II LA QUESTION DE LA REUNION : DES DONNEES UTILES
La Réunion n’est pas seulement un fait du passé, sans intérêt autre
qu’historique. Elle renvoie à quelques grandes questions qui se posent
d’ailleurs d¹une manière grave actuellement :
- Qu’est-ce qu’une nation ? C’est l’héritage commun de l’histoire des
siècles passés et de la géographie, l’adhésion volontaire à des valeurs
philosophiques et politiques communes et le partage d’une même culture. La
prise de conscience de l’appartenance à une nation s’exerce sur quelques
points fort particuliers.
-une langue (fierté de parler telle ou telle langue, intérêt et valeur de
cette dernière. En Savoie, le français était la langue des élites et des
classes aisées et d’une partie de la population. En dépit d’une tradition
scolaire (en français) très ancienne dans certains villages à forte
émigration, une autre part de la population ne parlaient couramment que le
franco-provencal (le «patois ») qui ne s’appuie ici sur aucune littérature
écrite, à la différence du niçois ou du piémontais. On comprend mieux ainsi
la lutte des instituteurs français contre le patois –beaucoup d’enfants
apprenaient à parler français à l’école- et l’histoire (pour montrer
l’ancienneté de la communauté et au-delà sa valeur). Avant 1860, on
insistait beaucoup sur l’histoire dynastique mais bien sûr après la
Réunion, l’école de la République donne la priorité à l’histoire de France.
-Un gouvernement idéal : Une nation se doit d¹avoir un gouvernement qui
lui corresponde et qui bien sûr comprenne ses particularismes et ses
droits. En 1860, on montre combien la maison de Savoie est devenue de plus
en plus piémontaise et italienne après sa restauration de 1561 et surtout
après 1815, donc forcément «mauvaise». L’idéal de la nation française est
depuis la Révolution la République. La Réunion, en 1860 a lieu sous le
Second Empire, privilégié comme régime d’ordre. Les savoyards se
reconnaîtront ensuite dans la République.
-Une frontière : C’est une ligne séparant le «pays» (ou la nation) de
l’étranger, il y a donc un bon et un mauvais côté, celui où l’on est chez
soi et l’autre où l’on n’a comme étranger que des devoirs et aucun droit.
La frontière est forcément un arrêt de contrôle sur les individus comme sur
les objets (chaque Etat se doit de savoir (ce) qui entre et (ce) qui sort
de chez lui de même que l’on surveille les situations judiciaires (ne pas
admettre de délinquants) ou idéologiques (ne pas admettre les «mauvaises»
idées) d’où la présence inévitable de gens d’armes et de douaniers ce qui
suppose l’existence d’un Etat organisé ayant les moyens d’assurer cette
présence.
La frontière est souvent (mais pas forcément) une coupure culturelle
(souvent une langue différente, parfois une religion différente, des moeurs
différentes, une cuisine différente, des références différentes, une
monnaie différente), cela peut donner de subtiles nuances, ainsi la
frontière entre le Piémont et la Savoie est peu significative alors que la
même ligne mais considérée comme frontière entre la France et l’Italie est
bien réelle.
La frontière est souvent liée à une zone particulière plus ou moins large
qui vit du passage, du contrôle, des règlements (ou de la violation de
ces derniers d’où les espions, les fraudeurs, les contrebandiers), ici on
profite des deux cultures car il y a mélange des «nationaux» et des