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appelés à marcher au premier rang de la société, assurons leur par les lettres et par
les sciences, par la philosophie et par l’histoire la culture de l’esprit la plus large et
la plus féconde afin de fortifier l’aristocratie de l’intelligence au milieu d’un peuple
qui n’en veut pas d’autre et de donner un contrepoids légitime à cette démocratie
qui coule à pleins bords. Si par l’enseignement primaire étendu, honoré et par l’en-
seignement secondaire français largement établi nous relevons le niveau moral du
peuple5, relevons en même temps celui de la bourgeoisie par un enseignement se-
condaire classique vigoureusement constitué. »6
L’enseignement de la philosophie est donc, par excellence, l’en-
seignement réservé aux classes bourgeoises. Enfin, il ne faut pas ou-
blier une troisième raison essentielle, interne à l’institution scolaire :
la classe de philosophie connaît de graves difficultés de recrutement.
D’ailleurs, dans les différents Conseils de l’Académie de Paris, dès
1860, sont émis des vœux convergents sur le nécessaire rétablisse-
ment de la classe de philosophie, pour des raisons liées à la survie de
l’institution, en concurrence avec l’enseignement confessionnel :
« La réforme la plus urgente est celle qui se rapporte à la logique propre-
ment dite. L’année dernière vous avez émis le vœu que cet enseignement fût relevé
et qu’on lui rendit son vrai nom qui a été conservé dans les écoles ecclésiastiques.
Depuis un an la situation des études philosophiques ne s’est pas améliorée. Le
nombre des élèves qui le suivent est fort restreint : 37 à Louis le Grand, 11 à Napo-
léon, 9 à Saint Louis, 14 à Charlemagne, 21 à Bonaparte, 13 à Rollin. (...) Pour
rendre la vie à cet enseignement, il ne suffirait pas de compléter les programmes
qui contiennent déjà, comme application à la logique, les principales questions de
philosophie, mais il faudrait encore donner aux professeurs une classe où le nombre
des élèves entretiendrait l’émulation. Il faut trouver un moyen de retenir jusqu’à
leur terme les élèves, donner une sanction plus forte aux études philosophiques dans
les épreuves du baccalauréat ».7
L’objectif d’ensemble de cette réforme, dont le rétablissement
de l’enseignement de la philosophie dans sa plénitude n’est qu’un élé-
ment, vise, en fait, avant tout à inciter les élèves à suivre le cours
5- Lorsque DURUY proposera au Conseil supérieur l’introduction d’un enseignement
de la morale dans l’enseignement spécial, il tient très fermement à distinguer cet en-
seignement de celui de la philosophie : « Ce sera donc moins une série de leçons philoso-
phiques qu’une morale en action expliquée par la science, puisque le professeur s’appliquera
à faire comprendre les préceptes par des exemples comme Cicéron le fait dans « des de-
voirs ». AN F*17/1870, séance du 1er décembre 1863.
6- Notes et souvenirs, Paris, Hachette, 1901, p. 198.
7- AN 16AJ251, rapport de FILON.