Le risque de transmission infectieuse au cabinet dentaire Carlos Madrid Service de Stomatologie et de Médecine Dentaire Policlinique Médicale Universitaire Lausanne Risque de contamination • Nombreux et Variables: • Diversité des agents infectieux Diversité des agents infectieux • • • • • • • • • Cytomegalovirus HBV HCV HSV 1 et 2 HIV Mycobacterium tuberculosis Staphylocoques Streptocoques … Risque de contamination • Nombreux et Variables: • Diversité des patients: – Porteurs asymptomatiques – Malades à pathologie non identifiée Risque de contamination • Nombreux et Variables: • Diversité de l’instrumentation Risque de contamination • Nombreux et Variables: • Diversité des surfaces Les voies de l’infection • L’infection peut être transmise au cabinet dentaire par – Contact direct avec • du sang, • la salive ou le fluide créviculaire • Des matériaux dentaires contaminés Les voies de l’infection • L’infection peut être transmise au cabinet dentaire par – Contact indirect avec des objets contaminés • Instruments, • Surfaces de l’équipement • Surfaces environnantes Les voies de l’infection • L’infection peut être transmise au cabinet dentaire par – Contact avec du tissu • conjonctival, • Nasal • Muqueux buccal – Avec des gouttelettes contenant des microorganismes issus d’une personne infectée et projetés à courte distance Les voies de l’infection • L’infection peut être transmise au cabinet dentaire par – Inhalation de micro-organismes aéroportés qui peuvent rester en suspension dans l’air longtemps Boylard,Infect Control, 1998 Les conditions de l’infection • Un organisme pathogène de virulence et en nombre suffisants pour causer la maladie • Un réservoir ou une source qui permet au pathogène de survivre et se multiplier (sang, salive) • Un mode de transmission de la source à l’hôte • Une porte d’entrée • Un hôte sensible Greene, Hospitals, 1969 La chaîne de l’infection La transmission des pathogènes hémato ou sialoportés • Sévère ( HBV,HCV,HIV) • Rare – Du patient au personnel – Du personnel au patient – De patient à patient • C’est la transmission patient-personnel qui est la plus fréquente patient famille médecin -dentiste assistante hygiéniste laboratoire La transmission des pathogènes hémato ou sialoportés • Du personnel vers le patient: – Pas de transmission du HIV documentée depuis 1992 – Dernier case report concernant une transmission du HBV du personnel au patient en 1987 – Pas de case report pour HCV La transmission des pathogènes hémato ou sialoportés • Du personnel vers le patient: – Le personnel doit avoir une virémie élevée – Être blessé ou présenter une affection qui permet une exposition au sang ou autres liquides biologiques – Permettre au sang/liquide biologique d’atteindre une plaie du patient, des tissus traumatisés, une muqueuse… – Toutes les conditions sont nécessaires La transmission des pathogènes hémato ou sialoportés • Du patient vers le personnel: – Variable selon la prévalence dans la population – Variable selon la nature et la fréquence des contacts avec du sang/liquide biologiques du patient à travers des portes d’entrées percutanées ou transmuqueuses du personnel Garner, Infect Control Hosp Epidemiol,1996 La transmission des pathogènes hémato ou sialoportés • Le risque d’infection après exposition à un virus hémato ou sialoporté est influencé par – La taille de l’inoculum – La voie d’exposition – La sensibilité du personnel hôte exposé Chiarello, Seminars in Infect Control, 2001 La transmission des pathogènes hémato ou sialoportés • HBV HDV • HCV • HIV La transmission des pathogènes hémato ou sialoportés • HBV HDV • HCV • HIV Virus de l’hépatite B • C’est un risque professionnel reconnu • Exposition percutanée ou transmuqueuse • Sang/liquide biol d’une personne avec hépatite chronique ou aigue à HBV • Les personnes sont contaminantes tant que leur antigénémie est positive Beltrami, Clin Microbiol Rev, 2000 Virus de l’hépatite B • Le risque de transmission est lié au status HBeAg du patient source: • Pour des personnels exposés à des piqûres d’aiguilles souillées avec du sang HBV positif pour HBsAg et HBeAg, le risque: – D’hépatite clinique: 22 à 31 % – De séroconversion: 37 à 62% CDC, Updated recommendation, 2001 Virus de l’hépatite B • Le risque de transmission est lié au status HBeAg du patient source: • Pour des personnels exposés à des piqûres d’aiguilles souillées avec du sang HBV positif pour HBsAg et négatif pour HBeAg, le risque: – D’hépatite clinique: 1 à 6 % – De séroconversion: 23 à 37% Werner, Ann Int Med ,1982 Virus de l’hépatite B • Les blessures percutanées sont la voie de contamination la plus efficace • les personnels contaminés sont le plus souvent incapables de se rappeler une blessure potentiellement contaminante Garibaldi, JAMA, 1972 Rosenberg, Surgery, 1973 Virus de l’hépatite B • Dans un tiers des cas de contamination professionnelle reconnue le personnel contaminé par aiguille souillée se rappelait avoir traité un patient à antigénémie positive Callender, Am M J 1982 Chaudhuri,Am M J 1982 Virus de l’hépatite B • Le virus survit environ une semaine dans du sang séché à température ambiante • La contamination peut donc survenir par contact avec du sang séché sur de simples abrasions cutanées • La capacité de contamination environnementale a été démontrée sur des patients en hémodialyse Bond, Lancet, 1981 Lauer, J Infect Dis, 1979 Virus de l’hépatite B • Depuis le début des années 1980, la vaccination a fait s’effondrer la prévalence de la sérologie positive chez les dentistes de • 14% en 1972 • 9% en 2003 • Les taux devraient encore s’améliorer avec le départ en retraite des « vieux » séropositifs avant vaccination. Cleveland, JADA,1996 CDC, Updated recommendations, 2003 La transmission des pathogènes hémato ou sialoportés • • • • • • HBV HDV HCV HIV Agents non conventionnels Mycobactérium tuberculosis Virus de l’hépatite D • 4% des patients présentant une infection aigue par HBV ont une co-infection par HDV • virus hématoporté défectif requiert la présence d’HBV pour se répliquer • Les sujets co-infectés ont un pronostic plus sombre • La vaccination contre HBV protège Polish Clin Microbiol Rev 1993 La transmission des pathogènes hémato ou sialoportés • • • • HBV HDV HCV HIV Virus de l’hépatite C • Ne paraît pas efficacement transmissible par des expositions professionnelles au sang • Le taux de séroconversion des personnels exposés accidentellement par voie percurtanée ou autre est faible: – Moyenne: 1.8% (0<x<7%) Alter Clin Liver Dis 1997 Virus de l’hépatite C • Pas d’études concernant le passage transmuqueux • Mais, 2 cas de transmission publiés après éclaboussure de la conjonctive • 1 cas de double transmission HIV-HCV après exposition de peau lésée Sartori, Scand J Infect Dis,1993 Ippolito Infect Int Med 1993 Beltrami Am J Infect Control 2003 Virus de l’hépatite C • Données insuffisantes à ce jour pour évaluer le risque professionnel au cabinet dentaire • La prévalence de l’infection à HCV dans la profession est sensiblement comparable à celle de la population générale ( 1 à 2%) • 1 étude visant à déterminer les facteurs de risque a montré que les piqures accidentelles étaient le seul facteur professionnel identifiable. Cooper Infect Control Hosp Epidemiol 1992 Polish Am J Infect Control 1993 Virus de l’hépatite C • Aucune étude sur la transmission personnel dentaire-patient • De multiples case reports rapportent la transmission par des chirurgiens lors de procédures invasives • Le risque de transmission dans ces conditions serait de 0.17% Duckworth, Commun Dis Public Health,1999 Cody Arch Int Med 2002 La transmission des pathogènes hémato ou sialoportés • • • • HBV HDV HCV HIV VIH • 57 cas de transmission du VIH à des personnels de soins • Aucun à des personnels médico-dentaires • 6 cas de transmission du VIH d’un médecin dentiste atteint du SIDA aux patients • Le CDC a surveillé plus de 22000 patients traités par 63 médecins-dentistes ou étudiants en médecine dentaire VIH positifs sans identifier de nouveau cas de transmission. Robert Ann Int Med 1995 CDC, MMWR, 1993 VIH • le risque de séroconversion après piqûre accidentelle par aiguille souillée avec du sang VIH + se situe autour de 0.3% (0.2<x<0.5%) • Après exposition d’une muqueuse ( nez, bouche) le risque est de 0.1% • Le risque par exposition cutanée serait inférieur. Bell Am J Med 1997 Ippolito Infect Int Med 1993 VIH • Expérimentalement: – Une aiguille pleine ou de faible diamètre ( aiguilles dentaires) transfère moins de sang • Un lien a été établi avec la quantité de sang transférée • Un lien a été établi avec la sévérité du SIDA chez le patient source Cardo, New England J Med 1997 Autres Agents Pathogènes • Agents non conventionnels : prions • Mycobactérium tuberculosis Agents non conventionnels • Le prion dans les tissus buccaux: • Le prion voyagerait du cerveau à la bouche par dégénérescence neuronale le long de l’axe trigéminal. • On pense à une probable accumulation de la proteine dans le ganglion trigéminal • Expériementalement, on a mis en évidence une infection rétrograde par le prion à partir d’une inoculation de la pulpe de hamster Guirroy Ann Neurol 1989 Wells Vet Rec 1998 Ingrosso J Gen Virol 1999 Agents non conventionnels • Le prion dans les tissus buccaux: • L’étude de Head en 2003 n’a pas permis de retrouver le prion dans la pulpe dentaire de 5 sujets autopsiés après décès par MCJ • Le prion était pourtant présent dans les amygdales Head Brit Dent J 2003 Agents non conventionnels • Transmission au cabinet dentaire: – transmission de la Maladie de CJ à la suite de traitements dentaire proposée il y a 20 ans – Les études cas/contrôles n’ont pas démontré d’association entre les soins dentaires et le développement de la maladie – Aucune donnée ne conforte la transmission de la maladie au cabinet dentaire Will et Mattews J Neurol Neurosurg Psychiatry 1982 Arakawa Acta Neurol Scand 1991 Porter JADA 2001 Agents non conventionnels • Transmission au cabinet dentaire: – Le département UK de la santé publique a soulevé l’hypothèse d’un risque potentiel de réemploi des instruments dentaires – Par abrasion des amygdales ! – Le risque serait estimé à 10 X moins que la tonsillectomie – risque lui-même inférieur à celui de la chirurgie cérébro-méningée UK department of Health 2003 Agents non conventionnels • Transmission au cabinet dentaire: – Une étude a été conduite pour déterminer la transmissibilité du prion à partir d’os bovin déspécifié utilisé en banque d’os. – L’étude conclut à un risque insignifiant Sogal and Tofe J Periodontology 1999 Agents non conventionnels • Transmission au cabinet dentaire: – Une étude de la transmissibilité de la tremblante du mouton par des fraises dentaires – Les fraises sont contaminées auprès des tissus gingivaux de souris infectées – Les souris saines sont sacrifiées 15 mois après contamination – Pas de signes clinique ou histologique de la tremblante Adams et Edgar Br Med J 1978 Agents non conventionnels • Transmission au cabinet dentaire: – Injection intraperitoneale de l’agent de la tremblante à des hamsters – Infection significative du système trigéminal de la pulpe et de la gencive des animaux – Injection directe dans la pulpe: tous les animaux test développent la tremblante Ingrosso J Gen Virol 1999 Agents non conventionnels • Transmission au cabinet dentaire: – Une étude sur l’élimination de la masse protéique au cours des procédures de routine de nettoyage des instruments endodontiques – Méthode la plus employée: nettoyage manuel – Stérilisation: autoclave Ingrosso J Gen Virol 1999 Agents non conventionnels • Transmission au cabinet dentaire: – 98% des instruments testés présentaient une contamination visuelle – 100% présentaient une contamination protéique résiduelle en moyenne – 5.4 microgr ( 0.5<x<63!) – Pour mémoire des résidus protéiques de 50 microgr ont été retrouvés sur des instruments chirurgicaux « stériles » – Les auteurs recommandent l’usage unique des instruments endodontiques Smith J Hosp Infect 2005 Agents non conventionnels • Transmission au cabinet dentaire: – L’OMS n’a pas pu se mettre d’accord sur une recommandation claire concernant les risques de transmission iatrogène au cours de traitements dentaires importants – La destruction du matériel utilisé par incinération est recommandée en cas de contact avec la pulpe chez les sujets à risque Azarpazooh et Leake 2006 Autres Agents Pathogènes • Agents non conventionnels : prions • Mycobactérium tuberculosis Tuberculose: infection aéroportée • Danger des sprays ou aérosols des turbines et des détartreurs US • 15 des 55 passagers d’un avion de ligne ont été contaminés par l’air conditionné de l’avion lui-même contaminé par la toux d’un patient tuberculeux Kenyon New England J Med 1996 Tuberculose: infection aéroportée • Plusieurs études ont évalué le contenu microbiologique des projections de ces aérosols • On ne retrouve pas MT • En revanche staphylococcus et streptococcus sont les deux espèces les plus fréquentes Prospero Infect Control Hosp Epidemiol 2003 Maglouth Quint Int 2007 Tuberculose: infection aéroportée • L’air des compresseurs dentaires a été testé en même temps que l’eau des mêmes unités dentaires • On retrouve une contamination bactérienne dans 23 des 99 prélèvement d’air comprimé • 100% des unités dentaires avaient une eau contaminée • Les auteurs estiment que leurs résultats soutiennent la possibilité d’infections opportunistes iatrogènes chez des sujets immunodéprimés. Hubar Jada 2002 Conclusions • La transmission des infections au cabinet dentaire a considérablement reculé avec l’apparition du SIDA dans les années 80 et la prise de conscience qui a suivi • Il reste quelques postes « à risques » • Des normes adaptées au risque potentiel mais aussi aux moyens des « petites structures » Merci de votre attention