CONFÉRENCE EPISCOPALE ITALIENNE Commission épiscopale pour l’éducation catholique, l’école et l’université Bureau National pour l’Education, l’Ecole et l’Université Bureau National pour le Projet Culturel en collaboration avec LE CONSEIL DES CONFERENCES EPISCOPALES EUROPEENNES (C.C.E.E.) LA COMMISSION DES EPISCOPATS DE LA COMMUNAUTE EUROPEENNE (COM.E.CE.) SYMPOSIUM EUROPEEN LES DEFIS DE L’EDUCATION Revalorisation, promesses, engagements INSTRUMENT DE TRAVAIL LES MOTIVATIONS DU SYMPOSIUM 1. Réfléchir sur le thème de l’education devient de plus en plus urgent La nécessité de considérer la question de l’éducation comme une question prioritaire s’impose de plus en plus. Les conditions dans lesquelles se déroule l’existence des individus et des communautés est en train de changer profondément en Europe. Tous les rapports internationaux, qu’ils soient sur le plan mondial (Unesco) ou sur le plan européen (UE) soulignent que le système de l’instruction et de la formation des pays industrialisés a radicalement évolué par rapport à ses fonctions traditionnelles. Ces sociétés sont devenues des sociétés du savoir (1) certes, mais également des sociétés où règnent la complexité, le pluralisme multiculturel, la mondialisation et la globalisation. Il convient toutefois d’examiner la question plus à fond, ne pas se limiter aux programmes du système scolaire et de formation mais s’interroger sur l’éducation elle-même. De nombreux événements de la vie quotidienne dénoncent avec clarté l’existence d’une situation dramatique de carence de normes pédagogiques inhérentes aux qualités morales et éducatrices de notre civilisation. Il s’agit en outre de faire une recherche sur l’éducation dans le contexte des défis et des perspectives de la modernité et de la transition culturelle en cours. Aujourd’hui, s’investir dans l’éducation, même sur le plan pastoral est devenu indispensable. Il faut le faire dans le respect d’orientations clairement définies par rapport aux objectifs escomptés, aux valeurs à promouvoir et aux protagonistes à soutenir. 2. Le système scolaire ne suffit pas. Il faut créer un réseau entre l’école, le territoire, l’Eglise locale, la famille Même si la pointe de l’iceberg la plus visible est le système scolaire ou la formation en général, il est clair que nous devons envisager un horizon plus vaste qui concerne la qualité de la vie humaine, dans son acception originelle, à la fois naturelle et rachetée. Nous pourrons de la sorte éviter de recourir à des notions cognitives ou technologiques qui sont utilisées de manière répétitive mais qui démontrent avoir toujours moins de prise sur la manière dont les individus et les groupes, perçoivent les choses, pensent et agissent. Il s’agit dès lors d’examiner les racines du problème pour découvrir ou redécouvrir le cas échéant, des pistes pour un engagement clair en matière d’éducation. Passer de la réalité scolaire au besoin d’éducation dans son sens large permet alors d’envisager un horizon plus vaste, enrichi déjà par l’expérience scolaire institutionnelle. Il faut savoir intercepter les nombreux signes de malaise que le monde des jeunes nous manifeste. Il faut repenser les modalités d’une présence adulte significative tant à l’école que dans la société. Les jeunes ont besoin d’un réseau de soutien, où personnes et institutions peuvent dialoguer et interagir (les différents mondes : famille, associations, paroisses, organisations locales…). Le Symposium souhaite approfondir le concept d’éducation afin d’arriver à mettre en réseau la totalité du système éducatif: Formel (les parcours de l’instruction et de la formation). Non formel (la famille, les associations, la paroisse….) Informel (les mass media). 3. Une rencontre européenne sur l’éducation, ouverte au dialogue et à la collaboration des chercheurs et autres agents du secteur Dans le cadre des politiques en matière d’éducation promulguées au cours des cinq dernières années par la Commission de l’Union Européenne, ce Symposium souhaite offrir aux chercheurs et aux participants engagés dans ce secteur l’occasion d’échanger leurs points de vue. Cette initiative souhaite attirer l’attention des participants sur certains thèmes urgents et cruciaux pour l’éducation et de préciser ceux d’entre eux qui devraient faire l’objet d’une stratégie prioritaire. 4. Le défi de l’éducation à la lumière de l’anthropologie chrétienne. La contribution des Eglises européennes dans ce domaine L’initiative réalisée en collaboration avec le Conseil des Conférences Episcopales Européennes (CCEE) et avec la Commission des Episcopats de la Communauté Européenne (COM.E.C.E.)veut également offrir l’occasion de se confronter sur ces questions avec les agents de la pastorale en tenant compte des politiques européennes en la matière. Il s’agit de poursuivre le cheminement entrepris par les Conférences Episcopales Européennes et de relever les défis posés par l’éducation à la lumière d’une anthropologie chrétienne et dans la perspective d’une action pastorale basée sur le dialogue et la présence dans le monde de l’éducation. CONTENUS ET OBJECTIFS GENERAUX DU SYMPOSIUM Le Symposium veut approfondir quatre thèmes ou priorités représentant les défis plus significatifs pour les personnes, l’éducation et la réflexion pédagogique: a) La manipulation, l’artificiel, l’éducation b) La construction de l’identité et l’éducation c) L’économie, le travail, l’éducation d) L’interculturalité et l’éducation Chaque thème sera introduit par une brève présentation ou contribution initiale pour lancer et orienter les travaux du Symposium. Les objectifs généraux du Symposium sont les suivants: Mettre en évidence les nouvelles instances en matière d’éducation et de pédagogie (les défis à l’éducation); Préciser les références idéales et anthropologiques de base (des défis lancés à l’éducation au défi de l’éducation); Cerner les fondements humanistes sur lesquels devraient se baser les stratégies formatrices européennes, en particulier pour ce qui concerne les relations entre l’école, la famille et la société; Permettre une confrontation sur la manière de combiner la dimension formelle, non formelle et informelle de l’éducation, en faisant particulièrement mention des relations qui existent entre l’école, la famille et l’Eglise locale; Discerner et reformuler les principes et les critères de l’action éducatrice des Eglises locales européennes (comme la nouvelle évangélisation et l’inculturation de la foi au service d’une nouvelle perspective humaniste). PEDAGOGIE DU SYMPOSIUM 1. Présentation du thème A. Chaque thème sera introduit par une brève présentation dans le but de poser les questions, situer les problématiques et orienter le débat. B. Chaque thème est considéré: A la fois comme un défi et un appel à une nouvelle humanisation face aux politiques d’éducation de la Communauté Européenne. Comme un lieu d’inculturation de la foi qui engage les communautés ecclésiales à renouveler leur manière d’annoncer le message pour qu’il soit source d’espérance et un soutien pour tous ceux qui travaillent dans ce secteur. 2. Conditions principales Il faudra répondre aux questions suivantes pour chacun des thèmes: 1. Quels sont les nouveaux défis (menaces et ressources) pour la personne et pour l’éducation? 2. Quelles réflexions et quelles instances nouvelles dans l’optique de l’anthropologie et de l’anthropologie chrétienne? 3. Quelles sont les conséquences des questions et problématiques du n. 1 pour la réflexion pédagogique et donc pour la théologie de l’éducation? 4. Quelles réflexions pour la famille, l’école et les médias? 5. Comment combiner les itinéraires de l’instruction formelle, non formelle et informelle? 6. Quels engagements et perspectives pastorales pour les Eglises d’Europe? 3. Le débat Il prendra la forme d’une confrontation entre: Chercheurs/experts des sciences humaines et de l’éducation; Hommes et femmes de culture, à titre individuel ou en tant que représentants de Fondations ou de Centres de recherche européens; Représentants institutionnels du monde de l’éducation, catholiques et laïcs; Membres du corps enseignant de l’école secondaire et des instituts de formation professionnelle; Parents, à titre individuel ou en tant que représentants des associations de parents; Responsables et agents de la pastorale de l’éducation, de l’instruction, de la catéchèse, de l’école des 34 Conférences épiscopales européennes ayant représentation auprès de la CCEE. 4. Recueil des interventions Les interventions seront recueillies et contribueront à l’élaboration d’une «Synthèse du Symposium» contenant les questions et les stratégies en vue d’un engagement commun des Eglises locales européennes dans le monde de l’éducation. Cette synthèse pourra favoriser la réflexion et la progression commune des Eglises européennes dans ce secteur. LES QUESTIONS Ier Thème: La manipulation, l’artificiel, l’éducation Le cadre pris en considération concerne les développements et les résultats de la recherche scientifique et des applications technologiques dans deux secteurs d’importance cruciale : l’ingénierie génétique et la biotechnologie d’une part, et, les technologies informatiques de pointe et l’intelligence artificielle de l’autre. Le fait qui rapproche ces deux secteurs est celui du rapport difficile et contrasté qui existe entre ‘nature’ et ‘technique’ et donc entre ‘originalité’ et ‘artificialité’. De quelle manière l’éducation se situe-t-elle comme élément de valorisation et d’équilibre pour une vision scientifique et humaniste correcte? Comment peut-elle donner les bases d’une perspective pédagogique solide? La position de celui qui affirme que la science n’est ni bonne ni mauvaise en soi mais bien l’usage qu’on en fait, n’est certes pas neuve. La question des nouvelles technologies réitère cette position. Une des grandes dérives de la mentalité moderne et post-moderne est de séparer nettement la compétence professionnelle de la connaissance éthique. Il s’ensuit que la première est soustraite à la responsabilité humaine et la deuxième est reléguée au monde abstrait des valeurs qui n’ont pas d’incidence significative sur la vie réelle. D’autre part on ne peut légitimer la position de qui considère l’éthique comme un frein aux progrès scientifiques et technologiques et la morale comme un obstacle au progrès. L’école, les contextes parascolaires (en commençant par la famille) et les médias sont sous tension et sous le feu d’indications, d’interprétations et d’évaluations contradictoires qui ne facilitent pas la conception d’un itinéraire respectueux à la fois des progrès et des conquêtes du savoir et de la technique tout en sauvegardant les messages de la sagesse et le respect des caractères profonds de la nature dans l’acception chrétienne du terme. Devant quelles implications se trouve l’anthropologie chrétienne pour situer ce thème comme «lieu d’inculturation de la foi» et comme «un défi et un appel pour une nouvelle humanisation»? IIème Thème: La construction de l’identité Si on considère l’étape de l’adolescence, quelques constatations s’imposent: La diffusion de manifestations violentes du corps pour se construire «une corporéité inventée» au détriment d’une corporéité naturelle; La difficulté de croire dans la possibilité de réaliser un projet personnel et le refus de se fixer un tel projet par crainte d’entraver soi-même sa réalisation; Un désarroi diffus par rapport aux valeurs qui s’exprime en recourant aux valeurs affectives et relationnelles plus qu’aux valeurs éthiques; L’ambivalence par rapport au rejet et à la nostalgie de l’autorité. Les questions suivantes se posent par rapport au thème de la construction de l’identité: Quels sont les aspects qu’une préoccupation pédagogique correcte doit considérer et prendre en compte dans les différents contextes éducatifs en commençant par la famille et par l’école? Quels sont les appels ou les ‘dons’ que de telles constations apportent à l’éducation? L’école, les instances extrascolaires (en commençant par la famille) et les medias sont soumis de nos jours à des tensions, des polarisations, des interprétations et des valorisations divergentes qui ne facilitent pas la construction d’un itinéraire et d’un réseau de collaboration, respectueux des libertés personnelles et capables de contribuer à l’élaboration d’un projet de vie et d’une vocation. IIIème Thème: L’économie, le travail, l’éducation Dans les pays industrialisés, les scénarios dans lesquels se déroulent la vie des personnes et des communautés connaissent des grands changements (internationalisation des entreprises et mondialisation du marché; croissance impressionnante du développement scientifique et technologique, marqué par l’informatique et la télématique; nouvelle conscience aiguë des droits humains, subjectifs, communautaires, écologiques; pluralisme et multiculturalisme des modes de vie et de la culture; sécularisation diffuse et nouvelles formes de religiosité comme par exemple le new age, le next age, les sectes, l’ésotérisme; un plus grand assouvissement des aspirations et des besoins subjectifs par rapport aux grandes confessions religieuses institutionnelles et traditionnelles). On affirme que la compétitivité de l’économie, de même que l’emploi et l’épanouissement personnel des citoyens européens ne se basent plus ni ne se baseront plus principalement sur la production de biens matériels. La vraie richesse est maintenant liée à la production et à la diffusion des connaissances et dépendra en grande partie des résultats acquis dans le domaine de la recherche, de l’instruction et de la formation outre à la capacité de promouvoir l’information. Les mutations en cours ont de lourdes répercussions sur l’instruction et la formation qui exigent dès lors des réformes incisives. Le Livre Blanc propose cinq finalités incontournables pour l’école et la formation en Europe: Encourager l’acquisition de nouvelles connaissances Rapprocher l’école de l’entreprise Lutter contre l’exclusion Promouvoir la connaissance de trois langues de l’Union Européenne Investir autant dans la formation que dans le matériel (Cresson et Flynn 1996) Ce document réitère, en les développant, les tendances au niveau européen: La politique d’alternance école-travail qui dépasse le modèle centré sur l’école; L’introduction de systèmes intégrant l’école, la formation, les entreprises, le territoire, les instances éducatrices des communautés locales, la politique nationale et internationale en matière d’éducation; Le développement de la formation continue après et simultanément à une instruction de base, avec la possibilité de se qualifier dans et parallèlement à l’école secondaire et avec des opportunités de spécialisation après le secondaire; Le rapport de la formation avec les politiques locales, nationales et internationales de développement. Comment dépasser le simple niveau de préparation au travail, de spécialisation ou de recyclage professionnel? Comment aller au-delà de la perspective cognitive et technologique prépondérante qui, a peut-être été trop soulignée dans les affirmations du Livre Blanc? Comment respecter les fondements de l’action éducatrice souhaitant cultiver des ambitions qui dépassent le cadre d’une perspective utilitariste? Comment permettre à la personne de s’épanouir, d’atteindre les plus hauts niveaux d’instruction exigés par ce nouveau scénario compétitif et offrir à tous les moyens de s’insérer dans la société? IVème Thème: l’interculturalité et l’éducation La problématique liée au facteur de la pluriculturalité n’est certes pas l’apanage exclusif de la société contemporaine. A notre époque toutefois, ce phénomène présente des caractéristiques particulières et problématiques (une plus grande diffusion, une accentuation plus marquée des facteurs ethniques et identitaires) et se situe dans un contexte inédit pour de nombreux aspects (mobilité, mondialisation, homogénéisation). La société moderne, déjà ébranlée au cours de la dernière partie du vingtième siècle par une déclination introvertie de la soi-disant postmodernité est remise rapidement en discussion par un phénomène migratoire d’envergure croissante. Les frontières nationales démontrent leur incapacité flagrante à maîtriser l’accroissement exponentiel des flux migratoires. D’autre part, au moment même où les frontières se dilatent elles se rétrécissent aussitôt pour répondre aux exigences d’un groupe ethnique donné (glocalisation). Tout ceci a lieu alors que la civilisation occidentale traverse des mutations profondes. Incertitude personnelle (vide métaphysique); homogénéisation culturelle (prométhéisme tecno pratique), fragmentation éthique; (aphasie sur la vérité), mélange des mœurs (incertitude socioculturelle). Très rapidement ce malaise existentiel profond, lié au fait de se mouvoir sur des sables mouvants, rebondit dangereusement: soit il implose dans une dissension intérieure ou il explose dans une protestation sociale. C’est le vide et non plus l’idéal ou l’idéologie qui sert de catalyseur avec tous les faits divers qui en résultent: ‘forte’ appartenance, identification ‘aveugle’, identité contre (négative, comme un non-être, ou plus durement encore, un être contre). Il s’ensuit une situation de désarroi (des semblables qui se reconnaissent mais qui ne se connaissent pas), de dépaysement (un univers peuplé d’enseignes et de signaux mais vide de symboles) de vide (un univers riche de moyens mais sans but). Une homogénéisation culturelle croissante avec ses caractéristiques monotypiques et atypiques : la vie éclatée tend à se vivre de manière épisodique, comme une succession d’événements sans lien les uns avec les autres. L’insécurité est un moment où l’être se divise en fragments et la vie en épisodes. Cet ensemble de faits, esquissés rapidement, interpelle la conscience du croyant: que demande la foi en Jésus, l’unique Rédempteur face à une présence culturelle et religieuse multiple? Comment concilier le commandement de l’amour sans mesure et sans exclusion avec l’exigence de sauvegarder et d’exprimer à fond sa conviction de foi chrétienne? On pourrait dire la même chose par rapport à de nombreuses problématiques débattues de nos jours dans nos communautés ecclésiales. Pensons par exemple à la réflexion en cours sur le renouvellement des paroisses. Il s’agit de trouver le fil conducteur pour garantir la continuité du processus de la foi traditionnelle dans les mutations culturelles qui caractérisent notre époque. Il ne s’agit donc pas de s’incliner devant la fragmentation de l’expérience religieuse, mais d’être conscient que celle-ci est pleinement humaine quand elle devient une expérience partagée en société, significative aux yeux de l’histoire et insérée dans la vie des peuples. Le thème de l’interculturalité exigerait un échange sur quelques notions ou contenus préliminaires. 1. Comment - dans la culture - l’homme vit-il son universalité (l’homme ressemble à tous les autres hommes), ses particularités (l’homme ne ressemble qu’à quelques autres hommes), l’homme ne ressemble à aucun autre homme (son unicité ne permettant pas la répétition) ? 2. Où l’homme s’inculture-t-il (famille, groupes humains avec lesquels il entre en relation, territoire où il vit, itinéraires éducatifs, influences de l’environnement)? 3. Comment faut-il comprendre la relation et le dialogue entre les cultures (c’est le sens de la préposition ‘inter’) et entre les cultures: relations dont l’homme seul est le médiateur? 4. Quels sont les obstacles, les limites, les conditions du dialogue (subjectifs et objectifs)? 5. Pourquoi l’éducation formelle à une approche interculturelle est-elle indispensable de nos jours également pour l’enseignement religieux? 6. Comment l’éducation interculturelle se fait-elle (par la transmission de quelles connaissances et en favorisant quelles attitudes et capacités)?