La grammaire latine est considérée comme le modèle absolu. C’est l’élaboration de
manuels d’apprentissage des langues étrangères qui permet de rendre les grammaires de
cette époque bien plus fonctionnelles.
Un des grands grammairiens humanistes, nommé Ramus, établit en 1562 une
grammaire qui se présente comme un dialogue entre le maître et l’élève. La grammaire
devient alors indissociable de la pédagogie, c’est à dire de son enseignement.
D’autres comme Henri Estienne cherchent dans leurs ouvrages non seulement à légitimer
la langue française par rapport au latin, mais aussi à distinguer la bonne langue française
du parler du peuple. Il s’agit d’une opération de purification et de perfectionnement de la
langue. La réflexion sur le langage est désormais coupée de la réflexion métaphysique des
grecs. Les grammairiens puristes apparaissent. Ils passent la langue et ses usages au
crible, ce qui implique l’existence de normes.
Ainsi, à la fin du XVIè siècle, Pasquier fait des reproches à Montaigne à propos de la
forme de ses Sentences. Selon lui il use de mots inaccoutumés qu’il lui reproche d’aller
chercher en dehors de la réserve de mots admise dans les milieux lettrés. Il lui reproche
aussi d’employer des tours syntaxiques familiers aux gascons et non pas aux français.
IV- Les grammaires de l’âge classique
A l’époque classique, le latin n’est plus la langue de référence qu’il a été jusqu’alors.
Il est de bon ton dans de nombreux pays européens d’apprendre le français, tout comme
en France, on s’enorgueillit de savoir l’italien ou l’espagnol. Les grammairiens vont donc
proposer un arsenal pédagogique hérité des méthodes vivantes d’apprentissage du latin
développées au XVIe siècle. Ainsi, Charles Maupas, un des plus célèbres de ces
grammairiens écrit-il en 1625, une Grammaire et Syntaxe française contenant règles bien
exactes et certaines de la prononciation, orthographe, construction et usage de notre langue
en faveur des étrangers qui en sont désireux. La démarche adoptée par Maupas est toute
nouvelle, il ne se réfère plus aux modèles du latin mais il observe les usages en place chez
des sujets choisis. Pour lui, c’est l’usage qui prime sur toute autre considération en
matière de grammaire. Il s’inscrit dans la tradition classique de l’usus mais au service du
bon goût. Le grammairien prend acte des irrégularités, ne tente pas de les réduire à la
norme pourvu qu’ils soient « artistement agencés ». Le grammairien n’est plus un
philosophe dans l’acception antique du terme, il n’a pas de vocation transcendentale non
plus, il ordonne, classe. Maupas, comme Charles Oudin son contemporain dont les deux
ouvrages de 1632 et 1640 ne sont que des reprises de ceux de Maupas, sont d’abord des
pédagogues professionnels. Oudin contribue à débarrasser la grammaire de Maupas de
tous les tours provinciaux qui y pullulaient. Il dit avoir reconnu chez Maupas « force
antiquailles à reformer ». Oudin s’attaque à la mauvaise prononciation qui choque les
oreilles délicates.