ne supportèrent plus aucune charge. L’incendie
commença juste après le séisme et dévora les maisons de
bois qui avaient résisté. L’hôpital brûla. Les 312 maisons
restantes étaient toutes en bois, elles étaient celles qui
avaient été épargnées par l’incendie de 1780. L’église
s’écroula, il ne resta que sa façade debout, avec son
horloge arrêtée à10 heures 45. Il y eut 1120 morts et 1500
blessés (Figure 5).
Le tremblement de terre de 1843 ébranla fortement les
murs de l’église Saint-Pierre et Saint-Paul de Pointe-à-
Pitre. La façade subsista, mais en si piteux état qu’il
fallut en abattre la partie supérieure à coups de canon
pour déblayer les approches du monument et permettre
les réparations. Les oeuvres vives étaient profondément
atteintes : colonnes branlantes, entablement lézardé,
tympan et clocheton ruineux... On du fermer l’église qui
le resta dix ans. Sans regret on démolit presque tout, avec
l’intention d’utiliser tous les matériaux utilisables.
3.3. La reconstruction
Ce fut l’architecte Petit qui fut chargé de la
reconstruction. Cet architecte eut l’idée que les
maçonneries armées pourraient être une réponse adaptée
et le formula ainsi :
«Les murs de pierre, construits suivant les usages
ordinaires, et nullement combinés de façon à résister à
de secousses de tremblement de terre, n’ont pu tenir
contre les mouvements qui les attaquaient en sens divers
; ils se sont brisés, et les matériaux, en se séparant, ont
entraîné la chute immédiate de tous les édifices. Au
contraire, les maisons de bois, présentant des murailles
plus légères, mais surtout adhérentes et en quelque sorte
élastiques, ont résisté aux violentes oscillations du sol et
ont repris leur position lorsque la terre s’est calmée. De
là est venue naturellement la pensée de n’employer que
le bois dans les constructions nouvelles. Puisqu’il est
reconnu que l’emploi du bois pour les constructions
nouvelles est, et doit être généralement et définitivement
adopté, nous poserons en principe que la concentration
d’un incendie, fléau malheureusement très fréquent, doit
être l’objet de toutes les études. La Pointe-à-Pitre elle-
même en 1780, Hambourg et Port-au-Prince en 1842,
n’ont que trop prouvé le danger qu’offrent les maisons de
bois qui n’ont point été élevées en prévision de ces
terribles accidents. Il faut donc, pour obvier à ce péril
de tous les instants, trouver un moyen de concentrer le
feu à sa naissance ; en isolant chaque maison, puisque
l’incendie peut y éclater d’un moment à l’autre. Pour
nous, le plus facile comme aussi le plus sûr de tous les
moyens à employer, est de renfermer, d’enchâsser entre
deux murs de maçonnerie chacune des constructions en
bois. Ces murs seraient armés de montants et de
traversines en fer, fortement agrafés et reliés, de manière
à ne former de chaque mur qu’un seul bloc, qu’une seule
pierre, qui pourrait obéir aux mouvements du sol sans se
briser ; la disposition calculée et combinée de
l’armature maintiendrait les murs en tous sens et en
empêcherait la chute. » (Petit, 1844).
Il reconstruisit l’église en appliquant ces principes, très
proches des prescriptions parasismiques actuelles,
précisant qu’ils devaient être « une garantie contre les
secousses des tremblements de terre. ». Il arma les murs
de deux lits d’armatures, l’un intérieur, l’autre extérieur,
et les relia entre eux. De plus il chaîna les angles et les
ouvertures. La charpente métallique, enfin, soutenue par
des piliers métalliques séparant les nefs, est décollée de
la face intérieure des murs de façon à rendre
indépendante la maçonnerie.
3.4. L’incendie de 1871
La rue centrale était la rue des forges. Le feu partit des
foyers artisanaux des forgerons et s’alimenta des braises
des cuisines des maisons et de l’éclairage de nuit. Pointe-
à-Pitre fut détruite de fond en comble. A la suite de cet
incendie, l’arrêté de novembre 1871 fut pris, et trois
possibilités furent offertes aux habitants pour rebâtir :
- constructions avec des murs en briques et des
charpentes métalliques.
- réalisation d’une ossature de murs en bois avec des
remplissages en briques ou en maçonneries.
- exécution de rez-de-chaussée et de pignons latéraux,
jusqu’aux faîtages, en maçonnerie. Etages réalisés en
structure de bois avec des remplissages en bois ou en
briques.
Pointe-à-Pitre, à la veille du séisme de 1897, est
constituée de maisons ayant des rez de chaussée et des
murs pignons coupe-feu en maçonnerie et des étages en
bois. Les maçonneries sont de moellons de calcaire et de
mortier de chaux et de sable, sachant que la chaux de la
Guadeloupe est de très mauvaise qualité. Une dizaine de
maisons sont réalisées en fer et en briques. C’est très
coûteux et cela ne peut se généraliser. Les murs en
maçonnerie de certaines maisons ont été renforcés par de
grands S en fer reliés de part et d’autre du mur par des
étriers, suivant les recommandations de l’architecte Petit.
Une culture sismique locale à la Guadeloupe - Michèle Robin-Clerc
Actes des VIe Rencontres - Archéosismicité & Vulnérabilité, Environnement, bâti ancien et société
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Groupe APS
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2002
5
Figure 5 : Le séisme du 8 février 1843, Epinal 1843, fabrique
de Pellerin, gravure sur bois coloriée, 40X59 cm. 11/PFA/315.