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L’accident vasculaire cérébral demeure l’une des principales
cause des décès tant dans les pays industrialisés que dans
ceux en voie de développement.1,2 Les actuelles recom-
mandations diagnostiques et thérapeutiques mettent l’accent
sur la sténose artérielle et sa signature ischémique en tant
que marqueurs de la sévérité des lésions d’athérosclérose.
Toutefois, ces critères centrés sur la lumière artérielle font
abstraction des particularités morphologiques et moléculaires
de la plaque, lesquelles sont susceptibles de fournir d’utiles
informations sur le risque d’événement lié à la thrombose de
cette dernière.
L’inflammation est une caractéristique majeure des
plaques qui sont hautement pourvoyeuses de thromboses et
d’événements vasculaires cérébraux d’origine ischémique.3–5
Les techniques d’imagerie non invasives telles que la
tomodensitométrie (TDM)6–8 ont permis d’identifier divers
caractères morphologiques à haut risque (CMHR) qui, telle
la présence d’un remodelage positif, d’un noyau nécrotique
riche en lipides et d’ulcérations ou d’irrégularités de surface
des plaques, augmentent le risque d’événement vasculaire
cérébral ischémique.8–11 Une étude menée sur plus de
1 000 patients suivis pendant 2 ans a montré que le risque
d’événement coronaire aigu est fortement majoré lorsque
plusieurs de ces CMHR coexistent, les taux d’événements
ayant été respectivement de 0,5, de 3,4 et de 22,2 % selon
que les patients présentaient 0, 1 ou 2 CMHR, (p <0,001).12
D’autres travaux ont, par ailleurs, établi un lien entre
l’augmentation de la captation carotidienne du 18flurodésoxy-
glucose (FDG) objectivée par la tomographie par émission
de positons (TEP) et la récente survenue d’un événement
vasculaire cérébral d’origine ischémique chez le patient
considéré.13,14 Il est établi que la TEP-FDG permet de mesurer
le degré d’inflammation des plaques d’athérosclérose.15–19 En
cela, l’estimation par imagerie de l’inflammation en fonction
du nombre de caractéristiques à haut risque peut faciliter la
stratification des risques chez les patients présentant une
athérosclérose carotidienne de grade faible à modéré et
qui posent fréquemment des problèmes de prise en charge
thérapeutique. Or, alors que l’influence exercée sur
l’inflammation par la présence d’un unique CMHR est
parfaitement documentée, on ne dispose d’aucune donnée
sur la répartition de l’inflammation au sein des plaques selon
le nombre de CMHR qu’elles présentent. A ce jour, seules
quelques études ont été menées pour rattacher les sites de
fixation du FDG aux caractéristiques structurales des
plaques.19,20 De plus, à notre connaissance, aucune étude
d’imagerie n’a été publiée ni, ce qui est encore plus
surprenant, aucune série histologique ayant eu pour objet
d’évaluer la répartition relative de l’inflammation au sein des
plaques en fonction des CMHR existants. C’est pourquoi,
dans cette étude, nous nous sommes efforcés d’établir la
répartition de l’inflammation en fonction des CMHR
présentés par les plaques carotidiennes. Nous nous sommes
appuyés sur l’angiographie par TDM (A-TDM) multi-
barrettes pour rechercher au niveau des plaques les CMHR
(remodelage, dépôts lipidiques et irrégularité de la lumière
artérielle) connus pour augmenter le risque d’événement
clinique.8–11 Nous avons également eu recours à l’imagerie par
TEP-FDG et à l’examen histologique (chez un sous-groupe de
patients ayant fait l’objet d’endartériectomies carotidiennes
[EAC]) pour évaluer la répartition de l’inflammation en
fonction de la morphologie des plaques.
Méthodes
Patients
Trente-six patients ont fait l’objet de deux explorations vasculaires
distinctes par TEP et par A-TDM dans le cadre d’études menée
en 2009 à l’hôpital général du Massachusetts en vue d’évaluer
l’inflammation des plaques d’athérosclérose carotidiennes. Les images
acquises chez deux patients n’ont pas été incluses dans l’analyse car
elles ont été jugées de qualité insuffisante, de sorte que la série de
données finale a porté sur 34 patients. Dans les études en question, les
patients atteints de pathologies inflammatoires aiguës ou chroniques
ont été exclus lors de la sélection effectuée préalablement aux
évaluations par imagerie, sur la base des antécédents médicaux, de
l’examen physique et du bilan biologique (hémogramme, constantes
urinaires, antigène de surface du virus de l’hépatite B, anticorps
anti-VIH, etc.). Un sous-groupe de 10 patients porteurs de sténoses
sévères de l’artère carotide interne (amputation de la lumière artérielle
atteignant 70 à 99 %) décelées par écho-Doppler, angiographie par
résonance magnétique ou A-TDM a été inclus dans l’étude un mois
avant la réalisation d’une endartériectomie carotidienne programmée.
Ces patients formaient un sous-groupe d’une étude précédemment
publiée qui avait été entreprise pour rechercher le lien existant
entre la captation du FDG et le degré d’inflammation des plaques.16
Les 24 autres patients ont été inclus dans l’étude parce qu’ils
satisfaisaient à l’un des critères ci-après : (1) lésions d’athérosclérose
documentées au niveau d’un quelconque territoire vasculaire
(carotidien, coronaire ou périphérique) ; (2) diabète de type 2 ;
(3) obésité (indice de masse corporelle compris entre 30 et 40 kg/m2)
(Figure 1). Le protocole de l’étude a été approuvé par le comité
local de surveillance des recherches biomédicales ; tous les patients
ont fourni leur consentement éclairé.
Explorations par TEP et TDM
Le FDG a été administré par voie intraveineuse (10 à 25 mCi) après
une nuit de jeûne et l’imagerie a été réalisée 1,5 à 3 heures plus tard au
moyen d’une caméra de TEP Siemens de type ECAT HR+ (Siemens,
Knoxville, Tennessee, Etats-Unis) dont la résolution intrinsèque était
de 4,2 mm. Les images ont été acquises en mode tridimensionnel lors
d’une séance de 20 minutes, les patients étant placés en décubitus
dorsal. La reconstruction des images corrigées de l’atténuation a été
effectuée en utilisant un algorithme de rétroprojection filtrée, ce qui a
fourni une résolution efficace de 5 mm. Les patients avaient tous une
glycémie inférieure à 200 mg/dl lorsque l’imagerie a été réalisée.
Une TDM avec prise de contraste a été pratiquée au moyen d’un
scanner à 64 barrettes Siemens (Siemens, Knoxville, Tennessee,
Etats-Unis) le même jour que la TEP en utilisant comme produit de
contraste de l’iopamidol (Isovue 300 ; Bracco Diagnostics, Rome,
Italie), administré à la dose de 100 à 140 ml à raison de 3 ml/s. Les
paramètres du tomodensitomètre comprenaient une tension de
tube de 120 kVp, un courant de tube de 220–250 mA, un temps de
rotation de 0,8–1,0 s, une épaisseur de coupe de 2,5 mm avec distance
de reconstruction inter-coupes de 1,25 mm, une vitesse de table de
3,75 mm/rotation et un rapport de déplacement de 0,75/1.
Mesure de la captation du FDG en TEP
La fixation carotidienne du FDG a été mesurée tous les 5 mm le long
du grand axe de l’artère (sur la zone s’étendant 2 cm en dessous et
3 cm au-dessus de la bifurcation). A la hauteur de chaque coupe
frontale, une zone d’intérêt (ZI) unique d’environ 8 mm de diamètre a
été tracée autour de la paroi de la carotide interne, puis la captation
standardisée maximale (CSmax) a été mesurée. La CS est le rapport
de la concentration tissulaire en FDG (kBq/ml) corrigée pour la
décroissance à la dose injectée en fonction du poids corporel (kBq/g).
L’absorption de fond du FDG a été mesurée au niveau d’une veine de
336 Circulation Septembre 2012