Entrevistando Emiíe Bréhier Aproveitando a ocasião de se achar

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Entrevistando Emiíe Bréhier
Aproveitando a ocasião de se achar entre nós, a convite da Municipalidade, o grande filosofo francês Mr. E'mile Bré hier, Maiirg de
Confárences à Ia Sorbonne, obtivemos uma entrevista dele, durante a qual tivemos o prazer de ouvir o maior historiador, em França, dia filosofia mundial,
sobre algumas questões gerais do pensamento filosófico dle nossas dias.
Transcreveremos aqui uma pagina de apresentação do Prof, E'mile Bréhier em seu livro Hisfoire de Ia philosophie alle-mande (1921):
«Mr. E'niile Bréhier enseigne, depuis 1908, Ia philoso -phie dans lês universités; après avoir été professeur dans lês facultes dês lettres de
Rennes et de Bordeaux, il est depuis 1919 maítre de conférences de philosophie et d'histoire de Ia philosophie à Ia Sorbonne.. Sés travaux ont
porte en par-liculier sur lê période dite «hellénistique» de rhistoire de Ia phiíosophie grecque (/does Philosophlques et Re/igieuses de Philun
d J Â{exandrie — Paris, 1908; Chrysippe - - Paris, 1910) et sur riristoive de Ia philosophie allemande au début da XIX 1 siècle (Schelling — Paris,
1912).
Mr. E'mile Bréhier est decore de Ia Croix de Guerre et de Ia Légion d'Honneur au tiíre militaire».
Depois djesta época, Mr. E'mile Bréhier publicou, além de outros escritos, sua grande Histoire de Ia Philosophie, com a qual mais se firmou
seu justo renome de erudito e pensador.
Como reconhecimento dos elevados méritos de Mr. E'miíe Bréhier^agora mesmo foi ele indicado para Presidente do Neu-v time Ccngrcs International
de Philosophie, (Congros Descartes), que ise realisará em Paris de l a 6 de agasto de 1937, onlde Henri Bergsony^ Presidente de honra, além dos
maiores nomes do aíual pensamento francês, que comparecerão como membros, entre outros: Celestin Bouglé, Léon Brunschvi cg, Geor-gês Dumas,
E'tiemiG Gilson, E'dotiard Lê Roy, Abel Rey, Louis Rougier, etc..
Foram as seguintes as questões de filosofia contemporânea apresentadas por nós a Mr» E'rnile Bréhier:
«l.a) — L'(i/iciefiti'j ei Ia nouvcile philosophie — Njou._ fatidra-t-il remplacer Ia philosophie classiqtte par une nouvel-le philosophie, selou lês
irrationnalistes et pragmatístes radica ux?
2. a ) — Science ei phll^ophic - Y a-f-il,, de fait, jcetCc inuíiíité, si répandue, de Ia philosophie dans Ia vie scíentifiquo de notfs jours? CV-est-à-dire,
est-el!e vraie Ia tendance de cértains philosophes actueis, selon laquelle Ia philosophie a perda sã raison d'être pour ne plus pouvoir jeter un coup d'oeil
general et synthétique sur lês sciences particulières qui auraient surpassé leur ancienne rnaitresse?
3.a) — ThócriC drr l-1 connni ratice — La théorie de Ia connaissancc -est-clle une thcorie complètenient indépendante, partículière, ou jest-ellé une seule partie de Ia philosophie scié:?tifique? Ne vaut-il pás niiciix 1'cnvisager comme un résultaí;
nccessaire et unique de Ia finion: physique-psychologie-logi !que?
f
4.a) — íniellectualisine et an'i-iiiíclleclualisme - - Lê rnou-vement anti-intellectualistç d'aiijourdhui,, à lê bien prendrc, n rest-il pás vraiment
réactionnaire au dépens de Pauthentique pensée ratiounelle et phisolophiquc?
5. a ) • Vavenir de Ia philospphie - Que nous dit sur ravenir de Ia philosophie lê devenir contemporein du mond
Do Professor E^niíle Bréhier tivemos a honra de receber as seguintes respostas, que dispensam qualquer comentário, az tal maneira são claras
e meditadas:
;l
Lês questions qiic vous ine posez et auxquelles je no me flatte nullement de donner une repense décisive, me montreni quelie importancc vous
attachez à Ia philosophie et combien vous senliez vivement Ia crise qifelle traverse.
Je grouperai trois de cês questions, Ia première, Ia deu -xièrne et Ia quatrième,, qui mettent en lumière trois opposition^ Tune .entre «Fancienne et Ia
nouvelle philosophie», 1'autre entre «Ia science et Ia philosophie», Ia troisiòme entre «riatellecltia-lisme et rantiintellectualisme».
A - (2me. quesiion) Et je commcncerai par ia seconcfe^ Avant d'y repondre, je veux vous meítre en garde contre ,une conception, fausse quoique três
répandue, de 1'histoire de Ia philosophie: il n'est pás vrai qu'il y ait d"abord ! eu une épo^ que ou Ia philosophie contenait et dbminait toutes Ics
sciences, puis qifelles se soient détachées d'elle pejj à peu, Ia laissant ainsi sans contenu. La vérité, c'est que lês sciences dites positives sont nées
de techniques pratiques,, qui n'ont aucun rapj:ort avec Ia philosophie: Ia necessite de mesurer lês terrain.s x d'écftanger lês produits, de regler lês travaux dês champs a donné naissance à Ia géométrie,
à Ia arithiiré tique, à Ia astro-nornie; Ia physique et Ia chimie sont nées da techniques, telles que celles de Ia métallurgie ou díe Ia prepara tion dês
breuva-gês et médicaments; Ia science dês êtres vivants vient de Ia medicine. Lê catctère commum de toutes cês techniques est de sé livrer à dês opérations
,sur Ia matière?; ellej ont tonjours réilé positives, et jamais elles n'ont eu à lê devenir. La philosop/hie a un objet tout différent: cet objet, c'est, d'une
manière gé-nérale, Fesprit. Qucls soní dans cês conditions, lês ra pports eníre h philosophic et lês sciences? Pour se comprendre, il faut savoir comment
ils sont né.s: or, ils sont nés, diez lês OreaX, cTexig-ences qui éíaient inhérentes a ti développe.ment meme dê Ia ccience. Lês règles si.mplem.ent techniques et
empiriqués trou-vent e i cffet rapideinent leurs limites: ainsi, pour prendre un exemple célebre, Ton s'est aperçti que Ton ne pouvait ]:as
prendre n'impor te quelle uni té pour mesurer une íon -guer: li diagonal d''u n carré ne saurait être mesurée exao tement en prenant pour unité lê
cote du carré ou Ia rnoitié de cê cote, ou son quarí, ou son huitièmc, etc.; -cefíe de GO u-veríe de «rirrationnel» force Pesprit à se interroger sur lês
capacites et lês limites cie Ia raison hunraine, e[ de ceíterquestioíi naíssentdesphilosoplnes comme celles dês Pythagoriciens et de Platon;les abstacles gue
rencontrent lês sciencas ont faie naitre 1'effort pour le.3 vaincre; dans cet effort, lê travail spirituel, cjifest Ia science, prend conscience de lui meme,
cette çon; -cience, c'est Ia phiJosophie. L'experien-ce de Tliistoire inon-tre que Ia plupart dês grands savants, en appi"ofondissanf leur sci ence,
sont arr i vés à Ia phil osophi e: qu'i l suffi se de rappeler lês noms de d'Alenibert, d'Henri Poincaré, de Duhem, d ? Einstein, et án plus illustre
de tons, Descarnes, qui a cherché dans lês mathématiques lês conditions générales de toute certitude. L'utilií;é de Ia philosophie pour Ia science ne
disparaítrait que si lês sciences étaient réduiles à de simples techniques, doní lês règles pe.uvent être appliquées sans qu'on lês comprenne.
B - - (ínu et 4ute. qiiesilons) - - Pour répondre à Ia pre-miLre eí à Ia quatrième question, 51 me faut rappeler briève -ment dans quelles conditions
sont nées lês philosophies Irra-tionalistes, pragmatisíes et antiintellectualistes. Elles son une protestation, .absolument justifiée, contre lê caractere abstrai,
éloigné de Ia vie réelle, qu'avait pris Ia philosophie díans leis dernières décades dtt XIXe siôcle; toutes cês doctrines affirment avec rai:on, qu'tme vérité,
pour être telle, doit avoir une sigf -
niiication concrète, c^st-à-dire dioit modifier Pattitude de Pindividu qui connait à Pégard du réel: elles donaaient en exem
ple íes >jérités experimeníales de Ia science, qui, à mesuro
qu elles sont découvertes^ transforment notre condiute, ou bieri
lês vérités religieuses qui sont, elles aussi, inséparables de
Taction, Mais il faut remarquer deux choses:
lê.
Ia
défaut de Tintellectualisme contre lequel cês doctrines protes -aient, n ? est pás inhérent à rintellectualisme véritable; Pla,ton, lê typ'e et lê chef de
rintellectualisme, voyait, díans lês -sciérn cês et Ia Contemplation dês Idáes, Ia condition à laquelle lês philosophes pourraient instituer lê justice
dans Ia cite; Descartes voyait «lês fruits de Tarbre de Ia philosophie» dans Ia medicine, Ia morale et La mécanique»; Ia doctrine de Hegel s'achève en une phiíosophie du droit, de 1'art, de Ia relig^ion. L'irrationalisme a donc rendu lês plus graiids services á Ia ph ilosophie ien Ia rappelant à sã
vraie destiaation. 2.e — II n'en esj: pás moíns vrai que lê pragfmatisme proprement dit est fait de deux thèses dont Tune est fausse et Tautre
peu precise. II est peu précis de subordonner lê redierche de Ia vérité à I'.uíilité, tant que Pon n'a pás dét;erminé lê concepb, fort vague^ de
Tutile.
A Ia première quesiion, je rcpondrai donc: il n'y a pás de philosophie snclenne et de philosophie nouvelle, cê que, voiis appelez
«phííosophie nouvelle» n'éíant au fond que Paf-firmation cie lu necessite, pour Ia philoáophie, de revenir aux problèrnes concreís, — et à Ia quatrtime
quesaon: Pantiin-telIíectisaUsme, piis en lui-rneme et idépendaminent dês partis politiques qui veulent Pexoloiter n'a rie:i de «reactionna ni
d'«avaiK
D — 3.e quesiion) - - La théorie ds Ia connnaissance a né-*
cessainement pour fondement lc& formes concrètes de Ia connaissance ? parn:i lesquelles se trouve lê conn.aiss.ance s-cieutifique; elie dépend! donc de Ia science, dans Ia mesure ou cila
est une réflexion sur Ia science; c'est pourquoi elle est liéa
à Ia physique commie aux autres science^. Son rapport avec .Ia
psychologie soulève un problème difficile à résoudre: Ia théo
rie d!e Ia connaissance envisage Ia connaissan-ce dans sã structure universelle, dans sés lois géncrale:; elle ignore lês aspéct
que peut prcndre cette connaissance chez lês individus; or, cc
sont lês aspects qui sont étudiés par lê psychologtie.
:i'autre part, il est cartain que Ia connaissance aríievée, telle qu ?on Ia trouve dans lês sciences, ne peut g'uère s'expliquer si Pon ignore cê qirest Ia
connaissance chez Penfant, chez lê primitif, etc. La logique, enfin, prise en son sens strict, est Peiisamble dês règles techniques et pratiques
du raisonnement, et elle ne fait pás partie de Ia théorie de Ia con naissance; prise en
sens plus large, commc étude théorique dês procedes de ^•aisonnerrrent employés par lês différentes sciences, elie se confond partiellement
avec elle.
E — 5me. question) L'avenir de Ia philosophie? Je ne suis pás prophète, et je ne puis vous lê prédire. Cependànt, je f-tiis peut-être vous
dire pourquoi je ne peux pás Ie prédire. La philosophie est, comme h science et Fart, de cês acSvités spirituelíes qui, d'une part, exigent pour se
réaliser dês con-ditions nombreuses et complexes (sociales, psychologiques, etc), €t qui, íTauíre part, díépettdent encore de Ia liberte et út rinitiative
humaine, qui sont complètement imprévisibles. Sur premier poíni, j'ai écrit plus haut que, si lês sciences se rc -duisaient à de3 techniques, elles ne
sentiraient plus aucun besoin de se compléter par une philosophie: o ri peut gene -raliser oeíte remarque et dire que, si Ia société humaine tend,
comme lê croient certains, à un état analogue à -celui dês so-ciétés animales, oíi tout paraít réglé meQaniquement, Ia philosophie, et eri general toute
invention de pensée, deviendra inutile jeí íTipossible. Mais par lá, lê premier point se rei i e ,au second; Fhomme reste en effet toujours libre da s'affranchir
du mécanisme et de Futiliser comme un msoyen, au lieu d'être ^a victime; Ia seule question, c'est de savoir s'il usera de cettc liberte, ou si me.rne., à ia
longae, il pourra en user, si rhumía^ nité n'arrivera pás à Teta t d %uii homrne, qui est devenu Tesclave de sã routine et de sés hatitudes: alors Ia philosophie
idispa L-raítrait. La philosophie est donc Ia mesure de Ia liberte que Fesprit garde relativernent à Ia réaliíé qui Tentoure et lê pres -se; Ia fin de Ia
philosophie serait lê renocem'en't à cette liberte et, avec lui, Ia fin de Ia civilisatton occidentale.
Je pense ainsi avoir répondu, autant qu'il m'etait possible, aux graves questiona que vous me posiez. Je ne veux piais terminer sans vous
dire combien j'ai été heureux de voir que cês questions préoccupent Ia jeunesse intellettuelle du BrésiK j J'ajoute que. Tavenir de Ia philosophie me
paraít dápendre pra- ^ tiquement de deu x conditions: 'l.o — un enseignement philo- 1 sophique donné dans lês collèges d'enseignement secondaire à
Ia iin dês classes, et dians lês facultes; 2.° — Fexistence de sociétés philosiophiques dues à Ia initiative d !e personnes qui se rénnissent pour
discuíer de questions purement et strictement philosophiques; c^e^t par dês groupements libres de cê genre que p-Qiivent se produire Ia
sympathie et lê groupement dê* esprits, conditions indispensables de 1'existence et de Tav\ de Ia philosophie):.
EJmile Brchier^
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