Richard Strauss (1864

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Richard Strauss (1864 - 1949)
Opéra en un prologue et un acte, opus 60
Livret d'Hugo von Hofmannsthal
Composition : 1911-1912 et 1916
Création de la 1e version : Stuttgart, Neues Königliches Hoftheater, le 25 octobre 1912
Création de la 2e version : Vienne, Hofoper, le 4 octobre 1916
Le livret
Le Prologue
Le théâtre privé d’un palais viennois, au XVIIIe siècle.
Dans la maison de l’homme le plus riche de Vienne, se prépare la première représentation de l’opéra
Ariane à Naxos, œuvre d’un jeune compositeur.
Ce dernier apprend que son opéra sera suivi d’une comédie chantée et dansée. Une discussion s’en
suit afin de déterminer dans quel ordre passeront les deux pièces. Juste avant le début de la
représentation, le maître de céans veut que l’opéra et la comédie soient représentés simultanément
pour permettre au feu d’artifice d’être tiré à l’heure. Comme il reste peu de temps, il faut réagir
promptement et improviser, ce qui est la spécialité de Zerbinette.
Le compositeur estime que le pragmatisme l’emporte sur son idéal; ainsi a-t-on décidé de couper les
passages trop longs de l’opéra Ariane. La prima donna et le ténor rivalisent et en profitent pour inciter,
chacun de leur côté, le maître de musique à supprimer les airs de l’autre. Pris sous le charme de
Zerbinette, le compositeur finit par se résigner et accepte la tournure des événements, même si cela
lui paraît trahir l’art sacré de la musique, avant de se retirer.
L'opéra
Dans l’île de Naxos.
Ariane a été abandonnée dans une île déserte par son bien-aimé Thésée, qu’elle avait aidé à
s’échapper du labyrinthe du Minotaure.
Elle chante longuement sa misère et son malheur et aspire à rejoindre le royaume des morts.
Zerbinette ordonne à Arlequin et à ses compagnons de distraire Ariane avec des chants et des
danses. Ariane n’y réagit pas. Zerbinette essaie de la convaincre de prendre un nouveau compagnon.
Ariane, silencieuse, se retire dans sa grotte.
On annonce l’arrivée de Bacchus, qui vient d’échapper aux enchantements de la magicienne Circé.
Ariane croit d’abord au retour de Thésée, ensuite à l’arrivée d’Hermès, venu l’emporter dans le
royaume des morts.
Bacchus, de son côté, se croit à nouveau victime de sortilèges. Mais bientôt, Ariane et Bacchus
découvrent leur amour et s’élèvent vers la félicité éternelle.
La partition
« Noble ou trivial ? Grave ou léger ? Si le réel ne se prive pas de faire coexister les « genres
», l'opéra, lui, a souvent séparé le « sérieux » de la « vis comica Or, voici que nous nous
sommes laissés séduire par les faux-semblants de l'esthétique baroque. Le sujet ? Tout
entier dans cette tension qui oppose le sublime - incarné par la figure d'Ariane - à l'art des
saltimbanques italiens tenu pour dédaignable. Tantôt, c'est une déesse qui pleure notre
condition, tantôt c'est la très humaine Zerbinette qui en rit. D'un côté, Scaramouche,
Arlequin... De l'autre, l'art majuscule, et son ambition philosophique.
Autant de partages des rôles qui ne vont pas sans surprises. » Texte de Richard Strauss
cité par Antoine Goléa.
Ariane à Naxos a connu de nombreux avatars. Une première version, créée à Stuttgart, s’incorpore à
la représentation du Bourgeois gentilhomme de Molière.
Elle remplaçait la cérémonie turque prévue par Lully.
La seconde version, celle qui nous concerne, est une version entièrement lyrique.
Une troisième version pour grand orchestre est la plus jouée en Allemagne.
Enfin une version dite « mozartienne » ; c’est celle présentée à Toulon dans la mise en scène de
Mireille Laroche
La référence à Molière a complètement disparu. À la place, Hugo von Hofmannsthal crée un prologue
placé dans un palais viennois du XVIIIe siècle, permettant une description critique du système social
de l’époque.
La deuxième partie d’Ariane à Naxos est tout à la fois un opéra à numéro et un pastiche de l’opéra
seria.
La succession des scènes y est déterminée par une structure musicale.
Dans le prologue, par contre, le théâtre domine, avec un échange de répliques rapides, dans un style
récitatif très nerveux avec des échappatoires vers des arioso plus lyriques.
Après les orgies sonores d’Elektra et de Salomé, Strauss tisse, dans Ariane à Naxos, un tapis
orchestral au dessin transparent et aux couleurs envoûtantes.
Discographie
Sept versions sous notre regard critique (pour avoir la discographie complète, cliquez ici) et,
contrairement à la légende qui veut qu’une version ne soit de référence que si l’enregistrement a été
réalisé au temps de la télévision en noir et blanc, deux versions récentes font notre bonheur.
Deux autres appartiennent aux temps légendaires du team Walter Legge chez EMI et du Festival de
Salzbourg. Karajan (référence Médiathèque : ES7711) possède un plateau vocal de rêve dont le
premier miracle est la capacité de ses fortes personnalités (Streich ! Schwarzkopf ! ! Seefried ! ! !) à se
fondre dans une équipe. Bœhm, dans l’enregistrement public issu des archives de la radio
autrichienne (ES7719), nous comble par sa vivacité; ajoutez à cela des chanteurs déchaînés tels que
Della Casa, Schock, Neugebauer, Seefried, Güden, et vous aurez un plaisir sans nom, à condition de
supporter un son étriqué.
Les amateurs de technique moderne d'enregistrement se délecteront de l’enregistrement de Kurt
Masur à la tête de son orchestre du Gewandhaus de Leipzig (ES7717) : d’une part, grâce à
l’extraordinaire équilibre des timbres et surtout des couleurs orchestrales sombres qui entourent la
somptueuse voix de Jessye Norman dans le rôle d’Ariane; d’autre part, grâce à l’éclat de Varady et la
virtuosité éblouissante de Gruberova.
Kempe, par ailleurs chef straussien de grande valeur, est passé à côté de son Ariadne, principalement
à cause d’une distribution trop sage, sans réel engagement, à l’exception d’une admirable Gundula
Janowitz (ES7713).
Solti, aurait lui aussi pu mieux réussir son Ariane; à son avantage, une direction incandescente mais
toujours très claire dans la polyphonie, une Troyanos dans une vision très originale du rôle du
compositeur, la stature de Gruberova ; à son désavantage, le couple Ariane et Bacchus qui aurait dû
être distribué à d’autres chanteurs que Leontine Price et René Kollo (ES7715). La version dirigée par
Levine (ES7716) illustre bien les errements d’une production “ Canada Dry ”.
C’est bien chanté, bien dirigé, mais il y manque l’essentiel : l’âme.
Peu de temps avant sa mort, Sinopoli a signé une passionnante intégrale. Les interprétations du chef
italien ont toujours fait l'objet de controverses infinies, cette Ariadne n'y échappe pas. La distribution
recèle des trésors avec le compositeur d'Anne Sofie Von Otter, la prodigieuse Zerbinette de Nathalie
Dessay et le couple Ariane et Bacchus de Deborah Voigt et Ben Heppner (ES7723).
Bibliographie
BANOUN, Bernard, L'Opéra selon Richard Strauss, un théâtre et son temps, Fayard, 2000
GOLEA, Antoine, Richard Strauss, Flammarion, 1965
JAMEUX, Dominique, L'Ecole de Vienne, Fayard, 2002
JAMEUX, Dominique, Richard Strauss, Collection "Solfèges", Le Seuil, 1971
KENNEDY, Michael, Richard Strauss, Fayard, 2001
ROSTAND, Claude, Richard Strauss, Seghers, 1964
TUBEUF, André, Richard Strauss ou le voyageur et son ombre, Albin Michel, 1980
STRAUSS, Richard & HOFMANNSTHAL, Hugo von, Correspondance 1900 - 1929, Fayard,
1992
Liens
L'Avant-scène Opéra a consacré son n° 77 (juillet 1985) à Ariane à Naxos
 http://www.asopera.com
Le site de la Richard Strauss Gesellschaft
 http://www.richard-strauss.com/
Une page de ressources en anglais, avec quelques curiosités
 The Richard Strauss Page
 Un article de Glenn Gould sur Richard Strauss
Représentations dans le monde
 http://www.operabase.com/
 http://membres.lycos.fr/juteauf/compositeurs/disco_richard_strauss.htm
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