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La nomenclature botanique :
les Codes internationaux de nomenclature botanique et horticole
Valéry Malécot
UMR462 SAGAH, INH, INRA, Univ-Angers, 2 rue le Nôtre, F-49045 Angers. [email protected]
Résumé
Toute communication au sujet d’une plante nécessite l’utilisation d’un nom, il est fréquent d’utiliser les
noms scientifiques (ou noms latins) lorsque l’on parle de plantes sauvages, et d’employer des noms de
cultivars lorsque l’on aborde les plantes cultivées. La création, la « gestion », et la rédaction des noms
doivent cependant respecter des règles qui sont répertoriées dans des Codes internationaux de
nomenclature, soit « botanique » (CINB) dans le cas des plantes sauvages soit « des plantes
cultivées » pour les plantes horticoles (CINCP). Par contre, quel que soit le cas, les noms
vernaculaires et les désignations commerciales ne sont pas concernés par ces Codes.
Les règles des Codes de nomenclature devraient être suivies lorsque l’on créé un nouveau nom (pour
un taxon qui n’en à pas) où lorsque l’on change le nom (lorsque l’on change la taxinomie par
exemple).
Pour les plantes sauvages, les principes fondamentaux de la nomenclature sont les suivants :
- le principe d’unicité (dans une classification donnée un taxon ne possède qu’un seul nom),
- le principe de priorité (le nom le plus ancien, au rang donné, est à utiliser),
- le principe des échantillons-types (l’application du nom est basée sur un échantillon de
référence).
Par ailleurs les noms doivent avoir été publiés selon des règles précises qui peuvent concerner soit le
nom lui-même, soit le texte associé au nom, soit l’échantillon-type, soit le support de la publication.
Pour les plantes cultivées les principes de priorité et d’unicité s’appliquent, mais pas celui des
échantillons type (bien que le dépôt de standards nomenclatoriaux soit fortement recommandé), et
dans le détail les règles sont parfois très différentes.
Entre les deux codes, des zones d’ambiguïté subsistent, comme par exemple pour les espèces cultivées
inconnues dans la nature (telles que le maïs), ce qui peut conduire à des pratiques différentes selon
les auteurs.
Abstract
Any discussion about a plant needs the use of a name, commonly we use scientific names (or latin
names) when dealing with wild plants, while cultivars names are used for cultivated plants. The
creation, the “gestion” and the writing of names should, however, follow some rules listed in the
international Codes of nomenclature, either the “botanical code” (ICBN) for wild plants, or the
“cultivated plants code” (ICNCP) for horticultural plants. While, whatever Code we choose, vernacular
names and trade designations are not concerned.
Rules listed in the nomenclatural Codes could be followed when we create a new name (for a taxa who
did not get one) or when we change the name (if the taxonomy change for example).
For wild plants, fundamentals principles of nomenclature are the following:
- the unicity principle (in a specified taxonomy, a taxa can get only one name),
- the priority principle (the oldest names, at a given rank, should be used),
- the type specimen principle (application of names is based on a specimen for reference).
In addition, names should be published according to precise rules that may apply either to the name
itself, the associated text, the type specimen, or the physical document of the publication.
For cultivated plants, priority and unicity principles apply, but not type-specimen principle (even if the
deposit of nomenclatural standard is strongly recommended), and in detail, the rules can be quite
distinct.
Between the two Codes, ambiguous zones remain, such as for cultivated plants unknown in the wild
(such as maize), leading to quite distinct practices according to authors.
Communiquer sur les plantes nécessite de les nommer. S’il est possible d’utiliser des noms
vernaculaires dans le langage courant, les scientifiques utilisent généralement des noms latins (ou
noms scientifiques) pour désigner n’importe quelle plante sauvage. Pour les plantes cultivées, c’est à
dire celles sélectionnées par l’homme, on parle dans le langage courant (et administratif) de variétés,
alors que les scientifiques utilisent le terme de cultivar.
La nomenclature correspond à un ensemble de règles qui permettent de déterminer quel nom donner à
une plante, une fois que le taxinomiste qui étudie le groupe, auquel elle appartient, a déterminé quels
étaient les taxons et quels étaient les échantillons attribués à chaque taxon. La pratique actuelle de la
nomenclature botanique résulte d’une histoire assez compliquée, et se base sur une série de principes,
de notions ou de concepts qui peuvent parfois être ambigus. La mise en pratique des règles peut être
schématisée en distinguant les plantes sauvages des plantes cultivées, mais aussi en prenant aussi en
compte le cas des plantes nouvelles pour la science et celui de celles déjà connues. Compte-tenu de
leur histoire et de l’activité des systématiciens, les Codes de nomenclature présentent certaines
limites, ces dernières pouvant être soit internes à un Code, soit entre le Code applicable pour les
plantes cultivées et celui des plantes sauvage. D’autre part, avec les mêmes règles mais avec des
philosophies différentes, deux systématiciens peuvent diverger dans le choix du nom donné à une
plante. Nous aborderons donc ces différents points (histoire, concepts et principes, applications,
limites) afin de présenter le fonctionnement des règles de nomenclature.
Histoire des Codes
La compilation des règles de nomenclature, sous forme de Codes, présente une dimension historique
importante. Linné, dès ses premiers travaux (par exemple le Fundamenta Botanica de 1736), a exposé
les "règles arbitraires" de nomenclature qu'il suivait, il s'agit en particulier de règles d'orthographe, de
synonymie et d’homonymie. A la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe d'autres botanistes ont
critiqué les règles de Linné (comme Heister) et certains on même exposé leurs propres règles
(Adanson, A. P. de Candolle, Lindley). Globalement, durant cette période les règles, ont été implicites
et relativement peu appliquées. Dans les années 1850 botanistes et horticulteurs se sont trouvés
encombrés de noms nouveaux et de synonymes, et ils ont cherché des procédés pour fixer la
nomenclature (dixit Alphonse de Candolle, 1867). Par ailleurs, la rédaction du Prodrome a également
fait connaître, à Alphonse de Candolle, quelques cas d'application discutable des règles de
nomenclature. Suite à la réunion internationale de botanique de Londres (en 1866), Alphonse de
Candolle va rédiger les premières Lois de la nomenclature botanique, en consultant abondamment la
littérature antérieure (y compris zoologique) mais sans forcément la suivre. Il mettra en particulier
l'accent sur les bonnes conduites à suivre, plutôt que sur des règles à respecter.
Dans les années 1880-1890, les règles de nomenclature reviennent sur le devant de la scène, en
particulier du fait des idées iconoclastes de Saint-Lager (200 pages de règles orthographiques ou
presque) ou de Kuntze (point de départ de la nomenclature 1735 au lieu de 1753), mais aussi suite à
l'inclusion dans les Lois de nouvelles règles en 1883 ou à l'apparition de concepts tels que celui de
combinaison nouvelle (= Kew rule, évoqué par Trimen en 1878). De nouveaux recueils de règles sont
alors rédigés en particulier aux USA (code de Rochester en 1892, résolution de Madison en 1893) mais
également en Europe (règles de Berlin en 1897). Le congrès international de botanique de Paris (en
1900) puis celui de Vienne (en 1905) seront l'occasion de rédiger et d'approuver le 1er Code
International de Nomenclature Botanique (=CINB), mais d'international il n'aura que le nom puisqu'en
1907 les systématiciens américains publierons leur « Brittonian Code » (= le Code américain). Chaque
Code contenant certains points fondamentaux de la nomenclature botanique actuelle (tels que la
typification ou la combinaison), Ce n'est qu'en 1930 que le schisme Code Américain / Code
International cessera, pour fournir un Code dont le contenu est assez proche de sa version actuelle.
Dans la suite du XXe siècle, d'autres phénomènes vont apparaître dans le débat nomenclatural avec,
par exemple, la scission des règles applicables aux plantes cultivées dans les années 50 avec la
création du Code International de Nomenclature des Plantes Cultivées (CINPC). Dans les années 19701980, ce sera au tour des bactériologistes de prendre leurs distances par rapport aux plantes sauvages
(en particulier pour les « algues bleues », officiellement le premier code de nomenclature des
bactéries datant de 1947). Plus récemment, diverses initiatives ont vu le jour avec des échos plus ou
moins importants chez les systématiciens. C’est en particulier vrai dans les années 1990-2000 avec
une série de Codes « alternatifs » (Reformed Code - 1990; New Biological Nomenclature - 1991;
Biocode - 1997; Phylocode - 2000), qui servent toujours pour certaines communautés scientifiques.
Actuellement, le CINB en est à sa 14ème édition (il est révisé tous les 6 ans depuis les années 1970).
Cette dernière édition, aussi appelée Code de Vienne, est datée de septembre 2006 et résulte des
discussions survenues lors du Congrès International de Botanique ayant eu lieu à Vienne (Autriche)
entre le 12 et le 16 juillet 2005. En ce qui concerne le CINPC, il en est à sa septième édition (de
2004), et fait l’objet de révisions plus sporadiques que le CINB, sachant cependant qu’il est prévu une
session de travail sur ce sujet en octobre 2007 à Wageningen.
Concepts et Principes
Faire de la nomenclature nécessite de jongler avec différents objet et concepts. Tout d’abord, certains
de ces objets sont indépendants des Codes, il s’agit en particulier des classifications et des
échantillons. Une classification correspond à un système logique de catégories, chacune contenant un
nombre indéterminé d’organismes, ce qui facilite le renvoi à ces organismes (Stace 1994). Un
échantillon est un objet réel qui peut être positionné dans une classification (= assigné), identifié,
nommé et qui peut servir de référence à un nom. En général un échantillon est conservé de manière
permanente dans une institution. Sans classification ni échantillons il n’est pas possible d’envisager de
faire de la nomenclature, tout comme on ne peut pas faire un plat sans ingrédients ni outils.
D’autres objets ont une fonction essentielle dans le processus de la nomenclature, en particulier les
rangs et les publications. Dans une classification hiérarchique, les rangs correspondent à niveau de
regroupement des organismes. En nomenclature botanique ont prend en compte neufs rangs principaux
(règne, embranchement, classe, ordre, famille, genre, espèce, variété), ainsi que leurs subordonnées
(les mêmes précédés par sous-, par exemple sous-genre), plus deux rangs intermédiaires, la tribu
(entre la famille et le genre) et la section (entre le genre et l’espèce) ainsi que leurs subordonnés.
Pour les plantes cultivées on prend en compte deux rangs supplémentaires : le groupe [de niveau infragénérique] et le cultivar [de niveau infra-spécifique]). Les publications sont des travaux d’autres
personnes dont le format et le contenu doivent être étudiés attentivement lorsque l’on fait de la
nomenclature.
Enfin, les noms, qui sont à la fois le résultat et la base de la nomenclature. Au rang spécifique, un nom
c’est un objet composé de deux termes : un nom de genre et une épithète spécifique. Dans la mesure ou
les noms sont considérés comme appartenant au latin, dans un texte ils s’écrivent en italique (par
exemple Hydrangea macrophylla). On peut y rajouter un auteur (Hydrangea macrophylla Seringe) et
des indications sur l’histoire du nom (Hydrangea macrophylla (Thunberg) Seringe : Thunberg ayant
créé l’épithète macrophylla, Seringe ayant placé le taxon correspondant dans le genre Hydrangea).
Aux rangs supérieurs au rang spécifique (famille, genre, etc.), c’est un mot unique (Hydrangeaceae).
Aux rangs inférieurs au rang spécifique, c’est un trinom, composé d’un nom de genre, d’une épithète
spécifique et d’une épithète infraspécifique, auquel on peut rajouter l’indication du rang infraspécifique
correspondant (Hydrangea macrophylla subsp. serrata). Pour les plantes cultivées, les noms de
groupes s’écrivent de la forme Brassica oleracea Groupe Gemmifera ou Rosa Groupe Polyantha, et les
cultivars sous la forme Trifolium repens ‘Star’ ou Dianthus ‘William Sim’.
En plus de ces objets, des principes sont communs à tous les Codes :
Un taxon ne porte qu’un seul nom correct dans une classification donnée, ce que l’on appelle le
principe d’unicité. Et donc si la classification change, le nom est susceptible de changer.
Lorsque plusieurs noms existent pour un taxon donné, le choix du nom correct se fait en
appliquant le principe de priorité, c’est à dire que l’on utilise le nom le plus ancien au rang donné
(avec une limite temporelle variant selon les groupes). Donc si l’on découvre qu’un nom plus ancien
doit s’appliquer au groupe que l’on étudie, c’est ce nom antérieur qu’il faut utiliser.
Enfin, l’application des noms est basée sur des échantillons appelés échantillons types. Revoir
l’échantillon type peut donc conduire à préciser l’utilisation d’un nom. Ce dernier principe n’existe
cependant pas pour les noms de plantes cultivées. Dans ce cas des noms de plantes cultivées, des
standards nomenclaturaux peuvent être déposés pour réaliser le lien entre objet réel (l’échantillon) et
objet linguistique (le nom), mais ce dépôt n’est pas obligatoire.
Pratique de la nomenclature
Dans son fonctionnement, la nomenclature permet de déterminer quel est le nom correct d’un taxon
dans une classification donnée. Dans cette même classification, les autres noms utilisés pour désigner
ce taxon deviennent des synonymes. Pour aboutir à ce choix (qui dépend de la classification) un Code
de nomenclature contient un ensemble de règles qui vont pouvoir concerner les noms dans leur forme
(ont-ils été publiés, quand ont-ils été publiés, quels sont les textes associés au nom, quelle est leur
orthographe...) ou dans leur « fond » (sont-ils associés à un échantillon type, ont-ils le même
échantillon-type qu’un autre, quel est le rang correspondant, ont ils la même forme qu’un autre
nom...). D’autres règles concernent les échantillons types (relation avec le nom, citation,
conservation). Un dernier ensemble de règles concerne les publications que ce soit sur la forme
(support utilisé par exemple) ou sur le contenu (présence des certaines informations en plus du nom
...).
Ces règles vont présenter des subtilités en fonction du groupe auquel appartient le taxon, ainsi
certaines règles sont spécifiques aux plantes fossiles, d’autres à certains type de champignons. Les
règles peuvent aussi varier en fonction du rang dans la classification, certaines règles applicables à un
nom de famille ne sont pas applicable en l’état à un nom de variété. Enfin les règles, bien que rétroactives peuvent varier en fonction de la date, par exemple la publication d’un nom réalisée en 1887 ne
nécessite pas de respecter le même format que pour publier un nom en 2007.
Lorsque l’on fait de la nomenclature de plantes sauvages, on peut s’attacher à donner un nom à une
plante qui n’en à jamais eu, et dans ce cas on doit rédiger une publication dont le contenu respecte les
règles du code (par exemple présence d’une diagnose ou d’une description en latin pour les plantes
actuelles, ou présence de l’information sp. nov. après le nom s’il s’agit d’une espèce nouvelle, etc). On
peut aussi changer le nom d’une plante car on considère qu’elle n’appartient pas au genre dans lequel
elle a été placée à l’origine. On parle alors de combinaison nouvelle et dans la publication on doit
noter le nom initial de la plante (que l’on appelle basionyme). Une autre démarche plus pointue
consiste à réviser la nomenclature d’un taxon en désignant l’échantillon type du nom s’il n’a pas été
désigné par l’auteur du nom. Dans le même ordre de complexité il est nécessaire, lorsque l’on fait la
révision d’un groupe, de revoir la rectitude de tous les noms, c’est à dire de vérifier si tous les noms ont
bien été publiés selon les règles applicables à leurs dates respectives, afin de déterminer lesquels sont
potentiellement utilisables.
Des procédures assez complexes existent également si l’on souhaite rejeter un nom car, mis à part par
son auteur d’origine, il a été utilisé pour désigner une autre entité, ou car il est plus ancien qu’un nom
très largement utilisé. Ces procédures, dites de conservation ou de rejet, sont assez lourdes car elles
doivent passer par diverses commissions avant d’être retenues ou refusées par les instances gérant le
CINB.
Pour les plantes cultivées les règles sont beaucoup moins nombreuses en ce qui concerne la pratique
nomenclaturale dans la mesure où il n’y a pas d’échantillon type et que les critères applicables aux
publications (format et contenu) sont beaucoup plus souples, si ce n’est un principe d’enregistrement
des noms qui n’existe pas dans le CINB. On peut aussi noter que la notion de combinaison nouvelle (par
exemple on attribuerait un cultivar à une espèce différente de celle à laquelle l’attribuait son
obtenteur) n’est pas utilisée. Cela réduit les règles de nomenclature des plantes cultivées
essentiellement à des définitions et à des règles de formation des épithètes de cultivar et de groupe, en
particulier pour la translittération (la conversion d’un alphabet comme le cyrillique ou le grec en un
autre comme l’alphabet romain) ou la présence de signes typographiques. De plus, dans la mesure où
le CINPC ne date que des années 50 (auparavant les noms de plantes cultivées étaient pris en compte
par le CINB et publiés sous forme latine), il existe un ensemble de règles qui concernent les épithètes
de cultivar sous forme latine.
On peut aussi noter l’existence dans le CINPC d’une procédure de rejet des noms comme dans le CINB,
mais surtout de ré-utilisation des noms de cultivar si la plante correspondante n’est plus en culture, n’a
que peut été mentionnée dans la littérature, et n’a pas servit de parent à un autre cultivar (entre
autres).
Limites des Codes
Malgré, ou du fait de la complexité des Code de nomenclature, ceux ci peuvent présenter des limites.
C’est rarement en interne à un Code qu’il existe des incohérences, les « problèmes » surviennent
plutôt du fait de la dimension historique de noms et des divergences d’opinions des systématiciens.
Fréquemment la vérification du statut nomenclatural d’un nom n’a jamais été faite ou a été réalisé une
seule fois en un siècle. Ainsi répondre à simple la question « ce nom a t’il été publié de manière
conforme aux règles ? » peut nécessiter des jours de recherche bibliographique à un systématicien et
peut soulever des problèmes qui relèvent du cas exceptionnel, y compris pour une plante courante. Le
faible nombre de systématiciens spécialistes de nomenclature rendant alors encore plus évidentes les
conséquences du travail consciencieux d’un seul d’entre eux. On peut à ce sujet noter que pendant près
de 200 ans (jusqu’en 1930) il n’y a pas eu de règles de nomenclature ou ces règles étaient plus ou
moins différentes d’un continent à l’autre.
Par ailleurs, une très forte proportion des actes les plus visibles de la nomenclature, les changements
de noms, sont indépendant des Codes dans la mesure où ce changement n’est pas lié à une application
plus juste des règles de nomenclature (la publication était invalide ou bien il manquait une diagnose
latine), mais est lié à un choix de classification différent. Et comme évoqué plus haut, si la
classification change, le nom est susceptible de changer, les règles de nomenclature n’étant là que
pour préciser quel nom est a utiliser dans telle ou telle classification. Considérer qu’un taxon est un
hybride ou non est un exemple de choix taxinomique qui se reflète dans le nom. Ainsi, si l’on considère
que le tabac est une espèce on l’appellera Nicotiana tabacum L., par contre si l’on considère qu’il
s’agit d’un hybride le nom s’écrira Nicotiana  tabacum L., le signe multiplier indiquant le choix
taxinomique, mais le nom d’auteur ne changeant pas.
Il est par contre un peu plus fréquent d’avoir des ambiguïtés entre CINB (plantes sauvages) et CINPC
(plantes cultivées). Ainsi le maïs doit-il être considéré comme une plante sauvage ou une plante
cultivée ? La réponse à cette question, ne relève pas uniquement d’une réflexion scientifique mais tient
aussi compte de la culture et des a priori philosophiques de la personne interrogée, conduit à choisir le
Code de nomenclature à utiliser. Si l’on considère qu’il s’agit d’une plante sauvage, le nom est Zea
maïs L., mais si l’on considère qu’il s’agit d’une plante cultivée, il est possible de nommer Zea ‘Maïs’
cette même plante.
D’autre cas compliqués, à l’interface entre les deux Code, concernent les plantes pour lesquelles on a
d’abord connu et nommé la forme horticole, stérile, et ultérieurement on a découvert la forme sauvage.
Avec le CINB le nom le plus ancien à utiliser est celui de la forme sauvage, la forme cultivée devenant
une variété ou une sous-espèce de la forme cultivée. Les cas sont assez rares, mais c’est l’exemple de
Viburnum plicatum, dont la forme sauvage est couramment appellée Viburnum plicatum f. tomentosum
et dont la forme cultivée s’appelle Viburnum plicatum f. plicatum. Par contre d’autres auteurs, utilisant
le CINPC, préfèrent désigner la forme sauvage sous le nom Viburnum plicatum et la forme cultivée sous
le nom Viburnum plicatum ‘Sterile’ (voir même Viburnum plicatum ‘Thunberg’s Original’ pour certains
car c’est Thunberg qui à nommé la plante cultivée le premier).
Un autre exemple d’ambiguïté entre le CINB et le CINPC concerne les plantes prélevées dans la nature
et dont des clones sont cultivés. Le CINPC dit « Les plantes issues du milieu sauvage et mises en
culture et qui ne sont pas par la suite classées comme des cultivars ou des Groupes conservent les
noms qui sont appliqués aux mêmes plantes poussant dans le milieu naturel. » (Article 18.1). Par
contre, pour le même cas, le CINB dit « Les plantes sauvages introduites en culture gardent les noms
qui sont appliqués aux même taxons croissant dans le milieu naturel. ». L’absence de l’information
« qui ne sont pas par la suite classées comme des cultivars » a conduit certains auteurs a renommer
toutes les plantes cultivées issues du milieu sauvage, en particulier si elles n’ont qu’un nom de cultivar
et non pas un nom de taxon infraspécifique. Ainsi le lamier jaune d’ornement et nommé, en conformité
avec le CINPC, Lamium galeobdolon ‘Argenteum’, il n’est connu qu’en culture bien que la plante
d’origine ait été prélevée dans la nature mais d’autres auteurs ont créé, en conformité avec le CINB le
nom Lamium galeobdolon subsp. argenteum.
Dans le même ordre d’idée, les hybrides inter-spécifiques obtenus en culture peuvent être nommés soit
en utilisant le CINB, sous la forme d’un binome latin, soit en utilisant le CINPC, sous la forme d’un nom
de genre suivit d’une épithète que cultivar.
Dans tous ces cas, le nom change ni pour des raisons d’application des règles, ni pour des raisons de
changement de la classification, mais du fait du choix d’un Code ou de l’autre.
Au travers de ce survol de la nomenclature botanique, j’ai souhaité présenter de manière aussi claire
que possible le fonctionnement et les limites des Code de nomenclature. Sans chercher a entrer dans le
détail ni utiliser certains termes complexes de la discipline, il ne faut pas perdre de vue que la
nomenclature, bien qu’elle paraisse généralement imposée et compliquée, est en fait une activité
indispensable et très rigoureuse qui fournit les noms qui nous servent à communiquer. Cependant ce
n’est pas elle qui fait le choix taxinomique, elle ne fait que donner la procédure pour choisir le nom en
fonction du choix taxinomique. Ce dernier évoluant selon les époques, les méthodes et les conceptions
des auteurs.
Références
Candolle A.L.P.P. de 1867. Lois de la nomenclature botanique adoptées par le congrès international de
botanique tenu à Paris en août 1867 suivies d'une deuxième édition de l'introduction historique
et du commentaire qui accompagnaient la rédaction préparatoire présentée au congrès. H.
Georg, Genève et Bale ; J.-B. Baillière et fils, Paris.
Stace C.A. 1994. Plant Taxonomy and Biosystematics. Cambridge University Press, Cambridge, New
York, Melbourne.
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