Analyse 1 Les Réels Introduction : pourquoi les réels A l'origine les mathématiques sont apparues à partir de problèmes concrets. Les nombres, en particulier, ont servi d'abord à compter (entiers naturels) puis à mesurer: il s'agit alors de représenter une longueur géométrique, une unité de longueur étant choisie. Les nombres rationnels (quotients de deux entiers) ne suffisent pas. On s'en rend compte dès l'époque de Pythagore (-560,480) : la longueur de la diagonale d'un carré de coté 1 (qu'on représente par le symbole pas un rationnel (cliquer ici pour une démonstration élémentaire). ) n'est Ainsi on peut construire un segment dont la longueur n'est pas représentée par un rationnel : le problème de la droite réelle est posé, on peut le formuler ainsi: Étant donné une droite avec une origine et une unité de longueur (ou deux points de la droite affectés respectivement des nombres 0 et 1), on cherche à associer à tout point de la droite un nombre ou encore à représenter la droite par un ensemble de nombres. Cet ensemble de nombres est celui des réels . son : animation : D'autre part avec les entiers naturels, et avec les rationnels on calcule : on additionne (et, si cela est possible, on soustrait), on multiplie (et, si cela est possible, on divise). Les ensembles de nombres ont des structures algébriques (on y définit des opérations qui ont certaines propriétés). Sans donner la construction de ces ensembles rappelons en brièvement le principe de la méthode. L'ensemble de base est N ensemble des entiers naturels, il est muni de deux lois: addition notée + multiplication notée . ou . En symétrisant l'addition, ce qui revient à rendre la soustraction toujours possible, on obtient l'ensemble Z des entiers relatifs. De même, en symétrisant sur Z*=Z\{0} la multiplication, on obtient l'ensemble Q des rationnels. Merabti Abde louahab Groupe : 2 mias On remarque que, dans les deux cas, il s'agit de le même méthode: opération algébrique de symétrisation. L'ensemble Q est un corps commutatif (rappel de la définition). On dit que un ensemble K muni des deux lois de composition internes + et . est un corps si (K, +) est un groupe abélien, la loi . est associative, commutative, unitaire, distributive sur +, tout élément différent de l'élément neutre de + admet un inverse. Exemples : les corps de nombres Q, R, et C pour l'addition et la multiplication habituelles les corps finis Fp pour les opérations déduites de celles de Z par passage au quotient. D'autre part les entiers naturels servent à ordonner (premier, second,..) ; la relation d'ordre sur N se prolonge sur Z puis sur Q. Cette relation d'ordre ( total) notée est compatible avec la structure de corps (rappel de la définition). La relation d’ordre ce qui signifie: est compatible avec la structure algébrique (corps) de Q. en particulier La construction de R est une opération plus difficile, il existe plusieurs méthodes suivant que l'on cherche à combler l'une ou l'autre des "lacunes" de Q. On admet ici l'existence de R, on en donne les propriétés fondamentales : propriétés algébriques, propriétés de l'ordre total (ces propriétés sont liées par la condition de compatibilité), propriétés topologiques. Des propriétés de la relation d'ordre se dégage le concept de borne supérieure , des propriétés topologiques celui de voisinage. Il s'agit de notions qui sont à la base de l'étude des suites comme de l'étude locale des fonctions. Notons l'importance, théorique et pratique, du fait que Q est dense dans R. L'ensemble R n'en a pas moins des "lacunes", ainsi l'équation x2+1=0 n'a pas de racines réelles; d'où la nécessité de construire C (construction algébrique exclusivement). Sur R la relation est une relation d'ordre total, ce qui signifie que deux éléments quelconques de R sont comparables ou encore que deux réels x et y vérifient x y ou y Cette relation d'ordre total prolonge celle de Q. On note Merabti Abde louahab Groupe : 2 mias . x. Définition. La relation d'ordre R. ce qui signifie: est compatible avec la structure algébrique (corps) de en particulier On désigne par A une partie non vide de R. Définitions. On dit qu'un réel a est un majorant de A si tout élément de A est inférieur ou égal à a . a majorant de A équivaut à : On dit que A est majorée si A admet un majorant (elle en admet alors une infinité). On définit de même un minorant, une partie minorée. A est bornée si A est majorée et minorée. Remarque: Une partie non vide de R n'a pas toujours de majorant; lorsqu'elle en a un, elle admet une infinité (Exemples). a. Soit 2, 3, sont des majorants de A, 0,1 des minorants de A. A est donc une partie bornée de R. On remarque que 2, majorant de A, appartient à A. b. Soit ; -10, 0 sont des minorants de B; B est une partie minorée de R mais B n'est pas majorée (il existe des éléments de B arbitrairement grands). On remarque que 0 est un minorant de B qui appartient à B. Définition. On dit qu'un réel a est plus grand élément (ou maximum) de A si a appartient à A et est un majorant de A . a plus grand élément de A équivaut à : On définit de même la notion de plus petit élément (ou minimum). Merabti Abde louahab Groupe : 2 mias b. Remarque: une partie majorée (resp. minorée) n'a pas nécessairement de plus grand (resp. petit) élément (Exemples). c. On reprend les exemples précédents : d. e. 2 est le plus grand élément de A, 0 le plus petit élément de B. 1 est un minorant de A qui n'appartient à A, mais qui est tel que tout nombre supérieur à 1 n'est pas minorant de A, ce qu'on traduit par : f. g. il suffit de prendre n>1/ , . Ainsi si =10 -10 on prend par exemple n=1010 +1. Propriété. Si A a un plus grand (resp. petit) élément celui-ci est unique. h. Preuve:On aurait sinon a b et b a, d'où a=b. i. On note alors max A (resp. min A ) le plus grand (resp. petit) élément de A. j. Quand une partie A non vide de R est majorée, elle admet une infinité de majorants, et si a est un majorant de A, tout réel supérieur à a est majorant de A. Il est donc naturel de s'intéresser à l'existence éventuelle d'un plus petit majorant. C'est ce concept de plus petit majorant que l'on va formaliser en exprimant que tout réel qui lui est strictement inférieur n'est pas majorant. Définition. Si l'ensemble des majorants (resp. minorants ) d'une partie A de R admet un plus petit (resp. grand) élément, celui ci est appelé borne supérieure (resp. inférieure) de A et se note sup A (resp. inf A). a=sup A équivaut à : . On écrit souvent (ii) sous la forme k. Propriétés. 1. Si A a une borne supérieure (resp. inférieure), celle-ci est unique. 2. Si A a un plus grand (resp. petit) élément a, alors a=sup A (resp. inf A). l. Preuve: La propriété 1. vient du fait que la borne supérieure est le plus petit des majorants et la 2. découle de la définition. La réciproque de 2. est fausse comme le montre l'exemple : Merabti Abde louahab Groupe : 2 mias on a sup A=2 A et inf A=1; 2 est plus grand élément, 1 n'est pas plus petit élément. m. Remarque: Toute partie majorée de Q n'admet pas nécessairement de borne supérieure (Exemple). n. Exemple. Considérons maintenant l'ensemble E={x Q, x2< 2}, il a dans R une borne supérieure qui est : il est évident que est majorant de E. Aussi pour montrer que la propriété (ii) est vérifiée il suffit de considérer une suite de rationnels qui converge vers , ainsi la suite (un) définie par un+1 (cf cours sur les suites), or n'appartient pas à Q. o. C'est cette "lacune" de Q qui est à la base d'une construction de R (méthode dite des coupures). Définition. R est défini comme devant satisfaire aux conditions suivantes : (i) R est un corps totalement ordonné, (ii) R est une extension de Q, (iii) toute partie non vide majorée de R admet une borne supérieure. p. La propriété (iii) est dite propriété de la borne supérieure. q. La propriété (ii) exprime que R est une extension de Q c'est à dire que R est un corps qui contient le corps Q; en fait R est le plus petit corps contenant Q et qui possède la propriété de la borne supérieure. On remarque qu'il ne peut être question de borne supérieure dans C puisque ce corps n'est pas muni d'une relation d'ordre (a fortiori d'une relation d'ordre total). r. On obtient, bien évidemment, en considérant l'ensemble des opposés de la partie envisagée, la propriété : s. Toute partie non vide minorée de R admet une borne inférieure. Définition. On appelle valeur absolue d'un réel x, le réel, noté |x| , défini par : |x|=max(x, -x). t. Propriétés. Merabti Abde louahab Groupe : 2 mias u. La preuve est élémentaire: il suffit d'étudier les différents cas suivant les signes de x et y. v. Parmi les rationnels les décimaux ont un rôle pratique important, leur intérêt est d'approcher les réels d'aussi près que l'on veut, ce qui permet les calculs sur les réels. Définition. Un réel d est un nombre décimal s'il existe k N tel que 10kd Z. w. (Exemples) x. on écrit . y. Cette écriture décimale signifie : z. aa. En revanche 1/3 n'est pas un décimal. bb. On note D l'ensemble des décimaux; on a l'inclusion: cc. D Q R, dd. mais attention D n'est pas un corps: 3 est un décimal mais non 1/3. ee. Le théorème suivant exprime l'équivalence entre quatre propriétés, la première, dite propriété d'Archimède, exprime le fait que tout réel peut être "dépassé" par les multiples d'un réel positif quelconque. Théorème. R est un corps archimédien , c'est à dire qu'il satisfait à l'une des quatre propriétés équivalentes suivantes : (i) étant donné deux réels y et x, x strictement positif, il existe un entier n N* tel que y nx; (ii) étant donné un réel y il existe un entier n N tel que y n; (iii) étant donné un réel positif y il existe un entier n unique tel que n y<n+1; l'entier n est la partie entière de y notée E(y) ou [y]. (iv) étant donné un réel positif y et un entier k, il existe un décimal yk unique, tel que 10k yk Z et yk y<yk+10-k yk est l'approximation décimale d'ordre k ou à 10 -k près par défaut de y. ff. Preuve : On démontre les implications (i) puis on montre (i) par l'absurde (Preuve). gg. Preuve. hh. (i) (ii): il suffit de prendre x=1. Merabti Abde louahab Groupe : 2 mias (ii), (ii) (iii),(iii) (iv), (iv) (i); ii. (ii) (iii): soit y R+*, d’après (ii) l’ensemble {p N, p y} est fini et admet donc un plus grand élément, soit n, n vérifie donc n y<n+1. Soit y R-, l’entier E(y) défini par : jj. E(y)=-E(-y)-1 si y Z, -E(-y) si y Z, kk. convient. La partie entière d’un réel x est le plus grand entier inférieur ou égal à x. Attention [- ]=-4 et non -3 (comme l’indique la fonction Int de certaines calculettes). ll. (iii) (iv): soit y un réel, 10ky est un réel qui admet donc une partie entière [10ky], celle-ci vérifie mm. [10ky] 10ky < [10ky] + 1 ; nn. d’où, si l’on pose yk = , oo. 10k yk Z et yk y < yk +10 -k. pp. (iv) (i): soit y R, et x R+*, en appliquant (iv) à y/x avec k=0, il existe un entier qui vérifie , d’où x<(u+1)y. On montre alors (i) par l’absurde. Supposons que, pour tout entier n on ait y>nx; soit A={nx, n N*}; A est non vide et majorée, elle admet une borne supérieure >0. On a donc, pour tout entier n, ny et il existe p tel que: qq. <py d’où 2py> , rr. or 2py appartient à A, on a donc une contradiction . ss. La propriété d'Archimède, est dans R une conséquence de la propriété de la borne supérieure; toutefois elle n'est pas caractéristique de R, Q est également archimédien mais ne vérifie pas la propriété de la borne supérieure. tt. On remarque que, dans les calculs numériques, lorsqu'on "approche" 1/3 par 0,33, cela correspond à la double inégalité: uu. ; vv. 0,33 est l'approximation décimale d'ordre 2 (ou à 10-2 près) par défaut de 1/3, tandis que 0,34 est l'approximation par excès. ww. Les intervalles de R jouent un rôle fondamental dans l'étude des fonctions numériques (fonctions de R vers R), tant du point de vue global (ensemble de définition) que local (voisinage): ce sont les parties connexes, c'est à dire d'un seul tenant, de R. Définition. Une partie I de R est un intervalle si . Merabti Abde louahab Groupe : 2 mias xx. La propriété de la borne supérieure (resp. inférieure) permet de classer les intervalles non vides de R en 9 types distincts suivant l'existence ou non d'un majorant, d'un minorant, d'un plus grand, d'un plus petit élément. yy. On montre ainsi qu'un intervalle non vide de R est d'un des types suivants : zz. intervalle borné ouvert : ]a,b[ = {x R, a<x<b} semi-ouvert : [a,b[ = { x R, a x<b} ]a,b] = { x R, a<x fermé : aaa. [a,b] = { x R, a b} x b} intervalle non borné minoré, non majoré : avec minimum [a,+ [ = {x R, x a} sans minimum ]a,+ [ = { x R, x>a} majoré, non minoré : avec maximum ]- ,b] = { x R, x b} sans maximum ]- ,b[ = { x R, x<b} non minoré, non majoré : ]- ,+ [ Merabti Abde louahab Groupe : 2 mias bbb. Preuve : Par exemple, on peut montrer qu'un intervalle borné ayant un plus petit élément mais pas de plus grand élément est de la forme [a,b[ (Preuve). ccc. Les intervalles ]a,b[ et [a,b], (b>a) peuvent être encore définis de la façon suivante : ddd. Le réel est le centre de l'intervalle, est le rayon. Cette définition de l'intervalle ]a,b[, sera très souvent utilisée, en particulier, dans l'étude des suites et des fonctions. eee. Les propriétés locales font appel à la notion de voisinage d'un point. Définitions. Soit a R, on dit que a est intérieur à un intervalle I s'il existe un intervalle ouvert contenant a et inclus dans I. On appelle voisinage de a toute partie de R qui contient un intervalle ouvert contenant a. On appelle voisinage de + (resp. - ) toute partie de R qui contient un intervalle de la forme ]A,+ [ avec A R, (resp.]- ,B[ avec B R). On dit qu'une propriété est réalisée au voisinage d'un point s'il existe un voisinage du point dans lequel cette propriété est vérifiée . fff. Pratiquement on prendra pour voisinage de a R, les intervalles ouverts contenant a (fréquemment les intervalles ouverts centrés en a ) et pour voisinage de + (resp. ) les intervalles ]A,+ [, (resp. ]- ,B[). ggg. Si V est un voisinage de a, on note V* =V-{a}, voisinage épointé de a . Théorème. Q est dense dans R. (entre deux nombres réels distincts a et b, il existe un rationnel) hhh. Preuve : Ceci peut être démontré en utilisant une approximation décimale de (Preuve). iii. Preuve. Soient a et b deux réels, vérifiant a<b; on pose Si =b-a>0. est rationnel, il convient car il vérifie a < Merabti Abde louahab Groupe : 2 mias < b, si n’est pas rationnel, soit k N tel que 10-k< /2; le réel approximation décimale à 10-k près par défaut xk et l’on a : admet une jjj. a<xk< < b, avec xk D. kkk. Le rationnel xk convient donc. On montre de même que R\Q (ensemble des nombres irrationnels) est dense dans R. Merabti Abde louahab Groupe : 2 mias