eux, évidemment ne voient que le côté humain de l’Église et volontiers, ils vous jettent à la figure : les
papes de la Renaissance ou l’Inquisition etc.. . Je sais bien que cela a existé, cela est vrai ; je les
connais bien, les papes de la Renaissance : je les ai bien étudiés, ils n’étaient pas si méchants que cela,
au fond. C’étaient des princes de l’époque, c’étaient des mécènes. Ils aimaient les artistes. Leur vie
morale a été plus ou moins conforme à la loi de l’Église, c’est vrai. Ils n’ont pas fait de grosses bêtises
quand même. L’inquisition, c’est vrai, c’est dur, mais il n’y a pas que cela dans l’Église, c’est l’aspect
humain de l’Église. Et c’est vrai que nous aussi nous sommes pécheurs, chacun de nous doit se
reconnaître pécheur devant Dieu. Ce n’est pas pour rien qu’au début de chaque Eucharistie, on répète,
« Reconnaissons que nous sommes pécheurs ». Mais l’Église c’est autre chose que cela. C’est aussi
une force de sanctification. C’est la force de Dieu qui travaille cette pâte humaine, si lourde, c’est vrai,
mais elle la travaille quand même et cela produit du fruit. Dans notre Église, il y a aussi des Saints et
c’est cela la véritable Église. Dans tous les pays, il y a de la Sainteté. Je suis né pas loin d’ici dans une
maison où à l’époque de la révolution française, j’avais un arrière-arrière grand-oncle qui était prêtre
(en effet ma famille habite là de père en fils, au moins depuis le quinzième siècle) et lorsque le prêtre
de la paroisse a refusé de signer la constitution civile du clergé comme de partir en exil, il n’avait plus
le droit d’accéder à l’église paroissiale, il venait dire la messe chez moi, là où je suis né. Donc, je suis
né dans une maison qui a accueilli les messes clandestines pendant la révolution française et cela a
profondément marqué notre famille. Si bien que chez mon père, il ne fallait pas dire du mal de
l’Église. Dans ma famille maternelle, c’était autre chose. On était radical socialiste et on mangeait
volontiers du curé. Aussi, je comprenais mal ces nuances quand je passais de ma grand-mère
paternelle qui était une chouanne, à ma grand-mère maternelle qui était républicaine. Je sentais bien la
différence mais je ne savais pas pourquoi. Je l’ai compris après coup.
Notre Église, c’est une pâte humaine, mais une pâte humaine dans laquelle travaille la force de
l’Esprit Saint, d’où l’importance extraordinaire de la liturgie et des sacrements dans notre
Église.
De tous les vocables bibliques désignant l’Église, trois ont été spécialement consacrés par
l’interprétation chrétienne : le Peuple de Dieu, le Corps du Christ, le Royaume de Dieu. Il y en aurait
bien d’autres : l’Église est l’épouse du Christ etc..
L’ÉGLISE, PEUPLE DE DIEU ET CORPS DU CHRIST :
Dans sa signification propre, l’Église se rattache au peuple de Dieu de l’Ancien Testament. Le peuple
de Dieu de l’Ancien Testament réalisait l’accomplissement de la promesse du rassemblement des
peuples, promesse qui était incluse dans la vocation du peuple élu. Le peuple juif a été élu par Dieu,
mais ce n’était pas pour être séparé de tous les autres, c’était pour être porteur du rassemblement de
tous les peuples du monde et Jésus, Lui, a donné à son Église une dimension universelle : « De toutes
les nations faites des disciples ». L’Église ne peut s’identifier à un peuple particulier pas plus qu’un
peuple particulier ne peut devenir comme tel, l’Église. Je sais bien que les Francs que nous sommes,
nous aimons bien nous dire que nous sommes ‘la fille aînée de l’Église’. Comme j’ai voyagé de temps
en temps dans ma vie, quand je vais en Arménie, je constate que l’Arménie était une nation chrétienne
avant la France et que la Géorgie aussi était une nation chrétienne avant la France. Il ne faut pas trop
chanter sur les toits que nous sommes la fille aînée de l’Église !. L’Église ne peut pas s’identifier avec
un pays. Elle peut même disparaître d’une région. Il y a trois ans, j’ai fait un pèlerinage aux Églises de
l’Apocalypse, les sept Églises de l’Apocalypse de l’Asie Mineure : Éphèse, Smyrne, Pergame,
Thyatire, Sardes, Philadelphie et Laodicée. Qu’est-ce qu’il en reste ? Des ruines ! Smyrne est devenue
une grande ville mais musulmane avec trois millions d’habitants. Il y reste un évêque catholique. Je
suis allé lui rendre visite. Je lui ai demandé combien il avait de diocésains. Il m’a répondu :
« 1250 pour tout le diocèse ». 1250, une petite paroisse de chez nous. Tout le reste est passé à l’Islam !
L’Asie mineure qui a été profondément chrétienne est devenue musulmane. L’Afrique du Nord qui a
connu jusqu’à environ 800 évêchés est devenue une terre musulmane. Alors je me dis, la France, la
France chrétienne n’a pas les promesses de la vie éternelle. L’Église peut disparaître en France, on est
sur cette voie en ce moment. Alors il faut faire attention. Je sais bien qu’il y a, Dieu merci, quelques
bonnes ressources chez nous et j’espère que l’on triomphera de cette crise mais aucun pays n’a les
promesses de la vie éternelle. Il n’y a pas tellement longtemps, quand j’étais simplement étudiant ici,
l’Église était où ? les catholiques étaient où à ce moment là ? : essentiellement dans le pourtour de la