PROJET DE SYNTHESE VERSION FINALE
POLITIQUE FISCALE: IMPÔT, REPARTITION DU
REVENU NATIONAL ET ASSURANCE SOCIALE
(Par Ceci Vieira Juruá, animatrice du Chantier sur la Politique Fiscale,
avec les observations et suggestions de la révision élaborée par Marcos
Arruda, animateur du Pôle de Socio-Economie Solidaire)
S O M M A I R E
1. Constatations et diagnostic
2- Visions et paradigme nouveau
3- Initiatives et innovations
4- Propositions
5- Stratégies et acteurs
I Constatations et diagnostic
Le cadre institutionnel général
L’on observe unanimement qu’une fragilisation des Etats nationaux est
en cours, face à l’expansion des entreprises transnationales et le
déréglement financier. Nous adhérons à cette observation à condition
que l’on définisse les différences entre ce qui se passe dans les pays du
Nord, les pays centraux, riches et puissants, et les pays du Sud,
périphériques, pauvres et/ou émergents. Les plus grandes entreprises
et conglomérats ainsi que les détenteurs des titres financiers se situent
dans des Etats du Nord; et c’est dans le Nord qu’agissent les
transnationales et le grand capital déréglé, en tant qu’agents
“extraordinaires” de renforcement de leurs Etats nationaux et leurs
gouvernements, avec lesquels ils partagent la gloire, le pouvoir et
l’argent.
Dans les économies pauvres ou émergentes, il existe un mouvement
contraire: de désindustrialisation, d’incapacité de gestion technologique
propre, de perte de marchés, de manque de ressources financières et
d’endettement croissant. Cet appauvrissement,visible dans le sud de
l’Equateur, a ame beaucoup de sociologues à penser que le plus
grand conflit de tous les temps provient de la polarisation Nord/Sud.
Dans ces économies perdantes, l’Etat passe par un processus aigu de
fragilisation fiancière, de délégitimation croissante, et même de
souveraineté décadente face aux créanciers internationaux. Les
programmes d’ajustement fiscal (ou structurel) et leur version actuelle
le déficit zéro -, élaborés et controlés par des agences internationales
(comme le FMI et la Banque Mondiale) contribuent à l’affaiblissement
des gouvernements, et à limiter la croissance et le développement
économique, en promouvant des modèles d’ouverture commerciale et
financière dont le résultat le plus visible sont la perte d’autonomie
monétaire et les dettes extérieures croissantes et impayables. En
Amérique du Sud, particulièrement, il existe encore un processus en
cours d’occupation militaire des territoires nationaux, avec l’expansion
des bases nord-américaines et les accords militaires défavorables aux
pays de cette région du globe.
Au Nord comme au Sud, la dépolitisation et la perte de confiance en
des mécanismes traditionnels de démocratie libérale ont lieu à un
rythme accéléré: le vote et la représentativité des élus. le vote est
facultatif, l’on constate le petit nombre d’électeurs qui ont comparu
aux urnes (égal ou inférieur à 30% de l’électorat). Dans les régimes
politiques le vote est obligatoire, le pouvoir des médias et du grand
capital exercent une énorme influence sur l’opinion publique. Dans les
uns et les autres, la représentation sociale à l’intérieur des partis
politiques est dominée majoritairement par les représentants de
secteurs d’entreprises et des élites financières locales et internationales.
Du point de vue de l’ordre international, cette période correspond à la
consolidation des Etats-Unis en tant que puissance mondiale
hégémonique, à l’internationalisation des cartels et des oligopoles
formés à l’origine dans les pays de la triade (Amérique du Nord, Japon
et Union Européenne), au démantellement de l’Union Soviétique et au
ressurgissement économique et politique de la Chine.
Tendances observées de Politique Fiscale
Au cours des deux dernières décennies, une adhésion croissante des
autorités gouvernementales à la Pensée Unique, ainsi qu’aux postulats
qui lui sont attribués en matière de politique fiscale, a eu lieu. Dans le
domaine des impôts, l’on observe: a) une réduction de la progressivité
des impôts directs; b) une réorientation des subsides et des privilèges
fiscaux, du travail au capital, du consommateur aux entreprises, de la
demande à l’offre; c) augmentation de la base d’incidence et des
aliquotes des impôts indirects considérés plus justes et volontaires; d)
élimination partielle des impôts qui incident sur le commerce
extérieur. Dans le domaine des dépenses publiques, dans les pays du
Nord, le discours dominant est un discours de condamnation des
activités d’entreprises des Etats, et leur privatisation progressive. Dans
le Sud, il s’agit plutôt de dénationalisation que de privatisation, en
tenant compte du fait que le contrôle actionnaire des entreprises
d’Etat est entrain d’être transféré majoritairement vers le grand capital
financier international. L’on assiste en même temps á la désarticulation
des institutions responsables de l’Etat-providence (ou Etat du Bien-
Etre Social).
Des asymétries de pouvoir et de capacité technologique et financière
entre pays centraux et périphériques, ou entre pays riches et pauvres
ont eu des conséquences très différentes au Nord et au Sud, dont la
complexité ne peut pas être analysée dans le cadre restreint du présent
rapport. Toutefois, il vaut la peine de mettre en évidence quelques
caractéristiques importantes. En premier lieu, contrairement à la
rhétorique officielle et à ce que l’on observe dans la riche Amérique du
Nord et dans l’Union Européenne, il y a eu dans les pays périphériques
une augmentation considérable de la charge tributaire , tout-à-fait
détachée des intérêts sociaux et collectifs: on augmente
progressivement la charge tributaire pour couvrir les lourds intérêts de
la dette extérieure et de la dette publique interne. L’endettement
croissant sert à justifier l’adoption de taux d’intérêts spoliateurs et
vampiriques, plus de cinq ou dix fois supérieurs à la croissance du
Produit National, ce qui amène à un endettement chronique et
explosif et à la détérioration de la souveraineté monétaire. La
suppression d’investissements publics stratégiques (infrastructure
physique), la réduction des dépenses sociales et le démantèlement des
Systèmes Etatiques d’Assurance Sociale, fonctionnent comme des
éléments de désagrégation de la société, d’encouragement à
l’augmentation de la violence et de reconcentration du revenu .
1
La politique fiscale en vigueur reflète également une tendance à la perte
des droits sociaux, pas seulement dans le domaine des droits de
citoyenneté inscrits dans les Constitutions, mais surtout dans les
rapports capital-travail l’on s’efforce d’imposer des règles de
flexibilisation du marché de travail, ce qui veut dire: réductions de
salaire et détérioration des conditions matérielles nécessaires à la
reproduction des travailleurs. La liberté octroyée aux entreprises en
matière de flexibilisation du travail signifie que l’on délègue au
travailleur des dépenses qui devraient faire partie du cahier de charges
des entreprises, ainsi que les risques provenant d’oscillations de la
demande.
En plus des interventions erronnées dues au FMI et à la Banque
Mondiale, les pays périphériques et leurs Gouvernements sont
confrontés à des menaces concrètes provenant de l’OMC, qui cherche
à mettre des clauses restrictives à la politique fiscale dans les
accords sur le commerce et les investissements internationaux. S’il est
vrai que les négotiations ayant trait à l’AMI Accord Multi-Latéral sur
les Investissements sont paralysées, ses clones sont toujours présents
1
Cfr. Le Monde Diplomatique, “Baisses d’impôt, retour aux fortunes d’antan”, septembre 2001, article de Thomas
Piketty, directeur de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales/Paris.
dans les impositions des agences régulatrices et/ou de financement
internationaux.
Tendances compensatoires
L’émergence des Etats-Unis comme super-puissance, ou comme un
véritable Empire presque planétaire, la fragilisation des Etats nationaux
et de leurs instruments de politique macro-économique (monnaie et
budget public), l’insécurité qui règne quant aux conditions matérielles
de vie de la plupart des populations, le pouvoir démesuré et dictatorial
du grand capital financier international, et, enfin, l’ensemble de traits
représentatifs de la post-modernité, ont déclenché des réactions et des
mouvements de défense de la part de certains agents collectifs. Il suffit
d’en citer quelques-uns: les blocs régionaux et l’Union Européenne en
particulier, au sein desquels on parle plus de souveraineté partagée que
de perte de souveraineté; un nombre immense et croissant
d’associations de toute sorte (de consommateurs, de producteurs,
d’usagers, de citoyens, de marginalisés, de discriminés, etc); des entités
au rayonnement international et agissant au niveau multinational, qui
condamnent le modèle hégémonique d’organisation sociale et qui
luttent pour la construction d’une nouvelle utopie, comme c’est
nettement le cas d’ Attac/Association pour la Tributation des
Transactions financières et d’Appui aux Citoyens, de l’Alliance pour un
Monde Responsable, Pluriel et Solidaire, du PSES- Pôle de Socio-
Economie Solidaire de cette Alliance, entre autres. Au Brésil et dans
beaucoup d’autres pays, il existe des réseaux amplifiés et diversifiés de
socio-économie solidaire. Les cris et les manifestations de protestation
globale contre les institutions représentatives du o-libéralisme et et
de leur politique se multiplient enfin: Seattle, Washington, Prague,
Nice, le Forum Social mondial de Porto Alegre, Gènes, etc.
Des réactions individuelles à cette globalisation perverse pourraient
également être citées: la religiosité croissante, la criminalité et la
violence urbaine, par exemple.
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