La sainteté, secret de la fécondité de l`Institut

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INSTITUT FILLES DE MARIE AUXILIATRICE
Fondé par saint Jean Bosco
Et par sainte Marie Dominique Mazzarello
N. 921
La sainteté,
secret de la fécondité de l’Institut
Comme Eglise et comme Famille salésienne, nous sommes en train de vivre un temps de
grâce : le 140ème anniversaire de la fondation de l’Institut et le début des trois années de
préparation au Bicentenaire de la naissance de Don Bosco.
Les Journées Mondiales de la Jeunesse 2011, auxquelles j’ai eu l’immense joie de participer,
ont été aussi une forte expérience d’Eglise. Et le Mouvement Salésien des Jeunes a su y faire
briller les couleurs spécifiques de notre spiritualité.
Ces événements, accueillis dans la foi, nous aident à prendre le large pour donner à nos vies la
haute mesure de la sainteté selon le projet de Dieu qui est amour. Ils renouvellent en nous la
conscience d’être tous appelés à la sainteté et d’accompagner les jeunes sur ce chemin, pour
qu’ils deviennent apôtres parmi les autres jeunes.
La sainteté est un don du Seigneur offert gratuitement à notre liberté, mais elle est aussi un
engagement et une urgence apostolique à une époque où la tentation d’éliminer Dieu de la
culture se répand toujours plus largement.
Les JMJ ont été un événement au cours desquelles profondeur, joie, beauté, musique, art,
accueil de la Croix, de la Parole, adoration, silence, prière, convivialité pacifique et communion
ont révélé le visage jeune de l’Eglise d’aujourd’hui.
Durant la veillée du 17 août, j’ai été profondément frappée par l’expérience vécue avec les
11 000 jeunes venus des milieux salésiens du monde entier, au cours de laquelle langues et
cultures diverses ne formaient qu’une seule famille unie dans un seul esprit, en présence de
Jésus Eucharistie. Nous étions un seul cœur à vibrer dans l’esprit salésien. Don Bosco et
Marie-Dominique étaient là, et je pense que du Ciel ils ont contemplé ce spectacle de jeunes où
eux-mêmes se reconnaissaient.
La spiritualité salésienne des jeunes porte vraiment une force intrinsèque qui conduit à la
rencontre avec Jésus, et trace une route qui mène à la sainteté aujourd’hui, de la même
manière que du temps de Don Bosco et de mère Marie-Dominique Mazzarello.
Comme Famille salésienne, comme Institut, nous sommes interpellées pour la proposer aux
jeunes, avec un courage renouvelé. La cascade de lumière, comme Benoît XVI a défini les JMJ,
doit demeurer, comme un horizon lumineux, dans notre vie de FMA appelées par charisme à
éduquer à la sainteté.
Dans la circulaire écrite ensemble, du 24 juillet 2011, une question est restée ouverte : « Quel
est le secret de la fécondité de l’Institut, né dans un petit village et aujourd’hui répandu sur les
cinq continents ? »
Sans aucun doute, c’est la sainteté ! Je me suis sentie irrésistiblement stimulée à partager avec
vous quelques réflexions sur ce thème vital dans l’espérance que l’Esprit Saint fasse éclore en
tout l’Institut des bourgeons de vie nouvelle.
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Le dynamisme de la sainteté, source de renouveau
Quand je contemple l’histoire de l’Institut, je ne considère pas seulement les faits et les
événements, aussi importants soient-ils, mais je rencontre surtout tant de visages de sœurs,
des femmes simples, ouvertes, chercheuses passionnées de sainteté avec un visage pascal, et
qui ont eu, dans le contexte où elles ont vécu, une force de rayonnement charismatique.
Notre famille religieuse est une famille traversée par la sainteté. Non une sainteté abstraite et
éloignée de la vie, mais une sainteté discrète, concrète et réaliste, qui affronte les défis, les
difficultés, les inévitables contradictions humaines et qui, en même temps, est lumineuse, pleine
de joie et de créativité apostolique.
Ce style nous le découvrons en Don Bosco et en Marie-Dominique Mazzarello, en tant de
sœurs, de n’importe quel âge, formation ou culture. C’est un dynamisme qui fermente l’histoire
et lui donne fécondité.
Comme nous le rappelle l’Exhortation Apostolique sur la Vie Consacrée : « Les saints et les
saintes ont toujours été source et origine de renouvellement dans les circonstances les plus
difficiles de l’histoire de l’Eglise » (n. 35).
L’actuel contexte social et ecclésial nous présente des défis inédits et de grandes occasions
pour dire avec notre vie que ce qui compte c’est de rencontrer, connaître, aimer, annoncer
Jésus, véritable source de justice, de paix et de bonheur.
Benoit XVI, en s’adressant aux jeunes religieuses durant les JMJ a souligné que le témoignage
de la sainteté, à laquelle Dieu nous appelle, consiste à suivre Jésus, de près et sans aucune
condition, dans la consécration, la communion et la mission (cf. Discours du 19 août 2011).
La sainteté, c’est donc, donner avec conviction la première place à Jésus dans notre existence,
c’est désirer ardemment et avec un cœur amoureux, vivre une relation constante et profonde
avec Lui. C’est Le suivre, sans réserve, jusqu’à embrasser « le précieux trésor de la Croix »
dans laquelle nous reconnaissons l’icône de l’amour suprême, où nous apprenons à aimer ce
que Dieu aime et comment Il aime : ceci est la Bonne Nouvelle qui redonne l’espérance au
monde » (Madrid, 19 août 2011).
A travers ces paroles, nous lisons implicitement l’invitation à vivre la sainteté sans timidité,
disponibles à tout, même au martyre, pourvu de ne pas faillir à notre alliance avec Dieu qui est
source de fécondité, de renouveau et d’espérance pour tous, spécialement pour les jeunes.
Mais sommes-nous vraiment convaincues que la sainteté est possible aujourd’hui encore,
qu’elle doit être le programme de vie qui nous stimule à vivre la volonté de Dieu chaque jour ?
Dieu est saint et nous appelle à vivre « une vie transfigurée » qui rayonne lumière, joie et paix.
Dire oui au chemin d’ascèse de la sainteté signifie, chères sœurs, ne pas pactiser avec la
médiocrité spirituelle qui petit à petit éteint le feu intérieur, met en péril notre constante union
avec Jésus et affaiblit le témoignage de la mission.
Marie-Dominique a su accueillir avec un cœur attentif et docile l’appel à la sainteté et, jour
après jour, elle a essayé d’y répondre. C’est ce qui a donné à sa vie un ton de fraîcheur
évangélique et de confiance et un esprit d’initiative missionnaire.
Elle ne parle pas de la sainteté d’une manière idéalisée, mais elle en trace un chemin concret.
A la jeune missionnaire Sœur Giovanna Borgna elle donne un conseil très pratique : « Mais
rappelle-toi qu’il ne suffit pas de commencer, il faut continuer, il faut combattre toujours, chaque
jour » (L.19.1).
Le point de départ est toujours la charité, une « grande charité » enracinée dans le
« demeurer » dans l’amour de Dieu, à travers une relation personnelle avec Lui et, donc dans le
« rester » continuellement en sa présence, qui se concrétise ensuite par la qualité des relations,
la confiance en Marie et la fidélité au projet contenu dans notre Règle de vie.
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Ce qui transparaît de l’expérience de Marie-Dominique, c’est ce que Anselm Grün appelle la
« simplicité du cœur ». Le cœur simple « est clair, rempli de l’Esprit saint. Il voit les choses
telles qu’elles sont ». Il n’a pas peur de ses « zones d’ombre », de ses propres défauts et
faiblesses et c’est pourquoi il sait voir aussi les autres dans leur véritable dimension : en
chacun, il ya le désir du bien.
La simplicité du cœur est humilité, droiture, pureté, liberté. De là découle cet amour qui n’est
pas pollué par des prétentions de possession et de désirs infantiles, mais rempli seulement par
la recherche de vivre en profonde communion avec Dieu, être habitée par sa paix et disponible
pour le propager avec un courage évangélique.
En effet, quand Marie-Dominique essaie de définir la prière, elle en parle comme une immersion
dans la volonté de Dieu, au fil de la trame du quotidien : « la vraie piété religieuse consiste à
accomplir tous nos devoirs en temps et lieu voulus et seulement par amour de Dieu »
(Cronistoria II 338).
Il ne s’agit pas d’une prière à côté du travail, mais à l’intérieur du travail, dans le concret de
chaque action qui est ainsi transfigurée par un plus grand Amour.
L’activité, quelle qu’elle soit, devient un espace privilégié de la rencontre avec Dieu et un feu qui
maintient allumée la passion apostolique. Même un simple point de couture peut se transfigurer
en amour et toute la maison pourra se présenter comme « la maison de l’amour de Dieu », le
temple de la « louange éternelle ».
Le rêve que je porte dans le cœur, et que je voudrais voir se réaliser dans chacune de nos
communautés, c’est de savoir que nous sommes toutes des Filles de Marie-Auxiliatrice qui
rayonnent la simplicité, l’humilité, la paix, la charité et la passion éducative ; des sœurs
« enracinées et fondées en Christ, fermes dans la foi » (cf. Col. 2,7).
Une sainteté au visage communautaire
Dans l’identité charismatique de la FMA, il y a l’appel « à vivre et à travailler ensemble au nom
du Seigneur » (C 49).
La communauté est une dimension essentielle de notre vocation. En effet, l’appel à la sainteté
nous rejoint non seulement comme personnes, mais comme communauté. Ensemble, nous
servons le Seigneur dans la joie et nous travaillons avec optimisme et espérance pour le
Royaume de Dieu, en devenant parmi les jeunes signes de son amour, comme nous y a
invitées le XXII CG et comme le souligne le premier article de nos Constitutions.
A Mornèse et à Nizza, la première communauté naît comme expérience de charité apostolique,
qui trouve en Christ et dans le « prendre soin » des filles, l’élément unifiant et le dynamisme
propulseur. Les premières FMA se sentent être une famille de sœurs convoquées par Dieu et
par Marie-Auxiliatrice et animées par Ste Marie-Dominique, femme de grande capacité en
communication, habile pour tisser des relations pas toujours faciles, mais possibles parce que
orientées vers un unique but : le bonheur authentique, le salut des jeunes. Tout autre problème,
personnel ou communautaire, passait au second plan, parce que tout était relatif au pourquoi
elles avaient été convoquées.
Nous, comme Institut, nous sommes nées d’une communauté qui avait comme idéal la sainteté
vécue avec un visage joyeux et dans l’esprit de famille ; une communauté qui gardait et
rayonnait la fraîcheur naturelle du charisme dans la simplicité et la responsabilité au quotidien.
Mère Marie-Dominique était consciente de l’énergie dynamique de cette ambiance, quand elle
écrivait à Sr Angela Vallese : « Sr Vittoria ne l’a pas encore acquis (l’esprit de l’Institut) parce
qu’elle est restée trop peu de temps à Mornèse » (L 25,3)
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Il fallait demeurer et vivre dans cette communauté pour assimiler l’esprit. En effet, toutes
reconnaissaient que Dieu nourrissait en chaque sœur « une volonté ferme de devenir saintes »
(L 26,2). Elles étaient convaincues que l’Esprit saint pouvait créer des chefs d’œuvre de grâce
sur leur terre accueillante, même si elle était pauvre et fragile.
Le regard transparent de mère Marie-Dominique reconnaissait la main de Dieu qui travaillait
dans les sœurs (cf. L 66,2). C’est pourquoi elle était pleine d’admiration en constatant que la
charité régnait entre elles, qu’elles étaient unies, sereines, généreuses et humbles, ouvertes et
courageuses pour repérer les éventuelles exigences des jeunes et des familles et prêtes à
n’importe quel sacrifice pour apporter une aide adéquate.
C’était une communauté édifiée sur l’écoute de la Parole de Dieu, sur la force de l’Eucharistie,
sur la confiance en Marie-Auxiliatrice. En même temps, c’était une communauté construite sur
la faiblesse humaine qui marchait sur les pas de Dieu au prix de continuelles réconciliations
dans la trame du quotidien. Dans ce climat, la joie était contagieuse.
Justement là se trouve notre chemin de sainteté ! Nous l’expérimentons tant de fois : Dieu se
sert de notre pauvreté pour œuvrer, et même il veut en avoir besoin. C’est pourquoi, les
relations communautaires sont un authentique laboratoire de sainteté, une continuelle école
d’amour, de pardon, de patience et de gratuité (cf. La vie fraternelle 25).
Dans la vie de nos communautés, respire-t-on le désir de sainteté en style mornésien ?
Sommes-nous convaincues que la fécondité de notre Institut jaillit de la sainteté comme un
engagement constant de chaque personne et de chaque communauté ?
La fidélité aux Constitutions vécue ensemble est une voie sûre à parcourir ; « Nous aimerons
les Constitutions comme ‘pacte de notre alliance avec Dieu’, guide sûr vers la sainteté » (C
124).
Un projet partagé dans la communauté éducative
Si le but du chemin spirituel de Marie-Dominique Mazzarello est de se faire sainte, dans le
projet éducatif salésien, la sainteté devient un idéal partagé avec les jeunes et avec ceux qui
collaborent dans la même mission éducative. Le « devenir sainte » est un bien qui fait vibrer de
joie et gagne celui qui nous approche. Il devient un climat bienfaisant et rayonnant. Mère Marie
Dominique, dans ses lettres, exhorte ainsi les sœurs : « A nous religieuses, il ne suffit pas de
sauver notre âme, nous devons devenir saintes et avec nos bonnes œuvres rendre saintes
beaucoup d’autres âmes qui attendent que nous les aidions » (L 18 3).
Dans la première biographie, on lit que, sous sa guide, les FMA qui lui étaient confiées brûlaient
« du désir de coopérer au salut des âmes et de faire connaître à tout le monde, s’il était
possible, combien il est doux d’aimer et de servir le Seigneur » (Lemoyne, Suor Marie
Mazzarello 1881)
C’est de la profondeur de la rencontre avec Dieu que découle l’efficacité de l’évangélisation. Par
la prière et par la communion avec Lui, vérifiée dans les relations communautaires, grandit et se
développe le mystère de notre maternité spirituelle.
Devenir sainte, c’est accueillir Dieu qui est saint et garder en nous les traces de sa sainteté
pour guider aussi les autres vers ce même but.
Il est vrai que Dieu seul sanctifie, toutefois Il a besoin de médiations. Plus nous laissons
travailler l’Esprit Saint en nous, plus Il transforme et sanctifie par notre intermédiaire.
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Un nouvel engagement de sainteté de notre part, personnes consacrées, est aujourd’hui plus
que jamais nécessaire, également pour aider et soutenir la marche vers la sainteté de chaque
chrétien et de chaque membre de la communauté éducative.
Nos premières sœurs de Mornèse, par leur vie simple et cohérente, suscitaient chez les jeunes
et les collaboratrices laïques un profond désir de sainteté, un réel besoin de conversion et de
renouveau.
Leur fidélité à suivre le Christ, dans la joie et dans la souffrance, conduisait les jeunes, avec
discrétion et clarté, sur le chemin de la découverte du projet de Dieu dans leur vie. La
communauté éducative était un espace de croissance et lieu de proposition vocationnelle
explicite pour les jeunes.
Mornèse devint ainsi le sein fécond de la future vitalité de l’institut et sa capacité à engendrer ne
cesse de nous étonner.
Le message qui en découle est valable aussi pour nous aujourd’hui, chères sœurs : qui marche
d’une manière authentique vers la sainteté et prend soin des autres avec un amour gratuit
devient une voix prophétique et un appel lumineux pour les vocations, non seulement par des
paroles, mais surtout par la vie.
Il est temps de proposer à nouveau - comme insistait le bienheureux Jean Paul II dans la Lettre
Apostolique Novo Millennio Ineunte – ce « haut degré » de la vie chrétienne ordinaire, qui exige
une véritable pédagogie de la sainteté (cf. NMI 31).
Voici le chemin pour que rayonne le charisme dans toute sa splendeur. Faisons notre possible
pour que chaque communauté éducative grandisse dans cette responsabilité.
Que peut-il exister de plus grand, dans un milieu éducatif sinon d’avoir la conscience d’être
appelés à être des éducateurs et éducatrices de sainteté, dans un monde toujours plus assoiffé
de Dieu ?
Que l’Esprit Saint nous aide à trouver les voies adaptées pour parler au cœur des jeunes avec
un langage qui s’enracine dans la cohérence d’une vie évangélique.
Que Marie-Auxiliatrice accompagne notre chemin de sainteté et celui de tous ceux qui
collaborent avec nous pour le bien des nouvelles générations. A Elle, nous confions surtout les
nouvelles vocations.
Qu’Elle nous aide à décider d’entreprendre avec audace ce chemin d’amour qui est le secret
de la fécondité de l’Institut. « En Elle, nous trouvons une présence vivante et l’aide pour orienter
résolument notre vie vers le Christ et rendre plus authentique notre relation personnelle avec
Lui » (C 79)
Je reste toujours en communion profonde avec vous.
Rome 24 septembre 2011
Avec toute mon affection de Mère
Sr Yvonne REUNGOAT
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