traités systématiques correspondant à l’Almageste , ouvrages d’astronomie sphérique à l’usage des
calculateurs et des observateurs, travaux plus spécialisés enfin (catalogues d’étoiles, manuels ayant trait
aux instruments, etc.).
La science astronomique des musulmans se caractérise, d’une manière générale, par son adhésion au
système géocentrique. Elle y fut portée tout d’abord par l’autorité dont jouissait Aristote « le
Philosophe », puis par celle de Ptolémée lui-même et enfin, de façon paradoxale, par les exigences de
l’astrologie qui, admise quasi unanimement alors comme une science véritable, se fondait sur un
géocentrisme rigoureux. D’ailleurs, l’héliocentrisme n’était pas démontrable avec certitude et, comme le
télescope n’existait pas à l’époque, cette théorie ne pouvait être d’aucune utilité pour l’astronomie
pratique. Connaissant les mêmes corps célestes que les Grecs, les Arabes ne pouvaient se représenter
autrement que ceux-ci les mouvements astraux et les expliquaient par les excentriques et les épicycles.
Seuls des auteurs qui furent plus philosophes qu’astronomes, comme Ibn Tufayl ou al-Bitrudji
(Alpetragius ou Alpetrage), essayèrent de faire appel à une théorie spéciale dont on ne peut dire qu’elle
fut héliocentrique ni qu’elle remit en cause le mouvement strictement circulaire des corps célestes.
Quelques détails doivent être connus concernant l’astronomie arabe classique. Les sphères – ce que
l’Occident médiéval appelait les cieux – étaient pour Aristote et Ptolémée au nombre de huit (sept pour
les planètes et un pour les étoiles fixes) ; ce nombre sera conservé par les premiers astronomes arabes,
tels al-Farghani et al-Battani. Certains auraient voulu les ramener à sept pour se conformer au Coran (II,
27), mais cela ne fut jamais accepté par les astronomes. D’autre part, quand Ibn al-Haytham, au
XIe siècle, fit admettre dans l’enseignement la doctrine des sphères solides d’Aristote, il fallut y ajouter
une neuvième sphère sans étoiles, qui communiquait le mouvement diurne aux autres sphères et qui,
acceptée ensuite par tous les astronomes, fut appelée « la sphère universelle », « la plus grande sphère »,
« la sphère des sphères », « la sphère unie » (al-falak al-atlas ). En général, les falasifa , tels Avicenne et
Ibn Tufayl, acceptèrent ces neufs sphères, mais Averroès (Ibn Rushd) en resta au nombre de huit.
L’obliquité de l’écliptique par rapport à l’équateur, un des fondements du calcul astronomique, ne
manqua pas de poser un problème aux astronomes musulmans. Les Grecs, qui depuis Ératosthène (230
av. J.-C.) l’avaient calculée, avaient trouvé 230 51H 20J et considéraient ce chiffre comme invariable.
Les Arabes furent étonnés de trouver une valeur plus faible (al-Battani, par exemple, arriva à 230 35H) et
en vinrent à se demander s’il n’y avait pas eu diminution de l’obliquité, ou bien si les observations des
Anciens n’étaient pas erronées. Al-Battani adopta la seconde hypothèse, tandis que d’autres, s’appuyant
en outre sur la précession des équinoxes, imaginèrent la théorie, en fait inadéquate, de la « trépidation »
(ou « libration ») des fixes (harakat al-iqbal wal-idbar ), admise par Ibn Qurra et, sous une
forme un peu différente, par al-Zarqali. Mais les observations réitérées persuadèrent les astronomes qu’il
y avait effectivement une très légère diminution, ce qui fut reconnu universellement au XIIIe siècle.
Était-elle continue ou périodique, et dans quelles limites ? Les savants musulmans ne purent le
déterminer. En revanche, les astronomes de Ma’mun eurent le mérite de reconnaître que l’apogée solaire
est lié au mouvement des étoiles fixes et à celui des apogées des planètes, c’est-à-dire au déplacement
des longitudes dû à la précession des équinoxes.
La théorie générale de Ptolémée ne rencontra d’opposition qu’en Espagne, où Ibn Badjdja
(Avempace), Ibn Tufayl et Ibn Rushd rejetèrent, au nom d’Aristote, cette
représentation des mouvements célestes. Alpetrage (m. en 1204) alla jusqu’à nier tout mouvement
céleste d’occident en orient. Mais ces positions des philosophes espagnols ne trouvèrent aucun crédit
auprès des astronomes.
Comme Ptolémée, les premiers astronomes musulmans s’abstinrent de définir la nature des sphères
célestes ; ce problème ressortit d’ailleurs à la physique et à la métaphysique et non à l’astronomie, qui ne
s’intéresse alors qu’à l’aspect mathématique des sphères. Une fois admise la thèse aristotélicienne des
sphères solides, les auteurs musulmans en vinrent à considérer celles-ci et les corps célestes comme
constitués par une substance unique, un cinquième élément différent des quatre éléments sublunaires. La
solidité des sphères assure la fixité des étoiles, qu’elles entraînent dans leur rotation. Cependant, si l’on