Violaine Girard
4
qu’elles marquent l’entrée dans un statut résidentiel valorisant.
Les espaces périurbains apparaissent bien plutôt sièges de processus diversifiés, leur
hétérogénéité interne entraînant l’impossibilité « d’analyser le périurbain comme catégorie
unifiée »
(Rivière, 2008 : 32, voir aussi Rivière, 2011). Pour autant, si l’on en croit les
données issues des recensements de l’Insee, deux grands types d’évolutions, demeurées
jusqu’ici peu étudiées, affectent les espaces périurbains au cours des années 1980 et 1990.
Nombre de ces territoires constituent tout d’abord, au cours des décennies 1980 et
1990, des lieux d’installation privilégiés pour de nombreux ménages des classes populaires,
entre des centres urbains attractifs pour les catégories supérieures et des espaces ruraux
relativement préservés de la pression immobilière mais éloignés des équipements et des
emplois urbains. Les dispositifs d’encouragement à l’accession à la propriété (Groux et Lévy,
1993) concourent ainsi à une hausse de la part des classes populaires parmi la population
périurbaine (Gobillon et Leblanc, 2005). Ainsi, en 1999, « plus on s’éloigne des "pôles
urbains", plus la part des classes populaires augmente : la part des CSP ouvriers et employés
parmi les actifs est de 55 % dans l’espace urbain, de 58 % dans le périurbain, et de 61 % dans
l’espace à dominante rurale » (Mischi et Renahy 2008 : 14). Deux précisions s’imposent
cependant : les processus de ségrégation résidentielle qui accompagnent la périurbanisation
affectent de façon différenciée les différentes fractions des classes populaires et ne se
déploient pas uniformément au sein des espaces périurbains. Si, par exemple, les ouvriers
qualifiés et les professions intermédiaires s’installent massivement au cours des années 1980
dans le périurbain (Schmitt et al., 1998), les espaces périurbains les plus éloignés apparaissent
marqués par la surreprésentation des seuls ouvriers qualifiés (Cavaillès et Selod, 2003), quand
les espaces ruraux sont caractérisés par de plus fortes proportions d’ouvriers non qualifiés
.
En second lieu, les espaces périurbains sont également marqués par un mouvement de
relocalisation des activités productives, en lien avec les restructurations économiques en cours
La catégorie du périurbain renvoie sur le plan statistique au zonage en aires urbaines et en aires d’emploi de
l’espace rural (ZAUER), proposé par l’Insee et l’Inra à partir du recensement de 1990, qui définit plusieurs types
d’espaces : l’espace à dominante urbaine qui rassemble, autour d’un pôle urbain (unité urbaine offrant au moins
5 000 emplois), la couronne périurbaine (composées de communes dont 40 % des actifs travaillent dans l’aire
urbaine ainsi formée) et les communes multipolarisées (qui n’appartiennent pas à l’aire urbaine mais dont au
moins 40 % des actifs travaillent dans plusieurs aires urbaines) et l’espace à dominante rurale qui regroupe les
autres communes. La délimitation des espaces périurbains, construite sur la base du seul critère des migrations
alternantes domicile-travail, rassemble ainsi des espaces fortement différenciés socialement, même si elle
permet de mesurer l’extension des zones d’urbanisation diffuse et de mettre en évidence l’influence exercée par
les agglomérations en matière d’emploi auprès de nombreux actifs résidant en dehors des pôles urbains.
Un autre type de données, les revenus fiscaux des ménages, montrent également que le revenu moyen par
habitant est plus faible dans les couronnes périurbaines éloignées que dans le reste du périurbain ou encore que
dans les centres villes, mais aussi qu’en banlieue (Cavaillès et Selod, 2003).