LABORATOIRE DE
RECHERCHES PHILOSOPHIQUES
SUR LES LOGIQUES DE L’AGIR - EA 2274
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Ateliers Thématiques en Philosophie des Sciences Sociales
Besançon, 28 Avril 2010
Choses, objets, artefacts : le matériel et le social
Que l’on pense la société comme un tout supra-individuel ou bien comme une
collection d’individus – pour reprendre l’opposition classique – on ne quitte jamais le
domaine de l’homme, de ce qui le met en relation avec ses semblables, de ce qui résulte de
cette multitude. Or, si derrière « social » nous lisons d’abord « humain », il paraît de plus en
plus accepté qu’en analysant les phénomènes sociaux, on ne peut pas oublier la présence des
objets. L’attention qui leur est accordée n’est certainement pas une particularité des
recherches les plus contemporaines, il suffit de penser à l’importance prêtée au matériel par
les études d’inspiration marxiste, ou bien encore au constructivisme sociologique entrant en
scène dans les années 1970. La forte « promotion sociale » des objets est toutefois un fait
récent. Cette tendance doit beaucoup à la sociologie des sciences et des techniques qui a tout
particulièrement travaillé la question de la place que les objets occuppent dans ce qu’elle
appelle les réseaux « socio-techniques ». L’enjeu de ce type de recherche est tout sauf local.
Ainsi l’anthropologie symétrique de Bruno Latour, qui s’inscrit dans ce courant de pensée,
s’appuie sur un geste doublement radical : non seulement Latour réintègre les non-humains
dans les réseaux sociaux en leur attribuant un rôle actif, mais son ambition est également de
rendre compte de la manière dont nous procédons à cette séparation entre choses-en-soi et
hommes-entre-eux, entre le monde naturel et le monde social. Ce sont les fondements mêmes
de la sociologie qui en sortent repensés.
Choses, objets, artefacts – ce sont les définitions de ces différents concepts qu’il
faudra élaborer, sans oublier de s’interroger sur le rôle qu’il convient d’accorder à la notion de
« matérialité » qui nous sert spontanément de critère de reconnaissance : celui-ci est-il à la
fois nécessaire et suffisant pour penser la nature des objets et la place qu’ils occupent dans la
société ? Rien n’est moins sûr : dans le prolongement de la théorie du don (Mauss) et des
descriptions ethnographiques des échanges cycliques (Malinowski), les études sur « la vie
sociale des choses » (Appadurai) essaient de repenser les interactions entre humains et objets
en tant que ces derniers renferment une valeur (marchande ou autre) liée, entre autres, à ce
que l’on peut appeler leur « biographie ». Il ne faut pas sous-estimer les conséquences de ce
point de vue, qui peut conduire jusqu’à une sorte de dématérialisation des objets, ceux-ci
devenant un pur support de communication et d’échange (pensons ainsi à Baudrillard qui
parlait des objets-signes). Du problème de la place des objets dans la société, notre attention