conséquences peut-être des bouleversements politiques et économiques qui provoquent les
esprits à remettre en cause ce qui paraît acquis. Le développement des relations
internationales a pu aussi y aider, montrant que cette discipline était cultivée et enseignée dans
beaucoup de pays."
Le droit est à la base de tout débat sur l'homme dans nos sociétés contemporaines
Brimo, pour sa part, remarque que la philosophie du droit est enseignée dans toutes les
grandes facultés de droit du monde et qu'il y a lieu de s'en réjouir car: "Cette diversité est
source d'enrichissement et a donné naissance à un grand nombre de systèmes de philosophie
du droit. Nous entendons par là tout système de principes que l'on établit ou que l'on suppose
établi pour grouper ou expliquer un certain nombre de faits ou d'idées en partant du concept
de droit ou de l'existence de systèmes juridiques." (...) on ne peut rien comprendre aux grands
systèmes philosophiques si l'on néglige la philosophie du droit, car le droit et les systèmes
juridiques sont à la base de tout débat sur les rapports de l'homme et de la société."
On peut souligner que tous les grands juristes contemporains (Ripert, Gény, - qui a renouvelé
la technique d'interprétation du droit privé en partant de ses réflexions sur le donné et le
construit -, etc) ont senti le besoin de compléter leur conception du droit par certaines prises
de positions philosophiques. Car les deux sont liées et les changements profonds du droit
viennent de la philosophie du droit. En effet, d'après Brimo, la philosophie du droit appartient
au domaine du droit : " elle est le droit positif réfléchi par la pensée spéculative...toutes les
grandes révolutions dans le domaine de la pensée juridique sont l'oeuvre des philosophes du
droit et de l'Etat".
Facteur d'universalité et de progrès du droit
De plus, selon Brimo, la philosophie du droit, parce qu'elle se situe au niveau le plus élevé,
appelle les esprits à la convergence, et à ce titre doit être considérée comme un facteur
d'universalité et de progrès du droit. Le droit comparé nous révèle cependant une diversité
étonnante des conceptions du droit et de ses rapports avec la politique, la morale et la religion.
Dans d'immenses communautés humaines le droit est lié non seulement à une morale, mais à
une religion. Dans le monde musulman par exemple, le droit n'est qu'une face de la religion.
"Celle-ci comporte d'une part une théologie qui fixe les dogmes et précise ce que le musulman
doit croire; elle comporte d'autre part une partie, le shar, qui prescrit aux croyants ce qu'ils
doivent faire ou ne pas faire." (R. David, Les grands systèmes de droit contemporain)
Dans la conception hindouiste et dans la conception juive, on ne voit pas les choses d'une
manière différente. "Dieu est partie aux relations entre les hommes: le devoir à son égard
l'emporte sur les droits de ceux-ci", note Tunc. "Si par exemple un débiteur néglige de payer
sa dette, il méconnaît son devoir religieux..." Ainsi en est-il du droit africain qui est sacralisé:
l'élément juridique et l'élément religieux sont indissociables. D'autre part, pouvons-nous
croire que le droit puisse être indépendant de la politique? Après l'Etat gendarme, gardien des
libertés de chacun, l'État providence proclame le droit de chacun à la santé, à l'éducation, au
travail etc. Le droit n'est-il pas alors toujours l'instrument d'une politique? A ce sujet, Tunc
note: "La politique fixe des objectifs, elle gouverne, elle "fait" de la direction. Le droit fait de
l'administration quotidienne."
Il convient aussi de noter les différentes attitudes des populations à l'égard du droit (cela étant
lié à la culture propre à chaque milieu). Par exemple, dans nos pays occidentaux, nous
sommes toujours soucieux de faire ce qui est conforme au droit, ce qui est permis. Mais dans
le monde oriental, en Chine, au Japon, on a du mépris pour le droit. "Pour des Japonais
honnêtes, écrit Y. Noda, le droit apparaît comme une chose indésirable, dont il est souhaitable
de s'éloigner autant que possible". C'est que les obligations morales, les règles religieuses sont
suffisamment puissantes, sans qu'on ait besoin de recourir aux règles juridiques pour arriver à
une entente. L'amitié, l'harmonie n'est pas nécessairement le fruit des procès et des tribunaux.