Coordination Nationale de la Formation Continuée du moyen-secondaire, Universités de vacances de Thiès (31 mars-05 avril 2003) sur la
didactique de la philosophie / Louis-Roi-Boniface Attolodé, De l’approche de quelques notions du programme
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Assurément, on y réussit aussi de par la manière de faire. La réflexion
philosophique n’est, en effet, jamais que quête de fondement, au double sens de la fondation
et de la raison d’être, qui vise à donner sens, et signification et direction, de par son mode
d’investigation privilégié : pourquoi ? Dans sa forme générique, pourquoi ? est englobant,
mais il se prête aussi à un dédoublement étant, d’une part, visée du mouvement originel
d’émergence (pourquoi ?) et, de l’autre, quête de l’objectif, du but, de la fin (pour quoi ?). On
comprend alors que les deux sens du pourquoi ? ouvrent aux deux dimensions du fondement
et permettent de rencontrer les deux modalités du sens.
Appliquer la question du pourquoi à tout thème, à toute notion du programme est
alors la voie royale pour initier proprement à la philosophie même lorsque le libellé du
programme peut paraître ou s’avérer insatisfaisant pour le puriste.
Les intitulés «individu et société» ou «l’idée de norme», par exemple, se verraient,
comme thèmes, mieux dans un programme de sociologie, mais se pensent aussi
philosophiquement. Dans le premier registre, il s’agirait de décrire les modes de rapport,
d’imbrication, qui importent peu au philosophe soucieux, à l’image d’Alain, d’en fixer les
fondements. En atteste cet extrait.
Etat de solidarité, en partie naturelle, en partie voulue, avec un groupe de nos
semblables. Le lien de société est en partie de fait et non choisi, en partie imposé, en
partie choisi ou confirmé par la volonté. Tous les paradoxes de la vie en société
résultent de ce mélange, et l’on ne peut pas nommer société une association qui n’a
pas une part de hasard et une part d’amitié. Le contrat social ne fait jamais que
reprendre volontairement ce qui est subi comme ce qui est aimé. Les sociétés fondées
sur un contrat ne sont pas de véritables sociétés. Une banque, dès qu’il y a menace de
ruine, tout le monde en retire ses fonds et l’abandonne. La véritable société est fondée
sur la famille, sur l’amitié et sur les extensions de la famille.6
6 Alain, Définitions, Paris, Gallimard, 1953, p. 197-198. Il est donné de ce passage une lecture schématique dans
notre ouvrage portant le titre de Méthodologie de la Réflexion en Classe de Philosophie, Dakar, EENAS, 2000,
p. 46-49. Ailleurs, dans un texte de formation sur l’appropriation des contenus des deux premiers domaines de
notre programme de Philosophie et intitulé «La société : une introduction à la vie sociale», il sert de prétexte :
les développements en constituent un commentaire détaillé. Aussi en faisons-nous ici l’exploitation directe.