Passer à l`action - comprendre

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Passer à l’action ? Remarques sur la psychologie
des sociologues
par Yves Clot
On n’y échappe pas : les sciences humaines, et tout particulièrement la sociologie, sont le
théâtre d’une forte relance des « théories de l’action ». Cette relance s’alimente au regain
d’intérêt de beaucoup de chercheurs pour la dimension philosophique du problème. Sous
l’effet du reflux de la figure marxiste de l’action historique, la confrontation des traditions
issues de la phénoménologie et de la philosophie analytique revient au premier plan [1].
Au-delà, une philosophie pratique de l’agir social cherche à repenser le sens de l’activité
politique en parcourant le chemin suivi par M. Weber, H. Arendt ou J. Habermas [2].
I - Une « anthropologie de la prudence »
Il semble aussi que la référence à Aristote soit devenue structurante pour accompagner la
redécouverte de cette rationalité pratique [3]. Certes A. Tosel a raison de faire remarquer
que ce retour à Aristote s’opère selon les lignes de clivage des débats contemporain, en
séparant, dans la tradition grecque, la philosophie pratique de l’ontologie qui lui donne
sens [4]. Il reste qu’il est devenu fréquent de regarder L’Éthique à Nicomaque comme « la
première théorie de l’action » et qu’une interprétation récente de la pensée de Marx
comme « philosophie de l’activité » n’hésite pas à soutenir que ce dernier a trouvé dans
Aristote l’antidote de l’idéalisme hégélien [5].
Bien sûr il n’est pas dans mon propos de discuter le bien-fondé théorique de ce retour à
Aristote. Par contre on peut réfléchir, dans la conjoncture actuelle, sur la percée de cette
« anthropologie de la prudence », pour reprendre le mot de P. Aubenque. Si l’on évite le
contresens qui ferait prendre le souci de la délibération et, plus largement, la « prudence »
d’Aristote (phronesis) pour des signes de renoncement à agir, on partagera sans peine
l’analyse de P. Aubenque sur les racines historiques de cette anthropologie : au début, la
société de Platon, désaxée mais dans laquelle tout paraît possible à l’action des hommes
justifiée par la science, à la fin, l’impuissance politique de la Grèce, l’impossibilité de
transformer le monde, transmuée en une cosmologie du destin. « Entre les deux, le monde
d’Aristote est ambigu, comme la société où il vit : tout n’est pas possible, mais tout n’est
pas impossible ; le monde n’est ni tout à fait rationnel, ni tout à fait irrationnel. La
délibération traduit cette ambiguïté » [6]. On peut penser que le monde dans lequel nous
vivons aujourd’hui n’a rien à envier à celui d’Aristote en matière d’équivocité.
Simultanément offert et refusé, l’avenir fait rage contre lui-même et les conditions de
possibilités de l’activité transformatrice n’existent que sous bénéfice d’inventaire. Du
coup, il paraît difficile de séparer la réhabilitation en cours des « théories de l’action » et la
situation historique présente où se cherchent les sujets d’une possible intervention sur le
monde.
II - Un préalable : l’action avec qui ?
Dans ce cadre, la discussion ouverte par le « passage à l’action » de quelques-unes des
disciplines des sciences de l’homme fait peut-être partie des inventaires en cours sur les
possibilités d’agir. Il n’est pas possible de parcourir tout le spectre couvert par le travail
réalisé dans ces disciplines. Dans ce qui suit je me limiterai à examiner d’abord quelques
problèmes relatifs à la réception sociologique de l’ethnométhodologie en France. Encore
plus étroitement j’essaierai de comprendre les termes de la confrontation entre
sociologues portant sur l’intentionnalité du sujet dans l’action. C’est ce qui me poussera à
m’intéresser à ce qu’on pourrait appeler « la psychologie spontanée des sociologues ».
Au préalable, c’est le régime de production des connaissances sur l’action que je voudrais
questionner. Car il est malheureusement toujours possible de réduire l’action à son
concept sans reconduire les problèmes épistémologiques à la transformation effective des
situations humaines concrètes. En effet, même lorsqu’on est résolu à mettre l’action au
centre de la réflexion conceptuelle, on peut se trouver concerné par cette remarque de A.
Rich : « Lorsque quelqu’un qui jouit de l’autorité du professeur, par exemple, décrit le
monde et que vous n’en faites pas partie, il y a un moment de déséquilibre psychologique,
un peu comme si vous regardiez dans un miroir sans vous y voir [7]. »
Soyons net. Le miroir des concepts est indispensable à qui veut se connaître. Mais, à
l’inverse, ce miroir ne démontre son utilité qu’exposé au dehors, face à ce qui n’est pas lui.
L’expérience de la vie a besoin d’être réfléchie, pas escamotée. On peut le dire aussi en
soutenant la thèse d’une double racine de la pensée. C’est L. Vygotski qui a peut-être été le
plus loin dans ce sens [8]. Pour lui, les concepts scientifiques et les concepts quotidiens
sont deux sources d’intelligibilité qui peuvent se rejoindre mais jamais s’identifier. Les
seconds sont saturés de contenus empiriques, gorgés du sens d’une expérience singulière.
Les premiers ne prennent pas les choses directement comme point de départ et leur
rapport à l’objet est lui-même médiatisé par le système de concepts. Il y a deux façons de
penser, et ce qui fait la force de l’une fait la faiblesse de l’autre. Du coup, les dangers qui
menacent le développement des concepts quotidiens sont tout autres que ceux qui
menacent la croissance des concepts scientifiques risque de se refermer sur les rhétoriques
narratives d’un côté, risque de s’isoler dans l’exercice logique et catégoriel de l’autre [9].
C’est sans doute pourquoi M. Bakhtine a pu écrire que tout le problème de l’exactitude des
sciences humaines tient à la difficulté de « surmonter l’altérité de ce qui est autre sans le
transformer en quelque chose à soi » [10]. A vrai dire cette difficulté nous impose non
seulement d’avoir une activité théorique mais aussi de construire des milieux sociaux
d’analyse et d’actions comme instruments de recherche. S’ils sont durables, ces milieux
scientifiques élargis, ces « tiers-milieux » cultivant l’indépendance mutuelle des formes de
vie et des formes de recherche, peuvent agir comme des zones communes de
développement décisives pour lier et relier inlassablement les deux lignes d’intelligence
opposées décrites ci-dessus. Quand ces conditions existent, c’est le régime de production
du savoir sur les hommes qui se trouve modifié. Les concepts scientifiques germent vers le
bas par l’intermédiaire des concepts quotidiens et ceux-ci germent vers le haut par
l’intermédiaire des autres. Cette discordance créatrice instituée me paraît être le ressort
philosophique indispensable de la recherche en sciences humaines. Le chercheur, pour ce
qui le concerne, est alors au carrefour d’une double expérimentation « dialogique », avec
l’expérience de ses interlocuteurs d’un côté, avec la communauté scientifique de
l’autre [11].
III -Le choix ethnométhodologique
En fait, c’est sans doute aussi avec ce genre de préoccupations que s’est décidé le tournant
sociologique assumé par ce qui allait devenir l’École de Chicago entre 1915 et 1935, si l’on
retient sa grande époque comme référence. Il ne s’agit pas ici de discuter directement de la
contribution importante de cette tradition [12] à la reconnaissance de l’intelligence
sociologique existant en dehors de la sociologie professionnelle. Il s’agit plutôt de
comprendre pourquoi ce retour au concret dont portent témoignage tant de beaux
travaux [13] et ce souci de saisir l’expérience dans le vif des interactions sociales peuvent
susciter en France une discussion aussi engagée chez ceux qui cherchent à promouvoir
l’action pratique comme concept central de la sociologie. Visiblement, en traitant les faits
sociaux comme des « accomplissements » factuels portant strictement en eux-mêmes le
sens de la situation observée, l’ethnométhodologie a ranimé de vieux démons
épistémologiques.
On ne dira jamais assez à quel point l’interactionnisme cherche à se défaire du mythe de
l’intériorité dans l’analyse de l’activité humaine. O. Schwartz a bien marqué, par exemple,
à quel point pour H. Becker, l’un des maîtres de cette tradition, il n’est pas de propriété
« cachée » du comportement, pas de « qualités occultes » du social qui ne puissent se
regarder comme l’effet d’une séquence interactive. L’interactionnisme, écrit-il, ne connaît
pas de « boîte noire » [14]. On pourrait dire qu’il s’agit d’une sociologie sans vie intérieure,
si l’on voulait flirter avec le vocabulaire utilisé par G. Politzer pour définir sa « psychologie
concrète ». L. Quéré a particulièrement insisté sur les implications de cette posture
épistémologique en marquant ainsi la réception française des travaux américains.
L’originalité de l’ethnométhodologie résiderait dans une « désubjectivation de
l’intentionnalité ». Pour lui, « l’action n’est pas un mouvement d’extériorisation d’une
intériorité déjà constituée. Au contraire l’intériorité se forme par réappropriation,
internalisation et formulation des actions et expressions publiques » [15]. C’est une
« illusion grammaticale » que de se représenter la subjectivité comme un état mental
déposé dans une « instance externe de pilotage de l’action et d’attribution de sens »
(ibid.). La subjectivité n’a pas plus de consistance qu’une émergence en cours
d’accomplissement public de l’action. On reconnaîtra sans peine dans cette formulation
l’influence de la critique radicale de Wittgenstein à l’égard de tout mentalisme et de tout
fétichisme du sens : « on ne peut pas savoir ce que l’on cherche à faire si ce qu’on fait n’a
jamais été fait par quiconque » (ibid., p. 104). La démonstration suit donc le chemin d’une
identification de la subjectivité à l’intentionnalité puis, celle-ci étant considérée comme
une propriété émergente de l’action, l’analyse débouche sur l’identification de l’agent à un
corrélat de l’accomplissement social de ses actes. On comprend dans ces conditions que
l’action - qui est toujours action réciproque - soit seulement passible d’une enquête
« grammaticale » s’interdisant les explications causales qu’engendre toujours la question
« pourquoi ? » Une analyse sémantique de l’action, en épousant le sens commun, ne peut
qu’enfermer le chercheur dans l’impasse scientifique de la sociologie compréhensive. Cette
conclusion a le mérite de la clarté. Très proche des conceptions de H. Garfinkel, elle a fait
l’objet d’une critique non moins claire de P. Pharo.
IV -Le retour de l’intention
Ce dernier voit dans l’ethnométhodologie « une accentuation behavioriste et sceptique de
la théorie wittgensteinienne » [16]. A suivre cette accentuation, l’intention n’est plus
qu’une modalité de l’action dont la factualité épuise la signification. A ce compte, « on ne
peut que perdre son temps à faire comme le sens commun et la sociologie usuelle qui ne
cessent de chercher des motifs à des événements dont le sens est rigoureusement
inaccessible » (ibid.., p. 280). Bien sûr, il n’est pas pensable de séparer l’intention de
l’action mais, en suivant E. Anscombe, P. Pharo soutient qu’il existe un ordre original de
l’action et de la rationalité pratique fait « de connaissance préthéorique et d’exercice d’un
désir en vue d’une fin » (ibid., p.283). L’existence d’un « vouloir actif » du sujet de l’action
présidant à la formation des buts et au choix des moyens, théâtre de délibérations
internes, n’est pas réductible à une grammaire de l’action. Même si l’on suit Wittgenstein ce qui ne va pas de soi - pour qui « le monde de la représentation est tout entier décrit
dans la description de la représentation » [17], même si, en conséquence, décrire le motif
n’est rien d’autre que décrire l’accomplissement de l’action, rien n’autorise à aller plus
loin : à penser, par exemple, que ces descriptions ne puissent jamais apporter une réponse
vraie à la question du « pourquoi ? ». Mieux, la liaison sémantique entre l’intention en
acte et sa description, écrit P. Pharo, « nous réintroduit immanquablement et de façon
renouvelée dans la problématique de la responsabilité et de la justification morale à
l’intérieur de la Cité » (ibid., p. 305).
L. Quéré a répondu à ces objections, qu’on revient en deçà de l’interactionnisme lorsqu’on
réintroduit la substance d’un sujet présupposé de l’action, lorsqu’on prend le sens
commun à la lettre et enfin lorsqu’on rétablit le primat de l’opposition entre individu et
société [18]. Une philosophie morale de la conscience ne peut que suivre un tel acte de
réhabilitation de l’intentionnalité en sociologie.
L’antagonisme de ces « théories de l’action » pourra paraître irréductible si on ajoute au
dossier de cette discussion l’intérêt de P. Pharo pour l’hypothèse de E. Anscombe selon
laquelle pourrait exister en l’homme une tendance originaire à bien faire [19]. Cette
prémisse formerait le lien intrinsèque du jugement et de l’action et fonderait la possibilité
de « vérités pratiques ». Désir informé, l’intention rendrait l’action vraie ou fausse (ibid.,
p. 191).
V - Subjectivité et intentionnalité : quel « social » ?
Il n’est pas envisageable ici de pousser d’avantage la discussion qu’appelle cette sociologie
de l’éthique si réceptive à l’anthropologie de la prudence évoquée plus haut. Je voudrais
plutôt concentrer mon attention sur la question de l’intentionnalité et surtout questionner
l’évidence de l’identification entre subjectivité et intentionnalité qui pourrait bien être le
point aveugle de la discussion entre les tenants de l’ethnométhodologie et leurs critiques.
Disons-le brutalement Contrairement aux apparences, l’anti-psychologisme militant de
l’interactionnisme ne fait pas la part belle au social. On peut même se demander si ce n’est
pas sa conception de la socialité qui rend trop lourde pour lui l’hypothèse « subjective ».
Pour L. Quéré, par exemple, si le sens de l’action n’a bien sûr pas sa source dans le sujet, il
ne la trouve pas non plus « dans la situation ou dans l’histoire. Il est intersubjectivement
assemblé, sur une base purement procédurale, à partir de significations publiques déjà
données par les formes symboliques » [20]. Cette définition du sens de l’activité comme
usage du symbolique fait de la subjectivité une appropriation des normes collectives que
les agents se rendent mutuellement disponibles. Par une action réciproque de
configuration, ils s’accordent sur « les faits naturels de la vie », pour reprendre
l’expression de Garfinkel, c’est-à-dire sur des définitions de l’ordre des choses tenues pour
légitimes et sur des structures normatives qui les obligent moralement [21].
Rien ici qui permette de penser la vie sociale dans ces dissonances constitutives comme un
rapport entre les plusieurs ensembles, les plusieurs formes de vie auxquelles chaque
individu appartient et entre lesquels il se doit de circuler. Rien qui ne nous rapproche de
cette arène d’incitations discordantes que recèle la topologie sociale, ni même des
possibilités simultanément offertes et refusées qu’elle renferme. Or, vivre en société n’est
pas un exercice de grammaire symbolique. Certes, « on ne peut savoir ce que l’on cherche
à faire si ce qu’on fait n’a jamais été fait par quiconque » mais il faut bien expliquer
pourquoi, alors, nous nous entêtons à chercher à faire ce qui n’a jamais été fait.
Décrire un segment d’actions réciproques indépendamment des réseaux et des univers
socio-historiques qui viennent s’y mêler, s’y croiser, s’y contredire, et opposent par
conséquent la situation à elle-même, coupe l’herbe sous les pieds à l’activité du sujet.
Transparente, la situation est sans énigme. Elle n’offre pas d’intrigues à l’intersection des
logiques socio-symboliques excentrées, mais seulement l’immédiateté de « l’arrangement
spontané des parties ». Ce qui est alors occulté c’est le temps des questions ou des doutes
qui ont partie liée avec les contradictions multiples de la situation, pour ne laisser
subsister que l’espace des réponses grammaticalement possibles. Au contraire, on peut
considérer, en suivant ici l’œuvre trop ignorée de Ph. Malrieu, que les individus n’agissent,
même à leur corps défendant, que dans une pluralité de formations sociales qui les
provoquent. De plus, chacun des ensembles ou systèmes où se déroule leur vie est porteur
de valeurs et de significations propres, sources d’une disparité qui « divise les acteurs
entre eux et au fond d’eux-mêmes » [22]. Ces divisions exposent ceux qui les vivent à
chercher un sens à ces discordances qui, même lorsqu’elles échappent à l’acteur, révèlent
leur force dans le sentiment d’aliénation du sujet.
Il s’ensuit que, loin d’être le coffret de l’intentionnalité, le sujet n’existe qu’en découvrant
les valeurs des formes de vie qui le divisent, qu’en éprouvant leurs possibilités et leurs
contradictions, qu’en agissant pour surmonter celles-ci dans une activité de subjectivation
d’où la société ne sort jamais identique à elle-même. Le sujet existe si et seulement si, en
quelque façon, existe le pouvoir de l’individu de se déprendre de ce que ses activités
sociales représentent pour lui et pour l’ensemble de ceux auxquels il s’identifie. Dans cette
perspective, la subjectivité est un travail du sujet pour « se mettre à distance de l’une de
ses formes de vie sociale lorsqu’il est situé dans l’autre » au prix de payer ses
identifications successives du sacrifice d’autres possibilités. Pour être abandonnées, ces
possibilités ne sont d’ailleurs pas abolies pour autant et continuent d’agir. Mais il
n’empêche : être sujet c’est aussi « se faire inconscient, par ses choix, ses partis-pris, ses
paris, d’une part de la réalité » (ibid., p. 264). Ainsi, toute représentation du réel
résulterait d’un tri opéré parmi plusieurs représentations possibles. Toute intention
impliquerait le refoulement d’une autre et la subjectivité, loin de voir ses frontières
dessinées par l’intentionnalité vivrait, au contraire, de ses limites. C’est ainsi que nous
comprenons la formule de G. Canguilhem : « la subjectivité, c’est alors uniquement
l’insatisfaction. Mais c’est peut-être là la vie elle-même » [23]. La subjectivité n’est pas une
chose, - fût-ce une représentation mentale -, c’est un rapport qu’on ne peut dissoudre tout
entier dans une description grammaticale. La critique de l’illusion d’intériorité psychique
s’aveugle si elle confond subjectivité et intentionnalité. L’activité des sujets est rendue
amorphe si elle est regardée seulement comme une médiation des interactions et on
échoue à désubstantialiser l’individu et la société, comme L. Quéré souhaite le faire, si on
ramène la qualité de sujet à une émergence ou à un corrélat. Il semble préférable de
soutenir, avec Ph. Malrieu, que la qualité de sujet s’éprouve, entre les formes sociales,
comme médiateur actif : « Elle leur est assujettie, et en même temps elle est le lieu ou se
révèlent leurs contradictions. Il lui revient de choisir entre elles, comme de rechercher les
moyens de les rendre compatibles : ce n’est pas possible sans un effort pour prendre
conscience des refoulements, des méconnaissances que le sujet opère pour se défendre des
angoisses que suscitent ses divisions internes » (op. cit., p. 265). Ici on pourrait parler
avec J.-L. Nancy d’un sujet qui n’est pas plus présupposé que se supposant lui-même mais
« " exposé " ou s’exposant. C’est-à-dire à la fois présenté au dehors, exhibé et risqué,
aventuré » [24].
VI -Intentionnalité et subjectivité : quel sujet ?
Et de fait, à l’occasion des hésitations, des délibérations et des dénégations par lesquelles
il s’emploie à surmonter les divisions auxquelles l’exposent les contradictions sociales, le
sujet se mesure aux conflits de sa propre histoire. Aux discordances topologiques
croissantes de ses formes de vie sociale répond, sans coïncidence, une topologie subjective
attestant que l’histoire vécue par lui n’est pas et ne fut jamais la seule possible. Les
histoires avortées, les projets suspendus ne disparaissent pas sans laisser de traces. Les
vies non vécues ne sont pas abolies. Refoulés, leurs résidus incontrôlés n’en ont que plus
de force pour exercer dans l’activité du sujet une influence contre laquelle il est sans
défense puisqu’il en ignore la source au moment même où les dissociations sociales les
incitent à renaître.
On ne peut que s’associer à une critique du concept de sens défini comme visée, comme
représentation consciente d’un but, comme intention orientée. Le sens n’est pas un oeil
mental. C’est la limite de toute sociologie compréhensive et même de celle, si
remarquable, de M. Weber [25]. Mais il ne s’ensuit nullement qu’il faille se passer d’un tel
concept. Si on le conçoit comme une manière d’apprivoiser les rapports toujours
singuliers par lesquels chacun relie entre elles, même sans intention de le faire, les
diverses activités dissonantes où il est introduit, on peut le comprendre ainsi : l’évaluation
énigmatique qui permet ou ne permet pas à un sujet de réguler ses activités dans un
domaine de vie par la signification qu’il leur accorde dans d’autres domaines de sa
vie [26]. C’est ce genre de mouvement, semble-t-il, qu’O. Schwartz appelle aussi la
« dimension du sens » et qu’il propose, dans une perspective maussienne, de conserver au
centre d’un incontournable empirisme ethnographique pour pouvoir approcher les faits
en respectant leur « caractère d’intersection entre sphères, dimensions, niveaux
d’organisation différents du social » [27]. Sans ce jeu des « déterminations à distance »,
pour reprendre l’expression de J.-P. Terrail [28], en demeurant dans des cadres
interactionnels trop étroits, on cède au fétichisme de la conduite. Or, le sens est toujours
latent.
On peut ajouter que les intersections entre plusieurs vies sont aussi le ressort de la
topologie subjective, ce qui lui ôte également toute linéarité. C’est d’ailleurs ce qui rend la
réponse à la question « pourquoi ? » non seulement délicate pour celui qui cherche à
interpréter l’activité des autres mais aussi pour ceux-là mêmes qui agissent. On sait qu’à la
suite d’E. Anscombe, P. Pharo n’accepte pas de supprimer la question du « pourquoi »
dans l’analyse de l’action. C’est même ce qui lui vaut d’être suspecté de subjectivisme par
L. Quéré. Pourtant, il ne faut pas simplifier la critique. J’ai essayé de montrer plus haut
qu’une analyse trop « amorphe » du social conduisait L. Quéré à une dénégation du
subjectif. Je voudrais suggérer maintenant, à l’inverse, que P. Pharo, loin de faire la part
trop belle au sujet, neutralise à l’excès ses tensions internes et, pour cette raison, risque
d’affaiblir notre vision du social.
Je soutiendrais volontiers ce paradoxe : un peu de subjectif nous éloigne du social mais
beaucoup nous en rapproche et, inversement, un peu de social nous écarte du subjectif et
beaucoup nous y ramène [29].
L’argumentation de P. Pharo, dans la lignée du scepticisme de L. Wittgenstein réévalué
par E. Anscombe, cherche à réhabiliter l’action intentionnelle comme réponse à des
raisons d’agir orientées vers l’avenir. L’intention est inséparable d’une représentation
consciente du résultat de l’action. Certes, « elle ne peut exister en dehors du mouvement
qui cherche à l’accomplir » [30], mais « les intentions sont des raisons que l’on peut
donner, et non pas des caractères sensibles du comportement humain » (ibid., p. 288).
L’intention est, pour lui, l’orientation donnée par des raisons impliquant « le bien et le
mal » et, en ce sens, « l’agent habite la signification de ses raisons » (ibid., p. 286).
Réhabilitation de l’action volontaire, cette analyse récuse pourtant, à sa manière, toute
tentative de rendre compte de la formation des intentions. Elle le fait dans la stricte
tradition ouverte par Wittgenstein qui distingue l’objet et les causes de l’action : « le visage
qui nous inspire de la crainte ou du ravissement (l’objet de la crainte, du ravissement)
n’est pas pour autant leur cause, mais pourrait-on dire, leur orientation » [31]. Dans la
même perspective, E. Anscombe, commente ainsi l’exemple de l’enfant qui prend peur
devant un bout de tissu en satin, victime d’un malentendu avec sa nourrice à qui il entend
dire que c’est un « bout de satan » : « Ce qui l’a effrayé, c’est le morceau de tissu ; la cause
de sa frayeur, c’est la remarque de la nourrice. L’objet de la peur peut être la cause de la
peur, mais, comme Wittgenstein le remarque, il n’est pas en tant que tel la cause de la
peur [32]. »
Or, à la suite d’E. Anscombe, P. Pharo accepte de séparer radicalement l’orientation de
l’action par l’objet, de la provocation de l’action par un autre sujet ; dans ce cas
emblématique, il accepte de mettre le tissu d’un côté et l’échange entre l’enfant et la
nourrice de l’autre. Ainsi, c’est l’incitation ou l’invitation à agir qui se trouvent rangées au
rang de simples « stimuli » de l’action orientée par ses raisons propres. On grossit trop
souvent l’importance de ces « stimuli », pense E. Anscombe. Le problème, c’est qu’en
taillant dans l’unité problématique qui relie le tissu et l’échange entre l’enfant et sa
nourrice, c’est le sens latent de la peur qui s’évanouit. C’est pourquoi on ne peut pas
seulement dire que l’agent habite la signification de ses raisons. Il est aussi habité par les
activités d’autrui. La subjectivité sort durcie de l’opération théorique qui consiste à
neutraliser les discordances créatrices ou destructrices entre l’orientation et l’incitation de
l’activité. Car elle n’existe qu’au jeu de leurs tensions. Le sens n’est pas lisible sur l’axe de
l’action volontaire. Il se forme ou se perd entre l’orientation intentionnelle de l’activité et
la gamme des incitations inintentionnelles que tout acte volontaire réalise, même à l’insu
du sujet. C’est pourquoi il est plus une régulation latente qu’un attribut conscient de
l’activité [33].
VII -L’intention en « actes » :formation et réalisation
On ne trouve pas de meilleur garde-fou contre le fétichisme d’une subjectivité
intentionnelle que l’œuvre de M. Bakhtine. Pour lui l’activité du sujet est tournée non
seulement vers son objet mais simultanément vers l’activité d’autrui portant sur cet objet.
Elle n’est jamais substantielle mais structurellement opposée à elle-même comme
l’activité sociale. Plus d’une incitation vitale, plus d’une vie peuvent se réaliser ou être
indexées dans une seule intention. Plusieurs exposants lui sont toujours associés. Cette
indexicalité est essentielle même si formellement telle intention appartient à une seule
personne, un aspect constitutif de sa signification réelle provient de ce fait : une ou
plusieurs invitations à agir venant d’autrui dans le monde social y sont reflétées et s’y
répondent. Du coup, l’intention est polyphonique ou polysémique.
Le sens d’une action c’est le rapport de valeur que le sujet instaure entre cette action et ses
autres activités possibles. Tiraillée entre les différentes injonctions sociales qui la
convoquent l’activité du sujet ne cesse de s’adresser aux autres et de compter avec leurs
histoires, soit pour les réfuter, soit pour les hiérarchiser mais toujours en polémique avec
elles. L’intention naît du débat entre ces valeurs comme une tentative pour s’affranchir de
leurs contradictions. Elle se forme dans l’effort pour surmonter les conflits provoqués
dans l’activité du sujet par l’échange social. Elle sort de ce qui est toujours, en quelque
façon, dans le sujet, débat de la société avec elle-même, et c’est ce qui lui donne sa
contenance et sa plasticité. Les échos et les résonances de ces délibérations ne cessent
d’alimenter l’ambivalence des intentions et donc d’exposer l’action volontaire, maillon
inaliénable dans la chine de l’échange social [34], à des changements possibles. La vie
subjective ne cesse jamais de se « fixer » dans des buts mais, à l’inverse, elle ne cesse pas
non plus de se démettre de ses intentions, fût-ce en les réalisant.
La polyvalence des intentions peut d’ailleurs affleurer dans les énonciations divergentes
par lesquelles le sujet cherche à rendre compte aux autres de ses raisons d’agir. Un bon
exemple de cet « affleurement » des incitations qui « doublent » l’action volontaire est
donné par l’analyse de la correspondance d’Hölderlin à laquelle Ph. Malrieu a procédé. En
1799, Hölderlin forme le projet d’éditer une revue. Il s’ouvre de son intention à une
quinzaine de correspondants. L’intérêt de ces lettres, est qu’elles associent chaque fois, à
l’exposé du même but, une présentation différente des mobiles qui l’incitent à le
poursuivre. A Neuffer, écrivain et ami, il fait savoir que la revue sera un centre d’éducation
morale dans la mesure même où elle lui permettra de publier ses couvres. A sa mère, à qui
il devait avoir régulièrement recours pour survivre, il indique qu’il gagnera cinq cents
florins par an, de quoi se mettre à l’abri. A son éditeur, il explique que l’intérêt des lecteurs
est acquis à ceux qui savent concilier la science et la vie. En écrivant à Goethe, il met
l’accent sur le caractère essentiellement poétique du projet et lorsque c’est à Schelling qu’il
s’adresse, avec qui il partagea les années de séminaire, il soutient que la fonction de la
poésie n’est autre que d’instruire l’humanité. Selon la formule de Ph. Malrieu, il donne à
chacun une représentation différente de son intention « caractéristique d’un des
cheminements de sa vie : d’une de ses vies » [35]. Au passage, il faut souhaiter que tout
chercheur en sciences humaines ait pu, un jour, faire aussi cette expérience : l’histoire
d’une vie ne s’identifie jamais à celle que le sujet a bien voulu nous livrer et il y a quelque
chose d’imaginaire dans la volonté de la saisir dans sa toute dernière phase comme si elle
n’avait jamais pu se dérouler autrement, comme si elle n’était pas à tout instant une
réserve de possibilités, un terrain de choix. C’est aussi cette polyvalence subjective qui
justifie le travail durable avec nos interlocuteurs, au-delà de l’échange ponctuel, dans les
milieux que j’ai évoqués au début.
Écoutons Hölderlin : la vie sociale et ses dissociations ne sont pas le contexte de l’activité
individuelle. Elles en sont plutôt le subtexte. La vie individuelle ne s’exprime pas dans la
vie sociale, elle s’y réalise aux deux sens du terme. Inversement, la vie sociale n’est pas
dans la vie individuelle « comme un contenu dans son contenant » [36]. C’est peut-être en
quoi elles ne sont, ni l’une ni l’autre, transparentes et réservent toujours des surprises. Il y
a des ombres en chacune d’elles du fait même que l’action, collective ou personnelle est
habitée par le fantôme de toutes les autres activités qui « passent » par elle pour en sortir
changées.
C’est à ce genre d’impersonnalité que doit se mesurer toute vie subjective et toute vie
sociale. C’est pourquoi d’ailleurs, je serai assez réservé à l’égard des propositions de P.
Pharo concernant les qualités normatives d’une « sémantique morale » fondée sur la
validation des intentions par la communauté [37]. Je sais ce que cette approche du lien
social doit aux argumentations de J. Habermas et de K.O. Apel sur l’éthique de la
discussion idéale [38]. Mais l’éthique ne consiste-t-elle pas d’abord à discuter
l’indiscutable, à parler de ce dont on ne parle pas, à regarder les zones d’ombre pour s’y
mesurer ? En pensant a ces « zones », on pourrait dire que la vie sociale est davantage
transsubjective qu’intersubjective.
Cette trans-subjectivité entre pour beaucoup dans la formation des intentions. Mais leur
réalisation nous confronte à l’objectivité du monde. En effet, il n’y a pas d’action
volontaire dont l’accomplisse ment puisse échapper aux procédures et aux techniques que
l’exécution de l’action impose à l’usage. L’opérationnalité, sans laquelle l’intentionnalité
reste une « vue de l’esprit », obéit à des lois d’efficience, d’affectation des moyens,
autrement dit à des contraintes sociales réelles qui, là encore, donnent une contenance
inintentionnelle à l’action cherchant à atteindre son but. Ces contraintes « extérieures » à
l’action ne sont d’ailleurs pas que des « freins » à celle-ci. Elles peuvent la faire aussi
bénéficier de disponibilités imprévues. C’est souvent l’effet de résultats inattendus, se
mettant à compter plus que les incitations initiales de l’action, qui devient la cause d’une
transformation de l’activité. L’ « extériorité » de l’action du sujet est donc au principe de
son histoire inachevable.
Voilà donc l’intention deux fois sociale, et deux fois offerte aux risques de l’inintentionnel.
Mais n’est-ce pas sa vie même, entre sa formation et sa réalisation, que de s’affranchir de
cette double condition ? L’analyse d’une action volontaire est du coup indissociable de la
compréhension du mouvement qui l’annule. En s’éteignant elle s’accomplit. Mais c’est au
bénéfice du sujet. Car le sujet de cette histoire est, en quelque sorte, sa « plus-value » : ce
qu’il faut sans cesse investir pour que l’histoire continue mais qui, simultanément, ne
cesse de lui échapper.
VIII -L’activité, la goutte de pluie et l’océan
En conclusion je trouve qu’il est vital pour les sciences de l’homme de rechercher, comme
le propose O. Schwartz, l’ « unité de base » de l’analyse. Avec lui, je pense que celle que
propose l’ethnométhodologie sous le concept d’interaction se prive des tensions entre
lesquelles se déplacent les sujets réels de l’activité. L’indispensable découpage ne devrait-il
pas privilégier plutôt une « triade vivante » celle que constitue l’activité tournée non
seulement vers son objet extérieur et exposée aux surprises de son résultat, mais tournée
aussi vers l’intersection des activités entre sujets portant sur cet objet ? Cette double
orientation de l’activité lui donne toujours un sens latent à redécouvrir en chaque
situation singulière et à chaque palier de son organisation. Ce découpage peut autoriser un
déplacement et une circulation - un « go-between » dirait O. Schwartz - entre les
différents niveaux de formation du « fait social » et de l’activité individuelle. C’est à L.
Vygotski, M. Bakhtine et A. Léontiev, ces théoriciens russes des années vingt que nous
devons les premières tentatives de définir ainsi les « unités de base » de l’échange social
comme opérateur d’inter-niveaux. L. Vygotski en a donné une définition imagée : « La
formule chimique de l’eau, qui vaut au même degré pour toutes ses propriétés, vaut dans
une égale mesure pour tous ses aspects en général, pour l’océan Pacifique comme pour la
goutte de pluie » [39]. Pour avoir régulièrement éprouvé, avec d’autres, cette approche du
réel dans l’analyse des situations de travail [40], je crois pouvoir dire qu’elle permet de
lever quelques-uns des obstacles rencontrés par le découpage interactionniste.
Dans le cours de leur activité, ceux qui travaillent n’agissent pas seulement pour desserrer
les contraintes de la nature en usant des disponibilités qu’elle offre au contact des
techniques. Pour obtenir des résultats, ils n’ont pas affaire à la seule transformation des
chose sur l’axe d’efficience de la poiesis : Ils doivent aussi travailler en coopérant de
manière délibérée ou forcée, en échangeant entre eux leurs activités, fût-ce dans des
conditions inégales. Pour faire ce qu’ils ont à faire, ils entrent, même à leur corps
défendant, dans des relations déterminées et ce n’est que dans les limites d’une praxis où
se joue la signification éthico-politique de leurs rapports que s’établit le cours de leur
activité. Ainsi l’extériorité naturelle à quoi se mesure la poiesis présuppose l’altérité
humaine où s’alimente la praxis et inversement. Est-ce vrai pour la goutte de pluie d’une
situation de travail ou pour l’océan Pacifique de la vie sociale ?
[1] On trouve un bon exemple de ce mouvement vers une « nouvelle théorie de l’intentionnalité » dans
J.-L. Petit, L’action dans la philosophie analytique, PUF, 1991.
[2] Particulièrement significatif de cette recherche, P. Ladrière, « Espace public et démocratie », Raisons
pratiques, n° 3, 1992.
[3] P. Ladrière, « La sagesse pratique », Raisons pratiques, n° 1, 1992.
[4] A. Tosel, « Quelle pensée de l’action aujourd’hui ? », Actuel Marx, n° 13, 1993, p. 23.
[5] M. Vadée, Marx, penseur du possible, Méridiens Klincksieck, 1992, p. 342.
[6] P. Aubenque, La prudence chez Aristote (1963), PUF, 1993, p. 113.
[7] Cité par J. Bruner, Acts of Meaning, traduction française sous le titre Car la culture donne forme à
l’esprit ; de la révolution cognitive à la psychologie culturelle, Eshel, 1990, p. 46.
[8] L. Vygotski, Pensée et langage (1934), éditions Messidor, 1985.
[9] Sur ce point, J. Bruner, Acts of Meaning, op. cit.
[10] M. Bakhtine « Remarques sur l’épistémologie des sciences humaines », in Esthétique de la création
verbale, Gallimard, 1984.
[11] Sur ces questions voir : Y. Clot, présentation et postface à I. Oddone et alii, Redécouvrir l’expérience
ouvrière, vers une autre psychologie du travail, Ed. Sociales, 1981 ; Y. Schwartz, Expérience et
connaissance du travail, Messidor, 1988 ; C. Dejours, « De la psychologie à la psychodynamique du
travail », in Travail et usure mentale (1980), deuxième édition, Bayard, 1993.
[12] Pour une approche critique documentée, on peut lire d’O. Schwartz, « L’empirisme irréductible »,
postface de N. Anderson, Le hobo, sociologie sans-abri (1923), Nathan, 1993. Egalement de J.-P. Terrail,
« Construction et détermination du social », Société française, n° 47, dernier trimestre 1993.
[13] Pour ne prendre qu’un exemple récent en France, J. Peneff, L’hôpital en urgence, Métaillié, 1992.
[14] O. Schwartz, op. cit., p. 292.
[15] L. Quéré, « Agir dans l’espace public », Raisons pratiques, n° 1, 1990, p. 107.
[16] P. Pharo, « La question du pourquoi », Raisons pratiques, n° 1, 1990, p. 280.
[17] L. Wittgenstein, Investigations philosophiques, paragraphe 402, Gallimard, 1961, p. 249-250.
[18] L. Quéré, « Langage de l’action et questionnement sociologique », in P. Ladrière, P. Pharo, L. Quéré,
La théorie de l’action, le sujet pratique en débat, CNRS éditions, 1993, p. 73 et suivantes.
[19] P. Pharo, « Existe-t-il des vérités pratiques ? », in P. Ladrière, P. Pharo, L. Quéré, La théorie de
l’action, le sujet pratique en débat, op. cit., p. 181.
[20] L. Quéré, « Langage de l’action et questionnement sociologique », art. cit., p. 70-71.
[21] L. Quéré, « Agir dans l’espace public », art. cit., p. 106.
[22] Ph. Malrieu, « Pour une étude interdisciplinaire des changements sociaux », in coll. sous la
direction de Ph. Malrieu, Dynamiques et changements personnels, éditions du CNRS, Toulouse, 1989,
p. 262.
[23] G. Canguilhem, « Le concept et la vie », in Études d’histoire et de philosophie des sciences, Vrin,
1983, p. 364. A. Badiou a décrit le sujet de « l’égologie négative » de G. Canguilhem comme « un vivant
quelque peu déplacé » (« Y a-t-il une théorie du sujet chez Georges Canguilhem ? », in actes du colloque
G. Canguilhem, philosophe, historien des sciences, A. Michel, 1993.
[24] J.-L. Nancy, « Un sujet ? », in A. Michels et coll., Hommes et sujet, la subjectivité en question dans
les sciences humaines, L’Harmattan, 1992, p. 91.
[25] Sur le concept de « sens » chez M. Weber, on peut lire de F. Isambert, « Notes pour une
phénoménologie de l’action », in P. Pharo, L. Quéré, La théorie de l’action, le sujet pratique en débat,
op. cit., p. 113-134.
[26] Ph. Malrieu, « La crise de personnalisation. Ses sources et ses conséquences sociales », Psychologie
et éducation, vol. III, 1979, p. 18.
[27] O. Schwartz, op cit., p. 303.
[28] J.-P. Terrail, art. cit., p. 17.
[29] Pour une analyse impossible à développer ici de ce paradoxe, voir Y. Clot, Le travail entre activité
et subjectivité, Thèse de doctorat, Université d’Aix-Marseille 1, novembre 1992.
[30] P. Pharo, « La question du pourquoi », Raisons pratiques, op. cit., p. 297.
[31] L. Wittgenstein, Investigations philosophiques, paragraphe 476, op. cit., p. 264.
[32] E. Anscombe, « L’intention », in Raisons pratiques, n° 1, 1990, p. 259.
[33] Sur ce point, je partage les arguments d’A. Léontiev, encore trop méconnus pour ce qu’ils sont
vraiment : Activité, conscience, personnalité, éditions de Moscou, 1984.
[34] Parmi les textes de M. Bakhtine, on peut lire particulièrement sur ce sujet « Les genres du
discours » in Esthétique de la création verbale, op. cit.
[35] Ph. Malrieu, « Un projet idéologique d’Hölderlin », in Coll. Fonction des projets dans les
structurations personnelles et sociales, Éditions universitaires du Sud, Toulouse, 1992, p. 86.
[36] Pour utiliser la belle formule que G. Canguilhem emploie dans un autre texte, « La vivant et son
milieu », in La connaissance de la vie (1952), Vrin, 1985, p. 154.
[37] P. Pharo, « La question du pourquoi », art. cit., p. 303, 305.
[38] Voir en particulier : J. Habermas, De l’éthique de la discussion, Cerf, 1993. Pour une critique
impossible à développer ici : Y. Clot, Le travail entre activité et subjectivité, op. cit., p. 566-623.
[39] L. Vygotski, Pensée et langage, op. cit., p. 35.
[40] Par exemple, Y. Clot, J.Y. Rochex, Y. Schwartz, Les caprices du flux : les mutations technologiques
du point de vue de ceux qui les vivent, Matrice, 1990.
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