Qu’est-ce que le Laboratoire Africain de Science Politique « Appliquée » ? Le Laboratoire Africain de Science Politique « Appliquée », LASPA en sigle, est un think tank composé essentiellement de politistes et de constitutionnalistes, dont les recherches, les réflexions et les propositions portent notamment sur des problématiques de politiques publiques, de gouvernance, de démocratie participative, de mondialisation, du développement durable et de leadership. En valorisant la recherche fondamentale et la recherche appliquée en sciences sociales, en faisant l´option de la recherche qualitative dont la profondeur empirique est établie, le LASPA utilise la science politique comme l’un des outils privilégiés pour trouver des solutions aux véritables problèmes contemporains de la gouvernance : fragilité des assises du pouvoir politique, absence de cohésion sociale, fragilité de l’unité nationale, conflits identitaires, corruption endémique, inefficacité de l’administration publique. Face à la mondialisation ultralibérale dont les ravages se font sentir davantage en Afrique, et face aux grandes mutations sociétales de ces trois dernières décennies, la gestion gouvernementale classique devient de plus en plus inopérante. La persistance d’un chômage généralisé, les multiples conflits sociaux, la pauvreté et l’absence de perspectives reluisantes pour les jeunes générations permettent de se rendre compte des difficultés de mobilisation des populations dans le cadre des projets collectifs d’intérêt général. Dans cet ordre d´idées, la solution à la crise de légitimité du pouvoir ne réside plus seulement dans la recherche du « suffrage populaire », mais aussi et surtout dans la réduction substantielle du déficit social. Dans ce contexte, le LASPA entend non seulement assister les décideurs politiques centraux et locaux à faire de bons choix programmatiques pour le bien-être collectif, mais aussi promouvoir l’empowerment en offrant à la société civile des outils lui permettant d’augmenter le capital social nécessaire à l’action collective. Dans cette perspective, le LASPA vise à minorer l’asymétrie relationnelle entre gouvernants et gouvernés, afin de promouvoir les conditions propices à une gouvernance participative indispensable à l’émergence d’un « quatrième pouvoir du citoyen », comme fondement d’une société civile autonome. La vision du LASPA et sa démarche puisent leurs racines dans la dialectique toujours actuelle conceptualisée par Max Weber : « La science, la politique : deux vocations profondément divergentes. L’une requiert modestie et disponibilité d’esprit. L’autre, déchirée entre l’éthique de la conviction et l’éthique de la responsabilité, souffre d’une contradiction nécessaire qui toujours lui interdira la certitude scientifique ». Si, selon ce grand sociologue, les vertus du politique étaient incompatibles avec celles du savant, il n’en demeure pas moins que son souci de les séparer ne fût pas plus aigu que sa conscience du lien entre ces deux activités. C’est ainsi qu’il considérait qu’une science qui analyse les rapports de cause à effet contribue au processus de prise de décision raisonnable, susceptible d’atteindre le but que l’on vise. Bien qu’il ait posé le principe de neutralité axiologique pour éviter les risques de corruption de la pureté de la pensée rationnelle par des prises de position politiques ou des effusions sentimentales, Max Weber n’a pas pour autant versé dans la négation du libre arbitre du chercheur. Par ailleurs, à la période behavioriste, certains chercheurs voulaient construire une science objective et « neutre », alors que d’autres, s’inscrivant dans la perspective de la recherche appliquée, souhaitaient contribuer activement à la solution des problèmes politiques réels au sein de la société. Ces derniers, à l’instar de C. W. Mill et H. Lasswell, marquèrent leur volonté de faire servir la sociologie à l’action, autrement dit, d’en faire une science non plus seulement « désintéressée », mais utile et éclairante pour résoudre les problèmes concrets auxquels sont confrontés les sociétés modernes. Autrement dit, une science susceptible de servir de thérapeutique sociale. A ce titre, Roger-Gérard Schwartzenberg notait : « […], tout sociologue, et a fortiori tout politiste, se trouve aujourd’hui obligé de poser consciemment le problème des rapports de sa discipline avec l’action politique ». C’est à l’aune de cette alternative que le LASPA s’inscrit dans la perspective de la « révolution post-behavioriste », en ce sens qu’elle vise à aider la science politique à déceler les besoins réels de la société. Rappelons, s’il en était besoin, qu’une science ne se définit pas par les objets qu’elle étudie, mais par la nature du regard qu’elle porte sur les objets et par les approches méthodologiques mises en œuvre. D’où le choix de l’analyse des politiques publiques considérée par Lasswell H. et Lerner D. comme le paradigme qui « contribue à la résolution de problèmes, en niant ainsi la dichotomie entre le savant et le politique, pour proposer un savoir engagé ». Quant à Pierre Muller, « toute société sectorielle sera nécessairement confrontée à un grave problème de cohésion sociale. Alors que la société traditionnelle est menacée d’éclatement, la société sectorielle est menacée de désintégration si elle ne trouve pas en elle-même les moyens de gérer les antagonismes intersectoriels. Ces moyens ce sont les politiques publiques ». Partant de l’analyse habermassienne de la fragilité de la cohésion sociale et celle de l’Etat, Elias Norbert considère que « le problème de l’ordre social et en même temps sa raison d’exister est de rendre compatible l’interdépendance des individus (les individus ont besoin les uns des autres) et le conflit (mais leurs intérêts les opposent) pour garantir les conditions du vivre ensemble ». Dès lors, les véritables enjeux politiques et sociaux résident dans le processus d’élaboration des politiques publiques. En effet, selon Paul Sabatier et Edella Schlager, « le processus d’élaboration des politiques publiques recouvre la manière dont les problèmes sont conceptualisés et présentés au gouvernement pour être résolus ; les institutions gouvernementales formulent des alternatives et choisissent des solutions sur base des avis formulés par de nombreux acteurs gouvernementaux ou non gouvernementaux ». Il en résulte que la cohésion sociale indispensable à l’unité nationale dépend de la prise en compte efficiente des divers intérêts, souvent contradictoires, dans le cadre du processus décisionnel ou de l’élaboration des politiques publiques. Comme on peut aisément le constater, l’analyse des politiques publiques relève d’une importance capitale, en ce sens qu’elle sert de boîte à outils permettant d’ouvrir la « boîte noire » de l’Etat, afin d’appréhender le contenu des programmes gouvernementaux, en questionnant l’origine des problèmes et en jaugeant la portée des solutions envisagées. A l’instar de la théorie politique d’inspiration économique, le but de l’analyse des politiques publiques n’est pas nécessairement de savoir « qui décide », mais plutôt de comprendre les logiques sous-jacentes au processus de prise de décision, en examinant les mécanismes procéduraux et les structures de comportements des acteurs publics que sont les gouvernants et les gouvernés. Partant d’une approche séquentielle, le processus d’élaboration des politiques publiques peut se décliner, selon C. O. Jones, en cinq étapes : la première est celle d’identification du problème nécessitant l’intervention des pouvoirs publics et l’inscription de celui-ci sur l’agenda politique. La deuxième constitue le traitement du problème et la formulation des solutions éventuelles. La troisième s´intéresse à la mise en œuvre, autrement dit, l’exécution effective d’un programme gouvernemental. Il s’agit de traduire une politique publique en action concrète. La quatrième procède à l’évaluation de l’exécution d’une politique publique ou d’un programme gouvernemental. Cela permet d’analyser les résultats en vertu des critères spécifiques. L’évaluation considérée comme analyse ex-post de l’impact d’une politique publique sur une situation donnée devient une dimension essentielle du débat démocratique, du fait de l’implication des acteurs indépendants du pouvoir exécutif. C’est de cette évaluation qu’une politique publique tire sa légitimité. Enfin, la cinquième étape consacre la terminaison de l’action publique et éventuellement la mise en œuvre d’une nouvelle politique publique. Au terme de ce processus, le LASPA entend, par l’analyse des politiques publiques, répondre à un certain nombre de questions : le programme gouvernemental exécuté a-t-il atteint les objectifs visés? Si oui, dans quelle proportion ? Sinon, pourquoi ? Comment remédier à l’inefficacité de l’action gouvernementale ? Quelles alternatives aux insuffisances du modèle « top down » de l’élaboration des politiques publiques ? Comment la participation citoyenne peut-elle remédier à l’obsolescence de l’approche stato-centré de la définition de l’intérêt général ? C’est à travers ce questionnement que se définit la mission principale du LASPA, en ce sens qu’une politique publique considérée, selon Mény et Thoenig, comme le «produit de l’activité d’une autorité investie de puissance publique et de la légitimité gouvernementale », recouvre toute la problématique de la gouvernabilité de l’Etat postmoderne que postule de nos jours la mondialisation. Principaux domaines d´action Les recherches entreprises par le LASPA s´étendent aux domaines prioritaires suivants : - Politiques publiques - Etat central et Etat local - Gouvernance politique, administrative, locale et financière - Territorialité, services publics, développement - Lutte contre la pauvreté et développement durable - Acteurs publics et parapublics - Démocratie participative - Conflits sociaux, cohésion sociale Les moyens de mise en œuvre Pour accomplir sa mission, le LASPA se donne les moyens suivants : - Analyse des travaux de recherche en vue de leur application concrète sur les problèmes de société - Mise à disposition de l´expertise du LASPA dans la formation et la réalisation des études - Initiation des programmes de recherche - Organisation des séminaires et colloques - Publications - Animation d´une revue à caractère scientifique certes, mais accessible à tous - Gestion d´un centre de documentation - Partenariats tant au niveau national qu´international - Initiation d´une politique de dialogue avec les acteurs engagés dans l´action publique Les organes du LASPA Le LASPA est doté d´un conseil scientifique et d´une direction exécutive (directeur, directeur adjoint, secrétaire scientifique, gestionnaire comptable). Constituant le dernier levier de la hiérarchie, les membres du LASPA sont éligibles à tous les postes de responsabilité sus-cités en fonction des critères définis à cet effet.