La Question de la Palestine jusqu`en 1939 Introduction: Tout d`abord

La Question de la Palestine jusquen 1939
Introduction:
Tout dabord il est essentiel de rappeler que la Palestine nest quune expression
géographique formant la région sud de la « grande Syrie » qui nexiste que dans les récits
bibliques. Elle incarne le lieu des trois religions monothéistes, et suscite, depuis toujours, par sa
position et son symbolisme, toutes les convoitises. Dabord, nous allons nous intéresser à la Palestine
Ottomane jusquen 1914. Cest une période de redécouverte de la Palestine et du développement du
sionisme. Ensuite, nous allons voir quau moment de la guerre, la question de la Palestine
s'internationalise, devenant un conflit dintérêt dans le jeu des puissances entre la France et la
Grande Bretagne. Cette dernière semble instrumentaliser le sionisme pour légitimer son action.
Finalement, nous étudierons le retournement de situation au moment de la Palestine mandataire, et
le développement du nationalisme arabe en réaction au sionisme.
I- La Palestine Ottomane jusquen 1914
Les sociétés de l'Empire Ottoman sont au départ des sociétés soumises à l'Empire, organisées
et contrôlées par des familles exerçant une certaine stabilité économique des territoires et
garantissant un certain équilibre. En Palestine, comme dans tout lEmpire, les structures sociales et
sociopolitiques sont donc celles de lEmpire Ottoman. Les élites sont constituées par les grandes
familles arabes aristocratiques et le système est fondé sur larabité généalogique, plaçant au sommet
de la hiérarchie les familles descendantes du prophète. La différenciation est donc principalement
sociale, il ny a pas de solidarité nationale, ce qui explique que les terres palestiniennes seront
vendues par des arabes musulmans. Toute forme de nationalisme semble, à lorigine, être exclue,
malgré la diversité qui caractérise le territoire de la Palestine : les populations arabes musulmanes,
les populations arabes chrétiennes et les populations juives autochtones. Néanmoins, lorsque
lEmpire Ottoman est confronté à une série de défaites, il est déstabilisé, ce qui loblige à
entreprendre une série de réformes modernisatrices (Tanzimat) qui sont, selon les intérêts, appuyées
ou entravées par les puissances occidentales. Ces réformes entrainent une déstabilisation de lordre
ancien et engendrent, dune certaine façon, les premières formes de nationalisme.
Un intérêt naissant pour la Palestine voit également le jour à cette époque, en ceci quelle
représente le lieu d'origine des trois monothéismes. Cette redécouverte de la Terre Sainte passe par
des recherches archéologiques et historiques visant la découverte d'une certaine historicité du récit
biblique. La Palestine devient ainsi le jeu de luttes politiques et de conflits scientifiques, engendrant
une définition ambigüe, et entant que création une définition contestée. La position stratégique
qu'elle représente au Moyen Orient et la charge culturelle et symbolique qu'elle comporte,
internationalisent la question de Palestine en engendrant des conflits entre les puissances,
soucieuses détablir un protectorat sur les lieux saints. Ainsi, cette redécouverte permet-elle une
certaine légitimation de la pénétration dans le territoire palestinien par les puissances, se présentant
comme défenseurs des populations des chrétiens locaux notamment.
Cette historisation du texte sacré fait du peuple juif un acteur de lHistoire et légitime en
quelque sorte sa pénétration en Palestine, qui demeure discrète dans les années 1880. Cependant
elle est favorisée par les pogroms tsaristes dEurope centrale au cours dune période où le libéralisme
européen semble sépuiser et la montée de différentes formes dantisémitisme génère
lexpression dun nationalisme juif dans sa forme la plus radicale: le sionisme. Révolté par les
pogroms, Theodor Herzl, auteur de LEtat des Juifs (1896), justifie la nécessité dun Etat pour
protéger les juifs persécutés lassimilation ayant échouée. Il veut entamer une colonisation juive
européenne et représente ainsi linitiateur dun nationalisme juif explicité, touchant la diaspora juive.
Il fonde le mouvement sioniste lors du premier Congrès à Bâle en 1897. Son plan daction préconise
la colonisation de la Terre Sainte pour une nation et non plus pour une religion. Les Congrès suivants
sont révélateurs dune institutionnalisation et d'une organisation du mouvement, notamment à
travers la création de la Banque Nationale juive, à linitiative de Chaïm Weizman futur président
dIsraël en 1949 et à la création en 1905 du Fond National Juif destiné à lachat de terres agricoles
en Palestine. La volonté de colonisation semble claire, faisant fi de toute population sur place et
nexcluant pas leur expulsion: « une terre sans peuple, pour un peuple sans terre ». Cependant, les
autorités ottomanes refusent : elles ne contestent pas les arrivées individuelles mais sopposent à
une arrivée de masse.
II- La Palestine dans le jeu des puissances.
Le succès et lévolution du mouvement sioniste est possible par linternationalisation quil
donne au problème juif et à la question de son territoire. Le mouvement n'hésite pas à prendre
contact avec des personnalités influentes afin de légitimer son action: des chefs dEtat, le pape Pie X,
le sultan Hamid III, lempereur Guillaume II ou le ministre britannique Joseph Chamberlain. Ce
dernier est dailleurs à lorigine dune première offre pour constituer un Etat juif : lOuganda, alors
possession britannique. Ceci révèle lattachement de la Grande Bretagne au sionisme dans un
processus de concurrence avec la France. Herzl nhésite pas à accepter, faute de mieux, révélant
son aspect non traditionaliste et son insensibilité à la composante religieuse du problème. En fait, il
annonce cette offre en 1903, peu après le premier Pogrom du XX° siècle. Mais le refus de cette offre
par une certaine partie de juifs, révèle lexistence de l'hétérogénéité du nationalisme juif concernant
la question de la Palestine: différenciant un territorialisme radical et un nationalisme moins radical.
Au moment de la Grande Guerre, la question de la Palestine se conçoit comme une question
d'intérêts, qui se révèle par la politique hésitante et contradictoire de la part de la France et de la
Grande Bretagne, chacun essayant de préserver le soutient des mondes juifs et musulman.
Néanmoins, la première guerre mondiale donne aux sionistes lopportunité de sidentifier à
lAngleterre. En effet, Lloyd George veut établir une influence britannique en Palestine pour en faire
un Etat tampon entre lEgypte et la Syrie, alors que lEmpire Ottoman est en déliquescence. De plus,
les Anglais ne veulent pas dune présence française à Jérusalem. Lloyd Georges se montre donc
favorable à la cause sioniste engendrant la rédaction de la lettre de Balfour le 2 novembre 1917.
Celle-ci représente une impulsion décisive dans la question de Palestine. En effet, Lord Balfour,
ministre des affaires étrangères britanniques, adresse cette lettre au Congrès national juif mondial
en promettant la création par la Grande Bretagne dun foyer national juif en Palestine. Les projets
sionistes justifieraient ainsi la mise en place dun protectorat et permettraient à la Grande Bretagne
de constituer une zone tampon entre la Syrie française et lEgypte, et écarterait ainsi la France dune
région proche du canal de Suez. Par conséquent, le développement de limmigration juive
européenne se développe en Palestine, générant des troubles avec la population arabe.
Les enjeux concernant la lettre de Balfour sont nombreux. Sa rédaction est ambiguë car elle
laisse le peuple Arabe sans Etat. A linverse elle représente une victoire stratégique pour le
sionisme qui devient une réalité internationale et concrète. Cest également une victoire pour la
Grande Bretagne qui bénéficie désormais dune position favorable au Moyen Orient, sauvegarde
lintérêt économique que représente le peuple juif, mais perd certains intérêt avec les peuples
arabes. Lhostilité des Arabes sexplique par leur définition réduite à des « collectivités non juives »,
et par le refus de la reconnaissance de droits politiques, garantis aux Juifs. La déclaration de Balfour
représente une victoire pour le sionisme politique, un engagement britannique et des droits de
portée international, autant de facteurs qui leur fournisse un avantage dans la lutte qui souvre pour
la Palestine.
III- La Palestine mandataire jusquen 1939
La déclaration de Balfour déclenche, à la fin de la guerre, des mouvements de protestation
en Palestine avec notamment des troubles à Jaffa (1921). Cest dans ce contexte de trouble que se
met en place le mandat de la Palestine. Les contours géographiques de la Palestine précisés facilitent
la rationalisation du problème mais engendrent des oppositions. Les révoltes se poursuivent
notamment avec laffaire du mur des Lamentations (1929), appartenance musulmane revendiquée
par les juifs. Cette affaire connaît un grand retentissement dans lensemble du monde musulman et
entraine une volonté de rééquilibrage de la politique britannique au moment du Libre blanc de 1930,
freinée par le mouvement sioniste. Sen suit une mobilisation du monde musulman qui à travers les
organisations politiques exprime leur opposition face à limmigration juive et face au transfert de
terres arabes aux Juifs. La période des mandats britanniques constitue une période de maturation du
nationalisme arabe en réaction au développement du sionisme : le développement séparé des deux
communautés empêche la formation dune identité régionale associant Juifs et Arabes. Dans
limmédiat, cet échec justifie le maintien de la tutelle britannique en Palestine. Dans le cadre de la
montée des revendications autonomistes arabes après la révolution jeune-turque, lopposition au
sionisme devient pour les Arabes de Palestine un facteur de structuration du nationalisme naissant.
Le nationalisme arabe prend en compte la pluralité arabe et palestinienne, et se développe tout
comme le nationalisme juif qui redécouvre lusage de lhébreu par la création d'une histoire et le
développement de la langue et de la littérature.
Les réactions ne se font pas attendre. Une sorte de résistance sobserve dans la révolution
palestinienne qui s'étend de 1936 à 1939: cette révolution est appelée: Al Thauwra Al Kubra et prend
son essor au moment des obsèques de Syrien Qassam, une de premières figures de lindépendance
palestinienne, forgée en réaction au sionisme. Dans toute la Palestine, se déclenche une grève
générale des Arabes, très populaire, qui se solde par une commission denquête afin dapaiser les
tensions. Celle-ci est suivie par la proposition de la GB (en 37) dun plan de partage qui consiste,
simplement, à diviser le territoire en deux. Les sionistes font pression sur Roosevelt pour sy opposer,
ainsi que les Arabes qui le considèrent trop favorable aux Juifs : les régions les plus riches leur sont
cédées et le plan nécessite un transfert de population.
Autant de raisons qui déclenchent la révolte des Arabes de Palestine à la fin de lannée 1937,
et qui sérige violemment contre le sionisme, les Britanniques et tous leurs sympathisants : une
véritable guerre civile accompagne linsurrection. La répression britannique est dure et mobilise un
nombre considérable de soldats durant près dun an. Les couts sont élevés pour une portion de
territoire relativement petite, ce qui pousse la Grande Bretagne à se tourner vers une solution
politique à la fin de lannée 1938. Celle-ci se traduit par la publication du Livre blanc de 1939 qui
stipule que la Palestine ne doit pas être partagée, et quil ne sagira que dun développement
communautaire pour les Juifs. De plus, limmigration juive est fortement ralentie, au moment ou la
demande est la plus forte, et une législation des transferts de terres limite leur vente: ce Livre Blanc
constitue un succès incontestable pour les Arabes. Ces faits sont révélateurs de la politique
opportuniste de la grande Bretagne qui après avoir encouragé le sionisme lorsque la demande était
faible les migrations juives se dirigeant vers lEurope occidentale après linstallation des quotas
américains elle le limite en réduisant lémigration au moment la demande est la plus forte : six
mois après le début des persécutions contre les juifs dEurope et quatre mois avant la seconde
guerre mondiale.
Conclusion :
Nous pouvons finalement dire que la question de la Palestine est une question qui a évolué
depuis ses origines jusqu'en 1939. Elle était d'abord une question interne à l'Empire Ottoman avant
de devenir une question d'intérêt de conflits entre la France et l'Angleterre, au moment de la Grande
Guerre. Elle se forge surtout dans l'affrontement entre deux communautés pour un même territoire,
dont sa définition ambigüe est d'emblée source de conflit et sintensifie par le double nationalisme
juif et palestinien qui ne cesse de se développer. La question de la Palestine n'est plus une conquête
de la Terre sainte de religions mais une conquête de la Terre sainte de nations, dont larbitre la
Grande Bretagne décide et tranche selon ses intérêts. L'attention mondiale que suscite la question
finit par intéresser la puissance américaine, complexifiant davantage la question de la Palestine que
lon dénommera ensuite « la question palestinienne ».
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