffisante et qu’il fallait trouver des locomotives
locales.
D’un point de vue spatial, on peut retenir l’image
des “ ronds dans l’eau ” : les effets d’un pôle de
développement produisaient des effets en chaîne ; la
valorisation d’un territoire entraînait la valorisation des
territoires avoisinants.
Aujourd’hui, il n’y a plus d’effet mécanique de
l’accroissement des richesses. Les “ cycles vertueux ” sont
aléatoires et la valorisation peut entraîner de la
dévalorisation. Par exemple, Roissy connaît des effets
réduits sur son environnement, tant sur le plan social
qu’économique.
Quelles en sont les raisons ?
Des mécanismes sociaux et économiques : l’économie
fonctionne sur un mode horizontal plutôt que vertical.
Des facteurs territoriaux :jusque dans les années 80 le
territoire était une contrainte pour les acteurs
économiques et sociaux. Aujourd’hui le territoire est une
variable :on le choisit. Avant on était “ à proximité de ”,
aujourd’hui les effets de polarisation fonctionnent, on se
déplace. Du coup, on n’est plus dans des cycles
mécaniquement vertueux. D’un point de vue territorial, ce
n’est pas parce qu’il y a du développement économique
qu’il y a intégration sociale.
Cela change la question posée à l’action publique :
comment garantir un processus de développement social
et territorial qui n’est plus mécaniquement garanti ? Cela
contribue aussi à l’explosion des politiques de
redistribution sociales et territoriales dans tous les pays
européens.
À quelles conditions le développement produit-il des effets
d’entraînement ?
Si l’on prend pour exemples Toulouse et Montpellier, les
effets sociaux et territoriaux de leur développement sont
radicalement différents : Toulouse produit de la dualisation
sociale, Montpellier produit des effets en cascade sur tout le
territoire de l’Hérault.
Le développement d’un territoire est bien la capacité à
produire des richesses et à les redistribuer localement.
Mais de ce point de vue, les situations sont très
hétérogènes.
Pour l’illustrer, deux études de cas :
Beauvais (Oise)
La Plaine de France (Seine Saint-Denis)
Beauvais
Ville chef-lieu de l’Oise (60 000 habitants) possédant
d’importants quartiers d’habitat social et un moteur de
développement économique moyen. Il s’avère que le taux
de croissance en emplois durant ces dix dernières années
a été très élevé en valeur relative par rapport à la région :
2300 emplois créés à Beauvais, sur un spectre de
qualification relativement large. (Dans le même temps,
Creil a perdu 4000 emplois, et l’Oise en a gagné 500).
Beauvais est devenu un pôle de services qui a su générer
une nouvelle attractivité pour les populations périurbaines.
Ces nouveaux services contribuent à revitaliser la ville
centre, et constituent le moteur du développement actuel
(sur le mécanisme économique de création de richesses
à partir de cette économie “ résidentielle ”, voir l’article le
Laurent DAVEZIES :Le développement local hors
mondialisation). Ce développement a des effets sociaux
qui tiennent à la grande accessibilité des emplois créés
pour de faibles qualifications. Même s’il s’agit d’emplois
flexibles frappés de nombreuses discriminations
ethniques.
Lors de l’élaboration du nouveau contrat de ville, l’analyse
du profil social des quartiers a montré que les effets de ce
développement économique bénéficiaient à tous les
quartiers. La double analyse, économique et sociale, a
bouleversé la vision traditionnelle de la politique de la ville.
Les quartiers d’habitat social ne sont pas si “ décrochés ”
de la ville, ce qui ne correspond pas à l’image que
produisait la politique de la ville. Ce sont des quartiers qui
souffrent plus d’un déficit d’image que d’un manque
d’intégration sociale et économique.
Le contrat de ville a ainsi défini trois axes :
Comment renforcer cette économie de services et aider
les habitants des quartiers à y trouver des emplois ?
La question des quartiers : comment diversifier la gestion
urbaine qui leur est appliquée?
L’économie de services étant génératrice de nouvelles
fragilités : comment mettre en place des dispositifs
collectifs de lutte contre ces fragilités sociales et
territoriales ?
À première vue, Beauvais n’a à l’heure actuelle aucun
intérêt stratégique à signer un contrat d’agglomération
redistributif car elle perçoit 70 à 80 % du produit de la taxe
professionnelle de l’agglomération. La ville a des revenus
moyens moins élevés que son arrière-pays, mais elle
concentre 90-95 % de l’offre de logements sociaux... Avoir
une taxe professionnelle unique signifierait une perte de
ressources fiscales au profit des communes périphériques.
L’enjeu aujourd’hui est plutôt de maintenir la dynamique de
développement qui solidarise de fait ville centre et
communes périphériques et non de poser la question de la
géographie pertinente pour créer un contrat
d’agglomération.