analyse avec le recul de deux décennies et d’insister particulièrement sur le phénomène
mondialisé du féminisme islamique et sur ses interactions avec le monde musulman et surtout
arabe, dont les penseurs et intellectuelles ont jusqu’ici fort peu fait partie. Et ce, à deux
niveaux. D’une part, des réflexions feront un bilan de son apport intellectuel, de sa réception
et de son influence dans les pays et lieux du monde arabe et musulman. D’autre part, des
analyses proposeront une sociologie de ses actrices (universitaires, intellectuelles mais aussi
prêcheures, quand elles produisent une réflexion textuelle) qui, en ce qui concerne le premier
groupe, travaillent le plus souvent aux États-Unis, en Europe, en Malaisie, en Iran ou encore
en Afrique du Sud, etc.…
Dans le second axe, Militantismes féminin/féministe et enjeux politiques, un certain nombre
de frontières actuelles seront contestées ou questionnées. Celle, par exemple, qui est tracée
entre un féminisme qui serait séculier et un autre qui serait islamique(5). Comment analyser le
fait que dans nombre de mouvements dits séculiers ou même laïcs, les militantes sont
aujourd’hui voilées et pratiquantes ? Que peuvent nous dire les pratiques quotidiennes, les
micro-interactions au sein des mouvements et entre eux sur ce partage entre deux types
supposés antagonistes de mouvements ? On pense aussi à la frontière posée entre différentes
formes de militantisme sachant que les militantismes féministes séculiers ont souvent des
enjeux politiques, sont parfois directement liés à des partis ou à des causes. En ce sens il
convient de considérer avec un prisme similaire au militantisme ce qui se passe au sein de
partis dits islamistes (Hezbollah, Front d’Action Islamique jordanien, Hamas..etc). Surtout,
cela suppose d’avoir une lecture politique de ces formes de féminisme islamique, dans des
contextes d’opposition ou de positionnements sur différentes causes ou enjeux. A partir de
l’observation des pratiques et interactions, on cherchera à comprendre quels sont les enjeux
sociaux, politiques, économiques qui sous-tendent ces modes de contestation des ordres
établis et dans quel champ, à quelles échelles (locale, nationale, régionale, globale) ils se
déploient et empruntent leurs modes de légitimation.
Le troisième axe s’attachera aux Interactions et pratiques féminines dans la sphère religieuse,
parfois dans leurs liens au politique. La référence à la norme religieuse sera déconstruite en se
demandant par exemple à quel projet réformiste elle peut servir : un projet libéral ou bien au
contraire néo-fondamentaliste(6). Peut-on parler de féminisme quand les femmes se réfèrent à
un logos islamique conservateur (néo-fondamentaliste) pour appuyer leurs trajectoires dans la
sphère religieuse notamment ? Quelles sont les limites posées dans ce cadre à leur affirmation
? Pourquoi se saisissent-elles de ces références-là ? Dans quels contextes politiques
nationaux, régionaux ou globaux, mais aussi familiaux ou sociaux le font-elles ? Par ailleurs,
seront aussi considérées les pratiques quotidiennes de femmes sollicitant d’abord un langage
islamique pour servir leurs itinéraires ou choix (féminisme populaire), sans forcément qu’elles
aient un rôle public en ce domaine.
Des résumés de proposition (2000 signes maximun) peuvent être envoyés par courriel à
Stéphanie Latte Abdallah, IREMAM-CNRS : latte@mmsh.univ-aix.fr
avant le 15/09/2008.
Notes:
1 J’utiliserai le seul terme de féminisme islamique dans un sens large tel qu’explicité ci-après, en récusant la
distinction faite par Valentine Moghadam, peu claire à mon sens et génératrice de confusion particulièrement
quand on passe d’une langue à une autre. Elle distingue en effet le féminisme musulman (porté par des femmes
musulmanes) et traduit en anglais par islamic feminism, le féminisme islamique (défendu par des militantes se
revendiquant de l’islam – en anglais, ce serait ici muslim feminism) et le discours des femmes islamistes