1
L’Islam au XXe siècle - (Cours du 4 avril 2006)
Je ne rédige pas mes cours, il s’agit donc ici d’un ensemble de notes un
peu « améliorées » pour être plus compréhensibles par vous, mais je n’ai
pas rédigé l’ensemble. Je me tiens à votre disposition pour toute
précision.
Rappel du plan :
L’Islam au XXe siècle
Introduction
- Rappels
- Des changements dans les années 1970
1) L’Islam à la fin du XIXe s. :
a) Un monde de plus en plus dominé
b) Les tentatives de réforme de l’islam
c) La tentation de l’Occident]
d) Les désillusions de la modernisation et le refus de l’Occident (suite) :
PRECISION :
intégriste ou fondamentaliste, qui souhaite « rendre à la religion toute sa place, la 1e place, dans la vie
de la collectivité », dit Marcel GAUCHET, dans « Qu’est-ce que l’intégrisme ? », L’Histoire, 224,
sept 1998, p. 34)
= intégrisme : Attitude, opinion de ceux qui souhaitent maintenir dans son intégrité, sans qu’il évolue,
un système doctrinal (et particulièrement religieux) donné.
Minoritaire dans le catholicisme (rejette conclusion de Vatican II)
= fondamentalisme (mouvement en faveur d’un retour aux fondements de la religion) < refus de
l’emprise occidentale
En Pays musulman, le « fondamentalisme » est nettement plus puissant et se traduit notamment par une
réislamisation dans les années 1970
Les courants activistes de « révolution islamique » profitent, des carences graves de la pensée
musulmane héritée du mouvement réformiste trop timide.
C’est pour cette raison qu’on parle souvent de retour de l’Islam depuis une trentaine d’années
2) Le retour de l’Islam depuis les années 1970
= avant années 1970, configuration politique dominante, dans l’Islam se résumait ainsi : un pouvoir de
fait (sultan, roi, émir), légitimé par le corps des oulémas (docteurs de la loi) et régnant sur une société
régie par un droit mêlant charia et droit coutumier, et s’appuyant sur une légitimité nationale et
modernisatrice => prédominance de l’élément laïque
= qu’il s’agisse, pour le XXe siècle, d’un Etat résultant des luttes d’indépendances (Indonésie, Tunisie,
Algérie, Sud-Yémen, Bangladesh, Palestine) ou des luttes anti-impérialistes (Turquie avec Atatürk,
Égypte avec Nasser), ou encore d’un nationalisme socialiste (Nord-Yémen, régimes baassistes d’Irak et
2
de Syrie), ou encore d’une modernisation autoritaire (Iran du chah) : la légitimité politique après la
décolonisation ne se définit pas par rapport à l’islam.
= au contraire depuis années 1970, émerge le problème de la relation entre Etat/ politique et
Islam/religion
Déjà dans la période qui précède, une minorité de pays musulmans, les monarchies traditionnelles
(Maroc, Arabie Saoudite) et les émirats du Golfe appuient leur légitimité sur des éléments religieux
CEPENDANT, jusqu’au début des années 1970, le religieux est soumis au politique (ces monarchies se
présentaient comme le meilleur rempart de l’islam).
Les monarchies comme l’Iran, Irak, Libye et Égypte se trouvent confrontées, dans les années 1950, à
des mouvements provenant essentiellement de la gauche nationaliste et non de fondamentalistes
islamiques
Le seul État créé sur sa spécificité musulmane : le Pakistan (1947) (Constitutions et législation plutôt
laïques jusqu’en 1974).
a) la réislamisation des années 1970 :
= États musulmans confrontés à un «retour» de l’islam sous deux formes:
une contestation politique islamiste : Etat doit être un Etat véritablement islamique
un mouvement de réislamisation par le bas, venus notamment de milieux conservateurs,
comme les oulémas : ils émettent les exigences d’une plus vaste islamisation du droit et
de la société.
ATTENTION : Ne pas opposer systématiquement ces deux tendances: des mouvements
islamistes comme les Frères musulmans égyptiens ont joué sur les deux registres depuis leur
fondation.
Frères musulmans : (cf. Olivier CARRE et Michel SEURAT, Les Frères musulmans,
L’Harmattan, réédité en 2001) mouvement islamiste sunnite créé en 1928 en Egypte par Hanna
Al-BANNA. Panarabe, anti-occidental, anticolonialiste et anticommuniste, le mouvement, qui
s’était donné pour objectif la création d’un Etat musulman fondé sur la tradition dispose d’une
forte assise populaire.
À partir de 1943, les Frères musulmans ont perpétré des attentats contre des officiels égyptiens +
des démêlés avec le pouvoir.
Dans le monde arabe, le mouvement dispose aujourd'hui d’un vaste réseau d’adeptes, souvent
aux prises avec le régime en place, notamment en Syrie.
Ce mouvement est tout particulièrement présent en Egypte : il s’y rajeunit, s’y dynamise et attire
de plus en plus de monde et constitue en Egypte l’opposition la plus active. Il souhaite la mise en
place de réformes, mais pas par la violence. (en Egypte, la violence n’est guère appréciée et
aspirations à la religion ET à la démocratie)
C’est le mouvement islamiste le plus important d’Egypte et même du monde arabe.
= États musulmans se mettent à réislamiser sur les plans social et juridique + répression de la
contestation islamiste. ATTENTION, des cas très différents dans cette réislamisation :
=> nulle en Turquie, qui constitue un pôle laïque intransigeant (tout comme la Tunisie)
=> très forte en Iran, pôle islamiste, seul pays ait eu lieu une véritable révolution islamique (avec,
dans une moindre mesure, le Soudan).
=> ailleurs : en général, troisième voie : d’abord intégration dans le jeu politique des mouvements
islamistes (en Algérie et en Jordanie), mais finalement répression à la suite de victoires électorales de
3
ces mouvements + laïcité devient autoritaire, en particulier en Algérie, pour s’imposer contre islamistes
(qui à ce moment-là en profitent pour se présenter comme défenseurs de la démocratie !)
PROBLEME :
certains Etats perdent le contrôle de cette réislamisation ce qui entraîne une recrudescence des
critiques vis-à-vis de l’Etat en question et des revendications de type individuel : des groupes
considèrent que la réislamisation constitue un moyen pour l’Etat d’asseoir son autorité, ou moyen
d’assurer la domination d’un groupe sur le/les autres : c’est le discours avancé par les Kabyles
d’Algérie, les chiites du Pakistan et d’Arabie Saoudite, les chrétiens ou animistes du Soudan, d’Égypte
et du Nigeria
b) les mouvements islamistes :
= mouvements islamistes, apparus dans les années 1930 et 1940. Ils ont pour points communs :
revendication d’un «État islamique» (dawla islamiyya en arabe) car ils considèrent que la
société ne peut être véritablement musulmane que si l’État est islamique.
islamiser le système politique, le droit, l’économie, la politique étrangère, etc.
leur stratégie passe par l’organisation la plus dense possible : en mouvements politiques,
s’efforçant d’agir à tous les niveaux de la société (syndicats, mouvements de jeunes, de
femmes, d’étudiants, etc.).
dans les années 1970, ces mouvements se diffusent chez étudiants et dans professions
« modernes » (avocats, ingénieurs).
Ils sont parfois nourris par des militants anti-impérialiste de gauche.
= exemples d’organisations islamistes (hormis le Hezbollah, ceux qui sont cités ici sont sunnites)
=> Frères musulmans (F.M.), en Égypte en 1928 = a essaimé en Syrie, en Palestine, au Soudan, au
Koweït, en Jordanie et au Yémen.
=> En Inde, mouvement équivalent dès 1941 (mouvement Jama’at-islami, créé par Aboul Ala Maududi,
mort en 1979 et qui dispose de branches au Pakistan, en Inde et au Bangladesh) : le maududisme rejette
l’islam institutionnel et a engendré de nombreuses confréries prédicatrices et fondamentalistes, qui
influencent certains milieux musulmans immigrés présents en Europe occidentale ; ce mouvement a
aussi influencé la résistance afghane à l’occupation soviétique de l’Afghanistan, donc sorte de parrain
des Talibans
=> En Turquie, cette mouvance est plus récente ; elle date du début des années 1970.
Le mouvement a touché plus tardivement le Maghreb (création en Tunisie du Mouvement de la
tendance islamique en 1986 (devenu Nahda) ; de Al Adl wal Ihsan de Cheikh Yasin au Maroc, et enfin
du F.I.S. algérien, apparu à la fin des années 1980).
ces partis demandent un changement radical de système politique mais participent aux élections
lorsque cela leur est possible (le F.I.S. a remporté élections de décembre 1991 en Algérie, les Frères
musulmans jordaniens ont obtenu plus du quart des sièges de députés en 1989) + rôle du Hamas en
Palestine aux dernières élections.
Le Hezbollah libanais est un des partis importants au Parlement (il est chiite)
(septembre 2000, le bloc Hariri (sunnite)-Joumblatt (druze, c'est-à-dire secte ismaélienne
descendant des Fatimides) compte 43 élus sur 128 sièges au Parlement ; celui du
président de l’Assemblée, Nabih Berri, chef du parti chiite Amal, une dizaine d’élus, et
celui du Hezbollah, autant. Le 23 octobre, 106 députés se prononcent en faveur de la
4
nomination de Rafik Hariri PM jusqu’en octobre 2004 et assassiné en février 2005 pour
son opposition à la mainmise syrienne sur le Liban -comme Premier ministre.).
aujourd'hui, après législatives de juin 2005, le Hezbollah compte 14 députés et participe
pour la première fois au au gouvernement (de Fouad Siniora, proche d’Hariri), depuis
juillet 2005
+ noter rôle Frères musulmans en Egypte, lors des élections de novembre-décembre 2005 : 88 élus
(contre 15 auparavant) sur 445.
==> Il existe néanmoins des partis et mouvements plus radicaux qui refusent l’action politique légale et
n’agissent que par la force pour renverser des régimes politiques qu’ils estiment corrompus et
illégitimes : ils prônent le djihad
= Jihad islamique (égyptien)
= la Gamaa islamiya (auteur des attentats de 1993 au World Trade Center, attentat de Louxor 1997)
= G.I.A. algérien.
= C’est en Égypte que les mouvements radicaux ont été le plus actifs dans leur action contre l’État
(assassinat du président Anouar al-Sadate en octobre 1981 lors de la commémoration de la guerre
d’Octobre 1973, par le Jihad, et de plusieurs ministres et dignitaires).
= et bien sûr, Al Qaida : la Base. créée en 1988, par Oussama Ben Laden, qui a fédéré en 1998 4
organisations (1 pakistanaise, 2 égyptiennes, 1 bangalie du Bangladesh) pour former le Front
islamique international pour le Djihad contre les Juifs et les Croisés : attentats meurtriers contre les
ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie, en août 1998 + le 12 octobre 2000, un attentat dirigé
contre le destroyer lance-missile américain USS Cole dans le port d’Aden endommage le navire et fait
17 victimes américaines + bien sûr attentats du 11 septembre 2001. (pour éléments de précision très
rapides : Le Monde 2, 11 mars 2006, « Ce que je sais d’Al Qaïda »).
Enfin, il faut souligner la particularité de l’islamisme chiite.
b) la particularité de l’islamisme chiite
= monde chiite : logique propre.
= il existe un clergé transnational, basé en Irak à Najaf et Kerbala il faut souligner que la
radicalisation du chiisme s’est opérée au sein de ce clergé : les ayatollahs Baqer al Sadr, en Irak, et
Ruhollah Khomeyni, en Iran théorisent dans les années 1960 le concept d’Etat islamique (au Liban
dans le même temps : Cheikh Musa Sadr et Cheikh Fadlallah organisaient politiquement la
communauté chiite).
le chiisme est religion officielle en Iran depuis le XVIe s ; attente de l’imam (Rappel : retour de
l’imam caché : imam = Chef religieux, chez les musulmans. Titre donné à tous les héritiers de
Mahomet chez les sunnites, et seulement aux douze fondateurs du chiisme, chez les chiites.)
chiisme militant qui aboutit en Iran à la révolution islamique de février 1979 :
lors de cet épisode, le Shah d'Iran, soutenu par les Etats-Unis, est de plus en plus impopulaire
Il a en effet mis en place un régime alliant autoritarisme et volonté de modernisation, sur le mode
occidental. Mais cette modernisation trop rapide aboutit notamment à un renforcement des clivages
socio-économiques. Il est par ailleurs accusé de copier l’Occident.
(voir Aux sources de la révolution iranienne, Firouzeh NAHAVANDI, L’Harmattan, 1988.)
=> il quitte son pays en janvier 1979, vite remplacé par l'ayatollah Khomeyni, revenu d'exil, qui fonde
une République islamiste, très hostile aux Etats-Unis et à l'URSS
5
ex : personnel de l'ambassade des Etats-Unis à Téhéran est pris en otage par l'Iran du 5 novembre 1979
au 20 janvier 1981
conséquences importantes dans les relations entre Etat et Islam : cette volution entraîne la mise en
place du premier État islamique issu d’une révolution politique.
Conséquences :
la Constitution crée la dignité de guide de la révolution : un docteur de la loi (faguih)
détient la double légitimité, religieuse et politique : élection comme guide en 1989 de
l’ayatollah Khamenei, qui succède à l’ayatollah Khomeyni. Le faguih dispose de
pouvoirs judiciaires, pouvoir sur l’armée, les pasdarans, les imams, les médias
gouvernementaux ; il définit et vérifie l’application de la politique générale de la
République et il peut destituer le président de la République (en l’occurrence,
KHATAMI, plébiscité lors des élections de 1997 et 2001, puis Mahmoud Ahmadinejad,
en 2005.)
recherche d’une fusion entre pouvoir politique et pouvoir religieux, (cette fusion ayant
disparu avec prophète Mahomet).
la loi est votée par le Parlement mais doit être conforme à la charia, conformité vérifiée
par Conseil des Gardiens. les Gardiens de la révolution (pasdarans) constituent une
milice armée, sorte de garde prétorienne du régime
prédominance du politique sur logique strictement religieuse qui se traduit notamment par
étatisation rampante du clergé (=> perte d’autonomie : l’impôt islamique est réparti
principalement par l’État au lieu d’être versé directement aux grands ayatollahs, les
«imams du vendredi» sont nommés par le guide, etc.)
La révolution islamique moins une islamisation du politique qu’à une étatisation du religieux.
Le rôle éminent de la dimension politique explique sans doute l’évolution que peut subir
actuellement le régime : on assiste à une progression des réformistes (# les chiites de 1979 :
révolutionnaires) voire à une laïcisation : de nombreux religieux s’expriment plus ou moins à
découvert- en faveur d’une évolution et des discours émanent des intellectuels, mais aussi du
reste de la population en faveur d’un Etat de droit, de libertés publiques, de libertés individuelles,
de pluralisme, d’émancipation féminine…
En fait, cette évolution s’est dessinée du fait de l’attitude de Mohamed KHATAMI qui fait des
libertés publiques son grand cheval de bataille(développement de la presse, multipartisme dans
la mesure bien sûr les partis ne sont pas contraires à l'intérêt de la charia), ce a qui entraîné
d’ailleurs une pression accrue et un autoritarisme renforcé de la part du faguih et de son
entourage bras de fer entre deux approches du politique et volonté de « dé-khomeyniser » la
société iranienne (cf. élections législatives de 2004 et invalidation par le Conseil des Gardiens
des candidatures de réformistes majorité absolue des conservateurs)
MAIS actuellement, avec nouveau président Ahmadinejad, grande proximité entre président et
guide de la révolution, Ali Khamenei. Ahmadinejad s’est « distingué » par son hostilité à
démarche réformatrice de Khatami qui l’a même empêché à siéger en tant que maire de Téhéran
depuis 2003, avec un taux de participation aux élections d’environ 13 % !!! - au Conseil des
Ministres.
par ailleurs, on assiste à une «iranisation» du chiisme. (Le guide de la révolution est nommé
par une instance exclusivement iranienne, le Conseil des experts. L’Iran soutient un temps les
1 / 9 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !