Comprendre l’Islam Politique dans les Sociétés Arabes Méditerranéennes: Défis et Perspectives pour la Politique Etrangère de l’UE International Conference, College of Europe (Bruges) TOTAL Chair of EU Foreign Policy Friday 24 February 2012 Résumé des éléments clés de la conférence La Chaire TOTAL sur la Politique étrangère de l’UE a organisé le 24 février 2012 une conférence internationale sur la place de l’Islam politique dans les sociétés arabes méditerranéennes et les implications pour la politique étrangère de l’Union européenne. Après l’ouverture de la conférence par le Recteur du Collège d’Europe Paul Demaret, Stephan Keukeleire a expliqué que, en lien avec l’approche de la Chaire TOTAL dont il est le titulaire, l’enjeu était de présenter un panorama de l’Islam politique un an après les « printemps arabes » en s’appuyant sur des avis de terrain et de spécialistes plus que sur la perception d’observateurs européens. La première partie de la conférence a permis de préciser ce que le terme « Islam politique » recouvrait, à savoir la multitude d’acteurs politiques qui revendiquent une légitimité et un agenda islamique. Les interventions d’Emilio Platti (K.U. Leuven) et de François Burgat (IFPO Damas) ont permis d’établir que, au-delà des généralités journalistiques, les acteurs de l’Islam politique partageaient avant tout un « lexique » et des références religieuses, mais que leur projet politique n’est ni unique, ni figé. L’analyse des sermons accompagnant les soulèvements montre par exemple qu’en Egypte trois sources de légitimité ont été mobilisées : le nationalisme, l’Islam politique et la démocratie libérale. La proposition politique islamiste n’est ainsi pas imperméable à d’autres influences et n’est pas incompatible avec des principes démocratiques. A partir de références communes, ce sont les circonstances politiques et socio-économiques nationales qui déterminent le mode d’action politique des formations islamistes. En l’occurrence, les premières échéances montrent que le principe électoral est largement accepté et que, aussi fédératrice qu’elle puisse être, la référence islamique renvoie à des tendances politiques qui peuvent être très différentes. Ce point a été confirmé dans la seconde session de la conférence, pendant laquelle plusieurs acteurs ont présenté les diverses situations de l’Islam politique dans chaque pays arabe méditerranéen. Deux députés récemment élus, Souad Abderrahim (Ennahda – Tunisie) et Amr Elshobaki (Indépendant – Egypte), ont partagé leur expérience respective d’acteurs de terrain des transitions. Ils ont décrit le rôle des forces islamistes en insistant sur le caractère conservateur mais modéré de partis comme Ennahda (Tunisie) ou comme le parti des Frères Musulmans (Egypte), qu’il s’agisse des questions économiques ou de celles des droits et des libertés. Ils ont TOTAL Chair of EU Foreign Policy, EU International Relations and Diplomacy Studies, College of Europe, Dijver 11, BE-8000 Bruges, Fax +32-50-477250, www.coleurope.eu/TOTALchair Professor Stephan Keukeleire: [email protected], Tel. +32-50-477297 Charles Thépaut: [email protected], Tel. +32-50-477254 également attribué leurs succès électoraux à des éléments très concrets comme les moyens logistiques et l’implantation locale. Le cas des pays n’ayant pas connu de révolution en 2011 ou dont le soulèvement se rapproche de plus en plus d’une situation de guerre civile a également été abordé. A cet égard, la diversité des situations est flagrante et il a été montré comment la position des islamistes variait en fonction de la nature du pouvoir politique en place. Le système pouvait être en évolution comme au Maroc avec des réformes constitutionnelles et une entrée des islamistes au gouvernement (Fouad Ammor, GERM), en pleine implosion comme en Syrie avec une lutte de plus en plus sanglante entre le régime et une opposition composée de toutes les franges de la société (Salam Kawakibi, Arab Reform Initiative), ou relativement figé comme en Algérie avec un système politique verrouillé et qui exclu un réel pluralisme (Mohamed Hachemaoui, Université d’Alger). La dernier session s’est intéressée à la réaction de l’UE (Alexandre Zafiriou, SEAE, Bruxelles), de l’Espagne (Eduard Soler, CIDOB, Barcelone) et de la France (JeanFrançois Daguzan, Fondation pour la Recherche Stratégique, Paris) face à l’arrivée des partis politiques islamistes dans des positions de gouvernement. Il ressort que les européens ont en général été pragmatiques dans leur réponse aux printemps arabes. Cependant, ils souffrent d’avoir entretenu dans le passé des canaux de communication trop exclusivement centrés sur les élites occidentalisées des pays arabes. Avec l’arrivée de nouvelles élites dans les gouvernements, les diplomaties européennes sont contraintes de rénover leurs modes de dialogue et leurs instruments de coopération. Certains mécanismes et modes de fonctionnement européens semblent à cet égard avoir perdu de leur pertinence. Face à l’importance grandissante de l’Islam politique, Stephan Keukeleire (Chaire TOTAL) et Erwan Lannon (Collège d’Europe) ont conclu en estimant que le premier enjeu était pour les acteurs européens d’apprendre à mieux connaître ces mouvements, et notamment de comprendre leurs multiples dynamiques. Le second semble être l’engagement d’un dialogue sans préjugés avec les sociétés, et donc également avec les acteurs de l’Islam politique (partis, syndicats, organisations religieuses, etc.). A cet égard, la conclusion la plus frappante est peut être que le terme « islamiste », s’il permet d’identifier certains acteurs, n’apparait finalement plus d’un grand secours pour concevoir une politique étrangère équilibrée et en prise avec les subtilités des échiquiers politiques arabes. TOTAL Chair of EU Foreign Policy, EU International Relations and Diplomacy Studies, College of Europe, Dijver 11, BE-8000 Bruges, Fax +32-50-477250, www.coleurope.eu/TOTALchair Professor Stephan Keukeleire: [email protected], Tel. +32-50-477297 Charles Thépaut: [email protected], Tel. +32-50-477254