http://portaildoc.univ-lyon1.fr Creative commons : Paternité - Pas d’Utilisation Commerciale Pas de Modification 2.0 France (CC BY-NC-ND 2.0) http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/fr LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Université CLAUDE BERNARD LYON1 INSTITUT DES SCIENCES et TECHNIQUES DE READAPTATION MEMOIRE présenté pour l’obtention du DIPLOME D’ETAT EN ERGOTHERAPIE Présenté par LAMOITTE Guy-Hubert REFLECHIR ENSEMBLE : L’APPORT DE LA DEMARCHE TRANSDISCIPLINAIRE POUR L’INTERVENTION EN ERGOTHERAPIE Placer ici le sous titre du mémoire L’intérêt du Plan d’Intervention Individualisé pour la motivation du patient en ergothérapie Maître de Mémoire DARROUS Sylvain Membres du Jury Date de Soutenance © Université Claude Bernard Lyon1 - ISTR - Institut de Formation en Ergothérapie. LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Remerciements Je tiens à remercier sincèrement tous ceux qui me soutiennent et m’accompagnent tous les jours : Charlotte, ma famille, mes amis… Je remercie aussi toute l’équipe pédagogique de l’IFE de Lyon : Sabine LionnardRety, Amanda Ryan, Bernard Devin et Jean-François Bodin, ainsi que tous les professionnels que j’ai pu rencontrer au cours de mes stages. Mes remerciements vont également à Sylvain Darrous, pour m’avoir epaulé pendant la réalisation de ce travail. Merci à vous tous ! LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) SOMMAIRE Introduction............................................................................................................... 1 APPROCHE THEORIQUE ......................................................................................... 3 1. 2. L’accident vasculaire cérébral chez l’adulte : une problématique complexe................. 3 1.1. Définition ............................................................................................................... 3 1.2. Une problématique particulièrement complexe chez l’adulte ................................ 4 1.3. Une problématique qui reste souvent sans réponse ................................................ 6 La prise en charge en ergothérapie : une possibilité de réponse à cette problématique complexe ................................................................................................................................ 8 2.1. L’intervention en ergothérapie ............................................................................... 8 2.2. L’intérêt de l’intervention en ergothérapie pour la personne adulte victime d’AVC …………………………………………………………………………………….9 2.3. 3. Limite à l’intervention en ergothérapie : une difficulté à susciter la motivation . 10 La motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie ............................... 12 3.1. Qu’est-ce que la motivation individuelle ? .......................................................... 13 3.2. Facteurs favorisants la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie ...................................................................................................................... 15 3.3. 4. Un lien intéressant avec les démarches de qualité des établissements de santé ... 17 Le Plan d’Intervention Interdisciplinaire Individualisé. .............................................. 18 4.1. Qu’est-ce que le PIII ? .......................................................................................... 19 4.2. Déroulement du PIII : entre inter et transdisciplinarité ........................................ 20 4.3. Un moyen pertinent pour favoriser la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie? .................................................................................................... 21 METHODOLOGIE DE RECHERCHE ...................................................................... 23 1. 2. But de la démarche de recherche.................................................................................. 23 1.1. Problématique et hypothèse ................................................................................. 23 1.2. Objectifs de la démarche de recherche ................................................................. 23 1.3. Des indicateurs pour renseigner cette hypothèse ................................................. 24 Moyens méthodologiques mis en œuvre ...................................................................... 25 2.1. Choix de la population étudiée ............................................................................. 25 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 2.2. Technique de recueil de données : l’entretien individuel ..................................... 26 2.3. Choix des terrains d’investigation ........................................................................ 27 2.4. Considérations éthiques........................................................................................ 28 3. Limites de la méthodologie de recherche ..................................................................... 28 4. Méthode d’analyse des entretiens ................................................................................ 29 RESULTATS ET DISCUSSION ............................................................................... 30 1. Présentation des résultats ............................................................................................. 30 1.1. Concernant la compréhension par le patient de la situation ................................. 30 1.2. La compréhension de l’intérêt de la prise en charge en ergothérapie .................. 31 1.3. Concernant l’identification des besoins du patient .............................................. 32 1.4. Concernant la participation active du patient dans le plan d’intervention en ergothérapie ...................................................................................................................... 33 2. 1.5. Concernant l’implication de l’entourage .............................................................. 35 1.6. Concernant l’accompagnement de la personne .................................................... 36 1.7. PIII et problématique d’ acceptation du handicap ................................................ 36 1.8. PIII et anosognosie ............................................................................................... 36 Discussion .................................................................................................................... 37 2.1. Analyse des données en réponse aux indicateurs ................................................. 37 2.2. Eléments de réponse à l’hypothèse de recherche ................................................. 42 2.3. Intérêt et limites de la démarche de recherche ..................................................... 43 Conclusion .............................................................................................................. 45 Bibliographie........................................................................................................... 46 ANNEXES LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Introduction Au cours de mon troisième stage de la formation, j’ai été confronté à une situation particulière, qui m’a poussé à prendre un certain recul sur l’ergothérapie, et qui a été la source d’un questionnement important sur l‘intérêt de la discipline. J’ai été amené à réaliser la prise en charge d’une personne de 45 ans, victime d’un accident de la circulation quatre ans auparavant, et atteinte d’une tétraplégie incomplète. Elle était hospitalisée en soins de suite et de réadaptation pour une durée d’un mois, pour « faire le point sur la situation ». La prescription médicale indiquait alors de réaliser une « évaluation en ergothérapie ». Cette personne vivait à son domicile, avec son conjoint et ses deux enfants. Après cet accident, elle avait déjà pu bénéficier de différentes prises en charge en ergothérapie : en hospitalisation complète, en hôpital de jour, et même auprès d’un ergothérapeute libéral. Un projet de construction d’une maison individuelle entièrement adaptée avait déjà abouti, de même qu’un aménagement du véhicule personnel, ainsi qu’une expertise pour déterminer une prestation de compensation du handicap avec tiers responsable. Toutes les aides techniques et humaines nécessaires étaient déjà mises en place. Finalement, après deux heures de discussions quotidiennes sur une durée d’un mois, cette personne connaissait manifestement une difficulté d’ordre psychologique, se rapprochant d’une difficulté d’ « acceptation du handicap » (Kübler-Ross, 1969, citée par Lacroix, 2009). Quatre ans après l’accident, et malgré tout ce qui avait été fait en termes de rééducation et de réadaptation, cette personne était résignée, présentait des symptômes dépressifs, n’était pas parvenue à retrouver un sens à sa vie après l‘accident. Sa qualité de vie, son bien-être, étaient donc particulièrement affectés par les conséquences invalidantes de la pathologie. Cette personne qui était très sociale, active, qui aimait le partage et les rencontres, le sport et le sentiment de liberté que les activités de plein air peuvent procurer, restait aujourd’hui cloîtrée chez elle, depuis quatre ans. Cette prise en charge a permis d’identifier une limitation de participation à des activités satisfaisantes et significatives, notamment sociales et sportives. L’intervention a ensuite consisté en un accompagnement pour promouvoir sa participation à de telles activités, et retrouver une certaine qualité de vie. Néanmoins, malgré mes efforts d’écoute, de propositions et de stimulation, je ne suis jamais parvenu à susciter la motivation de la personne. Au cours d’un « rendez-vous famille », d’inspiration transdisciplinaire, mon point de vue a pu rencontrer celui du conjoint 1 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) de la personne, qui avait très bien identifié la problématique mais n’avait pas pu s’exprimer auparavant. Ce moment particulier a permis un véritable basculement : le patient, confronté à ces visions concordantes, a pu reconnaître ce besoin, semblant alors pour la première fois motivé par un projet, par une projection dans l’avenir favorable. Je me suis donc beaucoup questionné, d’une part sur comment l’ergothérapeute peut proposer une intervention qui offre une réponse satisfaisante et motivante à la personne ; et d’autre part pourquoi ce « rendez-vous famille » avait été aussi décisif. Toutes les prises en charges auprès d’adultes « actifs » qui ont succédé dans mon parcours ont fait écho à cette situation. En effet ces personnes manifestaient visiblement une importante difficulté psychologique avec la survenue du handicap, et consécutivement une plus grande difficulté à se projeter dans l’avenir. Ils étaient souvent résignés, peu motivés par rapport à l’intervention en ergothérapie, à leur avenir. C'est pourquoi j’ai choisi de me renseigner d’avantage sur la motivation du patient pour la prise en charge, sur comment l’ergothérapeute peut parvenir à déclencher une motivation chez la personne, pour élaborer ensemble un projet de réadaptation significatif, et rendre l’intervention réellement utile pour sa qualité de vie. J’ai par ailleurs gardé en tête tout l’intérêt qu’avait représenté cette réunion transdisciplinaire à laquelle j’avais participé. J’ai choisi de développer mes recherches au sujet d’une population adulte active, confrontée à un handicap acquis. La prise en considération des personnes victimes d’accident vasculaire cérébral m’a semblé être pertinente, pour réfléchir à ce sujet autour d’une problématique incluant à la fois des troubles moteurs, cognitifs et des difficultés d’ordre psychologique. La problématique de cette recherche est donc la suivante : comment favoriser la motivation du patient adulte victime d’AVC pour la prise en charge en ergothérapie ? 2 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) APPROCHE THEORIQUE 1. L’accident vasculaire cérébral chez l’adulte : une problématique complexe 1.1. Définition Le ministère français de la Santé a défini l’accident vasculaire cérébral constitué (AVC), comme un déficit neurologique focal, d’installation brutale et d’une durée supérieure à 24 heures, secondaire à une ischémie ou à une hémorragie intracrânienne. L’AVC désigne donc l’obstruction ou la rupture d’un vaisseau artériel transportant le sang dans le cerveau. Il en résulte un manque d’apport d’oxygène mettant en danger le fonctionnement d’une ou plusieurs zones du cérébrales, pouvant aller jusqu’à une destruction cellulaire irréversible (Ferry-Lemonnier, 2009). 1.1.1. Epidémiologie En 2008, en France, il y a eu plus de 130 000 hospitalisations pour accident vasculaire cérébral constitué, soit « 1 AVC toutes les 4 minutes ». L’âge moyen de survenue d’un AVC est de 73 ans (Ferry-Lemonnier, 2009). Le nombre de personnes hospitalisées pour AVC a augmenté de 10,9% entre 2002 et 2008, mais ceci est essentiellement lié à l’augmentation et au vieillissement de la population. En fait, le taux standardisé sur l’âge a globalement diminué de 2.6% sur cette période (FerryLemonnier, 2009). Cette tendance globale à la baisse s’accompagne pour la première fois d’une augmentation du taux avant 65 ans (+ 10.8%). Ce phénomène épidémiologique préoccupant est à examiner dans un contexte de diminution de l’espérance de vie sans incapacité, qui est passée à 61,9 ans pour les hommes et à 63,5 ans pour les femmes (Ferry-Lemonnier, 2009). 1.1.2. Une priorité de Santé publique L’incidence et la prévalence de l’AVC en font une priorité de santé publique en France et dans le monde. Dans les pays occidentaux, ils constituent la troisième cause de décès, la deuxième cause de démence, et la première cause de handicap acquis de l’adulte (FerryLemonnier, 2009). Nous verrons dans le prochain paragraphe que l’AVC revêt en effet une importance particulière de santé publique : de par ses conséquences en termes d’incapacités et de 3 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) situations de handicap, et également en termes de coûts humains et financiers. Environ 30 % des patients victimes d’un AVC constitué sont hospitalisés en soins de suite et de réadaptation (SSR), au décours de leur prise en charge en soins aigüs. Ce sont des patients « lourds » : la moyenne des scores de dépendance physique des patients post AVC est près de 50 % plus élevée que celle de l’ensemble des patients accueillis en SSR (FerryLemonier, 2009). 1.2. Une problématique particulièrement complexe chez l’adulte 1.2.1. Des conséquences importantes en termes de déficiences L’AVC est souvent responsable de séquelles affectant de manière brutale et conséquente la qualité de vie des patients. Etant donné que l’AVC peut atteindre toute zone cérébrale, ses conséquences en termes de déficiences et d’incapacités peuvent potentiellement être nombreuses. Trois quarts des survivants d’AVC garderont des séquelles invalidantes à long terme (Ferry-Lemonnier, 2009). L’AVC peut tout d’abord entrainer des déficiences sensori-motrices. Les troubles moteurs peuvent consister en une parésie, ou une paralysie d’un ou plusieurs membres, en général d’un hémicorps. Des troubles du tonus musculaire, comme la spasticité, sont fréquemment rencontrés. Des troubles cérébelleux peuvent survenir, et l’atteinte de l’équilibre est aussi fréquente. Les déficiences sensitives peuvent être l’anesthésie, la paresthésie ou encore la dysesthésie au niveau de la sensibilité superficielle : tactile, algique et thermique. Des troubles de la sensibilité profonde sont aussi des conséquences possibles. D’autre part, cette pathologie peut entrainer des déficiences sensorielles et cognitives : déficits sensoriels et perceptifs, de l’orientation temporo-spatiale, des fonctions instrumentales, des troubles attentionnels, la négligence spatiale unilatérale, des atteintes mnésiques, l’anosognosie, des troubles des fonctions exécutives, et également du comportement et des émotions. Des troubles affectants les capacités de compréhension, de langage avec notamment l’aphasie, sont également fréquemment rencontrés dans le cadre de cette pathologie. Des troubles du système nerveux végétatif peuvent être occasionnés : avec l’incontinence urinaire et fécale, les troubles de la déglutition, de la digestion et cardio-respiratoires, ou encore les troubles génitaux et sexuels. De nombreuses complications peuvent également survenir à distance de l’AVC : comme les syndromes régionaux douloureux complexes, les déformations articulaires, ou encore les risques de chutes, d’accidents de la voie publique et domestiques. 4 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Bien entendu les conséquences de l’AVC vont considérablement varier en fonction de l’emplacement de la lésion cérébrale, et en fonction de la gravité de l’anoxie cérébrale. L’évolution des complications et des déficits varie aussi selon les individus. 1.2.2. D’importantes situations de handicap chez la personne adulte Toutes ces déficiences vont avoir un retentissement sur les capacités de la personne adulte atteinte d’AVC. Elles vont entrainer de nombreuses situations de handicap, en lien avec ses habitudes de vie et son environnement matériel et humain. Impact sur l’indépendance et l’autonomie pour les activités de la vie quotidienne : Ces séquelles vont dans un premier temps avoir un impact sur l’autonomie et l’indépendance pour les actes courants de la vie quotidienne de la personne ( déplacements, toilette et soins de l’apparence, habillage, excrétion, alimentation, gestion du temps, gestion d’un budget ). Ces incapacités, si brutalement acquises, vont également remettre en question tout l’environnement matériel de la personne : le véhicule personnel, le logement, et tous les projets d’ordres matériels en cours de réalisation. Impact sur la vie sociale et professionnelle : Les déficiences vont aussi avoir un retentissement sur la vie sociale de la personne, en fonction de ses habitudes de vie et de ses rôles sociaux : vie familiale et conjugale, personnes à charge, relations amicales, l’image de soi et les interactions sociales (Teasell et al., 2000). Par ailleurs, la vie professionnelle sera remise en question, avec l’arrivée de tout un questionnement et d’une incertitude sur la poursuite de l’activité professionnelle, les possibilités mêmes d’avoir un emploi malgré ces déficiences (Teasell et al., 2000). Consécutivement, la situation financière sera aussi une source majeure d’inquiétudes, avec la question des revenus, des dépenses et des charges incombant à la personne, le remboursement de prêts, et l’abandon de projets ayants occasionnés une précarisation (Jérôme et al., 2009). Les activités de loisirs, les passions, qui sont souvent des sources de satisfaction et d’accomplissement importantes, seront également remises en cause. 1.2.3. Une problématique complexe et spécifique chez la personne adulte La survenue brutale de ces déficiences, de toutes ces situations de handicap, va être manifestement difficile à vivre pour la personne adulte victime d’AVC, à l’origine d’une problématique de santé très complexe. Une difficulté psychologique, d’acceptation du handicap : Ces changements vont remettre en question toute la vie, toute l’existence de la 5 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) personne et de son entourage, dans toutes ses dimensions. L’individu perd alors les activités significatives, les projets qui le guidaient dans la vie, et par la même occasion la représentation qu’il avait de lui-même (Lacroix, 2009). La complexité de la situation, l’incertitude concernant l’avenir, et également le ressenti émotionnel lié à la survenue brutale du handicap, vont entrainer la mise en place de mécanismes de défense importants. Autant de déterminants qui rendront le travail de deuil de la situation antérieure, d’acceptation de la situation présente, et la projection dans l’avenir très difficiles pour le patient (Lacroix, 2009). Elizabeth Kübler-Ross (1969, citée par Lacroix, 2009) a bien défini cette difficulté, à travers la problématique d’acceptation du handicap, passant par différents mécanismes de défense : la stupeur, le déni, la colère, le marchandage, la dépression et peut-être finalement l’acceptation. La personne pourrait également ne jamais accepter, s’enfermant alors dans le déni ou la résignation (Lacroix, 2009). La compréhension d’une telle situation permet d’imaginer toute la difficulté qu’aura le patient à retrouver un sens à sa vie, à sa rééducation, au lendemain de la survenue d’un AVC, et toute l’incertitude qui pèsera sur son avenir. Une problématique différente de celle des personnes dites âgées. Un quart des victimes d’AVC sont âgées de moins de 65 ans (Ferry-Lemonnier, 2009). Lawrence et Kinn (2012), ont à ce propos pu démontrer que la problématique de l’adulte était différente de celle des personnes dites « âgées ». Notamment en raison de la prépondérance de la parentalité et de la vie professionnelle, mais aussi parce que cette population est appelée à vivre plus longtemps avec les situations de handicap liées à la pathologie. Jérôme & al (2009) ont également mis en avant que le retentissement psychologique de l’AVC était différent chez la personne adulte, par opposition à la personne âgée, avec une plus grande prévalence de l’angoisse, de la tristesse, et de troubles dépressifs par exemple. 1.3. Une problématique qui reste souvent sans réponse 1.3.1. Le parcours de soins de la personne adulte victime d’AVC L’accident vasculaire cérébral est à la fois une pathologie aigüe, qui nécessite une prise en charge en extrême urgence ; et aussi une pathologie chronique avec des conséquences invalidantes à long terme (Yelnik & al., 2012). La première étape du parcours de soins de l’adulte victime d’AVC est donc la prise en charge en service d’urgence, afin de stabiliser l’état du patient. Il s’agit de la phase aigüe de la prise en charge, à l’hôpital général ou en unité neuro-vasculaire, pendant une dizaine de jours 6 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) environ. Une évaluation par différents intervenants est réalisée afin de déterminer les conséquences fonctionnelles de l’AVC. Elle permettra d’orienter le patient vers un retour au domicile, ou vers un centre de soins de suite et de réadaptation (SSR) si nécessaire (Yelnik & al., 2012). Au cours du séjour en SSR, une évaluation complète de la situation du patient est réalisée par une équipe pluri professionnelle encadrée par un médecin. Cette phase subaigüe aura pour but de favoriser une récupération fonctionnelle, une réadaptation vers le retour au domicile, ou une institutionnalisation vers un lieu de vie adapté. Le but est de pallier au maximum aux conséquences de l’AVC sur l’autonomie du patient, et sur sa satisfaction personnelle. Elle durera 1 à 4 mois environ, voire plus en fonction de l’importance des déficiences et de l’évolution de l’état de santé du patient (Yelnik & al., 2012). Une personne adulte victime d’AVC pourra ainsi bénéficier d’un suivi et d’une surveillance médicale tout au long du séjour ; d’un soutien d’ordre psychologique ; de l’accès à des possibilités de rééducations motrice, sensitive et cognitive ; de possibilités de réadaptation concernant les activités de la vie quotidienne et l’adaptation de l’environnement ; d’un travail sur la communication et l’alimentation. Elle pourra bénéficier de tout un volet d’information, de conseil, d’accompagnement pour les démarches relatives à la sortie de la structure de soins et au retour dans le contexte de vie. A l’issue du séjour en SSR, le patient pourra être en mesure de rentrer chez lui, pourra poursuivre la rééducation-réadaptation en hôpital de jour ou auprès de rééducateurs libéraux, ou encore grâce à une hospitalisation à domicile avec une équipe mobile (Yelnik & al., 2012). 1.3.2. Les besoins insatisfaits des personnes adultes victimes d’AVC Malgré les efforts pour que l’offre de soins corresponde aux besoins des patients, des études révèlent une insatisfaction des personnes adultes victimes d’AVC : par rapport à leur parcours de soins, et par rapport à leur problématique spécifique en réadaptation (Lawrence & Kinn, 2012). Une des principales insatisfactions révélées est le manque d’information personnalisée, d’explication par le personnel soignant, et de compréhension de la situation par la personne. Lawrence et Kinn (2012) ont ainsi recueilli ce besoin concernant : l’AVC et ses conséquences, les perspectives d’avenir, les effets psychologiques et cognitifs de la pathologie, la gestion de la fatigue et des situations de handicap au quotidien. Jérôme & al. (2009) ont également pu souligner ce besoin chez les aidants de ces personnes. Lawrence et Kinn (2012) reportent également un manque de soutien psychologique tout au long du parcours de soin. Avec un besoin de travail personnalisé autour de l’estime de 7 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) soi, et du renforcement du « sentiment d’auto-efficacité ». Le besoin de participation active et d’implication dans le projet de soins est également reporté, notamment par Röding & al. (2002), entrainant une certaine frustration des patients par rapport à leur parcours de soins, avec un défaut de personnalisation et d’écoute des patients pour l‘élaboration des plans d’interventions. Lawrence et Kinn (2012) ont par ailleurs identifié un manque d’accès à des possibilités de réadaptation et de réhabilitation sociale chez la population adulte victime d’AVC, au décours de leur parcours de soins. Ce besoin a été ressenti tout d’abord au niveau de l’autonomie pour les actes de la vie quotidienne (également reporté par Röding & al., 2003 ; Jérôme & al., 2009), et également au niveau de la conduite automobile, des loisirs et des activités significatives (également reporté par Jérôme & al., 2009). D’autre part, un manque d’accompagnement a été révélé au niveau socioprofessionnel : au niveau de l’accès ou du retour à l’emploi (également reporté par Röding & al., 2003), de l’accompagnement dans le domaine de la vie sociale, avec des besoins concernant notamment la difficulté à assumer les rôles sociaux et familiaux, et toutes les questions relatives à la vie de couple et à la sexualité. En France, Jérôme & al. (2009) ont aussi pu révéler un manque d’accompagnement de la personne et de son entourage, au niveau des démarches administratives. 2. La prise en charge en ergothérapie : une possibilité de réponse à cette problématique complexe Nous avons vu que la problématique du patient adulte victime d’AVC est généralement complexe. De plus, un manque de convergence entre les besoins de cette population et la réponse thérapeutique proposée est ressenti par les patients. Pourtant, l’intervention en ergothérapie semble pouvoir apporter une réponse à cette problématique. 2.1. L’intervention en ergothérapie Les bases conceptuelles de l’ergothérapie sont fondées sur le principe que la santé et le bien-être sont intimement liés aux capacités d’une personne à participer de manière autonome aux différentes activités de la vie (soins personnels, mobilité et déplacements, travail, loisirs, vie familiale et sociale). Selon l’arrêté du 5 juillet 2010 relatif au diplôme d’Etat d’ergothérapie (cité par Trouve & al., 2012), l’ergothérapeute est un professionnel de santé qui fonde sa pratique sur le lien entre l’activité humaine et la santé. Il est un expert dans l’évaluation des incapacités et 8 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) des situations de handicap de la personne, de leur interaction avec l’environnement humain et matériel, et également dans l’analyse d’activité, et du bien-être de la personne. « Il met en œuvre des soins et des interventions de prévention, d’éducation thérapeutique, de rééducation, de réadaptation, de réinsertion et de réhabilitation psychosociale, visant à réduire et compenser les altérations et les limitations d’activité, à développer, restaurer et maintenir l’indépendance, l’autonomie et l’implication sociale de la personne. » (Arrêté du 5 juillet 2010, cité par Trouve & al. 2012). L’ergothérapeute est donc un expert dans l’accompagnement des personnes touchées par une restriction d’autonomie et de participation, afin d’évaluer et de développer leurs compétences, rendre leur environnement facilitateur, maximiser leur qualité de vie, augmenter leur indépendance et leur autonomie par rapport aux différentes activités significatives et satisfaisantes que peut avoir l’individu. 2.2. L’intérêt de l’intervention en ergothérapie pour la personne adulte victime d’AVC L’Association Nationale Française des Ergothérapeutes (ANFE) a réalisé une revue de littérature (les « Données probantes en ergothérapie »), regroupant les recherches ayant prouvé l’intérêt de l’intervention en ergothérapie dans différents domaines de la Santé (Trouve & al., 2012). Au niveau de la prise en charge des patients victimes d’AVC, l’ergothérapeute intervient tout d’abord pour l’installation et le positionnement du patient, afin d’éviter la survenue de complications cutanées, trophiques, douloureuses, et articulaires (Partridge, 1990, cité par Trouve & al., 2012). Il intervient afin de procéder à une évaluation des capacités et incapacités de la personne : au niveau moteur, sensitif, articulaire et musculaire, cognitif, et au niveau de l’indépendance pour les actes de la vie quotidienne. Une évaluation de l’environnement matériel et humain de la personne est réalisée, ainsi qu’un recueil de données sur l’histoire personnelle du patient et ses habitudes de vie, dans le but de mieux comprendre les répercussions de la pathologie sur l’activité de la personne. Le diagnostic ergothérapique consiste alors en la synthèse des différentes évaluations, et à cibler les situations de handicap qui auront un retentissement sur l’existence de la personne et sur sa qualité de vie, mettant ainsi en lien l’individu, ses capacités, son environnement, et ses activités. 9 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) L’intervention en ergothérapie consistera ensuite, en coopération avec le patient, son entourage et les autres intervenants, à établir des objectifs et des moyens de prise en charge visant à améliorer l’indépendance et l’autonomie de la personne, sa participation aux activités significatives et satisfaisantes, sa qualité de vie et son bien-être (Drummond, 1996 & 2007, cité par Trouve & al, 2012). Les moyens d’interventions pourront consister en une rééducation, une réadaptation et une réhabilitation psychosociale, le choix et les adaptations d’aides techniques, un aménagement de l’environnement, l’accompagnement pour la réinsertion professionnelle, ou encore l’accompagnement pour l’accès aux droits de prestations de compensation du handicap Trouve & al., 2012). La prise en charge en ergothérapie est un aspect important du parcours de soins de la personne adulte atteinte d’AVC, puisqu’elle va pouvoir faire le lien entre le milieu hospitalier et le retour au domicile de la personne, et donc vers la réintégration de la personne dans son environnement, malgré la survenue d’incapacités et de situations de handicap. L’ergothérapeute a donc la capacité et les compétences nécessaires pour apporter une réponse à la problématique du patient adulte victime d’AVC. Il peut notamment, en plus de la rééducation motrice et cognitive et de l’aménagement de l’environnement, donner une réponse au patient concernant l’accès à des possibilités de réadaptation et de réhabilitation sociale. Il peut aider le patient à se projeter dans l’avenir à nouveau, l’accompagner en faveur de la participation à des activités satisfaisantes et significatives. 2.3. Limite à l’intervention en ergothérapie : une difficulté à susciter la motivation Nous avons vu que la prise en charge en ergothérapie peut théoriquement susciter de l’intérêt pour une personne adulte victime d’AVC en rééducation-réadaptation, puisqu’elle peut justement permettre de donner une réponse à sa problématique complexe, à ses besoins insatisfaits. Ceci implique cependant que la personne soit actrice de la prise en charge, afin que celle-ci puisse vraiment corresponde à ses besoins, et qu’elle ait un intérêt à la sortie de l’établissement de soins. Cependant dans la pratique, nombre de patients apparaissent sceptiques, peu motivés quant à cette prise en charge. Comment expliquer cette contradiction, et cette difficulté d’implication du patient pour la prise en charge en ergothérapie? 10 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 2.3.1. Une profession jeune et encore peu reconnue Certains auteurs ont réfléchi à cette question récurrente. Parmi eux, Babot & Cornet (2010) ont pointé le doigt sur la jeunesse de l’ergothérapie, profession moins établie dans la conscience collective que ses semblables, plus connus et reconnus du grand public : kinésithérapeutes, orthophonistes, psychologues, assistance sociale, infirmiers. Cette jeunesse de la profession, mais également son originalité, et l’aspect « originel » des moyens thérapeutiques proposés, rendent la profession très difficile à cerner pour les personnes qui la rencontrent, pouvant ainsi susciter au mieux la curiosité, au pire la déconsidération (Babot et Cornet, 2010, p.13). 2.3.2. Des difficultés pour comprendre l’intérêt de l’intervention en ergothérapie Le champ d’intervention de l’ergothérapeute est vaste. Le décret de compétence, et les fondements de la discipline impliquent une difficulté pour le patient à cerner la globalité de l’intervention (Babot & Cornet, 2010), et l’intérêt qu’elle peut susciter pour lui. Sur ce point, le comportement du thérapeute est un déterminant important, avec toute l’importance de l’information, de l’explication, de la clarté des propos, mais également de sa capacité à cerner les besoins de la personne pour pouvoir proposer une intervention significative. Certaines limites apparaissent également du côté du patient, principalement en cas de troubles perceptifs, intellectuels ou cognitifs limitant les capacités de compréhension, ou encore de troubles psychologiques ou psychiatriques la perturbant. L’anosognosie. Un premier obstacle important est sans doute l’anosognosie : l’incapacité pour une personne à reconnaître la maladie ou la perte de capacité fonctionnelle dont il est atteint (Larousse, 2013). Ce trouble cognitif est une conséquence possible de l’AVC, et va considérablement perturber la compréhension par le patient de sa situation, et donc de l’intérêt de l’ergothérapie pour lui. Des difficultés psychologiques, liées à « l’acceptation du handicap ». Un autre obstacle majeur serait la présence de difficultés d’ordre psychologiques, qui viendraient perturber la compréhension par la personne de sa situation, et nuiraient à ses capacités de projection dans l’avenir. Parmi ces difficultés, on peut citer dans un premier temps les troubles de l’humeur, comme les symptômes dépressifs pouvant être rencontrés chez les personnes adultes victimes d’AVC (Jérôme & al., 2009). 11 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) On peut également citer la problématique de « l’acceptation du handicap » (KüblerRoss, 1969, citée par Lacroix, 2009). Tout un processus psychologique d’adaptation au handicap est en effet nécessaire pour pouvoir à nouveau se projeter dans l’avenir, et même pour pouvoir prendre conscience de sa situation et de ses perspectives. Les étapes menant à l’acceptation seront plus ou moins propices à la compréhension de l’intérêt de la prise en charge, nuisant à l’évaluation de la situation, et des perspectives favorables. La personne peut également ne jamais accepter, rester à un stade défensif, ou s’enfermer dans la résignation ou la pseudo-acceptation (Lacroix, 2009). Moley-Massol (2004, cité par Lacroix, 2009) souligne également que le retentissement psychologique dépend aussi de la personnalité du patient, de son histoire personnelle, du moment de sa vie qu’il est en train de traverser, de la maladie en question comme de la représentation qu’en a le patient, et également de la communication qui lui est faite à ce propos. 2.3.3. Devenir acteur de l’intervention en ergothérapie : une difficulté de motivation Il est essentiel que la personne prise en charge en ergothérapie participe activement à l’élaboration du plan d’intervention, pour que celui-ci corresponde à ses besoins, et puisse offrir une réponse à sa problématique complexe de santé (Babot & Cornet, 2010). Devenir acteur de la prise en charge implique plusieurs choses. Tout d’abord d’avoir les moyens de le devenir, ce qui nous renvoie au rôle du thérapeute plaçant la personne en tant qu’actrice de la prise en charge, et également aux difficultés de compréhension de l’intervention. D’autre part, devenir acteur implique d’en avoir la volonté. En effet, rendre le patient acteur de son projet de soins suppose que le patient adhère à cette vision des choses. La participation du patient au projet de soins nécessite une certaine motivation pour y prendre part (Igunane, 2004). Pour mieux comprendre cette difficulté de motivation du patient adulte victime d’AVC pour la prise en charge en ergothérapie, et surtout pour trouver des pistes pour y remédier, il serait à présent judicieux de développer la recherche au sujet de la motivation. 3. La motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie Dans le domaine de la prise en charge des patients adultes atteints d’AVC en 12 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) rééducation-réadaptation, la motivation du patient a souvent été pointée comme un facteur fondamental de la réussite d’un projet de soins (Maclean & al., 2000), et son absence a contrario citée comme un déterminant important d’échec (Kemp, 1988). Afin de mieux comprendre cette difficulté de motivation des personnes adultes victimes d’AVC pour la prise en charge en ergothérapie, nous allons donc maintenant essayer de comprendre ce qu’est la motivation individuelle, puis comment la motivation du patient pour la prise en charge en peut être favorisée. 3.1. Qu’est-ce que la motivation individuelle ? Selon Vallerand & Thill (1993, cités par Fenouillet, 2012, p.19), « La motivation désigne une hypothétique force intra-individuelle protéiforme, qui peut avoir des déterminants internes et/ou externes multiples, et qui permet d’expliquer la direction, le déclenchement, la persistance et l’intensité du comportement ou de l’action. ». 3.1.1. Comprendre la motivation individuelle : le besoin d’autodétermination et de libre choix Selon Deci (1975, cité par Fenouillet, 2012), l’homme a une motivation intrinsèque pour certains objets. On peut la définir comme une motivation complètement autodéterminée, où l’objet est choisi librement et procure plaisir, bien-être et satisfaction au sujet, en lien avec le besoin d’activité et de compétence de l’être humain. Toujours selon Deci, la motivation intrinsèque est diminuée lorsque l’on y associe des contraintes externes, telles que la récompense, la limitation du temps, l’évaluation, la surveillance, la limitation du choix, la compétition, ou encore l’implication par l’ego, qui vont contribuer à limiter le sentiment d’auto-détermination ou de libre choix. Deci et Ryan (1985, cités par Fenouillet, 2012) ont proposé l’existence de différentes formes progressives de motivations, qui se distinguent par le niveau d’auto-détermination de l’individu pour l’activité. Ils postulent l’existence d’un continuum d’auto-détermination, partant de l’amotivation, jusqu’à la motivation intrinsèque parfaitement autodéterminée. Entre ces deux points se situent quatre formes de motivations extrinsèques, d’autodétermination croissante : la régulation externe (liée à la récompense, la douleur), la régulation intro-projetée (pression internalisée liée à des sources externes, sentiment de malêtre face à l’inactivité par exemple), la régulation identifiée (importance et valeur accordée à des activités), et la régulation intégrée (cohérence des valeurs et représentations, niveau important d’auto-détermination). Ainsi l’individu serait naturellement motivé pour certaines activités. Il pourrait 13 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) également le devenir pour d’autres activités, en fonction de contraintes extérieures, ayant plus ou moins de sens pour lui, comme pour la prise en charge en ergothérapie par exemple. 3.1.2. L’influence de la réussite et de l’échec, et l’expérience subjective La motivation pour une activité serait le résultat d’une évaluation par l’individu de ses chances de réussite ou d’échec, et de l’importance qu’il leurs accorde (Atkinson, 1964, cité par Fenouillet, 2012). Un individu sera alors motivé pour une activité s’il estime qu’il peut réussir, et si la réussite est significative et satisfaisante pour lui. D’autre part, chaque individu se construit une expérience subjective de la réussite ou de l’échec, en fonction de son histoire personnelle (Wiener, 1989, cité par Fenouillet, 2012). Ainsi une personne sera d’avantage motivée pour une activité donnée si elle a souvent réussi ce qu’elle a entrepris par le passé. De même, les individus attribueront la réussite ou l’échec à des causes internes ou externes, sur lesquelles ils peuvent avoir une action ou non (Wiener, 1989 ; Bandura, 2003 ; cités par Fenouillet, 2012). Ce mode d’attribution, conséquence d’une perception subjective, va influencer la construction de l’expérience subjective. La motivation pour l’activité pourra par exemple être diminuée si la personne attribue systématiquement ses échecs à des causes internes (comme de faibles capacités, à une incompétence de sa part), ou ses réussites à des causes externes (aide, facilité de l’activité, chance). Enfin, l’auto-efficacité reconnue par Bandura (2003, cité par Fenouillet, 2012) est une idée subjective de l’efficacité personnelle pour une activité donnée. Il s’agit de l’évaluation que se fait l’individu de ses aptitudes personnelles, construite à partir de quatre principales sources d’informations : l’expérience active d’activités similaires ; les expériences vicariantes relatives à l’efficacité des semblables pour l’activité (comparaisons sociales pouvant renforcer ou non l’estime de soi) ; la persuasion verbale par une source crédible et experte en la matière : le feedback ; et les états physiologiques et émotionnels ressentis lors de l’expérience. Ainsi des variations de croyances subjectives d’efficacité personnelle entre des individus ayant les mêmes aptitudes peuvent faire varier la motivation, et ce encore plus particulièrement devant une activité difficile et complexe, comme la rééducation au lendemain de l’AVC. 3.1.3. Le positionnement d’objectif Locke (1967, cité par Fenouillet, 2012) a également rappelé l’importance du positionnement de buts et d’objectifs pour la motivation individuelle. Objectifs qui doivent être ajustés à deux niveaux : la difficulté (relation équilibrée entre effort à fournir et probabilité de réussite), et la spécificité (un objectif précis et mesurable, avec la possibilité 14 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) d’instaurer une stratégie claire). Autre élément important : l’objectif doit être accepté. Bandura rejoint alors Locke, avec l’importance du feedback pour renforcer le sentiment d’auto-efficacité (renforcement de la satisfaction, régulation de l’effort, ajustement des stratégies). 3.2. Facteurs favorisants la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie Certaines recherches, et notamment celles de Maclean & Pound (2000), ont permis d’apporter des informations importantes sur comment favoriser et développer la motivation des patients victimes d’AVC en rééducation-réadaptation. Elles ont ainsi permis d’énoncer des facteurs pouvant favoriser le développement de la motivation pour la prise en charge. 3.2.1. Favoriser la compréhension de la situation par le patient Le premier point important est la compréhension par la personne de sa situation. Maclean & Pound (2000) ont pu mettre en évidence que la compréhension par la personne : de la pathologie, de ses conséquences en termes d’incapacités et de situations de handicap, pouvait avoir une influence favorable sur la motivation pour la ou les interventions. La personne doit donc pouvoir comprendre ce qui lui arrive, elle doit pouvoir évaluer ses perspectives réelles : à savoir ce qui va être mis en œuvre pour pallier à ces situations de handicap, quel sens et quelle cohérence aura le projet de soins au sein de l’établissement, et ce qu’elle peut espérer pour le retour dans le cadre de vie (Maclean & Pound, 2000). Ce besoin de compréhension nous renvoie ainsi à la qualité, la fiabilité, la cohérence et la personnalisation de l’information reçue par la personne au cours de son parcours. 3.2.2. Favoriser la compréhension de la prise en charge en ergothérapie Un autre facteur est de permettre au patient de comprendre l’intérêt de l’intervention. De favoriser sa reconnaissance aux yeux de la personne. Il faut que l’intervention soit porteuse de sens, qu’elle puisse lui trouver un intérêt en rapport avec sa problématique et ses besoins, pour lui accorder de la valeur et de l’importance (Deci & Ryan, 1985, cités par Fenouillet, 2012 ; Maclean & Pound, 2000). L’information du patient, mais aussi toute une démarche d’explication et d’accompagnement vers la compréhension de l’intérêt de l’ergothérapie, l’espoir qu’elle peut y placer, les objectifs et moyens mis en œuvre, seront autant d’éléments décisifs pour favoriser la motivation du patient pour la prise en charge (Maclean et al., 2000). 15 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 3.2.3. L’identification des besoins de la personne Une identification pertinente des besoins de la personne, et la perception par la personne que ses besoins sont bien identifiés, seront également favorables pour que la personne trouve un intérêt à l’intervention (Kemp, 1988). Pour qu’elle puisse faire un lien concret et significatif entre l’intervention et sa problématique, et que l’intervention prenne un sens pour la personne (Maclean & Pound, 2000). La personne doit comprendre sur quels points l’intervention peut porter, qu’est-ce qui peut être fait concrètement pour ses besoins, comment cela va-t-il être réalisé, et ce qu’elle peut espérer comme résultats. 3.2.4. La participation active du patient Un autre facteur important sera de donner la possibilité au patient de devenir véritablement acteur de la prise en charge, d’augmenter son sentiment d’auto-détermination et de libre choix. Ceci suppose donc la compréhension de l’intervention par la personne, mais requiert également des dispositions chez le thérapeute (Maclean et al., 2000). L’ergothérapeute devra ainsi donner une place à l’écoute et à l’expression de la personne, lui permettre de participer activement à l’identification de ses besoins (Kemp, 1988). Il devra l’impliquer dans la définition des buts et des objectifs de la prise en charge, pour que ceux-ci soient à la fois réalistes, concertés, acceptés et significatifs (Locke, 1967, cité par Fenouillet, 2012 ; Maclean & al., 2000). 3.2.5. L’implication de l’entourage L’implication de l’entourage comme acteur facilitateur de l’intervention et de l’accompagnement, sera également favorable pour la motivation de la personne. L’entourage peut effectivement représenter un soutien social important pour la personne, mais peut a contrario devenir un obstacle s’il est trop protecteur (Maclean & Pound, 2000). L’information et la compréhension de la situation et des interventions par l’entourage sera donc importante pour le rendre facilitateur. De plus, sa participation pour l’identification des besoins (Kemp, 1988), ou pour le projet de réadaptation, pourraient également faciliter le développement de la motivation du patient (Maclean & Pound, 2000). 3.2.6. L’attitude des thérapeutes : le feedback Comme nous l’avons décrit précédemment, des difficultés pourront être rencontrées par le patient pour comprendre et devenir acteur de la prise en charge, principalement en cas de difficultés psychologiques liées à l’acceptation du handicap. L’accompagnement par l’ergothérapeute prendra alors tout son sens, pour aider la 16 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) personne à prendre conscience de ces troubles, renforcer son sentiment d’auto-efficacité au travers du feedback, l’aider à se construire une représentation favorable de la situation (Bandura, 2003, cité par Fenouillet, 2012). L’ergothérapeute pourra aussi aider le patient à mesurer ses chances de réussite et d’échec par rapport aux objectifs, l’aider à voir plus clair dans son évolution, l’aider à se projeter de manière concrète et optimiste dans l’avenir. Ce soutien et cet accompagnement psychologiques sont souvent pointés comme des facteurs importants de motivation, d’implication du patient dans la prise en charge, et de satisfaction par rapport à l’intervention, en lien avec la notion de relation thérapeutique (Kemp, 1988 ; Maclean & al., 2000). 3.3. Un lien intéressant avec les démarches de qualité des établissements de santé Des similitudes peuvent être retrouvées entre ces facteurs favorisants la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie, et la démarche d’amélioration de la qualité des soins des établissements de Santé. Ceci peut permettre de trouver des pistes intéressantes pour notre problématique, notamment aux niveaux de l’information du patient, de sa participation au projet individualisé, et de la coordination des soins. 3.3.1. Vers un patient informé et acteur de sa santé Depuis la loi du 4 mars 2002, relative à l’information et aux droits des patients, un effort d’information des usagers des établissements de santé a été entrepris. Il vise à permettre au patient de mieux comprendre, d’être acteur et responsable de sa santé. L’individu est alors reconnu comme seul expert de sa propre vie, le rôle des soignants étant de l’accompagner, de l’éclairer dans ses décisions (HAS, 2009). Ce principe s’inscrit à la fois dans un but de personnalisation du soin, d’amélioration de la convergence entre les besoins de la personne et la réponse thérapeutique proposée, d’amélioration de la qualité de vie avec les conséquences de pathologies invalidantes à long terme, et enfin dans le but de limiter les coûts humains et financiers (Lacroix, 2007). On peut ainsi remarquer que cette exigence pour la qualité des soins, rejoint certains facteurs permettant de favoriser la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie. Notamment aux niveaux de la compréhension par le patient, et de l’implication active du patient et de l’entourage. 17 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 3.3.2. La coordination des soins pour mieux répondre à la problématique du patient : une piste pertinente pour la motivation? Le principe de la coordination des soins vise à rompre avec la pluridisciplinarité : la juxtaposition des intervenants de manière parallèle, sans lien ou interaction entre eux. Cette organisation aboutissant à un morcellement du patient entre les intervenants, à un égarement de la personne, une confusion de l’information, et surtout une difficulté à répondre efficacement à sa problématique (Boulanger, 2004). Une meilleure coordination des soins est possible avec l’interdisciplinarité. Elle permet un enrichissement mutuel par le partage d’informations et d’expertises, et la convergence de l’intervention de chacun vers un but commun : celui de pouvoir envisager la personne d’une manière plus globale, de cerner sa problématique avec une meilleure acuité, et de pouvoir y répondre de manière pertinente (Boulanger, 2004). Une coordination encore plus aboutie serait la transdisciplinarité : consistant cette à fois à placer tous les acteurs sur un pied d’égalité, afin que chacun vienne enrichir les efforts de l’autre. Ainsi le patient et son entourage feraient partie intégrante de l’équipe, le savoir accessible et partagé par tous. La personne a un rôle actif, elle donne son avis, elle influence les décisions, et coproduit le plan d’intervention qui la concerne (Goullet de Rugy, 2002). Ainsi, tendre vers plus de transdisciplinarité pourrait permettre non seulement une meilleure information, une meilleure compréhension par le patient, mais permettrait peut-être de mieux cerner les besoins de la personne, de l’impliquer d’avantage dans l’élaboration du projet individualisé, et pourquoi pas de mieux l’accompagner pour développer une motivation pour la prise en charge en ergothérapie. La transdisciplinarité pourrait donc constituer un moyen intéressant de favoriser la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie, et pour le projet de soins en général. Cependant, viser l’interdisciplinarité, voire la transdisciplinarité, suppose de mettre en place des moyens de communication adaptés entre les différents acteurs, et requiert également des dispositions personnelles de la part de chacun (Boulanger, 2004). 4. Le Plan d’Intervention Interdisciplinaire Individualisé. Le Plan d’Intervention Interdisciplinaire Individualisé (PIII) apparait comme une hypothèse intéressante pour favoriser la motivation du patient adulte victime d’AVC pour la prise en charge en ergothérapie, et lui permettre ainsi de trouver une réponse à sa problématique complexe. 18 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 4.1. Qu’est-ce que le PIII ? A la fin des années 1970, les équipes pluridisciplinaires de soins de suite et de réadaptation canadiennes ont cherché à améliorer leur travail d’équipe, pour justement mieux répondre aux besoins rencontrés par les patients. En parallèle, les premières classifications du handicap et du fonctionnement ont vu le jour, dans le but de mieux envisager la problématique des patients et du handicap, et de faciliter le partage d’information par l’adoption d’un langage commun. En 1984, à l’Institut de réadaptation de Montréal, l’équipe du Pr Y-L Boulanger s’est donc penchée sur l’élaboration d’un outil de coordination et de mise en commun du travail, dans le but d’aboutir à une prise en charge plus efficiente. Après de nombreuses expérimentations, le Plan d’Intervention Interdisciplinaire Individualisé a pu voir le jour, en 1985. Il est alors défini par ses auteurs comme un outil de synthèse, qui réunit les observations de l’équipe multidisciplinaire, les attentes du patient, les objectifs spécifiques, ainsi que les actions à mener (Jamet & Herniotte, 2005). Le PIII est basé sur des réunions formalisées, qui réunissent tous les acteurs du projet de soins en rééducation-réadaptation : l’ensemble des intervenants de l’équipe soignante, le patient et son entourage (ou des personnes impliquées, comme le médecin traitant ou un auxiliaire de vie par exemple). Le PIII est interdisciplinaire, mais tend vers le principe de transdisciplinarité, avec la participation du patient en tant qu’acteur de son projet. Il est organisé selon le modèle de la Classification Internationale des Déficiences, Incapacités et Handicaps (OMS, 1980, cité par Jamet & Herniotte, 2005), et du Processus de Production du Handicap (Fougeyrollas, 1998, cité par Jamet & al., 2005) qui visent à mieux comprendre la pathologie et ses conséquences sur l’existence de la personne. Le PIII est aujourd’hui un outil utilisé par de nombreux centres de soins au Canada et en France. Une formation d’équipe est cependant nécessaire pour pouvoir le mettre en place, et l’utiliser au mieux. Jamet et Herniotte (2005) ont bien su résumer tout l’intérêt que peut représenter cette démarche : « Utilisé par les soignants, avec la participation du patient et de ses proches, cet outil permet, à l’occasion d’une réunion protocolaire, de structurer et de synthétiser la pensée, d’élaborer un projet thérapeutique et de le rédiger sous la forme d’un contrat (…). Le PIII est en quelque sorte un temps de pause, un arrêt sur image. Un moment 19 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) où chacun, après un constat objectif de la situation présente, va participer à la construction de l’image positive, mais non utopique, vers laquelle tend le patient. ». 4.2. Déroulement du PIII : entre inter et transdisciplinarité Le PIII est donc un instrument qui se situe entre interdisciplinarité et transdisciplinarité. Il est mis en place à la demande d’un des intervenants, ou suite à une demande du patient et de son entourage, c’est-à-dire quand la situation nécessite de réfléchir ensemble autour de la problématique complexe du patient. Chaque réunion dure une heure, et tous les participants sont réunis autour d’une table. Un animateur va diriger la réunion, en s’assurant du respect du temps de parole de chacun, de la durée de la séance, et de son bon déroulement. Un rédacteur va remplir un document de synthèse sous forme de contrat signé, transmis à tous les intervenants et contenant le résumé : des déficiences, des incapacités et situations de handicap liés à la pathologie, à l’identité de la personne, et à son environnement matériel et humain ; puis les objectifs de soins, concertés et acceptés par tous. La présence du patient et de son entourage implique que le vocabulaire employé par les soignants soit adapté : pour la compréhension de tous, les termes utilisés se doivent d’être clairs et précis, et prononcés en toute franchise. Le PIII se doit d’être un temps et un lieu privilégiés d’échange, d’expression libre, de vérité et de réflexion autour de la problématique de la personne, chacun apportant son expertise et ses compétences. La réunion du PIII consistera dans un premier temps en un rappel de la situation : un point est fait sur la pathologie, son contexte, ses conséquences en termes de déficiences et d’incapacités. Les différents intervenants expliquent leur évaluation de la situation, tandis que l’animateur s’assure que l’information est bien comprise par tous. Ce moment est également l’occasion pour le patient et l’entourage de poser toute question relative à la pathologie. La seconde étape est le recueil des habitudes de vies, donc un point sur la personne, son histoire, ses activités et son environnement humain et matériel. La parole est alors donnée au patient et son entourage, ponctuée par l’intervention et les questions des intervenants. Une synthèse est ensuite réalisée, afin de clarifier la problématique de la personne, en lien avec les situations de handicap qu’elle pourra rencontrer. Consécutivement, les intervenants pourront proposer un projet d’intervention, avec des buts et objectifs clairs, et une discussion sera menée pour adapter au mieux les différentes interventions aux besoins de la personne (Jamet & Herniotte, 2005). 20 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 4.3. Un moyen pertinent pour favoriser la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie? Ce principe de réunion transdisciplinaire apparaît comme un moyen intéressant, à la fois pour l’amélioration de la qualité des soins (Sengler & al., 2010), et pour favoriser la motivation du patient pour les différentes interventions, dont celle en ergothérapie. 4.3.1. Un moyen pertinent pour favoriser la motivation du patient? Favoriser la compréhension de la situation par le patient et son entourage Le PIII est tout d’abord un moyen de mise en commun d’information. Il vise à permettre au patient et à l’entourage de comprendre la pathologie, ses conséquences, à donner des réponses à leurs interrogations, à clarifier leurs représentations sur la situation présente et à venir (Jamet et Herniotte, 2005). Favoriser la compréhension de l’intérêt de l’intervention en ergothérapie Cette délivrance d’information constituerait un moment privilégié pour que le patient et l’entourage puissent comprendre l’intérêt spécifique de chaque discipline de rééducation et de réadaptation. Pour clarifier le rôle de chacun, dans l’objectif de donner du sens et de la cohérence aux interventions, en regard de la problématique du patient. Ce moment pourrait ainsi mettre en lumière l’intérêt de la prise en charge en ergothérapie, et favoriser sa reconnaissance par le patient. Mieux cerner les besoins et la problématique de la personne Enfin, ce partage d’informations permettrait de mieux cerner les besoins et la problématique spécifique du patient, de l’envisager de manière globale, en lien direct avec l’environnement et l’histoire personnelle de la personne. Il pourrait permettre d’identifier ensemble les priorités, de poser les vraies questions, d’y répondre de manière claire et franche pour trouver des solutions satisfaisantes (Jamet & Herniotte, 2005). Permettre une participation active du patient Au cours du PIII, le patient et l’entourage doivent s’exprimer librement, être écoutés avec empathie, avec la reconnaissance de leur subjectivité, et en tant que seuls experts de leur vie (Jamet & Herniotte, 2005). La réunion doit offrir la possibilité de participer à l’identification des besoins, à la définition des objectifs et des moyens mis en œuvre. L’explication des objectifs et des moyens, leur concertation et leur contractualisation peuvent être gage de compréhension et de convergence entre la problématique et la réponse thérapeutique proposée. 21 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Permettre de rendre l’entourage facilitateur Le PIII permettrait donc d’inclure l’entourage de la personne dans la réflexion. Il pourrait permettre une meilleure information, une meilleure compréhension par les proches, dans le but de les rendre facilitateurs pour la motivation du patient. Ainsi le PIII pourrait permettre un soutien social favorable pour la motivation de la personne. Il permettrait aussi de recueillir un avis supplémentaire concernant les besoins de la personne, et de mieux envisager la problématique de réadaptation. Favoriser l’accompagnement, le soutien psychologique du patient La présence de tous les acteurs, l’effort de réflexion, de synthèse et de projection dans l’avenir, pourraient permettre de mieux envisager l’accès personnalisé aux possibilités de rééducation et de réadaptation. La situation passée et présente étant connue, le projet de vie, ou du moins le projet de soins et de sortie pourraient être abordés avec plus de sérénité, dans un cadre facilitateur (Jamet et Herniotte, 2005). Selon Jamet et Herniotte, la participation du patient et de l’entourage est difficile à gérer au niveau humain, mais cette confrontation à la réalité permet aux participants de déposer leur souffrance, leurs inquiétudes, leurs angoisses. Le langage se veut clair, mais sain et honnête. La réunion permettrait un travail de prise de conscience, de confrontation à la réalité, et de projection favorable dans l’avenir. Cette réunion constituerait donc un lieu privilégié de soutien et d’accompagnement psychologiques du patient et de l’entourage. Elle pourrait peut-être permettre un renforcement du sentiment d’auto-efficacité, un accompagnement dans l’évaluation de la situation, des chances de réussites et d’échecs, dans la projection vers des perspectives réelles et favorables d’avenir. 4.3.2. Les limites du PIII L’instauration du PIII suppose des dispositions personnelles de la part de l’équipe soignante : une envie de travailler ensemble et d’œuvrer dans un même but, ainsi que la mise en place de moyens d’interactions entre eux (Boulanger, 2004). Pour faciliter ce travail d’équipe, une formation est nécessaire, dispensée par des personnes ayant été personnellement formées par les créateurs du PIII, et bénéficiant d’une expérience en la matière. D’autre part, le PIII est assez coûteux en termes de moyens temporels et humains, puisqu’il suppose le regroupement de tous les intervenants en un même lieu pendant une durée d’une heure. La présence de l’entourage implique également une difficulté de coordination pour trouver un temps satisfaisant pour tous. 22 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) METHODOLOGIE DE RECHERCHE 1. But de la démarche de recherche La question de départ qui m’a guidé tout au long de ce travail, était de savoir comment l’ergothérapeute, au cours de l’accompagnement de personnes adultes confrontées à des situations de handicaps acquis, comme au lendemain de la survenue d’un AVC, pouvait arriver à motiver la personne pour la prise en charge. 1.1. Problématique et hypothèse Suite au travail de recherches théoriques, concernant la problématique de la personne adulte victime d’AVC, la réponse que peut lui proposer la prise en charge en ergothérapie, mais aussi sur la question de la motivation du patient, la problématique suivante a pu être formulée : Comment peut-on favoriser le développement de la motivation du patient adulte victime d’AVC pour la prise en charge en ergothérapie, dans le but de l’accompagner dans la recherche de réponses véritablement adaptées à sa problématique de réadaptation ? Après les recherches concernant la démarche de qualité, et le Plan d’Intervention Interdisciplinaire Individualisé, l’hypothèse que je propose pour tenter d’apporter des réponses à la problématique est la suivante : Le PIII permet de favoriser le développement de la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie. L’article de Jamet et Herniotte (2005) va dans le sens d’une confirmation de la pertinence de cette hypothèse. Le but de cette méthodologie de recherche sera donc de réaliser une première évaluation de l’intérêt du PIII, pour mettre en place les facteurs favorisants la motivation du patient. Cette recherche consistera donc en une première confrontation de l’hypothèse à la réalité du terrain. 1.2. Objectifs de la démarche de recherche Le premier objectif de cette démarche de recherche est donc de mieux savoir si le PIII, au travers de la démarche transdisciplinaire qu’il propose, peut avoir une influence positive sur les six facteurs pouvant favoriser la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie. 23 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Un second objectif sera d’évaluer de manière qualitative l’effet que peut avoir le PIII sur les facteurs obstacles au développement de la motivation pour la prise en charge : les troubles cognitifs et notamment l’anosognosie, et la problématique d’acceptation du handicap. Cette initiation à la démarche de recherche vise à renseigner l’hypothèse d’un lien entre la démarche transdisciplinaire, et la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie. Elle vise à éprouver cette hypothèse, à vérifier sa pertinence, par une première confrontation de la théorie à la réalité. D’autres recherches devront donc être entreprises par la suite, pour véritablement mesurer si un effet réel sur la motivation du patient est possible ou non. 1.3. Des indicateurs pour renseigner cette hypothèse Six facteurs ont pu être identifiés comme favorisants la motivation du patient pour l’intervention en ergothérapie. Ceux-ci vont nous permettre de déterminer des indicateurs, permettant d’évaluer si le PIII peut avoir un intérêt pour favoriser, ou non, cette motivation. Indicateurs concernant la compréhension par la personne de sa situation actuelle et à venir Ceci implique : la compréhension de la pathologie, de ses conséquences, et des perspectives réelles. La compréhension nécessitant une information du patient : accessible, fiable, et cohérente. Un autre indicateur sera la possibilité pour le patient de poser des questions, et d’obtenir des réponses claires. la compréhension de l’intérêt que peut représenter l’intervention en ergothérapie Les indicateurs seront : la compréhension de l’intérêt de l’intervention, des objectifs et moyens mis en œuvre, leur lien avec la pathologie et ses conséquences, la qualité et la personnalisation de l’information reçue. L’identification des besoins de la personne, et l’impression qu’en a le patient La participation active de la personne dans la définition et la personnalisation de l’intervention : La participation de la personne à la détermination de ses besoins, sa participation active dans la définition des objectifs et des moyens de l’intervention. L’expression libre et l’écoute du patient par le thérapeute. L’implication de l’entourage comme acteur facilitateur de l’intervention et de l’accompagnement : 24 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) L’information et la compréhension par l’entourage, leur implication dans l’identification des besoins et dans l’élaboration du plan d’intervention, leur participation au projet de réadaptation, et le soutien psychologique qu’ils peuvent représenter pour le patient. Le soutien psychologique et l’accompagnement du patient : L’accompagnement dans la construction d’une représentation de la situation. La relation thérapeutique et le feedback. L’accompagnement vers une projection dans l’avenir. Obstacles à la motivation pour la prise en charge en ergothérapie Il s’agira d’une part des troubles qui vont limiter les capacités de compréhension de la personne : à savoir les troubles de la perception, et certains troubles cognitifs comme l’anosognosie. L’autre obstacle analysé sera la problématique de l’acceptation du handicap, limitant la capacité de la personne à évaluer sa situation et ses perspectives d’une manière favorable à la motivation. 2. Moyens méthodologiques mis en œuvre 2.1. Choix de la population étudiée La problématique de ce travail de recherche concerne des patients adultes, victimes d’AVC caractérisé, et pris en charge en soins de suite et de réadaptation. Le terme adulte désigne ici une personne dont l’âge implique une problématique socio-professionnelle et psychologique spécifique et complexe. La population dite âgée, a été écartée, leur problématique n’étant pas tout à fait la même, comme nous avons pu le détailler dans la partie théorique. J’ai choisi cette population suite à mes expériences de stage, et suite à mes recherches dans la littérature scientifique concernant les difficultés de la prise en charge comme le manque de motivation et d’implication du patient pour son projet de soins, ou l’insatisfaction de ces patients par rapport à leur parcours de soins. J’ai également choisi de me concentrer sur une population et une pathologie donnée, dans un souci de clarté et de cohérence des recherches et des investigations. Enfin, la problématique d’acceptation du handicap peut différer selon l’étiologie des déficiences et incapacités, c’est pourquoi j’ai choisi de cibler une population suffisamment uniforme (Moley-Massol, 2004, cité par Lacroix, 2007). Compte-tenu d’un manque de moyens temporels, et d’une plus grande complexité 25 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) méthodologique, aucun patient n’a pu être sollicité directement. J’ai donc choisi de réaliser cette investigation auprès d’ergothérapeutes, participants à des PIII pour des personnes adultes victimes d’AVC, en SSR. Le recueil de données est donc indirect, et sera basé sur l’expérience des professionnels interrogés concernant les réunions de PIII, et sur son impact sur les prises en charges en séances avec cette population. 2.2. Technique de recueil de données : l’entretien individuel La technique de l’entretien individuel est apparue comme la plus appropriée à cette méthodologie, compte-tenu du but et de la nature de la recherche, et des contraintes rencontrées, notamment temporelles. L’entretien individuel constitue en effet une technique intéressante pour réaliser une première confrontation de l’hypothèse à la réalité du terrain. Il permet de donner une première approche de l’hypothèse, et d’ouvrir la recherche sur des éléments qui n’auraient pas été prévus pendant les recherches théoriques. L’intérêt de l’entretien était de pouvoir poser des questions ouvertes, sur les différents facteurs favorisant la motivation du patient pour l’intervention en ergothérapie. Afin de recueillir des données riches et développées, de rebondir sur des réponses intéressantes, et d’insister sur des éléments particuliers en cas de nécessité. L’entretien permet d’instaurer une discussion, un échange, de pousser plus loin la réflexion. Il permet également de favoriser une liberté, une spontanéité d’expression. Il peut également permettre de favoriser une expression franche de la part de l’interlocuteur, ou bien de recueillir des éléments non-verbaux de communication, venant renforcer ou non les idées. Enfin, l’entretien est moins contraignant pour la personne interrogée. Les questions peuvent être reformulées, les réponses sont totalement libres. Il est plus simple que le questionnaire car ne nécessite pas d’écriture, et requiert moins de temps pour la personne. Les entretiens seront donc semi-directifs, avec des questions ouvertes concernant les différents facteurs favorisants la motivation pour la prise en charge en ergothérapie. D’éventuelles relances seront réalisées si les réponses divergent des thèmes engagés, mais en laissant une certaine liberté et une spontanéité d’expression aux personnes interrogées. L’éventualité d’un questionnaire a rapidement été écartée. En effet, les questions auraient été vagues et complexes, les réponses amoindries, et sans la possibilité de reformuler, ou de rebondir sur des réponses intéressantes ou insuffisantes. Le débat n’aurait pas pu être suffisamment approfondi. La réalisation d’observations qualitatives sur le terrain aurait été très pertinente. Mais 26 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) cette technique n’a malheureusement pas pu être sérieusement envisagée, compte-tenu du manque de moyens temporels, et des difficultés relatives à la présence d’un observateur extérieur lors des réunions de PIII. 2.3. Choix des terrains d’investigation La première étape du recrutement a été de trouver une liste des établissements de SSR ayant été effectivement formés à la pratique du PIII, par un organisme certifié (Alister). Ces établissements ont ensuite été sollicités, afin de proposer des entretiens aux ergothérapeutes participants effectivement à des PIII pour des patients adultes victimes d’AVC. J’ai choisi de rencontrer des professionnels exerçant leur activité en SSR, car ma recherche porte sur les personnes au stade post-aigüe du parcours de soins, avant le retour sur un lieu de vie, au moment où le projet de réadaptation débute. J’ai cherché à réaliser plusieurs entretiens, pour recueillir l’expression de différentes sensibilités, une diversité de points de vue permettant d’envisager les différents aspects de la problématique, et prétendre à présenter des résultats significatifs. Finalement, trois ergothérapeutes ont répondu favorablement à la demande, sur une quinzaine d’établissements utilisant effectivement le PIII en neurologie adulte. Ces entretiens ont été réalisés par téléphone pour des raisons de simplicité. Les ergothérapeutes ont répondu à des questions ouvertes concernant les six facteurs formulés à partir de la partie théorique, dans le but de recueillir leurs points de vue spontanés sur ces thèmes, et de repérer ou non les indicateurs précédemment cités. Les trois ergothérapeutes interrogés exercent leur activité en services de SSR, en hospitalisations complète. Le troisième ergothérapeute sollicité a également une expérience du PIII en hôpital de jour, et une grande expérience de l’ergothérapie et du PIII en général, ce qui lui permet d’avoir un recul et une expérience intéressants pour le recueil de données. On peut également noter que l’établissement du second ergothérapeute comprend un hôpital de jour et une équipe mobile AVC intervenant après le retour au domicile des patients. J’ai choisi d’interroger des professionnels personnellement formés à la pratique du PIII, afin de s’assurer de la conformité de l’utilisation de la réunion aux recommandations de ses créateurs. Par ailleurs, un pré-test a été réalisé auprès d’un ergothérapeute rencontré en stage. Il n’a cependant pas été utilisé pour la démarche de recherche, le but étant simplement de perfectionner les questions et le recueil de données. 27 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 2.4. Considérations éthiques Le sujet de recherche a été explicité aux ergothérapeutes sollicités pour les entretiens. Les professionnels ont été informés sur le fait que cette démarche de recherche visait à « évaluer l’intérêt du PIII pour favoriser la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie ». Cette information a été nécessaire pour leur adhésion à la démarche. Un courrier électronique a été envoyé aux services d’ergothérapie concernés, afin de présenter la démarche de recherche, ses modalités, et de solliciter un entretien. Un consentement explicite a été demandé auprès des ergothérapeutes pour leur participation. D’autre part, un rappel de la liberté du professionnel interrogé concernant sa participation à la recherche a été effectué. L’anonymat, que ce soit pour les personnes interrogées ou pour les centres de rééducation-réadaptation sollicités, a été rappelé et effectivement préservé. Les enregistrements ont été conservés, et aucun ne mentionne de nom de personne ou de lieu. Enfin, il a été rappelé que le but de la recherche était une évaluation objective de l’intérêt du PIII, qu’il n’était en aucun cas question de « juger » la pratique des professionnels, ni de chercher absolument à démontrer son intérêt. Les professionnels ont ainsi été appelés à s’exprimer en toute liberté, dans la recherche de la plus grande objectivité possible. 3. Limites de la méthodologie de recherche Cette méthodologie de recherche n’a pas pour objectif de démontrer l’hypothèse, les moyens méthodologiques mis en œuvre ne le permettront pas. Elle vise simplement à vérifier sa pertinence, à la confronter une première fois à la réalité de terrain. En effet, le recueil de données est indirect, il ne permet pas de savoir véritablement si la motivation du patient pour la prise en charge est améliorée ou non. Aucun patient n’a malheureusement pu être sollicité, et aucune observation directe n’a pu être menée sur le terrain. Seul le sentiment, le ressenti du professionnel pourra être évalué. Les indicateurs pourront seulement permettre de se prononcer sur la possibilité d’un intérêt du PIII pour la motivation du patient. Le nombre de professionnel interrogé constitue également une limite, et ne permettra pas de rendre un avis significatif et représentatif. L’idéal aurait été de recueillir des réponses auprès d’un échantillon plus significatif. Néanmoins, ces trois professionnels, d’expériences et de sensibilités bien différentes, pourront commencer à renseigner la pertinence de l’hypothèse sur les principaux facteurs de motivation, suffisamment à ce stade initial de la recherche. Le temps imparti à la réalisation des entretiens a été un frein important (40 minutes). 28 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) De plus, le fait que les professionnels aient été formés au PIII constitue un biais. On peut penser que leur discours sera conditionné pour justement répondre favorablement aux indicateurs identifiés, qui sont étroitement en lien avec les recommandations de pratique. Néanmoins les indicateurs constituent des données plutôt objectives, de même que les questions qui s’y rapportent. D’autre part, les professionnels mentionneront certainement « une volonté d’information du patient » par exemple, sans forcément remettre en cause leurs compétences et leurs pratiques, chose qui sera donc difficile à vérifier. Cependant les professionnels ont été appelés à s’exprimer en toute franchise, et les thèmes des questions ne portent pas sur leur pratique, mais bien sur le PIII, qu’ils n’ont pas de raison de défendre. 4. Méthode d’analyse des entretiens Les entretiens ont été enregistrés, puis retranscrits intégralement par écrit. Les mots, groupes de mots et phrases pertinents, recueillis de manière spontanée lors des entretiens en réponse aux questions concernant les six facteurs de la motivation, ont été isolés, regroupés et classés en fonction de leur sens et de leurs fréquences d’apparition. Ces données ont ensuite été classées en regard des indicateurs identifiés et précédemment énoncés. Une analyse qualitative des éléments de réponse obtenus a ensuite été réalisée concernant chaque indicateur, en fonction du sens et de la récurrence d’apparition. 29 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) RESULTATS ET DISCUSSION Il convient donc à présent de présenter les données recueillies, de les mettre en lien avec les indicateurs repérés, pouvant révéler ou non une influence favorable sur la motivation pour la prise en charge en ergothérapie. 1. Présentation des résultats 1.1. Concernant la compréhension par le patient de la situation Compréhension de la pathologie et de ses conséquences : Tous les professionnels interrogés mentionnent spontanément le fait que la pathologie et les déficiences sont décrites et expliquées au patient et à l’entourage. Les trois ergothérapeutes ajoutent qu’un effort d’information, de clarté, de synthèse est réalisé, dans le but favoriser la compréhension : « comprendre c’est d’abord informer, informer c’est expliquer de manière claire » (E2, ligne 43). La possibilité de poser des questions, et avoir des réponses claires : Deux ergothérapeutes relèvent également le fait que patient et l’entourage peuvent librement poser des questions : relatives à la pathologie, à ses conséquences, et aux perspectives d’évolution. Selon ces professionnels, les réponses obtenues sont également claires et comprises (E2, E3). Le PIII constitue en cela « un moment privilégié » (E3, 1721), « LE moment de partage, d’écoute, et d’explication » (E2, 132). Cohérence du projet, des interventions, des perspectives : Les ergothérapeutes soulignent aussi le fait que les différentes interventions sont expliquées durant la réunion. Leurs liens avec la pathologie, les incapacités, est établi. Selon ces professionnels, la cohérence du parcours de soins est visible. Un effort est réalisé pour l’explication avec clarté et synthèse des situations de handicap, et de leurs liens avec les objectifs des différentes interventions, et des perspectives. Clarifier la situation et les représentations de chacun : Deux ergothérapeutes notent également que cette réunion est un moment privilégié pour faire le point, clarifier la situation et les représentations de chacun (E2, E3). Il permet de redire les choses de manière claire, d’officialiser et de s’assurer de la bonne information de tous les acteurs (E2, E3). Le premier ergothérapeute interrogé ne s’est pas prononcé sur ce 1 Dans un souci de clarté, ( E3, 172 ) = Entretien n°3, ligne 172. 30 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) thème, en précisant que le médecin du service « était polonais » (E1, 16), dirigeait les réunions mais « n’était pas toujours compris par les patients » (E1, 23). Fiabilité, qualité et accessibilité de l’information : Deux ergothérapeutes insistent sur la force que peut prendre l’information et l’explication : non seulement elle est synthétique et claire pour tous, mais « surtout tout le monde tient le même discours » (E2, 52), tout est « expliqué avec des exemples concrets, des exemples au quotidien, des bilans » (E3, 97). De l’autre côté, « tout le monde entend la même chose, avec les mêmes mots » (E3, 79, 97, 104). Les choses sont entendues, comprises, fiables et officielles. Cette réunion est également l’occasion de « mettre l’accent sur les problèmes », « d’insister » (E2, 39, 52 ; E3, 113). Enfin, un professionnel mentionne le fait que le document de synthèse du PIII, établi et signé par tous les participants, constitue un atout majeur pour l’information et la compréhension. En effet, « ce document est finalement le seul document officiel, clair et synthétique (…), transmis directement et accessibles à tous, (…) contenant toutes les informations importantes » (E3, 120). Il constitue « une référence de là où en est le patient à un moment t (…), de la pathologie, ce qui va poser problème, ce qu’il peut espérer, ce qui va être entrepris et pourquoi », de comment cela va être mis en œuvre (E3, 120), et « avec des échéances » (E3, 179). 1.2. La compréhension de l’intérêt de la prise en charge en ergothérapie Connaissance de l’ergothérapie : Tous les ergothérapeutes interrogés rappellent le fait que l’information, l’explication concernant la prise en charge en ergothérapie, sa nature, sa place, et sa dimension, est réalisée en amont du PIII, au cours de l’évaluation initiale. Les trois ergothérapeutes relèvent que le PIII n’apporte pas plus que ce qui est fait en amont. Le patient « n’est pas surpris » (E3, 111), « il ne tombe pas des nues lors de la réunion » (E2, 139). De plus, le PIII « arriverait quand même très tard pour comprendre l’intervention, il y aurait alors un problème » et un gâchis de temps à ce niveau-là (E3, 51). Tous les ergothérapeutes soulignent la nécessité d’un effort : d’explication, de clarté, d’un lien avec des exemples concrets de vie quotidienne, pour favoriser la compréhension. Cependant, tous les ergothérapeutes rappellent qu’une information et une explication de l’intervention, de ses buts, objectifs et moyens et réalisée pendant la réunion. Pour redire, clarifier, faire le point et officialiser les choses. Deux ergothérapeutes soulignent que l’apport 31 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) du PIII à ce niveau dépend de comment a été fait le travail en amont, et à quel moment le PIII se déroule (E2, E3). La reconnaissance de l’intérêt de la discipline : Un point important soulevé par un des ergothérapeutes est la reconnaissance de l’intervention, des propos de l’ergothérapeute au cours de la réunion. Le PIII va permettre d’officialiser la prise en charge en ergothérapie, de mieux positionner l’ergothérapie dans le projet du patient, et de lui donner une force et « une visibilité, une reconnaissance avec la présence et le soutient des autres professionnels dont le médecin » (E3, 151). 1.3. Concernant l’identification des besoins du patient Les habitudes de vie, l’histoire personnelle, l’environnement de la personne : Pour tous les ergothérapeutes, le PIII a un intérêt pour renseigner les soignants sur les habitudes de vie antérieures de la personne. Deux ergothérapeutes interrogés rappellent ici aussi l’intérêt du travail réalisé en amont du PIII, au cours des séances (E2, E3). Tout dépend de ce qui est fait avant, de comment ce travail est réalisé (E3). Si l’ergothérapeute utilise un moyen adapté pour le recueil des besoins, l’apport du PIII sera limité, mais sinon la réunion peut avoir un véritable intérêt (E2, E3). Deux ergothérapeutes soulignent aussi l’intérêt de réaliser la visite à domicile avant la réunion, de rencontrer la famille une première fois avant, pour pouvoir mieux préparer la réunion (E1, E2). Il faut que la réunion serve à faire un point, à mettre en place des actions, plutôt qu’à découvrir l’entourage et le contexte de vie de la personne (E2, E3). Clarifier la problématique de la personne : Tous les ergothérapeutes interrogés soulignent néanmoins un apport du PIII pour faire un point sur les besoins. Il va permettre de préciser, prioriser les besoins, de « mieux les comprendre et d’imaginer ce qu’il va se passer à la sortie » (E2, 57), de cibler ce qui est important, de « mettre l’accent sur les problèmes » (E2, 43), d’identifier et comprendre les principaux obstacles pour le projet de la personne. Cet atout est d’autant plus important « dans les cas où la prise en charge part dans tous les sens [ il oblige à faire le point dans les situations difficiles ], quand quelqu’un en ressent le besoin » (E3, 130). Le moment auquel intervient le PIII dans le parcours de soins du patient est également déterminant. Si le PIII intervient dans le cadre d’une hospitalisation complète, la priorité est au retour au domicile, aux préconisation 32 d’aides techniques et humaines, aux LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) premières démarches administratives, et aux projets d’aménagements architecturaux (E1, E2). S’il intervient plus tard, en hôpital de jour notamment, alors les questions de réadaptation socio-professionnelles, l’orientation du patient vers des services spécialisés pourra être posée et facilitée. En hospitalisation complète, « la continuité des soins est discutée, sa mise en œuvre peut être organisée (…), mais cela reste rare à ce stade » (E2, 72). Proposer des réponses directes à ces besoins : Deux ergothérapeutes rapportent également un apport pour une meilleure coordination entre les soignants et la famille pour la mise en œuvre d’actions, notamment pour les démarches administratives et de financement, avec l’ergothérapeute et l’assistante sociale (E1, E2). Le PIII permet alors de favoriser, de simplifier, améliorer l’efficacité de la détermination et de la réponse au besoin, pour une réponse plus directe (E2). Un autre professionnel rappelle cependant que le travail réalisé en dehors du PIII reste l’essentiel, qu’ « il ne faut pas attendre le PIII pour réaliser ce travail », et que le PIII n’est qu’ « un point d’étape » (E3, 35). L’intérêt de la présence de membres du personnel soignant est relevé par deux ergothérapeutes (E1, E2). Cette présence permettant de donner un avis précis sur ce que fait la personne au quotidien, d’améliorer l’évaluation des besoins d’aides techniques et humaines pour le retour au domicile (E1, E2). Le dernier ergothérapeute ajoutant cependant que ce travail était d’avantage réalisé au quotidien, et qu’une nouvelle fois le PIII était plus un point sur la situation et les besoins (E3). Enfin, les trois ergothérapeutes interrogés remarquent un grand intérêt de la présence de l’entourage dans ce point réalisé sur les besoins de la personne, notamment pour prévoir le retour au domicile, et débuter les démarches concernant les aides techniques et humaines. Un professionnel soulignant même spontanément que cette présence pouvait peut-être favoriser la motivation du patient, mais n’était pas le levier le plus important (E2). 1.4. Concernant la participation active du patient dans le plan d’intervention en ergothérapie Participation à l’identification des besoins, aux objectifs et moyens de l’intervention : Une fois encore, les trois professionnels interrogés avancent que la réunion est préparée en amont avec le patient. Ainsi les objectifs sont proposés, expliqués, discutés, décidés avant la réunion. Un ergothérapeute soulignant une nouvelle fois que « le PIII arriverait tard dans la prise en charge pour commencer à réaliser ce travail », et que le PIII 33 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) servait d’avantage à établir des objectifs communs transdisciplinaires (E3, 75). Néanmoins, un souci de partager l’élaboration du plan d’intervention avec le patient, de laisser la place à son expression, de lui offrir une place d’acteur, est relevé chez les trois ergothérapeutes interrogés. Le patient est « censé être acteur de la prise en charge, avec ou sans PIII » (E2, 152). Il faut « discuter avec le patient pour pouvoir axer la prise en charge sur ses véritables besoins, et proposer une intervention qui ait du sens et de l’intérêt pour lui » (E2, 154). C’est « le projet de vie du patient, il faut que l’on soit en accord sur ce que l‘on va proposer, on ne va pas aller à l’encontre (…) Sinon ça n’a pas de sens » (E1, 105). Parole, écoute du patient lors de la réunion : Les trois ergothérapeutes rapportent que le patient bénéficie d’un temps de parole pour l’élaboration des objectifs en ergothérapie durant la réunion, qu’il peut s’exprimer librement, être écouté. Le patient « a la parole, il s’exprime sur ses attentes, ses besoins, ses projets à la sortie » (E2, 112), « l’ambiance est vraiment propice à l’expression, c’est LE moment où il peut s’exprimer et être entendu, il n’est pas mal à l’aise loin de là » (E2, 132). « On essaye de l’inclure au maximum » (E2, 33). Le PIII permet alors de donner du sens et de la cohérence au projet de soins, et à l’intervention en ergothérapie (E1, E2, E3) : « Un point est fait sur les objectifs, les moyens, les buts, on en rediscute, on recadre quand c’est nécessaire, c’est un bon moment pour y réfléchir à nouveau » (E3, 73). Un point clair est réalisé concernant les attentes, « le patient demande, le médecin explique si c’est possible avec la pathologie, nous on propose ce qui peut être réalisé » (E2, 116). Tous s’accordent donc à dire que le PIII est un atout pour permettre la participation active du patient dans l’élaboration de son projet, et de la prise en charge en ergothérapie, mais rappellent la nécessité de ce partage au quotidien. Des limites à la participation active de la personne : Deux ergothérapeutes vont cependant spontanément mentionner une limite à la participation active du patient, à savoir la présence de troubles cognitifs importants : « si la personne a vraiment un tableau massif au niveau cognitif, qu’elle ne comprend pas, qu’elle est aphasique, on va essayer…(…) Mais on ne la rendra pas plus actrice » (E1, 167), « on va essayer mais ça ne va pas changer grand-chose (…), l’anosognosie restera » (E2, 53). Ces deux ergothérapeutes vont même spontanément mentionner deux obstacles principaux : les troubles cognitifs avec notamment l’anosognosie, et l’aphasie (E1, E2). 34 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 1.5. Concernant l’implication de l’entourage Tous les professionnels interrogés relèvent un grand intérêt de la participation de l’entourage du patient aux réunions de PIII. La compréhension par la famille ou l’entourage : Le PIII va ainsi permettre une meilleure compréhension, de la pathologie, de ses conséquences, de la situation et de son évolution, et de ce qui va pouvoir être fait pour répondre à la problématique de la personne (E1, E2, E3). Il va permettre de clarifier les choses, d’ « acquérir des connaissances importantes » pour la suite (E1, 108). Deux professionnels mentionnent spontanément un intérêt du PIII en cas d’anasognosie de la part de l’entourage. Le PIII va ainsi permettre de connaitre et de clarifier leur représentation (E2, E3). Tous les soignants ont le même discours, « tout le monde entende les mêmes choses, avec les mêmes mots » (E3, 79). Il va permettre une prise de conscience, de « ne pas laisser d’espoirs infondés » (E3, 95). Un ergothérapeute souligne également que la réunion, avec « le soutien des autres professionnels » pendant le positionnement de l’ergothérapeute, va permettre à la famille de « mieux cerner la prise en charge en ergothérapie », et « de la reconnaitre » à l’instar des autres disciplines (E3, 151). La participation active de l’entourage : La participation de l’entourage va avoir un intérêt pour l’élaboration et la mise en œuvre du projet de réadaptation, il va permettre de mieux envisager le retour au domicile (E1, E2, E3). Il peut faciliter la coordination avec la famille et les autres soignants, dont l’ergothérapeute, et également d’identifier d’éventuels problèmes par rapport au retour, dans leurs relations (E1, E2). Pour tous les professionnels interrogés, la présence de la famille va aussi être un atout pour la prise en charge en ergothérapie, et notamment en cas d’aphasie, ou de troubles cognitifs limitant les capacités du patient à participer activement à la prise en charge (E1, E2, E3). Rendre l’entourage facilitateur pour le soutien et la motivation du patient : Deux ergothérapeutes ont souligné le fait que l’implication de l’entourage allait représenter un plus pour la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie (E2, E3). 35 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 1.6. Concernant l’accompagnement de la personne Accompagner la personne dans la construction d’une représentation favorable : Deux ergothérapeutes (E2, E3) ont mentionné que la réunion du PIII était un moment privilégié dans le parcours du patient. Cette réunion « créée une dynamique favorable » (E2, 163), permet de poser les vraies questions, d’identifier les vrais problèmes ». Elle permet d’ « accompagner la personne vers une projection dans l’avenir » (E2, 163), mais en restant dans la réalité. Améliorer l’accompagnement : Selon un ergothérapeute, la réunion peut aussi permettre de découvrir certains traits de personnalité, d’en discuter, et d’ajuster l’accompagnement en fonction (E2, 143). Un autre professionnel mentionne que justement le PIII revêt un grand intérêt « quand on a besoin de faire le point, (…) quand on a besoin de poser les choses, (…) quand quelque chose ne tourne pas rond et que l’accompagnement du patient est difficile, (…) quand une situation est bloquée » (E3, 130, 175). 1.7. PIII et problématique d’ acceptation du handicap Tous les professionnels interrogés ont confirmé un intérêt de la réunion du PIII dans les cas de difficultés psychologiques, notamment dans l’acceptation du handicap. La réunion, par son déroulement et par le cadre qu’elle instaure, est « un moyen à la fois efficace et intelligent pour aider la personne » dans ce cheminement (E3, 92). Le fait que « tout le monde tienne le même discours (…), permet de confronter aux difficultés » (E2, 52), « parfois la personne reconnait cette difficulté (…), on peut ressentir une remise en question » (E2, 55), il y a une « dynamique favorable » (E2, 163). La clarification des représentations, avec la présence du médecin et l’information, vont aussi permettre de ne pas laisser d’espoirs infondés, de donner de la force aux propos (E1, E2, E3). Les trois professionnels ont mentionné un grand apport du PIII à ce niveau. Certains ont même rapporté que ce repère officiel, entendu de tous, permettait de s’appuyer dessus pour l’accompagnement lors des prises en charges à venir si le problème persiste (E3, 82). 1.8. PIII et anosognosie Tous les professionnels ont spontanément identifié l’anosognosie comme étant l’obstacle majeur, pour que le patient soit motivé pour la prise en charge en ergothérapie. 36 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Aucun d’entre eux n’a repéré d’intérêt particulier du PIII en cas d’anosognosie pour le patient, en soulignant le fait que quoi qu’il arrive, la non-reconnaissance restera, et que la personne ne sera pas actrice de la prise en charge. En revanche, deux professionnels ont spontanément noté que dans ces cas, la difficulté peut être compensée par la présence de la famille, qui pourra mieux comprendre, et être un allié pour le projet de retour au domicile (E2, E3). 2. Discussion 2.1. Analyse des données en réponse aux indicateurs Un moyen intéressant pour favoriser la compréhension de la situation par le patient La première réponse intéressante est que le PIII peut permettre une meilleure compréhension, par le patient et par son entourage : de la pathologie et de ses conséquences, des possibilités de rééducation et de réadaptation en réponse à ces conséquences, et de la cohérence générale du projet de soins pouvant être mis en place. Conformément à ce qui avait été proposé par Jamet & Herniotte (2005), la réunion du PIII constitue véritablement un moyen intéressant pour l’information et surtout la compréhension par tous de la problématique. Une exigence d’information du patient, des efforts de clarté et de synthèse, est reportée concernant le déroulement de la réunion. De plus, le cadre de la réunion avec la présence du médecin, la possibilité de poser des questions, et le document transmis aux participants, rendent l’information accessible, et lui apporter une fiabilité importante. Cette information, sa qualité, son caractère officiel et sa fiabilité pour le patient, sont des éléments fondamentaux reconnus comme pouvant favoriser la motivation du patient (Maclean et al., 2000). Cette donnée est très importante en regard de la problématique motivationnelle du patient pour la prise en charge en ergothérapie. Elle permet également de limiter l’angoisse et l’incertitude, la résignation pour le patient, qui sont généralement causées par la confusion des informations (les « mixed messages », Maclean et al., 2000). La réunion du PIII constitue le seul moment dans le parcours du patient pouvant mener à une telle synthèse, à une compréhension de la globalité de la problématique par tous. Il a été élaboré en ce sens, et sa mise en œuvre semble satisfaire à cette exigence. Sur ce point le PIII semble donc être une piste intéressante pour favoriser la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie, et pour le projet en général. La présence du patient et de l’entourage peut obliger les professionnels à faciliter la compréhension, à officialiser le discours et les 37 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) prises de positions. Ceci pourra ainsi aider la personne à mieux évaluer la situation, ses chances de réussites et d’échecs concernant la rééducation et la réadaptation, et ajuster la représentation de la situation et de ses perspectives. Ces éléments sont des éléments facilitateurs de la motivation, au sens de Maclean & Pound (2000), comme aux sens d’Atkinson (1967, cité par Fenouillet, 2012) ou Bandura (2003, cité par Fenouillet, 2012). Le PIII peut jouer un rôle favorable pour la compréhension de l’intérêt de l’intervention en ergothérapie, mais ce facteur dépend surtout de ce qui est réalisé pendant l’intervention Concernant la compréhension et la reconnaissance de l’intervention en ergothérapie, on constate que le PIII ne permet pas une grande avancée, l’essentiel étant réalisé en amont, au cours des séances individuelles. Le travail réalisé par le professionnel au quotidien reste l’élément clé pour la compréhension par le patient de son intérêt. Néanmoins, la compréhension de la situation, le point réalisé sur les représentations de chacun, sur les possibilités, peut tout de même agir en faveur d’une meilleure compréhension de la prise en charge en ergothérapie. La réunion permet de bien positionner le rôle de l’ergothérapeute, favorise la coordination de l’intervention avec la famille et les autres intervenants, favorise sa reconnaissance par le soutien des autres professionnels. La réunion permet de mieux l’intégrer dans la cohérence du projet individualisé, de donner un sens concret à la prise en charge en lien avec la problématique mise en lumière pendant la réunion. Cette réunion, avec une attitude favorable du professionnel au cours des séances, peut permettre à la personne d’intégrer et reconnaitre l’intérêt de la prise en charge en ergothérapie, et ainsi favoriser le développement d’une motivation « extrinsèque » d’avantage autodéterminée pour la prise en charge (Deci & Ryan, 1985, cités par Fenouillet, 2012). Un apport limité pour l’identification des besoins, mais une possibilité de montrer à la personne que sa problématique est bien prise en compte, que des réponses sont possibles Au niveau du recueil de données et de l’identification des besoins du patient, le PIII ne semble a priori pas apporter beaucoup plus que le travail réalisé en amont. Il peut permettre de recueillir des données supplémentaires avec la présence de l’entourage, surtout si il constitue une première rencontre ou que la visite au domicile n’a pas encore été réalisée. Il peut surtout permettre de confirmer l’identification des problèmes, par l’intégration directe de l’avis du patient et de l’entourage. Sur ce point, l’apport principal selon les professionnels interrogés est avant tout la 38 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) synthèse des informations, leur hiérarchisation en regard de la problématique, avec la présence des personnes concernées pour valider ou non ce qui est mis en avant. La présence de tous les intervenants permet alors de clarifier, de montrer au patient et à l’entourage que leurs besoins sont bien compris et identifiés, et des liens directs peuvent être réalisés avec des possibilités, des solutions. Le PIII semble donc avoir un intérêt pour que le patient ressente que ses besoins sont correctement identifiés, et peut donc jouer un rôle favorable pour sa motivation (Maclean & al., 2000 ; Kemp, 1988). La présence de tous les intervenants, dont l’ergothérapeute, permet aussi de démarrer des travaux en coopération sur une base commune, et de présenter directement des solutions concernant les différents domaines de réadaptation. Ce point peut paraître beaucoup plus vague, hypothétique, si les réunions transdisciplinaires ne sont pas réalisées. Ici le lien, la possibilité de réponse, est directe et accompagnée d’explications. La personne a la possibilité de jouer un rôle actif dans l’élaboration du projet Le déroulement semble être en accord avec les recommandations, la parole est laissée à l’expression du patient et de l’entourage. La dynamique et l’ambiance générale sont favorables à la libre expression. La réunion semble consister en un moment privilégié pour exposer les vrais problèmes, les vraies questions, les vrais besoins. Il ressort de ces entretiens qu’un effort est réalisé de la part des professionnels pour permettre au patient de jouer un rôle actif, aussi bien dans le projet de soins, que dans la prise en charge en ergothérapie. La réunion donne effectivement la possibilité au patient de participer. Il peut poser ses questions concernant la pathologie et les différentes interventions. Il peut donner son avis sur les propositions des intervenants, sur ses besoins, ses attentes et ses priorités. De plus, le patient peut s’exprimer en tant que personne. La place est faite à la description de ses habitudes de vies, de son histoire, dans le respect de sa subjectivité. Il peut également s’exprimer sur ses attentes, ses doutes, mettre des mots sur la souffrance et l’incertitude. Il peut également intervenir si des choses ne vont pas concernant les prises en charge, il peut manifester son mécontentement, son incompréhension, en étant sûr que ses revendications seront entendues. Le point peut être fait sur ce qui va, ou ce qui ne va pas dans son parcours. Cette possibilité de s’exprimer, d’être entendu, de jouer un rôle actif, rejoint également la compréhension de la situation et des interventions. Ces deux éléments vont dans le même 39 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) sens, ils se complètent dans un sens favorable à la motivation du patient, car ils vont dans le sens d’une intégration plus autodéterminée de l’intérêt de l’intervention en ergothérapie (Maclean & Pound, 2000 ; Deci & Ryan, 1985, cités par Fenouillet, 2012). L’échange sur les objectifs, les moyens des interventions, va permettre d’identifier des stratégies et des objectifs pour répondre aux besoins, ce qui nous renvoie à la théorie du positionnement d’objectif de Locke (1967, cité par Fenouillet, 2012). La présence de l’entourage représente un grand intérêt, surtout pour le projet en général La famille est informée avec clarté et fiabilité, elle peut mieux comprend la pathologie et la situation, la cohérence du projet, elle intervient pour apporter ses connaissances sur la personne, et son avis sur la problématique. De plus, cette présence se révèle être un atout considérable en cas de difficultés relatives à l’état de santé du patient, pour mieux cerner la problématique, et y apporter des solutions significatives et concrètes. L’apport pour mieux préparer le retour du patient dans son contexte de vie est significatif pour les personnes interrogées. Cette participation de l’entourage permet également de l’inclure en tant qu’élément facilitateur pour l’accompagnement du patient vers une motivation pour le projet de soins, et notamment pour la prise en charge en ergothérapie. La compréhension de la problématique de réadaptation permettant à l’entourage de jouer son rôle de soutien en étant éclairé, ce qui peut permettre de jouer favorablement du lien affectif entre patient et entourage (Maclean et al., 2000). D’autre part, la réunion du PIII peut permettre une meilleure reconnaissance de l’ergothérapie comme intervention importante, auprès de l’entourage. Ceci permettant ainsi une collaboration plus efficace avec la famille. Une piste pertinente pour accompagner la personne vers un projet motivant de réadaptation, et dans le processus d’ « acceptation du handicap » Au sens de Bandura (2003, cité par Fenouillet, 2012) et de Maclean & Pound (2000), l’accompagnement par le personnel soignant doit pouvoir permettre de favoriser la motivation du patient pour le projet de soins en général, et plus précisément pour l’intervention en ergothérapie. Il est bien sûr à noter que cet accompagnement intervient principalement au quotidien, lors des séances, ou encore en aparté dans les couloirs de l’établissement. Cependant, au vu du déroulement de la réunion de PIII et des entretiens réalisés, on peut remarquer cette réunion constitue un évènement privilégié et pertinent. 40 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) En effet, il créée une dynamique favorable, aussi bien pour la compréhension de la situation et des interventions, que pour la définition des besoins et des réponses à donner, que pour parler ensemble du vécu du patient. Il a souvent été rappelé que cette réunion permettait de mettre l’accent sur les problèmes, de discuter à propos des vraies questions, de faire un point sur la situation et sur l’avenir, dans un climat d’écoute, de partage, et de sincérité. Un tel moment, rare dans le contexte institutionnel hospitalier en général, peut constituer un bon point de départ, un basculement même, pour que le patient ressente le soutien qui peut lui être donné dans son parcours. Il s’agit là d’un moment d’unité, où tout le monde se fédère autour de la problématique de la personne, où tout le monde, patient et entourage compris, essaye de réfléchir ensemble pour trouver les meilleures solutions visant à améliorer la santé et la qualité de vie de la personne. Ainsi des stratégies peuvent être adoptées pour trouver des solutions, la personne peut avoir le sentiment d’être entourée par des personnes expertes pour l’accompagner, elle est accompagnée pour se projeter favorablement dans l’avenir, renforçant ainsi son sentiment d’ « auto-efficacité », et optimisant sa représentation de la situation (Atkinson, 1964 ; Locke, 1971 : Bandura, 2003, cités par Fenouillet, 2012). Ce recueil de données permet de renforcer le propos de Jamet & Herniotte (2005) : « Un moment où chacun, après un constat objectif de la situation présente, va participer à la construction de l’image positive, mais non utopique, vers laquelle tend le patient ». Ces auteurs ont émis l’hypothèse que le PIII pourrait permettre d’accompagner le patient vers la « résilience », que l’accompagnement vers l’acceptation du handicap peut rejoindre en de nombreux points. La mesure d’un tel apport reste très difficile à réaliser sans une observation précise et développée de ce qui se joue pendant la réunion. Néanmoins les réponses des professionnels interrogés viennent renforcer la pertinence cette hypothèse. L’anosognosie représente le principal obstacle pour la motivation de la personne L’anosognosie apparait comme LA limite à la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie. De l’avis de tous les professionnels interrogés, le PIII ne permettra pas d’amélioration, l’anosognosie persistera, malgré tous les efforts déployés. Il s’agit là de la première limite à l’apport du PIII, malgré la clarification, la synthèse officielle qu’il représente en bien d’autres points. Malgré que de bonnes choses puissent être mises en œuvre pour arriver à limiter l’impact de l’anosognosie, celle-ci semble inchangée même après les réunions. En revanche, l’intérêt de la présence de l’entourage peut permettre de compenser cet obstacle pour que la prise en charge en ergothérapie soit efficiente, mais le patient ne sera 41 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) vraisemblablement pas plus acteur de la prise en charge. Même si le PIII n’a pas d’impact favorable sur la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie pour ce point, il peut tout de même revêtir un intérêt pour l’intervention. 2.2. Eléments de réponse à l’hypothèse de recherche L’hypothèse de cette démarche de recherche était que le PIII pourrait permettre de favoriser la motivation du patient adulte victime d’AVC, pour la prise en charge en ergothérapie. Après ce recueil de données auprès d’ergothérapeutes participants à des PIII, on ne peut que renforcer l’intérêt de cette hypothèse, sans pouvoir l’affirmer véritablement. En effet la méthodologie de recherche mise en œuvre ne permet pas de donner une réponse suffisamment fondée. On peut cependant confirmer que cette piste transdisciplinaire mérite de faire l’objet de recherches complémentaires, dont une méthodologie plus appropriée permettrait d’évaluer précisément les effets, avec un outil de mesure de la motivation en rapport avec les facteurs identifiés, et une observation sur le terrain. Tous les professionnels interrogés ont pu spontanément révéler un possible intérêt du PIII concernant les indicateurs identifiés, à part pour les cas d’anosognosie. Cette première confrontation à la réalité du terrain permet de dire que oui : le PIII pourrait permettre de favoriser la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie, mais pas sans un travail important en amont et en aval de la réunion de la part du thérapeute, et pas dans les cas d’anosognosie. Il le permettrait en favorisant la compréhension de la situation et de l’intérêt de la prise en charge en ergothérapie, en permettant d’offrir une place plus importante au patient en tant que personne, à la fois pour définir ses besoins et les actions à mettre en œuvre pour répondre à sa problématique de santé. Il permettrait également d’accompagner le patient vers la motivation, par un soutien et un accompagnement appropriés, et en impliquant l’entourage de la personne dans cette démarche. Enfin, le PIII peut représenter une piste intéressante dans les cas difficiles, où le retentissement psychologique de la pathologie implique la mise en œuvre de moyens importants, où la difficulté de la situation nécessite de renforcer et partager les efforts de chacun, pour mieux soutenir et accompagner le patient vers une projection satisfaisante dans l’avenir. En revanche, cette hypothèse devra garder à l’esprit l’obstacle que peut représenter l’anosognosie pour la motivation du patient, même si il permet tout de même un apport pour le projet de soins dans cette situation. 42 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 2.3. Intérêt et limites de la démarche de recherche 2.3.1. Originalité et intérêts Cette démarche de recherche aura été l’occasion de s’intéresser à une problématique de fond, une question difficile, multidimensionnelle, mais pourtant fondamentale qu’est la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie. Ce sujet est finalement peu abordé dans la formation et les publications des professionnels, mais pourtant fréquemment source de questionnements dans la pratique. Elle constitue ainsi pourquoi pas un point de départ pour d’autres études, par la recherche théorique entreprise, et par la mise en avant des facteurs favorables à la motivation du patient. Des recherches futures pourront s’appuyer dessus pour développer par exemple un instrument simple de mesure de la motivation du patient pour la prise en charge, afin d’évaluer précisément l’intérêt de différents moyens, dont le PIII par exemple. Ce travail constitue un parallèle intéressant avec la démarche de qualité et de traçabilité menée par les établissements et autorités de Santé (Sengler, 2010). L’ergothérapie, en faisant le lien entre le milieu hospitalier et le milieu domestique, et par la dimension de son intervention, gagnerait à s’investir encore d’avantage dans de telles démarches, notamment aux sujets de l’information du patient et de l’entourage, de la place du patient dans l’élaboration de son projet individualisé, de l’éducation à la santé, de la coordination et de la continuité des soins. D’autre part, cette étude se veut transposable : à d’autres populations cibles, d’autres interventions de rééducation et de réadaptation, d’autres stades du parcours de soins. En effet l’intérêt de la transdisciplinarité pourra être retrouvé dans tous les cas où l’intervention de plusieurs compétences est requise. Le choix de la population d’adultes victimes d’AVC ouvre ainsi le champ aux pathologies impliquant les troubles sensori-moteurs, cognitifs, psychologiques. Un intérêt peut être retrouvé pour des recherches sur la motivation des personnes victimes de traumatismes crâniens, ou encore les enfants présentant une paralysie cérébrale. La problématique d’acceptation du handicap diffère selon l’étiologie de la pathologie et selon la personne, mais la motivation reste influencée par ces mêmes facteurs. Cette étude s’inscrit enfin dans une démarche transdisciplinaire : elle révèle comment le partage d’expertises, entre les soignants et le patient, peut permettre de trouver des solutions aux problèmes rencontrés dans la pratique. Elle révèle comment la coordination de tous peut permettre d’améliorer le travail de chacun. 43 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 2.3.2. Limites et pistes pour la poursuite de la démarche Plusieurs limites peuvent être énoncées concernant cette démarche de recherche. La première est qu’il s’agit justement d’une « initiation » à la démarche de recherche, elle n’est qu’un début de démarche, qu’une amorce. Le sujet et la problématique étant plutôt vastes et complexes, le temps imparti a été insuffisant pour pouvoir prétendre à démontrer des résultats significatifs. La technique de l’entretien auprès de professionnels pour le recueil de données était néanmoins la plus adaptée aux contraintes et aux moyens dans le cas présent. L’élaboration d’un outil de mesure de la motivation du patient, à partir des critères identifiés, aurait apporté plus de pertinence et de puissance pour répondre à l’hypothèse. Cet outil aurait pu être diffusé aux patients adultes victimes d’AVC ayant participé à des PIII, et une comparaison avec un même échantillon de personnes n’y ayant pas participé aurait pu permettre de mesurer un éventuel apport. Cette méthode aurait permis une évaluation directe, auprès d’un échantillon de personnes plus significatif et représentatif. D’autre part, la réalisation d’observations aurait également pu apporter d’avantage de précision et de vérité, concernant le déroulement de la réunion. Plusieurs observations qualitatives, avec des grilles d’observations construites à partir des indicateurs de la motivation, auraient ainsi pu être réalisées. Ces observations auraient alors pu être complétées par des entretiens individuels, auprès des ergothérapeutes participants, et des patients, afin de revenir sur ce qui s’est joué pendant la réunion en rapport avec les indicateurs. Cette méthodologie gagnerait également à être menée avec un psychologue. Enfin, un nombre plus important d’entretiens aurait pu être réalisé, pour augmenter la représentativité de l’échantillon. La qualité des données recueillies auraient pu être améliorée, notamment en prenant exemples sur des cas concrets, en les confrontant aux indicateurs. L’idée de groupes de discussion aurait aussi pu apporter un bénéfice. Cependant aucun des ergothérapeutes sollicités n’a pu se libérer pour une durée de plus de trente minutes, ce qui laisse présager qu’une telle démarche sera plutôt difficile à mener. Etudier l’apport du PIII dans différents stades du parcours de soins aurait également pu être intéressant. 44 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Conclusion Finalement, cette initiation à la démarche de recherche aura permis de souligner un possible intérêt de la démarche transdisciplinaire pour la prise en charge en ergothérapie, et pour la qualité de l’offre de soins en général. Elle a également permis d’identifier des facteurs de la motivation du patient pour la prise en charge, ouvrant ainsi la voie à la création d’un outil de mesure, et offrant des pistes pour favoriser la motivation du patient en ergothérapie. Pour revenir à ma situation d’appel, je dirais finalement que plusieurs éléments sont nécessaires pour accompagner une personne vers une projection favorable dans l’avenir, vers la construction d’un projet de vie significatif et satisfaisant, au travers de la prise en charge en ergothérapie. Tout d’abord l’information du patient est primordiale, pour sa compréhension de la situation et de ses perspectives. Disposer d’outils pertinents pour l’identification des besoins véritables est également nécessaire, pour pouvoir envisager des solutions, et trouver un intérêt à la prise en charge. Ces deux éléments pourront être facilités par une dynamique de transdisciplinarité où chacun vient renforcer les efforts de l’autre, où tout le monde offre sa compétence pour œuvrer vers un même but. Enfin, de cette dynamique pourra naître un espoir, et cet espoir devra ensuite être entretenu, soutenu, traduit en différentes actions tout au long de l’intervention. L’intérêt évoqué dans les cas de difficultés relatives au processus d’acceptation du handicap peut constituer une ouverture pertinente. D’un point de vue personnel, ce travail m’a permis d’une part de prendre le temps de réfléchir de manière rigoureuse sur ce problème de la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie. Cette démarche me permettra sans doute de mieux travailler avec la personne, en coordination avec les autres professionnels et l’entourage des personnes que je rencontrerais dans la pratique. Cette recherche m’a également offert la possibilité de mieux me projeter dans mon avenir professionnel, en tant qu’ergothérapeute, et a permis de développer ma motivation offrir mes compétences pour la problématique de personnes adultes confrontées à un handicap acquis. 45 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Bibliographie Babot, E. Cornet, N. (2010). L’ergothérapie à la croisée des chemins. In Ergothérapie en pédiatrie. Chap. 1, pp. 13-27. Marseille: Solal. Boulanger, YL. & al. (2004). Rééducation-réadaptation et interdisciplinarité. Encyclopédie médico-chirurgicale. 26-006-D-10. Boulanger, YL. & al. (2000). Comment optimiser le travail d’équipe en rééducationréadaptation. Journal de réadaptation médicale, vol. 20, n°3-4, p159. Daviet, JC. & al. (2012). L’éducation thérapeutique du patient en post-AVC : prise en charge non pharmacologique. Annals of physical and rehabilitation medicine. 55 : 641-656. Fenouillet, F. (2012). La motivation. Paris : Dunod. Ferry-Lemonnier, E. (2009). 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In Plate-forme d’échange HAS : Programme pilote AVC « Améliorer les parcours de prise en charge des AVC ». 47 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) ANNEXES Annexe 1 : La motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie……II Annexe 2 : Le PIII………………………………………………………………..III Annexe 3 : Entretiens auprès de professionnels…………………………………..V Entretien n°1………………………………………………………………V Entretien n°2………………………………………………………………XI Entretien n°3………………………………………………………………XVI I LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Annexe 1 : La motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie Présence patient + entourage + intervenants Description pathologie + incapacités PIII Habitudes de vie + situations de handicap Plan d’intervention concerté ANOSOGNOSIE Motivation pour l'intervention en ergothérapie Compréhension situation + intervention Identification des besoins Patient + entourage acteurs du projet Accompagnement, feedback Convergence besoins / réponse proposée Prise en charge en ergothérapie Patient acteur Implication entourage Accompagnement, feedback Réponse à la problématique du patient adulte victime d'AVC Projet de réadaptation Favoriser la qualité de vie II LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Annexe 3 : Le PIII III LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) IV LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Annexe 4 : Entretiens auprès des professionnels Entretien n°1 1 - En quelle année avez-vous eu votre diplôme ? 2 2012. 3 - Combien de temps avez-vous travaillé en service de neurologie adulte, en soins de suite et 4 de réadaptation ? 5 1 an, plus mes stages lors de la formation. 6 - Et depuis combien de temps participez-vous aux p3i ? 7 Depuis qu’on les a mis en place dans ce centre, donc depuis 8 mois environ. 8 - Avez-vous personnellement suivi la formation au p3i ? 9 Oui. 10 - Avez-vous participé à beaucoup de p3i ? 11 Je dirais une dixaine. 12 - Avez-vous participé à des p3i dans le cadre d’adultes victimes d’AVC ? 13 Oui 14 - Avec le p3i, est-ce que les patients comprennent bien leur situation actuelle, leurs 15 perspectives ? 16 - Alors généralement, pour vous dire franchement notre médecin est polonais, donc les p3i 17 sont compliqués parce que c’est le médecin qui fait la retranscription de toute l’équipe. 18 Généralement on est obligés de reprendre après, et disons que nous déjà en séance on a 19 tendance a beaucoup expliquer au patient tout ce que l’on fait, et pourquoi on le fait, pour quel 20 but, pour quel devenir et tout ça, mais nous en tant qu’ergothérapeutes on va dire que le p3i 21 n’est pas une finalité. 22 - Quand vous dites que le médecin est polonais… 23 Disons qu’en fait les patients comprennent pas forcément ce que le médecin veut dire. C’est 24 peut être pour ça qu’on fait aussi beaucoup de sensibilisation nous en ergothérapie, en séance 25 avant et après le p3i pour reprendre ce que le médecin a dit. 26 - Et comment se déroulent les réunions de P3i dans ce cas ? 27 En fait nous en équipe on prépare le p3i la veille ou le matin de la réunion. On se réunit en 28 équipe de rééducation donc ergo kiné psychomot ortho et quand c’est possible neuropsycho. 29 Donc on prépare nous déjà la réunion, capacités incapacités situations de handicap projet de 30 vie de la personne objectifs à courts et moyen termes. Donc quand nous on arrive en réunion 31 on donne cette feuille au médecin, le médecin en prend connaissance, on en discute, après on V LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 32 fait venir la famille et le médecin retranscrit. 33 - D’accord, j’avais vu ça en stage dans un centre, avec synthèse interdisciplianire puis rdv 34 famille… Du coup le patient comprend il bien au final ? 35 Oui. 36 - Est-ce qu’il y a des obstacles particuliers à la compréhension ? 37 Alors d’abord nous d’un point de vue psychologique, la psychologue ne fait pas partie des 38 retranscriptions de ces entretiens avec le patient dans le cadre du p3i. Parce que sachant que la 39 famille est présente, parfois elle n’a pas à être au courant de ce qu’a la personne d’un point de 40 vue psychologique. Et nous parfois on n’est même pas inclus dans cette retranscription là en 41 fait. C’est vraiment une relation duelle que le psychologue a avec le patient et si vraiment il y 42 a un gros problème alors elle en fait part sinon non. C’est leur relation de confiance qui est 43 préservée en fait. Mais du coup je dirais que ça dépend vraiment de la personne et de la 44 sensibilité qu’elle a sur ses situations de handicap et sur ses difficultés. Parce que certaines 45 personnes qui sont très anosognosiques et qui ne prennent déjà pas conscience de leurs 46 troubles en rééducation et même en situations écologiques, dans ces cas là le p3i ne permet 47 pas non plus heu.. ne permet pas non plus d’avancer de ce point de vue là. 48 - Donc dans les cas d’anosognosie, la présence du patient pendant l’énoncé des déficiences, 49 incapacités et situations de handicap, le p3i n’apporte pas plus ? 50 Ça dépend après des capacités que la personne peut déployer dans l’acceptation du handicap, 51 quand il y a beaucoup de troubles cognitifs, généralement ça n’apporte pas beaucoup plus que 52 ce que l’on peut faire en prise en charge. 53 - Au niveau des besoins et attentes du patient et de l’entourage, sont-ils correctement 54 identifiées et pris en considérations grâce au p3i ? Arrivez-vous ainsi à mieux cerner ces 55 besoins et attentes ? 56 Ça dépend en fait car nous en tant qu’ergothérapeutes on a quand même un lien privilégié 57 avec la famille avant d’arriver au p3i. Nous généralement on fait les visites à domicile très 58 rapidement donc on est en lien avec les familles très rapidement et on cible tout de suite le 59 projet de vie et tout cela. C’est vrai qu’au niveau rééducatif même, c’est vrai que parfois les 60 familles ne sont pas vraiment au courant de ce qu’il se passe et les patients ne leur en parlent 61 pas forcément en soi, ou dans le cas d’aphasie par exemple. Moi j’ai pas l’habitude de convier 62 les familles aux rééducations parce que ça peut vite être un parasite et je ne le souhaite pas. En 63 kiné par exemple ils intègrent les familles sur des temps données pour qu’ils intègrent des 64 techniques, et qu’ils puissent les mettre en œuvre par exemple lors de week end 65 thérapeutiques. 66 - Et pensez-vous que l’instauration des p3i, a permis justement de favoriser l’implication de la 67 famille et du patient dans l’élaboration du projet de soins, les visites à domicile précoces ? VI LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 68 Nous c’est strictement avant le p3i, parce que les reunion de p3i arrivent assez tard dans le 69 séjour du patient. De mon point de vue, la relation de confiance est déjà présente, et disons 70 que le p3i ça peut paraitre un peu froid quand même, avec la table ronde, la famille et le 71 patient d’un côté, l’équipe soignante de l’autre. Quand on connait déjà bien la famille, qu’on 72 s’est déjà bien incrusté dans leur vie familiale, sociale et tout ça, la tournure du p3i n’est pas 73 non plus la même. On connait mieux leurs habitudes, les kinés disutent beaucoup avec eux 74 aussi… 75 - Et si le patient a des attentes irréalistes ? comment la situation est-elle gérée ? est-ce que le 76 p3i permet de mettre les choses au clair avec le patient ? 77 Ça dépend parce que notre médecin ne prend pas beaucoup d’initiatives, donc parfois c’est à 78 nous de remplir ce rôle, ou à la cadre de santé du service. C’est vraiment du cas par cas, 79 suivant la difficulté de la situation. 80 - Et en ergothérapie, comment se déroule la définition des objectifs ? le patient et l’entourage 81 participent-t-ils ? 82 Oui, comme je vous le disais on prépare la réunion avant avec les kinés, et d’autres 83 intervenants si ils ont quelques chose à ajouter. Nous on pose nos objectifs qu’on souhaite 84 encore atteindre à court et moyen terme, et parfois on se concerte, parfois on a des objectifs en 85 commun, on aura pas les mêmes moyens ni les mêmes buts, mais c’est très pluridisciplinaire 86 et même presque transdisciplinaire. 87 - Le patient et l’entourage ont-ils leur mot à dire sur les objectifs du coup ? Ont-ils un temps 88 de parole dans tous les cas ? 89 Ha bah oui, nous on donne les objectifs qu’on a fixés au médecin qui les transmet au patient et 90 à l’entourage, et la famille a un temps de parole de toute façon à chaque p3i. Si ils souhaitent 91 rajouter des objectifs on en parle à ce moment là et nous on considère à ce moment là si c’est 92 atteingnable ou pas. 93 - Et si ils ne sont pas d’accord avec les objectifs ? 94 Généralement c’est des objectifs positifs donc ils sont plutôt d’accord, ils n’ont pas de raisons 95 d’être contre. Ça va toujours dans un sens de récupération ou d’amélioration de la qualité de 96 vie. 97 - Concernant la présence des patients et de leur entourage aux réunions ? Est-ce plus une 98 difficulté supplémentaire à gérer ? Est-ce que ça apporte beaucoup ? 99 Ça dépend vraiment beaucoup des patients. Pour les patients très anosognosiques par 100 exemple, le fait que la famille soit là et qu’elle soit de notre côté, elle devient un peu notre 101 allié. Des fois on ne souhaite pas trop que le patient soit là, parce qu’on a des difficultés avec 102 lui, dans tous les cas le patient est toujours là, mais si on souhaite parler à la famille seuls à 103 seuls alors on les voit dans le couloir après la réunion par exemple. Mais le patient est VII LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 104 toujours présent, après tout c’est son projet de vie donc même si l’on n’est pas d’accord avec 105 ce projet, on ne va pas aller à l’encontre. 106 - Et la présence de l’entourage ? 107 Et bien oui parce que le patient clairement il connait toute l’équipe, il sait à peu près ce qu’il 108 fait en rééducation avec tous les intervenants, et c’est important que la famille fasse partie de 109 cette dynamique aussi, qu’elle acquière des connaissances, sinon ça n’a pas de sens. 110 - Les infirmiers ou aides soignants sont-ils présents aux p3i ? 111 Oui, il y a tout le temps un membre de l’équipe soignante, il y a la cadre de santé aussi qui 112 prend part aux réunions, tous les intervenants du patient en somme. 113 - Et l’assistante sociale ? 114 Oui l’assistante sociale est toujours présente également. Il y a toujours une partie sociale 115 rattachée à la problématique du patient, en cas d’ALD, d’affiliation à la MDPH, à l’APA. Les 116 patients sont assez lourds pour qu’ils relèvent à chaque fois d’une aide sociale. Nous en tant 117 qu’ergothérapeutes on est très en lien avec l’assistante sociale, ça nous permet de nous mettre 118 sur la même base et de mieux travailler ensemble. 119 - Par rapport à la présence des infirmiers ou aides-soignants, est-ce que ça facilite la 120 coordination entre soignants, en favorisant par exemple l’indépendance et l’autonomie de la 121 personne ? 122 Je vais vous dire, clairement les infirmières et les aides-soignantes sont en sous-effectifs, et 123 elles n’ont pas le temps d’accorder du temps à l’indépendance et à l’autonomie de la 124 personne. Nous on a beau leur donner des pistes mais c’est à double tranchant, si elles font ce 125 que l’on souhaite au niveau indépendance et autonomie, alors les patients seront toujours en 126 retard pour les séances à 9h par exemple. C’est nous qui nous déplaçont en chambre, pour une 127 évaluation, des séances d’indépendance, ou pour faire des points réguliers ou quotidiens. Mais 128 elles ont l’avantage dans le P3i de donner un avis sur la réalité de la personne, et sur ce 129 qu’elle fait au quotidien, parce que nous on arrive quand on fait des interventions régulières 130 par exemple hebdomadaires, on voit la personne à un temps t on ne la voit pas tous les jours, 131 et les personnes notamment en neuro sont fluctuantes d’un jour à l’autre. Elles elles ont cet 132 œil là aussi, et elles permettent de savoir un peu comment appréhender le domicile avec des 133 auxilliaires de vie ou des aides soignantes qui viendraient à domicile. 134 - Au niveau de la relation thérapeutique en ergothérapie, le p3i permet-il de faciliter les 135 choses ? 136 On va dire que ça facilite les choses quand les patients n’ont pas compris, et qu’on est obligés 137 de reprendre derrière ce qui s’est dit au p3i. Sinon nous on est très clairs avec nos patients, on 138 leur explique pourquoi on fait tel exercice, pourquoi on fait telle intervention. Ça peut 139 apporter quelque chose c’est sur, mais quand on est assez clair avec la personne dès le début, VIII LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 140 ça peut pas apporter beaucoup plus. 141 - Pour des patients adultes victimes d’AVC, combien de p3i réalisez-vous en général ? 142 Normalement on devrait en avoir deux : un p3i de rééducation et un p3i de réadaptation. Nous 143 dans les faits ça ne se passe pas comme ça, on n’en fait qu’un. Niveau agenda, le p3i arrive 144 quasiment un mois après l’entrée de la personne, on a pu un peu cibler le projet de vie et les 145 capacités de récupération de la personne, et on arrive déjà à envisager comment pourrait se 146 faire le retour au domicile, donc on mélange les deux, on fait un point rééducation et on 147 prévoit dèjà la réadaptation. Le mieux ce serait d’en faire deux, mais ça n’arrive que quand els 148 patients restent longtemps, comme un an environ. 149 - A côté du p3i, faites-vous beaucoup de réunions de coordination avec l’équipe ? 150 Alors nous on fait des réunions pluri-disciplinaires toutes les semaines, dans tous les services, 151 où tous les intervenants sont présents et où on fait un point sur tous les patients en une heure. 152 On a une vingtaine de patients en moyenne dans notre service. Ça permet de faire un point si 153 il y a un problème, si il faut revoir quelque chose, comment s’est passée la semaine… Sinon 154 on a aussi des entretiens famille aussi, qui sont strictement ergo et assistante sociale, pour 155 prévoir plus précisemment les retours au domicile et les dossiers de PCH, ce genre de choses. 156 Dès qu’on doit prévoir un dossier pch pour des personnes donc de moins de 60 ans, avec des 157 demandes qui doivent correspondre au plus près de la personne, sil il y a des aménagements 158 architecturaux, des commandes de matériels etc, on inclut toujours la famille, on propose et ils 159 disposent. Par exemple pour une patiente très lourde que je suis en ce moment, je fait un 160 dossier PCH depuis depuis deux mois maintenant pour qu’elle aille dans une MAS et qu’elle 161 rentre le week end chez ses parents, je fais un point avec les parents toutes les deux semaines 162 quand même. 163 - Est-ce que pour vous, le p3i facilite le positionnement du patient en tant qu’acteur de la prise 164 en charge en ergothérapie, et de son projet de soins en général ? 165 La réponse attendue est oui ou non ? je pense que ça dépend vraiment de la personne, de sa 166 personnalité et de ses troubles cognitifs. Je ne peux pas dire vraiment, c’est du cas par cas. 167 L’anosognosie surtout. Si la personne, si la personne a des troubles massifs, qu’elle est 168 aphasique, qu’elle a des troubles de la compréhension, on la rendra pas actrice. Ou sinon si on 169 a des personnes frontales par exemple, elle sont aussi très anosognosiques et avec un handicap 170 plutôt invisible, et on les rendra pas plus actrices avec le p3i non. Après je sais pas si vous 171 avez détaillé vous l’acceptation du handicap ? Donc après voilà il y a aussi des personnes qui 172 ne vont pas jusqu’au dernier processus d’acceptation. 173 - Et quand il ya une difficulté dans l’acceptation du handicap, le p3i apporte-il quelque 174 chose ? 175 Non quand on parle de ça, je pense essentiellement encore aux troubles cognitifs, c’est le plus IX LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 176 gros frein. 177 - Et pour conclure, avez-vous le sentiment que le p3i permet de favoriser la motivation du 178 patient pour la prise en charge en ergothérapie ? 179 Oui ça peut aider, mais ce n’est pas systématique. Donc la réponse à votre problématique ce 180 serait oui, et non en raison des troubles cognitifs. X LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Entretien n°2 1 - En quelle année avez-vous eu votre diplôme d’ergothérapeute ? 2 2006. 3 - Avez-vous beaucoup d’expérience en neurologie adulte ? 4 Depuis 2006, donc 6 ans. 5 - Depuis combien de temps participez-vous à des p3i ? 6 Et bien, depuis 5 ans, oui ça a commencé un an après mon arrivée. 7 - Avez-vous personnellement participé à la formation au P3I ? 8 Oui. 9 - Est-ce des P3I sont proposés pour les personnes adultes victimes d’AVC ? 10 Oui c’est automatique, au bout de 3 semaines à partir de la date d’admission. On fait un 11 premier P3I à ce moment là, en général les patients restent deux mois donc il n’y a qu’un seul 12 P3I, sauf si il y eu problématique particulière ou si les patients restent plus longtemps, dans ce 13 cas on peut en prévoir d’autres. 14 - D’accord, et du coup en 3 semaines ça vous laisse le temps de faire l’évaluation initiale de la 15 problématique de la prise en charge de la personne… Est-ce que vous en profitez pour 16 anticiper et rencontrer la famille avant la réunion ? 17 Et bien ça arrive qu’on la rencontre avant, comme on intervient en chambre on peut etre 18 amenés à la rencontrer, ou si elle nous sollicite bien sûr. Apres ça arrive aussi que le p3i soit 19 la première rencontre avec l’entourage. Après ça varie beaucoup en fonction des personnes et 20 des situations. 21 - Comment se déroulent les réunions de P3I dans votre centre ? Qui participe, comment se 22 déroulent-elles ? 23 Alors le médecin est celui qui anime, dans la majorité des cas c’est le cadre de santé qui est le 24 rédacteur. Il y a toujours un membre du personnel soignant (soit infirmière soit aide-soignant), 25 et ensuite il y a tous les intervenants : donc ergo, kiné, psychomot, psychologue, 26 orthophoniste, assistante sociale… le patient et la famille ou son entourage proche. 27 - Est-ce que ça arrive que le patient ou l’entourage proche n’y participent pas ? 28 Hmmmm j’ai eu un cas particulier, où la personne était vraiment seule, donc il n’y avait 29 personne d’autre qu’elle au p3i. Sinon on s’est toujours arrangés pour que l’entourge soit 30 présent. Sinon on le reporte, ce serait vraiment exceptionnel que l’entourage ne soit pas 31 présent. Après ça peut aussi être fait qu’avec l’entourage, si il y a un imprévu et que le patient 32 a une consultation par exemple. Après même qd les capacités du patients permettent pas une 33 véritable participation (éveil, coma, état végétatif), c’est plus difficile mais on essaye quand 34 même de l’inclure, même si les capacités de compréhension sont pas optimales. XI LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 35 - Avec ces réunions, avez-vous le sentiment que la compréhension, par le patient et 36 l’entourage, de la situation du patient, mais aussi des différentes prises en charges et des 37 objectifs est favorisée ? 38 Oui je pense. Disons que ça permet de faire le point de manière claire. On fait le point sur les 39 capacités, donc on peut appuyer le fait que ça ça va, et que ça ça ne va pas… On peut 40 vraiment faire prendre conscience à la famille dans le cas où il y ait un problème. Après la 41 famille elle l’entend ou elle ne l’entend pas, pareil pour le patient. Il y a des patients voilà, qui 42 sont proches de l’anosognosie, qui n’ont pas conscience de leurs troubles. Nous on appuie 43 vraiment, on essaye ! après voilà comprendre c’est expliquer, de façon claire, on met l’accent 44 sur les problèmes… Après la famille et bien ils entendent ce qu’ils veulent bien entendre. Il y 45 a des cas où la famille n’a pas encore totalement pris conscience de ce que peut être un retour 46 à domicile. On est dans un service de rééducation donc les gens attendent une récupération, 47 après faire comprendre que ça peut être oui, ou que ça peut être non… 48 - Et dans les cas justement d’anosognosie, de difficultés relatives à l’acceptation du handicap, 49 est-ce que vous avez l’impression que ça favorise quand même la compréhension ? Est-ce que 50 ça permet une meilleure prise de conscience justement ? 51 Par rapport au patient, je réfléchis… oui c’est vrai qu’il y a un plus, on tient tous le meme 52 discours donc ça confronte aux difficultés d’entendre de la part de plusiseurs intervenants 53 qu’il y a un certain problème… Après une personne anosognosique, de toute façon elle restera 54 anosognosique, elle aura entendu, mais de là à le prendre en compte je pense pas. Pour 55 l’acceptation oui ça arrive que des patients se disent « effectivement vous avez raison » et ils 56 se remettent en question. 57 - D’accord, les troubles cognitifs seraient donc l’obstacle majeur dans ces cas… 58 Oui. 59 - Au niveau de la détermination des besoins et attentes de l’entourage, le P3I permet-il de 60 mieux les identifier ? de les cerner avec une plus grande acuité ? ça peut être par rapport au 61 retour au domicile, ou au retour à l’emploi, à la participation sociale… 62 Il y en a certains oui, les demandes sont mieux identifiées, on arrive à savoir mieux ce qu’il va 63 se passer à la sortie. A mieux se projeter ensemble. Après on arrive quand même au P3I avec 64 l’évaluation initiale en ergothérapie, donc on sait déjà ce qu’on va pouvoir faire pour répondre 65 à la problématique du patient. 66 - Et comment faites-vous votre recueil de données justement sur les besoins du patient ? Par 67 l’entretien ? 68 Oui il y aura l’enteretien de départ en ergo, et sinon c’est grâce au recueil de données du 69 médecin avec le patient et la famille, et aussi grâce à l’équipe soignante. Bon par contre pour 70 tout ce qui est problématique professionnelle, et ce qui touche plus à la réhabilitation sociale XII LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 71 en quelques sortes, ces questions là ne sont pas abordées dans notre p3i qui a lieu 3 semaines 72 après l’admission en rééducation… ça va dépendre où en est le patient, mais en général la 73 priorité c’est la récupération et le retour au domicile. Si le patient reste lgtps là là question 74 peut se poser. Nos patients vont souvent en HDJ après, donc là il peut y avoir un second p3i 75 qui touchera plus ces questions là. Nous ici on pense à l’autonomie dans la vie quotidienne. 76 C’est plus tard dans le parcours de soins que ce posent les questions de réhabilitation socio- 77 professionnelle etc… Et nous on a un service comete, donc le projet pro ça se fera au sein de 78 ce dispositif. 79 - Et pour les démarches administratives, c’est aussi en HDJ que ça se décide ? 80 Alors pas forcément, dans les hospitalisations complètes on va préparer le retour au domicile, 81 avec tout ce qui est sécurisation et aménagements architecturaux. En HDJ ça va être la suite 82 de la récupération d’une part, et on a aussi des équipes mobiles AVC qui va intervenir à 83 domicile avec une ergo, donc si il y a des gros projets d’aménagements c’est elle qui suivra le 84 dossier. Nous ici, on va mettre en place des aides techniques temporaires, et évaluer la 85 nécessité et la possibilité d’aménagements, et c’est l’équipe mobile AVC qui poursuit quand 86 le patient sort de chez nous. 87 - Et avec l’assitante sociale, est-ce que ça facilite la coopération avec elle ? notamment pour 88 les questions de financements, d’allocations, de prestations de compensations ? 89 Alors en hospitalisation complete oui, pour le financement des aides techniques. Au niveau du 90 p3i oui ça va permettre de faire un point directement avec le patient, l’entourage, l’assistante 91 sociale et nous oui. Il arrive des cas où on arrive à faire la VAD avant, mais majoritairement 92 on la fait après. Donc si elle est pas encore faite, on peut pas vraiment lancer le projet quoi… 93 Elle est-ce qu’elle rencontre la famille avant je ne saurais pas dire, c’est possible. Mais bon 94 les démarches elles vont se faire en dehors après le p3I, généralement on n’a pas encore assez 95 d’éléments. Ça peut être discuté hein, c’est vraiment en fonction du patient, de la 96 problématique… C’est vrai que l’environnement va beaucoup déterminer les problèmes qui 97 vont se poser, et donc du coup ça permet de voir ensemble, si du coup il y a une sortie de 98 prévue dans 4 semaines et bien on va se concerter pour organiser au mieux, et la présence de 99 la famille oui ça va aider, ils sont experts de leur environnement. Ça va plus servir sur le plan 100 des aides humaines je pense. Le reste on le fait après, en dehors. 101 - Au niveau des attentes du patient, j’imagine qu’à 3 semaines elles peuvent se réveler 102 irréalistes, ou qu’il peut être assez perdu sur ses perspectives, est-ce que ces reunions p3i 103 permettent de clarifier les choses pour le patient ? 104 Ha oui, bien sur. Après c’est surtout le médecin qui se positionne là-dessus. Voilà vous êters à 105 tant de temps de l’AVC, la récupération en est à ce stade… on peut pas savoir non plus, on va 106 pas dire non vous n’allez pas récupérer. La situation peut être peu favorable, dans certains cas, XIII LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 107 c’est le médecin qui va s’engager dans cette annonce. 108 - En ergothérapie, comment se déroule la défintion d’objectifs et de moyens pour la prise en 109 charge ? Vous proposez pendant la réunion et vous discutez avec le patient ? 110 Et bien d’abord on rappelle comment ça s’est déroulé depuis l’arrivée. Ensuite on dit ce qui va 111 être poursuivi, donc les objectifs qu’on a vus avec le patient avant, en effet c’est pas censé 112 être les notres. Le plus souvent il est demandé au patient quelles sont ses attentes, et après 113 c’est le medecin qui va dire bon vous en etes ici, on va travailler ça par rapport à votre projet : 114 VAD, rééducation motrice du membre sup quand c’est possible. C’est le médecin qui va 115 reprendre les objectifs et les adapter à la problématique du patient. Nous après on aura nos 116 objectifs spécifiques. Mais d’abord on laisse le patient s’exprimer, et on va faire un 117 récapitulatif des objectifs avec les différents intervenants. 118 - Comment se déroule les réunions à ce niveau, pour la place laissée à l’expression du patient 119 et de l’entourage, vous leurs posez des questions sur les habitudes de vies antérieures et tout 120 ce genre de choses ? 121 Oui, chaque intervenant va dire et expliquer ce qui est travaillé avec le patient, où est ce qu’il 122 en est actuellement, nous par exemple on détaille capacités/incapacités, le kiné tout ce qui est 123 relatif à la marche… juste avant le médecin fait un récapitulatif du contexte de survenue de 124 l’AVC, avec des explications sur la pathologie, là aussi la famille et le patient peuvent poser 125 des questions… Ensuite on leur donne la parole, on leur demande leurs attentes, leurs besoins, 126 quel sera le projet à la sortie de l’hospitalisation, on va voir aussi si le patient et sa famille 127 sont en accord, parce qu’il peut toujours y avoir des problèmes par rapport à ça. 128 - Et du coup au niveau de leur place au sein de la réunion, est ce qu’ils se sentent à l’aise, est 129 ce qu’ils arrivent à bien exprimer leurs attentes, à se livrer facilement ? est-ce qu’il ne sont 130 pas impressionnés ? 131 Non, à part bien sur l’apahasique pour qui c’est plus compliqué. On est nombreux mais ils 132 nous connaissent, l’ambiance est propice à l’expression, et puis c’est LE moment où ils 133 peuvent s’exprimer, poser des questions. Ils ne sont pas mal a l’aise non loin de là. Après 134 c’est pas évident car c’est sensible, mais il n’y a pas de problemes particuliers. 135 - Au niveau de la relation thérapeutique, est ce que ces réunions compliquent les choses ou est 136 ce que ça facilte les chose ? 137 Hmmmm c’est pas un obstacle non, après est ce que ça facilite ? non la relation est déjà 138 établie, ça change pas grand-chose. Les objectifs sont posés avec le patient, on lui explique 139 beaucoup ce qu’on peut faire donc il n’y a pas de double jeu, il ne découvre rien. Il ne tombe 140 des nues. A ce niveau là ce que le p3i va apporter c’est des connaissances notamment sur les 141 habitudes de vie antérieures grace à la famille, que nous on aurait pas pu mettre en lumière 142 seuls avec le patient par exemple, ou quand il ne peut pas s’exprimer. On peut découvrir des XIV LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 143 choses qui peuvent faciliter la prise en charge apres, ou expliquer certains traits de 144 personnalité, ou mettre en lumière des troubles du comportements. 145 - Avez-vous des réunions interdisciplinaires en parallèle du p3i ? 146 Oui, toutes les semaines. On se réunit donc aves tous les intervenants, les médecins, et on 147 discute de tous les patients. Pas en présence des patients hein, c’est juste une réunion entre 148 nous, interdisciplinaire. On fait le point, on affine les objectifs en équipe, on se coordonne ! 149 - Est-ce que la présence du patient lors des réunions, a permis donc de favoriser les efforts 150 d’information et d’explication lors des prises en charge au quotidien ? 151 Hmmm laissez-moi réfléchir… Peut-être effectivement. Mais bon on est censés le faire quoi 152 qu’il arrive dans la profession. C’est normal de le faire, le patient est censé être acteur de la 153 prise en charge, même sans p3i. Non j’avoue que je sais pas trop si ça a changé quelque 154 chose, plus oui mais… c’est pas évident. Même sans p3i il faut qu’on discute avec le patient 155 sur quoi on va axer la prise en charge, donc il faut qu’il sache quels genres de choses on va 156 pouvoir faire ensemble, donc oui il faut forcément informer et expliquer, avec ou sans p3i, ça 157 motive la prise en charge aussi bien pour lui que pour nous ! 158 - Pour conclure, est ce que le fait de mettre en place des p3i pour les patients adultes victimes 159 d’AVC, permet de rendre le patient plus acteur de la prise en charge ? 160 J’aurais quand même tendance à dire que oui, dans la majorité des cas. Après tout dépend des 161 troubles cognitifs des patients : il y en a pour qui ça ne va pas changer grand-chose. Peut être 162 que le fait d’avoir cette réunion avec tout le monde et la famille, oui ça va crééer une 163 dynamique favorable, on pose les choses et on va parler de l’avenir, même si c’est qu’à court 164 et moyen terme. Ça va aider, mais c’est pas tout le temps flagrant quoi. Ça va vraiment 165 dépendre du patient. C’est facilitateur, après que c’est le p3i en lui-même qui le permet, j’en 166 suis moins sure, c’est plutôt ce qui est fait en amont et en aval qui va faciliter, comment les 167 thérapeutes le rendront acteur de la prise en charge au quotidien. Nous dans notre service il 168 n’y en a qu’un de p3i… XV LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) Entretien n°3 1 - En Quelle année avez-vous eu votre diplôme d’ergothérapeute ? 2 En 1979. 3 - Du coup, j’imagine que vous avez une grande expérience en neurologie adulte ? 4 Oui. Depuis 82… 5 - Et depuis combien de temps participez-vous à des p3i en neurologie adulte ? 6 Hmmm… Je dirais… 1995 ? Oui 1995 il me semble. 7 - D’accord ! Et cette formation vous avez pu y participer vous-même ? 8 Oui oui. Tout le service a été formé. 9 - Ok donc vous utilisez le p3i depuis 1995 dans votre service de neurologie adulte… 10 Alors oui on a été formé, ensuite des médecins ont aussi été formés de leur côté, et ils en ont 11 fait un peu ce qu’ils ont voulu… 12 - D’accord, ça a un peu évolué en fonction des personnes et ça s’est un peu adapté à votre 13 contexte institutionnel du coup.. 14 Voilà ! Tout à fait. 15 - Comment se déroulent-ils ces p3i? C’est toujours le protocole de réunions 16 transdisciplinaires ? Avec la présence de tout le personnel soignant, le patient, son entourage ? 17 Alors j’aimerais décortiquer cette question là : tous les soignants, à peu près, c’est-à-dire que 18 des fois certains ne peuvent pas venir, dans ce cas ils laissent un compte-rendu. Le patient oui, 19 l’entourage oui et ils peut y avoir plus ou moins de proches, le max que j’ai vu c’était cinq 20 membres de la famille. Le médecin, l’interne, le cadre de santé, les rééducateurs, un infirmier 21 ou un aide-soignant, c’est à peu près ça. 22 - D’accord très bien. L’assistante sociale est-elle présente également ? 23 Ha oui je l’ai oubliée. Après quand il n’y a vraiment pas besoin d’elle elle ne vient pas, mais 24 elle est là souvent oui. Disons que plus de la moitié des fois on a besoin d’elle. Il y a d’autres 25 intervenants qui ne sont pas là tout le temps, comme l’orthophoniste quand elle ne suit pas le 26 patient. Ça dépend du besoin. 27 - Ok, et est-ce qu’il y a une psychologue qui participe aux p3i aussi ? 28 Non jamais. Mais on a pas beaucoup de temps de psychologue en fait. Elle vient vraiment de 29 temps en temps, sur demande ponctuelle en fait. Mais elle ne participe pas aux p3i non. Elle 30 doit avoir quelque chose comme un mi-temps pour trois services donc c’est très restreint. 31 - D’accord. Sinon, pour vous, en tant qu’ergothérapeute, est-ce que ces réunions, avec la 32 présence du patient et de l’entourage, facilitent la coordination avec les autres intervenants ? 33 Je pense notamment à l’assistante sociale pour les démarches administratives, de 34 financement… XVI LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 35 Non c’est pas ça qui facilite le travail non. Le travail se fait vraiment en amont, je vais pas 36 dire au quotidien non plus, mais disons très régulièrement avec l’assitante sociale. Faut pas 37 attendre le p3i pour commencer le travail avec l’assitante sociale. 38 - Très bien, et la coordination avec le personnel soignant, infirmiers et aides soignants pour 39 l’indépendance et l’autonomie, j’imagine que c’est fait en amont aussi ? 40 C’est la même chose oui. Pour la coordination avec tous les autres intervenants c’est pareil 41 oui, on fait vraiment se travail en partenariat au quotidien, faut pas attendre le p3i pour ça. 42 - Vous êtes donc déjà bien dans une dynamique interdisciplinaire au quotidien donc ? 43 Oui, après ça pourrait etre mieux, mais on va dire oui quand même. 44 - Bien. Autre sujet, avez-vous l’impression que le p3i permet une meilleure compréhension de 45 ce qu’est l’ergothérapie pour le patient ? Est-ce que ça permet au patient de mieux 46 comprendre l’intérêt de la prise en charge ? Est-ce que ça favorise la connaissance et la 47 reconnaissance de l’ergo auprès du patient ? 48 Alors nous en fait, on fait le p3i au bout d’un certain temps après l’admission du patient. Ce 49 n’est pas un p3i d’entrée. Il intervient qu’au bout d’un certain temps. Parfois on en fait deux, 50 avec un p3i de sortie encore plus tard. On le fait jamais au début de la prise en charge. C’est 51 pour ça que je dirais que non ça n’aide pas, ça arriverait un peu tard! Si on attendait 2 ou 3 52 mois de prise en charge pour que le patient comprenne ce que c’est l’ergo, alors il y aurait un 53 petit problème ! 54 - D’accord, j’imagine donc que dans votre pratique vous devez avoir pour habitude 55 d’informer et d’expliquer l’intervention en ergo. Avez-vous l’impression que c’est toujours 56 bien compris du patient ? 57 Alors pas toujours. Généralement oui mais, des fois les patients ont du mal à l’intégrer oui. 58 Après en mon nom personnel j’utilise un questionnaire d’activité, où on balaye vraiment 59 toutes les activités de la vie quotidienne, toutes les activités en général. Je lui explique que 60 l’on va voir ce qui est possible, ce qui est difficile, ce qui est impossible. Je lui explique qu’on 61 va essayer de se rapprocher le plus possible de l’autonomie, de retrouver les activités 62 antérieures qui ont du sens pour lui etc… Après je fait un effort de clareté hein dans le propos, 63 j’adapte mon discours. Et après on a des rubriques et on fait une conclusion pour chaque 64 rubrique, par exemple pour la toilette et l’habillage il y a des actions qui sont impossibles, bah 65 voilà moi en ergothérapie comme objectif je vais vous montrer des astuces pour pouvoir vous 66 habiller tout seul, que vous puissiez vous habiller tout seul, j’explique comment on va faire 67 comment on va s’y prendre. Et je fais ça pour chaque rubrique, mais c’est pour des situations 68 de handicap vraiment concrètes. Y compris la conduite auto, enfin voilà on balaye tout dès les 69 premières séances, et de cette manière j’essaye que le patient ait une vision assez complète ce 70 que l’ergothérapie peut lui apporter. XVII LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 71 - D’accord, donc oui vous disposez déjà dans votre pratique d’un moyen intéressant pour 72 recueillir les besoins du patient, et faire converger l’intervention et ses besoins donc… 73 Voilà tout à fait, votre question est importante dans le sens où il faut que le patient soit acteur 74 de sa rééducation. Pour moi le p3i, bon déjà chez nous il arrive trop tard pour que ce soit un 75 moyen d’explication de ce qu’est l’ergothérapie, pour décider d’objectifs et de ce que l’on va 76 pouvoir faire. Et la deuxième chose c’est que pour moi c’est pas tout à fait l’outil qui 77 correspond à cela, pour moi c’est plus pour définir des objectifs communs, ça dit bien ce que 78 ça veut dire hein le Plan d’Intervention Interdisciplinaire Individualisé, c’est le seul moment 79 où tout le monde entend la même chose, avec les mêmes mots, les mêmes… comment dire… 80 je dirais presque le même pronostic puisqu’on envisage aussi l’avenir. Si il y a une 81 interprétation qui est faite par la famille ou par le patient, on peut revenir dessus, on peut 82 clarifier cette représentation, ou même rappeler « vous savez au p3i on avait dit ça… », pour 83 moi ça c’est la grande qualité du p3i, son grand intérêt, son apport. Après oui il y a les 84 objectifs en commun. Mais c’est pas pour expliquer ce qu’est l’ergothérapie. 85 - Ok, je reviens sur la compréhension, car dans ma partie théorique j’ai pu développer le fait 86 que la compréhension était essentielle pour devenir acteur de la prise en charge en ergo, mais 87 que cette compréhension pouvait être limitée et perturbée par des troubles cognitifs comme 88 l’anosognosie, ou des troubles psychologiques liés à la survenue et l’acceptation du handicap. 89 Est-ce que le p3i permet d’apporter quelque chose pour remédier à ces difficultés et favoriser 90 la compréhension ? 91 Alors pour les difficultés psychologiques je pense que oui c’est un gros atout. C’est un moyen 92 à la fois efficace et intelligent… L’anosognosie ben, l’anosognosie de toute façon on peut 93 faire ce qu’on veut hein, elle va rester quoi qu’il arrive, p3i ou pas p3i la non reconnaissance 94 elle est là. En revanche, par rapport à la famille ça permet de faire le point, de ne pas laisser 95 des espoirs non-fondés quoi. Il y a des fois des familles qui sont anosognosiques j’allais dire, 96 donc ça permet de recadrer un peu les objectifs de rééducation et de réadaptation. Et pour la 97 suite ça peut être un atout, car encore une fois tout le monde entend la même chose, avec des 98 explications, des bilans, des exemples aussi de ce que fait le patient au quotidien, en 99 rééducation. C’est pas de la théorie c’est du concret. 100 - Et pour poursuivre sur la présence de l’entourage, dans les cas où la problématique du 101 patient est difficile à cerner, quand on arrive pas a identifier ses vrais besoins, est ce que cette 102 présence constitue un atout ? 103 Alors oui ça peut être un plus, et c’est tout l’intérêt du p3i, c’est vraiment le gros gros plus. 104 Encore plus dans le cas des difficultés psychologiques d’ « acceptation », ou d’anosognosie 105 oui. 106 - D’accord. J’en viens aux objectifs de l’intervention en ergothérapie. J’ai lu que les objectifs XVIII LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 107 doivent être concertés avec le patient et l’entourage pendant les réunions, comment ça se 108 déroule chez vous ? Vous arrivez avec des idées et vous en discutez véritablement avec le 109 patient ? 110 Oui, sachant qu’on en a déjà parlé avant. Ça tombe pas du ciel tout d’un coup, le patient n’est 111 pas surpris non, enfin normalement hein ! C’est un partage d’objectifs, on en discute avant 112 avec lui, on réfléchit aux objectifs on détaille les moyens même. Après lors du p3i on en 113 discute en équipe, on peut insister, on dit voilà on en a parlé ensemble, on a cet objectifs en 114 ergothérapie, on redit les choses, on clarifie on synthétise… On précise… Mais c’est jamais 115 une surprise pour le patient non. 116 - Ça vient officilialiser la prise en charge en quelque sorte… 117 Tout à fait c’est ça. Et puis c’est tracé sur un document collectif, accessible à tout le monde, 118 parce que le dossier ergo bon, c’est visible par le médecin et les rééducateurs mais bon , c’est 119 tellement compliqué avec le dossier informatisé : il y a des parties accessibles à tous, des 120 parties accessibles seulement à l’ergo, enfin c’est compliqué. Et là c’est un document qui est 121 commun à tous, et c’est le seul finalement. Ça donne une référence à un moment t de là où en 122 est le patient et de ce qui va être fait. 123 - Et vous m’avez dit toute à l’heure que le p3i intervenait tard, est-ce que du coup il permet 124 d’orienter un peu le patient vers un projet de réadaptation voire de réhabilitation, avec des 125 possibilités à l’extérieur de votre établissement, à la sortie ? 126 Alors on ne le fait pas pour tous les patients, on le fait quand on a besoin de faire le point. Ça 127 peut être à la demande de la famille, on l’appelle pas comme ça hein, mais la famille va 128 demander des informations, de rencontrer le médecin et un peu l’équipe donc le médecin va 129 pouvoir porposer le p3i. ça peut petre aussi une demande d’un thérapeute pour faire le point 130 sur les objectifs quand ça part dans tous les sens. Ça peut être une demande du patient, du 131 médecin aussi, mais c’est pas du tout systématique : sur 30 patients on va en faire moins de 132 10. C’est vraiment en cas de besoins ça n’a rien de systématique. 133 - Et en parallèle du coup vous faites aussi des réunions d’équipe ? 134 Oui on fait des réunions d’étage dans le service. Il y a la plupart des intervants, à part 135 l’assistante sociale. Et le patient est présent. Après c’est pas pareil dans tous les services, il y 136 en a où le patient n’est pas présent. 137 - Et est-ce que le p3i permet de mieux coordonner le travail au niveau de l’indépendance et de 138 l’autonomie, par la coordination avec les aides soignants et les infirmiers ? 139 Là encore je dirais qu’il ne faut pas attendre le p3i. Il y a en travail qui se fait au quotidien. Si 140 le patient a l’autonomie pour objectif, on va le prendre en séance en chambre, à la fin on fait 141 un bilan mis à disposition d’aides soignants et le patient continue à faire le maximum et eux 142 ils s’organisent, le message passe comme ça. C’est plus dur pour les transferts, car rien ne XIX LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 143 passera tant qu’il y aura une méconnaissance du travail de l’autre. Il y a un risque de chute, de 144 sécurité quand on le travaille en séance. Pour ça c’est plus dur, il y a une méconnaissance de 145 comment on fait le travail. Il faut communiquer, mais ça c’est un état d’esprit, ça se décrète 146 pas. On peut l’encourager, c’est le travail des cadres. 147 - Je reviens sur l’ergothérapie dans le p3i, est ce que vous avez l’impression que 148 l’ergothérapie a pu être mieux reconnue depuis que vous utilisez le p3i dans le centre ? 149 Par rapport aux autres professionnels je pense pas. En revanche auprès des familles c’est sur, 150 même si encore une fois on attend pas le p3i pour les rencontrer. Mais c’est vrai que ça donne 151 une plus grande visibilité, et puis avec la présence et le soutien du médecin, des autres 152 professionnels c’est vrai que ça favorise. 153 - Plus généralement, est-ce que vous voyez des difficultés liées au p3i ? 154 Et bien par rapport à ce que l’on nous avait appris lors de la formation, normalement il faut 155 préparer avant, retirer la tenue professionnelle, des petites choses comme ça qui ne sont pas 156 faites. Après je suis pas sur que ce soit fondamental. Les difficultés c’est d’avoir une date 157 commune pour tout le monde ! 158 - Et les réunions durent vrament une heure pile-poil ? 159 Oui c’est le cas. Nous aussi c’est le médecin qui est animateur et rapporteur. Et sinon oui, il y 160 a quelques années il y a un médecin qui avait très mal vécu la formation car il avait 161 l’impression de ne plus être le chef d’orchestre, parce que normalement tout le monde a une 162 place égale, il n’y a pas de hiérarchie. 163 - Après, ces réunions, ça peut paraitre impressionnant ? 164 Oui c’est pour ça qu’on nous avait dit de retirer les vêtements professionnels, je regrette un 165 peu qu’on ne l’ai pas fait. Mais les mentalités ne changent pas par l’apport d’une méthode, on 166 est encore dans des fonctionnements archaïques, même si ça bouge pas mal. On est toujours 167 avec le médecin au-dessus. Après je sais plus sur quel modèle ça se base, mais normalement 168 la famille est sur le même pied d’égalité que le médecin. Et c’est dommage qu’on l’ai pas mit 169 en place ça mais bon. C’est un peu éloigné de sa base, il a été transformé un peu. 170 - Mais le patient et son entourage peuvent poser des questions librement quand même ? 171 Ha oui oui ! Bien sûr ! Ils le font ! Dans la plupart des cas oui ils saisissent cette opportunité 172 oui.. C’est un moment très privilégié à ce niveau. 173 - Et le fait d’inclure cette démarche transdisciplinaire a permis de mieux coordonner les 174 acteurs, de favoriser la compréhension, de plus impliquer la famille pour la recherche 175 d’information ? 176 Et bien non je pense pas, déjà c’est pas systématique. Et il faut arriver à faire tout ça avant le 177 p3i, c’est plus pour faire un point d’étape, pour donner une synthèse à un moment t, ou alors 178 pour débloquer une situation quand il y a une chronicisation. Ça sert beaucoup plus à mettre XX LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 179 des mots sur des évènements, des projets, avec des écheances. C’est vraiment un point d’étape 180 quoi. 181 - En conclusion, dans tous les cas, et dans les cas plus difficiles aussi, le p3i permet il de 182 favoriser la motivation du patient pour devenir acteur de la prise en charge en ergo ? 183 Je suis pas persuadée qu’il peut motiver, je pense que c’est plutôt les objectifs concrets, les 184 activités significatifves, des objectifs qui collent aux centres d’intérets. Le p3i ça va permettre 185 de rendre la famille plus actrice, ça peut le remotiver, mais c’est pas le premier je pense. 186 - C’est vrai que vous avez l’air d’avoir un bon moyen pour cerner les besoins du patient, avec 187 votre questionnaires d’activité ? C’est de vous ? 188 Oui ! On l’a fait il y a longtemps, c’est un bon moyen pour cerner les besoins, et aussi pour 189 introduire l’ergothérapie auprès du patient. Après pour vos questions j’ai répondu en fonction 190 de ce que je vois dans mon service, pas en hopital de jour où c’est un peu différent. XXI LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) 191 LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0) « Réfléchir ensemble : l’intérêt de la transdisciplinarité pour le projet de soins en ergothérapie. » L’intervention en ergothérapie peut permettre aux patients adultes victimes d’accident vasculaire cérébral (AVC) de trouver des réponses à leur problématique de réadaptation. Cependant la réussite de cette intervention nécessite une certaine motivation pour la prise en charge. La problématique de ce travail est donc de savoir comment favoriser la motivation du patient adulte victime d’AVC, pour la prise en charge en ergothérapie, en soins de suite et de réadaptation. Cette démarche vise à mieux comprendre la motivation, à déterminer comment améliorer la convergence entre les besoins de la personne et la réponse thérapeutique proposée en ergothérapie, et comment susciter l’intérêt de la personne pour élaborer ensemble un projet adapté. L’hypothèse proposée est qu’un moyen de coordination des soins inspiré de la démarche transdisciplinaire, comme le Plan d’Intervention Interdisciplinaire Individualisé, permettrait de favoriser la motivation du patient pour la prise en charge en ergothérapie. Plusieurs entretiens ont ainsi été réalisés auprès d’ergothérapeutes, intervenants auprès de personnes adultes victime d’AVC, et participants à des PIII. Les résultats de cette recherche soulignent une possibilité d’apport de la démarche transdisciplinaire pour favoriser la motivation pour la prise en charge en ergothérapie. Cette démarche transdisciplinaire permettrait ainsi une meilleure identification des besoins de la personne, une meilleure compréhension réciproque de sa problématique et de l’intérêt de l’intervention en ergothérapie, et un meilleur accompagnement du patient vers un projet de réadaptation significatif. Elle rappelle également le rôle majeur de l’accompagnement de la personne au quotidien. Mots-clés : AVC, patient adulte, ergothérapie, réadaptation, transdisciplinarité, Plan d’Intervention Interdisciplinaire Individualisé, motivation. “Thinking together: the contribution of transdisciplinarity to the care plan in occupational therapy” Intervention in occupational therapy can enable adults suffering from cerebrovascular accident (CVA), or stroke, to find answers to their issues about rehabilitation. However, getting involved in such an intervention requires motivation, which is in fact difificult to achieve. The research question of this study was therefore to discover how to promote a stroke patient’s motivation to become active in occupational therapy intervention during the rehabilitation process. This approach aims to better understand a patient’s motivation, to determine how reconcile intervention in occupational therapy with the patient’s needs, and how to stimulate the person’s interest in order to involve stroke patients in collaboration for the development of the care plan. The hypothesis proposed was that a means of care coordination inspired by transdisciplinarity, such as the Interdisciplinary Individualised Intervention Plan (PIII), enables the promotion of a patient’s motivation for occupational therapy. Interviews were conducted with occupational therapists, those intervening with adult stroke patients and those using the PIII , in order to verify the pertinence of this hypothesis in real conditions. The results of this study underscore the possible contribution of a transdisciplinary to promote stroke patient’s motivation for occupational therapy. This approach enables a better identification of the person’s needs, a better mutual understanding of the patient’s issues about and interest in rehabilitation, and a better accompaniment of the patient towards a meaningful rehabilitation plan. Emphasis is placed on the major role played by accompaniment of the person in daily activities. Key words : CVA (stroke), adult, occupational therapy, individualised interdisciplinary intervention plan (PIII), motivation, rehabilitation, transdisciplinarity LAMOITTE (CC BY-NC-ND 2.0)