Bull. Acad. Vét. France — 2008 - Tome 161 - N°2 www.academie-veterinaire-defrance.org 149
COMMUNICATION
utilisation chez les cervidés s’est avérée décevante. (Comizzoli
et al. 2001). Au cours de nos travaux, nous avons constaté que
la co-culture de cellules épithéliales de l’oviducte dans le
milieu SOF était bénéfique pour le développement de l’embryon
d’élaphe et indispensable pour l’embryon de sika (Locatelli et
al. 2005; Locatelli et al. 2006). Ces observations suggèrent que
les embryons de ces deux espèces présentent des besoins spé-
cifiques par rapport à ceux des embryons de ruminants domes-
tiques. Chez l’élaphe et le sika, environ 30 % des embryons pro-
duits atteignent ainsi le stade blastocyste après co-culture sur
un tapis de cellules tubaires.
Les embryons produits au laboratoire ont été cryoconservés dans
l’azote liquide après congélation lente (élaphe et sika) ou
vitrification (élaphe). Décongelés, ils ont été transférés dans
l’utérus de biches élaphe synchronisées (J7). Pour cette mani-
pulation, les femelles sont anesthésiées afin de réaliser un
examen endoscopique du stade ovarien (contrôle de la présence
d’un corps jaune fonctionnel). La corne utérine ipsilatérale à
l’ovaire présentant le corps jaune est extériorisée à l’aide d’une
pince atraumatique, après incision de la paroi abdominale sur
une longueur inférieure à 2 cm. Une ponction est réalisée dans
la corne utérine pour introduire un capillaire de verre conte-
nant le(s) embryon(s). Dans un premier temps, la naissance de
trois faons de cerf élaphe, issus du transfert d’embryons produits
in vitro et congelés ou vitrifiés, a permis de démontrer la faisa-
bilité des techniques utilisées (figure 3).Une seconde étape a
été franchie plus récemment, objectivée par la naissance d’un
faon de cerf sika (figure 4),issu du transfert d’un embryon sika
produit in vitro,congelé, puis réimplanté dans l’utérus d’une mère
porteuse de l’espèce élaphe (Locatelli et al. 2008). Elle démontre
la possibilité d’un transfert interspécifique, à savoir la possi-
bilité d’utiliser des mères porteuses d’une espèce pour donner
naissance à des faons d’une autre espèce.
PERSPECTIVES
Dans un premier temps, l’optimisation de l’ensemble des tech-
niques évoquées demeure un axe prioritaire notamment en ce
qui concerne la PIV. Les spécificités des besoins de l’embryon
de cerf au cours des premières étapes du développement font
actuellement l’objet d’études plus approfondies. De même, le
transfert interspécifique soulève des questions fondamentales
intéressantes quant à ses conséquences sur le comportement
des jeunes (inné ou acquis). Ces recherches devraient nous per-
mettre, dans un second temps, son application aux espèces
menacées proprement dites comme le cerf d’Eld du Siam
(Cervus eldi siamensis),le daim de mésopotamie (Dama meso-
potamica),cerf du Viet-Nam (Cervus nippon pseudaxis) ou le cerf
de Formose (Cervus nippon taiouanus).Pour ces cervidés, il sera
nécessaire d’identifier l’espèce receveuse commune la plus
compatible. Ces stratégies pourraient ainsi être utilisées pour
faciliter le brassage génétique entre populations captives ou pour
augmenter artificiellement le nombre de descendants destinés
àla réintroduction en milieu naturel. Elles pourraient également
permettre le stockage d’embryons d’espèces vouées à une
extinction certaine.
•Asher, G.W., Berg, D.K., Evans, G. 2000.
Storage of semen and artificial insemination in
deer. Anim Reprod Sci. 62: 195 – 211.
•Asher, G.W., Monfort, S.L., Wemmer, C. 1999.
Comparative reproductive function in cer-
vids:implications for management of farm
and zoo populations. J Reprod Fertil Suppl.54:
143 – 156.
•Ceballos, G., Ehrlich, P.R. 2002. Mammal
population losses and the extinction crisis.
Science 296: 904 – 907.
•Comizzoli, P., Mermillod, P., Cognie, Y.,
Chai, N., Legendre, X., Mauge, R. 2001.
Successful in vitro production of embryos in the
red deer (Cervus elaphus) and the sika deer
(Cervus nippon). Theriogenology 55: 649 –
659.
•Dott, H.M., Utsi, M.N.P. 1971. The collection
and examination of semen of the reindeer
(Rangifer tarandus). J Zool. 164: 419 – 424.
•Krzywinski, A. 1976. Collection of red deer
semen with the artificial vagina. In Proceedings
of the. 8th International Congress of Animal
Reproduction and Artificial Insemination,July
12-16-1976, Krakow, Poland, M. Tischner,
J. Pilch Vol 4 pp. 1002 – 1005.
•Krzywinski, A. 1985. A study in artificial bree-
ding in deer for practical application, British
Deer Society Magazine 6 pp. 211 – 213.
•Locatelli, Y., Cognie, Y., Vallet, J.-C., Baril, G.,
Verdier, M., Poulin, N., Legendre, X.,
Mermillod, P. 2005. Successful use of oviduct
epithelial cell coculture for in vitro production
of viable red deer (Cervus elaphus) embryos.
Theriogenology 64: 1729 – 1739.
•Locatelli, Y.&Mermillod, P. 2005.
Caractéristiques et maîtrise de la fonction de
reproduction chez les cervidés. Productions
animales 18: 3 – 25.
•Locatelli, Y., Vallet, J.-C., Baril, G., Touz, L., J.,
Hendricks, A., Legendre, X., Verdier, M.,
Mermillod, P. 2008. Successful interspecific pre-
gnancy after transfer of in vitro-produced sika
deer (cervus nippon nippon) embryo in red deer
(cervus elaphus hippelaphus) surrogate hind.
Reproduction, Fertility and Development 20:
160 – 161.
•Locatelli, Y., Vallet, J.-C., Huyghe, F.P., Cognie,
Y., Legendre, X., Mermillod, P.2006.
Laparoscopic ovum pick-up and in vitro pro-
duction of sika deer embryos:effect of season
and culture conditions. Theriogenology 66:
1334 – 1342.
•Whitehead, G.K. 1993. Deer of the world.
Constable, London. 194 pp.
BIBLIOGRAPHIE