Sujet (objectif, démarche et technique, collaboration(s),...) :
La paroi des champignons, enveloppe fibreuse de chitine, glucanes, et autres polysaccharides
interconnectés, est tout sauf une structure inerte et immuable. Cette structure entourant toutes les cellules
fongiques est un exosquelette qui doit être suffisamment rigide et inaltérable pour assurer un rôle de support de la
forme cellulaire mais aussi de protection vis à vis de l’environnement. Toutefois, il est désormais admis que la
paroi fongique est surtout une structure dynamique et continuellement remodelée par l’action de multiples enzymes
de biosynthèse, de modification ou de dégradation. Cette plasticité moléculaire permet au mycélium d’assurer
d’une part sa croissance par un mécanisme d’élongation apicale, mais aussi de s’adapter aux nombreux stress qu’il
peut rencontrer, qu’ils soient de nature biotique ou abiotique. Chez les champignons phytopathogènes, la paroi est
également la zone de contact avec les plantes qu’ils parasitent. Cette structure se retrouve même au cœur d’un
véritable dialogue moléculaire où le polymère de chitine joue un rôle majeur.
La chitine est une macromolécule fortement immunogène. En effet, les plantes sont capables de percevoir
de très courtes chaînes de chitine d’une dizaine de résidus (chitooligosaccharides, COS) grâce à des récepteurs
membranaires possédant des domaines extracellulaires LysM capables de reconnaitre et de fixer les COS (exemple
du récepteur CEBiP du riz). Cette reconnaissance permet aux plantes de prendre l’avantage sur le parasite fongique
via l’induction d’une réponse immunitaire rapide, telle que la production d’espèces réactives de l’oxygène ou
l’expression de gènes de défense. Pour accentuer cette perception, les plantes secrètent des chitinases capables de
découper la chitine en oligomères reconnaissables. Afin de contourner ce mécanisme de défense, les champignons
ont développé des stratégies d’échappement très diverses pour empêcher la dégradation de leur chitine ou bien la
reconnaissance des COS lors de l’interaction. Ces mécanismes d’échappement ont jusqu’à présent été révélés dans
plusieurs pathosystèmes où les parasites sont des agents biotrophes ou hémibiotrophes. Ceux-ci se développent en
effet dans les tissus vivants de l’hôte et doivent donc trouver des moyens pour contourner son immunité s’ils
veulent pouvoir s’y maintenir.
Dans le cas particulier du pathosystème riz/Magnaporthe oryzae, le champignon secrète une protéine,
appelée Slp1, possédant un domaine LysM capable de se lier à la chitine. Slp1 s’accumule à l’interface plante-
champignon au cours de la phase de croissance biotrophe. Cet effecteur entre en compétition avec le récepteur
CEBiP du riz probablement via la séquestration des COS. En supprimant ainsi la réponse immunitaire induite par
la chitine, l’effecteur Slp1 contribuerait à la pleine virulence du champignon en exerçant un effet significatif sur
l'invasion des tissus et l'expansion des lésions.
Notre projet vise à étudier si un effecteur LysM peut jouer un rôle semblable dans le pouvoir pathogène du
champignon nécrotrophe Botrytis cinerea, agent responsable de la pourriture grise sur plus de 200 plantes
dicotylédones, dont la plupart d’intérêt agronomique (vigne, plantes maraîchères…). Des résultats obtenus au
laboratoire semblent corroborer cette hypothèse puisque des analyses transcriptomiques ont montré une induction
de l’expression d’un gène LysM spécifique à B. cinerea lors de la phase précoce de l’infection sur baie de raisin ou
bien au moment de la différenciation de structures infectieuses responsables de sa pénétration.
Nous proposons au cours de ce stage de Master 2 Recherche de :
- Construire une cassette de délétion ciblant ce gène par la technique de fusion de produits de PCR ;
- Générer un mutant en procédant à la transformation chimique de protoplastes de B. cinerea ;
- Cribler les transformants obtenus et vérifier la délétion par PCR ;
- Purifier le mutant et confirmer son obtention par un Southern-blot ;
- Analyser l’impact de la délétion du gène LysM sur la croissance in vitro du mutant ;
- Tester le pouvoir pathogène du mutant sur différentes plantes hôtes.