Revue des modèles narratifs de Greimas à partir des

Visions de lespace :
Regards croisés
Pensées
vives
2016
Spécial Chine n°1
Tiré à part
Directeurs de publication : Éric LYSØE et WANG Zhan
ISSN 2425-7028
©
Universités de Wuhan et de Clermont-Auvergne, avril 2016.
Les auteurs sont les seuls responsables des textes qu’ils ont signés. À
l’exception des citations, dûment référencées, aucune reproduction n’est
autorisée sans leur consentement explicite.
Revue des modèles narratifs de Greimas
à partir des contes fantastiques chinois
ZHANG Lu
Université de Wuhan et INALCO
Université des Études étrangères du Guangdong
ors de la deuxième moitié du XX
e
siècle, la sémiotique,
et surtout dans le contexte de notre recherche, celui de
l’analyse narrative et discursive du texte, a connu,
d’abord en France et en Italie, puis aux États-Unis et dans le monde
anglo-saxon, nombre de progrès tant dans sa modélisation théo
-
rique que dans son application aux textes de tous genres. Son repré
-
sentant en France est sans conteste Algirdas Julien Greimas, fonda
-
teur de la sémiotique française.
À
la différence des critiques
traditionnelles qui s’appuient sur des approches historiques, cultu
-
relles, ou littéraires, souvent imprégnées d’idéologie, Greimas ac
-
corde une place privilégiée aux conditions internes de la significa
-
tion du texte
:
L
Il ne s’agit pas donc de restituer pour un texte sa genèse, son his
-
toire. L’auteur du texte, l’époque de sa fabrication, les besoins
438
auxquels il devait répondre, n’intéressent pas directement le
-
mioticien.1
Il cherche à élaborer une grammaire narrative, c’est-à-dire une
-
rie de formes universelles organisant la narration. Dès la Séman
-
tique structurale, publiée en 1966, jusqu’à son article très connu
intitulé « Éléments d’une grammaire narrative » paru d’abord dans
la revue L’Homme en 1969 puis recueilli dans son essai sémiotique
Du sens I en 1970, il s’efforce de construire une théorie de la nar
-
rativité qui pourrait justifier et fonder l’analyse narrative comme
un domaine de recherche méthodologiquement autosuffisant. Dans
son parcours de recherche sémiotique, il a aussi créé une série de
modèles théoriques, par exemple, le schéma narratif canonique, le
modèle actantiel, et le carré sémiotique, qui se donnent pour but la
formalisation du mécanisme narratif et l’examen des racines du
sens. Ces modèles théoriques deviennent un outil efficace d’ana
-
lyse du texte et se trouvent ainsi mis en application dans la critique
littéraire.
Pourtant, les modèles sémiotiques de Greimas ne sont pas
applicables à tous les types de textes. Il existe dans cette théorie
une série d’éléments inadaptables aux corpus littéraires issus de
cultures différentes. Comme l’a montré Nijolé
K
ersyté
:
Greimas, au début de ses recherches, visait à créer une grammaire
narrative universelle conçue comme un dispositif d’analyse neutre
du point de vue idéologique. Pourtant, l’univers narratif qu’il pré
-
tend décrire n’est pas neutre. La grammaire narrative construit des
1 Groupe d’Entrevernes, Analyse sémiotique des textes : introduction, théorie, pratique,
Lyon, Presses Universitaires de Lyon, 1985, p. 7.
439
modèles d’interaction qui présupposent une certaine
"
ontologie
"
,
c’est-à-dire certains genres d’expériences, certains types de vision
existentielle, certaines conceptions des rapports du sujet aux objets
du monde et aux autres sujets.1
Donc la prudence s’impose quand on applique les modèles sémio
-
tiques de Greimas à des corpus venus d’autres civilisations. C’est
aussi la raison pour laquelle nous avons rencontré une série de dif
-
ficultés en employant ces modèles greimassiens dans l’analyse des
textes chinois. Notre article se concentre donc sur l’enjeu culturel
des modèles sémiotiques de Greimas à partir d’extraits d’une
œuvre classique chinoise : Sou shen ji (ou
À
la recherche des es
-
prits), un recueil de contes fantastiques composé par Gan Bao, his
-
torien et lettré très réputé sous la Dynastie Dong Jin. Notre regard
se portera sur trois contes représentatifs qui relatent des histoires
entre les hommes et les dieux. Nous essayerons, à la lumière des
analyses textuelles, de dégager quels sont les éléments inappli
-
cables à un texte chinois dans les modèles narratifs de Greimas et
d’où ils proviennent. Avant d’effectuer des analyses sur les contes
fantastiques chinois, nous considérons qu’il est nécessaire de pré
-
senter brièvement les deux modèles les plus importants de Grei
-
mas au point de part de notre réflexion, pour faciliter la suite de
notre argumentation.
1 Nijolé
K
ersyté, « La sémiotique d’A. J. Greimas entre logocentrisme et pensée phéno
-
ménologique », Actes sémiotiques, 112, 2009, http://epublications.unilim.fr/revues/
as/2870, consulté le 20 décembre 2015.
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