
le rédacteur se voit contraint de démissionner, généralement dans les six mois ou lannée qui suit. Les propriétaires du journal gardent juste ce quil faut de personnel pour maintenir la parution régulière du quotidien ou de lhebdomadaire. Ils cessent de réinvestir les bénéfices pour
les détourner au profit de la maison mère. Ils valorisent le contenu publicitaire et la rentabilitéau détriment de linformation. Au bout dun an ou deux, la situation est claire. Les dernierséléments du personneléditorial sont tellement occupésàassurer la survie du journal quils nont plus le temps denquêter ni de vérifier les faits en profondeur. La publication ne repose plus que
sur un journalisme superficiel et sur les dépêches des agences de presseUn tel contexte,
très certainement démoralisant pour les journalistes, est très profitable aux lobbyistes. Dans un
livre intituléPR : How the PR Industry Writes the News (Comment les consultants rédigent
linformation), Jeff et Marie Blyskal font remarquer queles consultants savent très bien
comment réagissent les journalistes. Ils adaptent leurs communiqués en conséquence, afin que
les journaux les acceptent et les publient. De ce fait, une grande partie des informations que le
public lit dans la presseécrite, regardeàla télévision ouécouteàla radio sont influencées et déformées par ces gensInfo ou intoxAujourdhui, le nombre des attachés de presse est supérieuràcelui des journalistes professionnels, et lécart ne fait que se creuser. Un reporter est
assailli chaque jour par des dizaines, pour ne pas dire des centaines de dépêches ou dinfos transmises par téléphone, lettre, fax et maintenant courrierélectroniqueLa sociétéPR Newswire prétendêtre depuis 40 ans leleader incontestédans la diffusion des informations
des entreprises, des associations et des institutions auprès des médias et du monde de la finance
Dautres agences-conseil se spécialisent dans la diffusion, auprès de la grande presse, darticles de fond ou de tribunes libresécrits par des lobbyistes sur des sujets divers et ayant toute lapparence devraiesinfos. La sociétéNorth American Precis Syndicate (NAPS), par exemple, envoie desreportages en kitde la part des plus grandes agences-conseil et des entreprises les plus prestigieusesàjournaux et magazines. Bien entendu, les journalistes
surchargés de travail accueillent cette offre très intéressée avec plus de soulagement que de
méfianceLes médias se soumettent doncàce système. Associated Press gagne désormais beaucoup dargent en diffusant sous forme numérisée des photos dagences-conseil aux 400 journaux qui ont acceptéde les recevoirLa diffusion généralisée de reportagesclés en mainpour la radio ou la télévision est une pratique assez peu connue, qui a pris son essor
durant les années 1980, lorsque les agences de lobbying se sont aperçues que les diffuseurs
acceptaient de présenter comme des reportages dinformation, le plus souvent sans rien y
changer, les séquences, voire les programmes entiers quelles pouvaient filmer, mettre en forme et produireLes reportages préfabriqués sont des produits aussi largement diffusés par
les agences de lobbying que les communiqués de presse classiques, affirme George Glazer, vice-
président principal de HillKnowlton. En fait, la plupart dentre elles en sont déjààla
deuxième génération de ces reportages. Nous utilisons quotidiennement des transmissions par
satelliteàpartir de nos bureaux. Nous attendons avec impatience la mise en place des systèmesàfibre optique, qui nous permettront détablir des réseauxàtravers le paysÀquelques exceptions près, les directeurs de programme refusent de participeràla normalisation de ce type de reportages, le plus souvent parce quils refusent dadmettre quils y ont eux-mêmes recours
Un responsable de GrayCompanyépingle quandàlui lhypocrisie des médiasJai lu dans Broadcasting les lettres indignées dun certain nombre de journalistes après lannonce de la distribution de reportages prêtsàlemploi. Ils protestaientQuelle horreur ! Il ne saurait enêtre questionCe sont les mêmes qui mont appelépour obtenir les coordonnées exactes du
satellite afin de pouvoir se procurer ces reportages. Ils savaient parfaitement qui nousétions. Un