TOTAL Chair of EU Foreign Policy, EU International Relations and Diplomacy Studies,
College of Europe, Dijver 11, BE-8000 Bruges, Fax +32-50-477250, www.coleurope.eu/TOTALchair
Professor Stephan Keukeleire: [email protected], Tel. +32-50-477297
Charles Thépaut: charl[email protected], Tel. +32-50-477254
Comprendre l’Islam Politique dans les Sociétés Arabes Méditerranéennes:
Défis et Perspectives pour la Politique Etrangère de l’UE
International Conference, College of Europe (Bruges)
TOTAL Chair of EU Foreign Policy
Friday 24 February 2012
Résumé des éléments clés de la conférence
La Chaire TOTAL sur la Politique étrangère de l’UE a organisé le 24 février 2012 une
conférence internationale sur la place de l’Islam politique dans les sociétés arabes
méditerranéennes et les implications pour la politique étrangère de l’Union
européenne. Après l’ouverture de la conférence par le Recteur du Collège
d’Europe Paul Demaret, Stephan Keukeleire a expliqué que, en lien avec l’approche
de la Chaire TOTAL dont il est le titulaire, l’enjeu était de présenter un panorama de
l’Islam politique un an après les « printemps arabes » en s’appuyant sur des avis de
terrain et de spécialistes plus que sur la perception d’observateurs européens.
La première partie de la conférence a permis de préciser ce que le terme « Islam
politique » recouvrait, à savoir la multitude d’acteurs politiques qui revendiquent une
légitimité et un agenda islamique. Les interventions d’Emilio Platti (K.U. Leuven) et de
François Burgat (IFPO Damas) ont permis d’établir que, au-delà des généralités
journalistiques, les acteurs de l’Islam politique partageaient avant tout un « lexique »
et des références religieuses, mais que leur projet politique n’est ni unique, ni figé.
L’analyse des sermons accompagnant les soulèvements montre par exemple qu’en
Egypte trois sources de gitimité ont été mobilisées : le nationalisme, l’Islam politique
et la démocratie libérale.
La proposition politique islamiste n’est ainsi pas imperméable à d’autres influences et
n’est pas incompatible avec des principes démocratiques. A partir de références
communes, ce sont les circonstances politiques et socio-économiques nationales qui
déterminent le mode d’action politique des formations islamistes. En l’occurrence,
les premières échéances montrent que le principe électoral est largement accepté
et que, aussi fédératrice qu’elle puisse être, la référence islamique renvoie à des
tendances politiques qui peuvent être très différentes.
Ce point a été confirmé dans la seconde session de la conférence, pendant
laquelle plusieurs acteurs ont présenté les diverses situations de l’Islam politique dans
chaque pays arabe méditerranéen. Deux députés récemment élus, Souad
Abderrahim (Ennahda Tunisie) et Amr Elshobaki (Indépendant Egypte), ont
partagé leur expérience respective d’acteurs de terrain des transitions. Ils ont décrit
le rôle des forces islamistes en insistant sur le caractère conservateur mais modéré de
partis comme Ennahda (Tunisie) ou comme le parti des Frères Musulmans (Egypte),
qu’il s’agisse des questions économiques ou de celles des droits et des libertés. Ils ont
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également attribué leurs succès électoraux à des éléments très concrets comme les
moyens logistiques et l’implantation locale.
Le cas des pays n’ayant pas connu de révolution en 2011 ou dont le soulèvement se
rapproche de plus en plus d’une situation de guerre civile a également été abordé.
A cet égard, la diversité des situations est flagrante et il a été montré comment la
position des islamistes variait en fonction de la nature du pouvoir politique en place.
Le système pouvait être en évolution comme au Maroc avec des réformes
constitutionnelles et une entrée des islamistes au gouvernement (Fouad Ammor,
GERM), en pleine implosion comme en Syrie avec une lutte de plus en plus
sanglante entre le régime et une opposition composée de toutes les franges de la
société (Salam Kawakibi, Arab Reform Initiative), ou relativement figé comme en
Algérie avec un système politique verrouil et qui exclu un réel pluralisme
(Mohamed Hachemaoui, Université d’Alger).
La dernier session s’est intéressée à la réaction de l’UE (Alexandre Zafiriou, SEAE,
Bruxelles), de l’Espagne (Eduard Soler, CIDOB, Barcelone) et de la France (Jean-
François Daguzan, Fondation pour la Recherche Stratégique, Paris) face à l’arrivée
des partis politiques islamistes dans des positions de gouvernement. Il ressort que les
européens ont en général été pragmatiques dans leur réponse aux printemps
arabes. Cependant, ils souffrent d’avoir entretenu dans le passé des canaux de
communication trop exclusivement centrés sur les élites occidentalisées des pays
arabes. Avec l’arrivée de nouvelles élites dans les gouvernements, les diplomaties
européennes sont contraintes de rénover leurs modes de dialogue et leurs
instruments de coopération. Certains canismes et modes de fonctionnement
européens semblent à cet égard avoir perdu de leur pertinence.
Face à l’importance grandissante de l’Islam politique, Stephan Keukeleire (Chaire
TOTAL) et Erwan Lannon (Collège d’Europe) ont conclu en estimant que le premier
enjeu était pour les acteurs européens d’apprendre à mieux connaître ces
mouvements, et notamment de comprendre leurs multiples dynamiques. Le second
semble être l’engagement d’un dialogue sans préjugés avec les sociétés, et donc
également avec les acteurs de l’Islam politique (partis, syndicats, organisations
religieuses, etc.). A cet égard, la conclusion la plus frappante est peut être que le
terme « islamiste », s’il permet d’identifier certains acteurs, n’apparait finalement plus
d’un grand secours pour concevoir une politique étrangère équilibrée et en prise
avec les subtilités des échiquiers politiques arabes.
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