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AFP, publié le lundi 14 novembre 2016 à 11h55
Kenya: des femmes échangent quelques regards intrigués devant une enseignante de
l'Islam venue leur parler de la contraception
Sous leurs hijab colorés, les femmes échangent quelques regards intrigués et répriment des
rires gênés. "Vous êtes sûre que c'est halal ?", ose timidement l'une d'elles, rompant le silence
d'une assemblée pendue aux lèvres d'une enseignante de l'Islam venue leur parler de la
contraception.
C'est qu'on n'a pas l'habitude de voir des pilules contraceptives, des préservatifs ou des
stérilets dans les étendues arides du nord-est du Kenya. Cette région musulmane semi-
désertique, peuplée de Kényans d'ethnie somali souvent nomades et vivant principalement de
l'élevage, est historiquement marginalisée par le gouvernement et sous-développée.
Selon une étude de l'ONG Save the Children, 2% seulement de la population du comté de
Wajir utilise des moyens de contraception - contre une moyenne nationale de 58% -
principalement car "les méthodes modernes de contraception sont perçues comme une
violation des principes islamiques".
"La religion musulmane permet l'usage de ces méthodes dans certaines circonstances, avant
tout si la santé du bébé et de la mère sont au coeur de la réflexion", explique pourtant
l'enseignante, Deka Ibrahim, à une quarantaine de femmes assises sur le béton poussiéreux
d'une pièce sombre et délabrée de la minuscule maternité du village. Dans l'assistance, qui
compte plusieurs mineures mariées ayant déjà enfanté, une femme nourrit son bébé au sein.
D'autres retroussent machinalement les manches de leurs austères tenues, laissant poindre de
fins tatouages au henné ou des bracelets imitation diamant.
La méthode contraceptive utilisée ne peut avoir d'effet permanent (comme la ligature des
trompes), l'accord de l'époux est indispensable et l'avortement est proscrit, détaille l'oratrice
exprimant une vision de l'Islam, avant qu'une infirmière n'explique le fonctionnement des
pilules, implants hormonaux ou préservatifs.
Halima, 16 ans, mère d'une fille de 9 mois, écoute religieusement. "Je souhaite avoir d'autres
enfants, mais pas maintenant", confie à l'AFP cette timide adolescente. "J'espère en avoir une
fois que mon enfant aura grandi et une fois que je serai sûre qu'il est en bonne santé".
Car dans cette maternité se joue une question aussi brûlante que le soleil martyrisant à
l'extérieur le sol ocre sablonneux parsemé de buissons asséchés et d'acacias: celle des
traditions qui, en plus de discriminer les femmes, peuvent mettre en danger leur santé et celle
de leurs enfants.
- Culture et religion -
Dans le nord-est du Kenya, plus de quatre femmes sur dix sont mariées avant 18 ans - le
double de la moyenne nationale - avec à la clef des grossesses précoces parfois difficiles,
d'autant que la quasi totalité des accouchements se déroulent à demeure et non en clinique.
Et chaque femme donne en moyenne naissance à huit enfants, une grande famille étant dans la
culture somali un symbole de richesse.