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Eglise d’Aix et d’Arles
juin 2010
Revue n°33
Un noyau de soleil sur Terre
Les défis d’Iter
Enquête
C’est une plate forme nue de 40 hectares (sur les
180 ha du projet) que les évêques de la région ont
aperçu ce 31 mai. Pour l’heure, 2 millions de m3 de
terre ont été déblayés ; une énorme route, où pas-
seront 300 convois exceptionnels depuis Fos-sur-
Mer, a été aménagée et un colosse de 60 m de haut
– le cœur du réacteur - est en passe d’être dressé.
Ce chantier pharaonique qui devrait durer encore
près d’une dizaine d’années est à la mesure des at-
tentes suscitées, comme des dés à relever.
Le défi foncier
« Vive la fusion au pays du soleil !», « Iter, l’éner-
gie du futur au cœur de la Provence » : dans la
mairie de Saint-Paul-lès-Durance, village de 1000
habitants qui abrite le centre de Cadarache et le site
d’Iter, les afches exhibent des slogans lyriques.
Comme les commentaires du maire socialiste :
« Cadarache, c’était déjà un gâteau extraordinaire,
Iter, c’est la cerise. Notre renommée ne sera plus
européenne mais mondiale ! », lance Roger Pizot.
Les deux sites occupent 40 % des 4500 hectares de
cette petite commune des Bouches-du-Rhône.
« C’est vrai qu’il y a d’importantes retombées éco-
nomiques, mais nos communes rurales ne devraient
être que très peu concernées par l’accueil du mil-
lier de chercheurs et techniciens. Ils préfèreront se
tourner vers des villes comme Aix ou Manosque.
En revanche, loger les ouvriers du chantier est un
casse-tête. » Propos corroboré par Bruno Vidal, le
curé de Peyrolles (Aix-Val de Durance) qui dessert
la paroisse de Saint-Paul. Ils sont environ 4000 lors
du pic de construction. Et plusieurs entreprises de
BTP auraient renoncé, faute de logements adap-
tés à leur personnel. Il faut dire que l’on ne trouve
plus de terrains disponibles à proximité. Et dans
un périmètre important, les prix des mètres car-
rés ont explosé. À l’évidence, le dé foncier n’est
pas le moindre à relever. Même pour les familles
des scientiques de 30 nationalités différentes qui
s’établissent peu à peu dans la région, en plus des
entreprises sous traitantes et des 6000 salariés de
Cadarache déjà installés.
Un défi culturel pour l’Église
A 20 km d’Iter, Manosque a anticipé cette arri-
vée inédite. En 2001, le maire a lancé un plan sur
20 ans, qui s’est accéléré dès le choix ofciel, en
2005, du site. 1600 logements ont été programmés
en deux ans. Un hôpital et un lycée international
sont sortis de terre. « C’est que le dé du vivre en-
semble est grand, commente Gilbert Marijsse, curé
de Manosque, commune de 20 000 habitants qui
n’en comptait que 8000 en 1960. En trois ans, cette
agglomération des Alpes-de Haute-Provence a ab-
sorbé 38% des nouveaux arrivants (contre 43 %
dans l’ensemble des Bouches-du-Rhône, 9% pour
le Vaucluse et 8% pour le Var). Au Conseil pasto-
Au carrefour de quatre départements provençaux,
le site de Cadarache va accueillir le plus grand complexe
expérimental du monde : Iter. Les évêques de notre province
ecclésiastique devaient, le 31 mai dernier, visiter le projet.
Pari scientique audacieux et chance pour l’économie
de la région, la mise en place de ce réacteur révolutionnaire
génère aussi de nombreux dés, y compris pour l’Église.
Jean-Claude Escaffit