ŶŶĞdžĞƐ ŽŵŵƵŶŝĐĂƚŝŽŶƐĚŝǀĞƌƐĞƐƌĠĂůŝƐĠĞƐăůĂ ƐƵŝƚĞĚƵƉƌŽũĞƚ ͨƚƵĚĞĚĞƐƚĞƌƌŽŝƌƐǀŝƚŝĐŽůĞƐĚĞ 'ĞŶğǀĞ͕ƉĂƌƚŝĞĐůŝŵĂƚŝƋƵĞͩ ƌƚŝĐůĞƐ;ũŽŝŶƚƐĂƵƌĂƉƉŽƌƚͿ͗ ƵƌŐŽƐ^͕͘ůŵĞŶĚƌŽƐ^͕͘&ŽƌƚŝĞƌ͘ϮϬϭϬ͘ŶĂůLJƐĞĚĞƐĨĂĐƚĞƵƌƐĞŶǀŝƌŽŶŶĞŵĞŶƚĂƵdžŝŶĨůƵĞŶĕĂŶƚůĂ ƉŚĠŶŽůŽŐŝĞĚĞůĂǀŝŐŶĞĚĂŶƐůĞĐĂŶƚŽŶĚĞ'ĞŶğǀĞ͘ZĞǀƵĞ^ƵŝƐƐĞĚĞsŝƚŝĐƵůƚƵƌĞ͕ƌďŽƌŝĐƵůƚƵƌĞĞƚ ,ŽƌƚŝĐƵůƚƵƌĞ͘ϰϮ;ϱͿ͕ƉƉ͘ϮϴϴͲϮϵϱ ƵƌŐŽƐ^͕͘ůŵĞŶĚƌŽƐ^͕͘&ŽƌƚŝĞƌ͘ϮϬϭϬ͘/ŵƉĂĐƚŽĨƉĞĚŽĐůŝŵĂƚŝĐĂůĐŽŶĚŝƚŝŽŶƐŽŶƚŚĞƉƌĞĐŽĐŝƚLJ ƉŽƚĞŶƚŝĂůŽĨǀŝŶĞLJĂƌĚƐŝŶƚŚĞĐĂŶƚŽŶŽĨ'ĞŶĞǀĂ;^ǁŝƚnjĞƌůĂŶĚͿ͘WƌŽĐĞĞĚŝŶŐƐŽĨƚŚĞϴƚŚ/ŶƚĞƌŶĂƚŝŽŶĂů dĞƌƌŽŝƌŽŶŐƌĞƐƐ͕^ŽĂǀĞ͕/ƚĂůŝĞ͘ϭ͕ƉƉ͘ϮϬͲϮϱ͘ &ŽƌƚŝĞƌ͕͘^ŚĂŶŝd͕͘ƵƌŐŽƐ^͘ϮϬϭϬ͘ŶŚĞƌďĞŵĞŶƚĚƵǀŝŐŶŽďůĞŐĞŶĞǀŽŝƐ͗ďŝůĂŶĞƚƉĞƌƐƉĞĐƚŝǀĞƐ͘ZĞǀƵĞ ^ƵŝƐƐĞĚĞsŝƚŝĐƵůƚƵƌĞ͕ƌďŽƌŝĐƵůƚƵƌĞĞƚ,ŽƌƚŝĐƵůƚƵƌĞ͘ϰϮ;ϮͿ͕ƉƉ͘ϵϲͲϭϬϯ͘ dƌĂǀĂƵdžĐŽŵƉůĠŵĞŶƚĂŝƌĞƐĞŶƉĂƌƚŝĞƌĠĂůŝƐĠƐĚĂŶƐůĞǀŝŐŶŽďůĞŐĞŶĞǀŽŝƐ͗ &ƌŽŝĚĞǀĂƵdžD͕͘^ĞƌŝŬŽǀ/͕͘ƵƌŐŽƐ^͕͘ZŝƐƚŽƌŝW͕͘^ŝŵĞŶŽǀs͕͘sĂŶĞŶĞƌŐŚ,͕͘WĂƌůĂŶŐĞ͕D͘͘ϮϬϬϵ͘ ŶĞǁůŝĚĂƌĨŽƌǁĂƚĞƌǀĂƉŽƌĂŶĚƚĞŵƉĞƌĂƚƵƌĞŵĞĂƐƵƌĞŵĞŶƚƐŝŶƚŚĞƚŵŽƐƉŚĞƌŝĐŽƵŶĚĂƌLJ>ĂLJĞƌ ƐŝĂ&ůƵdžEĞǁƐůĞƚƚĞƌ/ƐƐƵĞ͕ŶƵŵ͘Ϯϴ͕ϮϬϬϵ͕Ɖ͘ϭϯͲϭϳ &ƌŽŝĚĞǀĂƵdžD͘ϮϬϭϬ͘>ĂŶĚͲƚŵŽƐƉŚĞƌĞ/ŶƚĞƌĂĐƚŝŽŶƐDĞĂƐƵƌĞĚǁŝƚŚ^ĐĂŶŶŝŶŐZĂŵĂŶ>ŝĚĂƌ͘dŚğƐĞ W&>͕ŶŽϰϳϲϴŝƌ͗͘DĂƌĐWĂƌůĂŶŐĞ͘;ĚŽĐƵŵĞŶƚŶŽŶͲũŽŝŶƚͿ ŽŶĨĠƌĞŶĐĞ͗ ƵƌŐŽƐ^͕͘ůŵĞŶĚƌŽƐ^͕͘&ŽƌƚŝĞƌ͘ϮϬϭϬ͘/ŵƉĂĐƚŽĨƉĞĚŽĐůŝŵĂƚŝĐĂůĐŽŶĚŝƚŝŽŶƐŽŶƚŚĞƉƌĞĐŽĐŝƚLJ ƉŽƚĞŶƚŝĂůŽĨǀŝŶĞLJĂƌĚƐŝŶƚŚĞĐĂŶƚŽŶŽĨ'ĞŶĞǀĂ;^ǁŝƚnjĞƌůĂŶĚͿ͘ϴƚŚ/ŶƚĞƌŶĂƚŝŽŶĂůdĞƌƌŽŝƌŽŶŐƌĞƐƐ͕ ^ŽĂǀĞ͕/ƚĂůŝĞ͘ ĐŽůĞĚ͛/ŶŐĠŶŝĞƵƌƐĚĞŚĂŶŐŝŶƐ ͲϵϯͲ ĐŽůĞĚ͛/ŶŐĠŶŝĞƵƌƐĚĞŚĂŶŐŝŶƐ ͲϵϰͲ V i t i c u l t u r e Facteurs environnementaux et phénologie de la vigne dans le canton de Genève Stéphane BURGOS, Sébastien ALMENDROS et Elisabeth FORTIER, Ecole d’ingénieurs de Changins, 1260 Nyon Renseignements: Stéphane Burgos, e-mail: [email protected], tél. +41 22 363 40 50 Pour mieux cerner l’influence de la température du sol sur le développement de la vigne, dans chaque parcelle de l’étude, un petit ordinateur (boîtier jaune) a enregistré les températures à 2, 20 et 50 cm de profondeur durant trois ans. Introduction De nombreuses études de terroir ont été effectuées dans le monde entier. Leur but est en général d’estimer le potentiel cultural pour pouvoir conseiller les viticulteurs. Si de nombreuses études se focalisent sur le sol et la géologie (Bodin et Morlat 2003), d’autres incluent aussi les plantes et le climat (Murisier et al. 2004a; Barbeau et al. 2004; Lebon et al. 1996; Van Leeuwen et al. 2004). Il est généralement admis que le climat et le sol jouent un rôle prépondérant sur la précocité des par288 celles (Jones et Davis 2000; Tesic et al. 2002). Cependant, les conditions climatiques locales sont souvent difficiles à étudier car la densité de stations météorologiques est faible. Ainsi, on utilise de plus en plus les systèmes d’information géographiques (SIG) pour analyser les climats et les terroirs (Kumar et al. 1997; Jones et al., 2004; Carey et al. 2009). Un autre problème des études de terroir est le manque d’information précise sur les sols à l’échelle de la parcelle. Cette étude avait pour but de décrire précisément les principaux paramètres du terroir (sol, climat et topographie) qui Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (5) : 288–295, 2010 agissent sur la phénologie des plantes et d’établir si l’observation de parcelles existantes, non initialement vouées à la recherche et très hétérogènes, permet de caractériser le terroir. Matériel et méthodes L’étude a été effectuée dans le canton de Genève, où les 1360 ha du vignoble bénéficient d’une cartographie précise des sols (Dakhel et al. 2007). Les essais ont été menés de 2007 à 2009 sur 49 parcelles de Gamaret greffé sur 3309C, âgées de plus de huit ans, conduites généralement en guyot et représentatives du vignoble genevois (fig.1). Chaque parcelle était constituée de quatre rangs de trente plantes et cultivée selon les principes de la production intégrée. La topographie, le type de sol, la température du sol (2, 20 et 50 cm de profondeur), la réserve utile en eau du sol (RU, calculée en fonction de la texture, de la teneur en éléments grossiers et de la profondeur du sol) et le substrat géologique ont été relevés. La pente, l’orientation, l’exposition au Joran (NO) (fig. 2) ou à la Bise (NE) et la radiation potentielle (fig. 3) ont été calculées à partir d’un modèle numérique de terrain (MNT) à 5 mètres (Spatial ! Analyst, Arcview 9.2). Résumé Facteurs environnementaux et phénologie de la vigne dans le canton de Genève | Viticulture De nombreuses études de terroir existent à l’heure actuelle mais peu décrivent de manière précise les conditions pédologiques et climatiques locales influençant le potentiel de précocité des parcelles. Les objectifs de ce travail étaient de décrire les principaux paramètres du terroir (sol, climat et topographie) qui influent sur la phénologie des plantes et d’évaluer si l’observation d’un grand nombre de parcelles appartenant à des particuliers permet de caractériser un terroir, en dépit d’une variabilité importante. Les résultats montrent que les 49 parcelles de Gamaret étudiées diffèrent dans leur dynamique au débourrement et durant la période de végétation. Les facteurs topographiques et pédologiques influents durant ces deux périodes sont différents et varient en cours de saison. Certains paramètres dérivés des modèles numériques de terrain comme la radiation potentielle semblent prometteurs pour évaluer le potentiel de précocité d’une parcelle. Au final, l’observation de nombreuses parcelles de la pratique s’est avérée appropriée pour caractériser le potentiel de précocité, en dépit de leur très grande variabilité intrinsèque. Figure 1 | Répartition des parcelles dans le canton de Genève. Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (5) : 288–295, 2010 289 Viticulture | Facteurs environnementaux et phénologie de la vigne dans le canton de Genève Figure 2 | Exposition au Joran de la région de Satigny calculée avec le modèle numérique de terrain à 5 mètres. Vert: faible exposition, rouge: forte exposition, points noirs: parcelles de l’étude. Figure 3 | Radiation potentielle du mois de juin pour la région de Satigny calculée avec le modèle numérique de terrain à 5 mètres. Jaune: radiation moins importante, rouge: radiation plus importante, points noirs: parcelles de l’étude. 290 Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (5) : 288–295, 2010 Facteurs environnementaux et phénologie de la vigne dans le canton de Genève | Viticulture Résultats et discussion Développement phénologique de la vigne L’ACP des paramètres phénologiques de la vigne a mis en évidence deux dimensions principales (fig. 4a et b): la première était fortement corrélée (57,9 % de la variance) à la durée (en jours) de la période débourrement-floraison (r = –0,91) et à la durée de la période floraison-véraison (r = 0,79). La seconde dimension ! Individuals factor map (PCA) 3 A As1661 Cho Ch1962 Sy7254 Sy10513b CBe4374h Sy61 Sy7894 Sy3387 Vy2708 Bx1887 Sat Sy7105b Sy10513h Al2314 CBe4374b Lx732h Bx2884 Da429 PLO5887 Da226 SorSy6376 An5138 Lx732b Ani Sy5620 Sy1701h Da476Rb Sy7105h Dar Da165 Da476L Lul Da479 As1478 Da476Rh Co32 Ba2131h Da470 Sy1701b Ju197 Sl10507 Bx2676 Pei Ba13530 Sy10063 Bx5444 Ba2131b Sy7736 Bx2971 An5160 0 1 An3191 -1 Dimension 2 (30,11%) 2 Sy10102 Bl2539 Sy1703t -2 La densité des ceps et la surface foliaire ont été notées et les dates de débourrement, floraison et véraison (BBCH 09, 65 et 85) relevées sur 100 organes représentatifs des parcelles. Une plante est considérée comme ayant atteint un stade donné lorsque 50 % des organes l’ont atteint. Toutes les grappes de trois souches consécutives représentatives des parcelles ont été récoltées et pesées séparément pour estimer la charge par cep. Deux cents baies ont été prélevées le même jour et analysées au Grapescan (FOSS). La teneur en sucre, l’acidité, le pH et la teneur en anthocyanes ont été mesurés. Le diamètre de l’avant-dernier sarment de 100 plantes a été mesuré pour estimer la vigueur. Les paramètres influençant le développement de la vigne et la qualité des moûts ont été sélectionnés à l’aide d’une analyse en composantes principales (ACP). Des modèles de régression linéaires (option stepwise) ont été ensuite générés avec les paramètres sélectionnés. Les différents modèles ont été aussi testés d’après leur signification biologique. Le canton de Genève a été divisé en sept zones géographiques (tabl. 1), apparaissant comme variables qualitatives supplémentaires dans l’ACP. Les zones ont été comparées par des ANOVA et des tests de Tukey (HSD). Les analyses statistiques ont été effectuées avec les systèmes FactoMineR, Leaps, Lattice et Stats de la version 2.10.1 de R (© 2009 The R Foundation for Statistical Computing). -3 -2 -1 0 1 2 3 Dimension 1 (57,94%) Variables factor map (PCA) B date_D date_F N1 Altitude (m) Pente (%) Anières 8 428 5,8 245 1,0 Choully 4 478 3,5 322 10,1 Dardagny 8 419 14,5 93 12,0 10 462 5,9 184 7,1 Peissy 5 485 2,4 171 10,0 Satigny 8 429 3,8 121 8,0 Soral 6 425 5,8 192 11,6 Nb_j_DF RU_corr Tmax_DF_20 P200b joran interligne AT nbgrappe date_VTmin_DF_20 hfil Argile bise pgrappe H_haie L_haie jus secv ptcalc Tmax_FV_20 distlac pH kgm2 rad_veg Nb_j_VR rad_01.03 dens anthoalti –0,5 Dimension 2 (30,11%) 0,5 Distance du lac (km) 0,0 Zone Lully Exposition2 (°) 1,0 Tableau 1 I Caractérisation topographique des différentes zones géographiques du canton de Genève Nb_j_FV Oe Nombre de parcelles par zone. 0° correspond au Nord, 180° au Sud. 2 –1,0 1 –1,0 –0,5 0,0 0,5 1,0 Dimension 1 (57,94%) Figure 4 | Analyse en composantes principales (ACP) des parcelles de Gamaret (n = 49). A) Graphe des individus sur le plan principal, violet: zones géographiques, noir: parcelles. B) Graphe des variables, noir: variables discriminantes (Date_D: date de débourrement, Nb_j_DF: nombre de jours entre débourrement et floraison, Nb_j_FV: nombre de jours entre floraison et véraison), bleu: variables supplémentaires. Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (5) : 288–295, 2010 291 Viticulture | Facteurs environnementaux et phénologie de la vigne dans le canton de Genève présentant une variance expliquée inférieure à 69 %, beaucoup ont intégré la variable température minimale du sol à 20 cm de profondeur, montrant que le sol joue un rôle important dans la phénologie. En effet, l’effet d’une température du sol élevée est connu pour accélérer le développement de la vigne (Bodin et Morlat 2003) et du maïs (Stone et al. 1999). Le nombre de jours entre la floraison et la véraison, lui, a été influencé par la densité de plantation, la radiation entre juillet et septembre, la réserve en eau utile (RU) des sols et la date de floraison avec respectivement 29, 11, 5 et 3 % de la variance (total 48 %). Les parcelles présentant une densité élevée, une radiation potentielle élevée, des sols peu profonds avec une RU limitée et une floraison précoce ont montré les développements les plus rapides. Tous les facteurs favorisant l’augmentation de la radiation reçue ou de la température contribuent au développement rapide de la végétation, comme l’ont mentionné d’autres études (Lebon et al. 1996). L’analyse multivariée de la seconde dimension de l’ACP montre que les facteurs qui influent sur la date de débourrement sont la réserve en eau utile des sols, la radiation potentielle entre janvier et mars, l’exposition au Joran et l’altitude à hauteur de 9, 6, 4 et 2 % de la variance (total 21 %). Les modèles de régression ne sont cependant pas aussi bons que pour les facteurs de la première dimension. Les parcelles qui débourrent le (30,1 % de la variance) était principalement corrélée à la date de débourrement (r = 0,87). La bonne répartition des parcelles révèle une grande variabilité de développement de la vigne. Les régressions multivariées de la première dimension montrent que la durée débourrement-floraison est influencée par la radiation entre avril et septembre, la densité des plantes, l’altitude et la date de débourrement, à raison de respectivement 29, 18, 18 et 4 % de la variance (total 69 %). La radiation est donc le facteur le plus important, qui résulte en fait de la combinaison de deux autres: la pente et l’orientation. Les paramètres multifactoriels, comme la radiation ou la réserve en eau des sols (intégrant profondeur et texture), sont plus souvent présents dans les modèles explicatifs que les paramètres simples (Murisier et al. 2004a), car ils font appel au fonctionnement global de l’environnement de la plante. Ainsi, les parcelles recevant une grande quantité d’énergie entre avril et juin, plantées à haute densité, situées à basse altitude et débourrant précocement ont montré un développement rapide entre le débourrement et la floraison. Par exemple, les zones de Lully et Peissy ont reçu significativement plus de radiations entre avril et juin, avec plus de 4,95 105 Wh/m2 contre une moyenne de 4,7 105 Wh/m2, ce qui explique leur rapidité de développement (fig. 5). Parmi les nombreux modèles possibles donnés par la fonction «stepwise» de la régression multivariée, Débourrement Moyenne des 49 parcelles min Floraison Moyenne des 49 parcelles moy max min Véraison Moyenne des 49 parcelles moy max min moy max Soral Satigny Peissy Lully Dardagny Choully Anières 100 120 140 160 180 200 220 Jours Julien Dormance Période débourrement-floraison Période floraison-véraison Post-véraison Figure 5 | Evolution phénologique (moyenne de 2007 à 2009) des différentes zones géographiques du canton de Genève comparée à la moyenne des 49 parcelles (min: date de la parcelle la plus précoce, max: date de la parcelle la plus tardive, moy: moyenne de l’ensemble des parcelles de la zone). 292 Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (5) : 288–295, 2010 Facteurs environnementaux et phénologie de la vigne dans le canton de Genève | Viticulture plus tôt sont celles qui reçoivent une grande quantité de radiations à la fin de l’hiver, sont protégées du Joran (non exposées NO) et ont des sols à RU moyenne à faible (< 130 mm). Les zones exposées au nord, en altitude et à sols lourds et assez profonds (grande RU) ont eu en moyenne un retard significatif (p < 0,05) de trois jours, comme la zone de Choully qui est significativement plus tardive que les autres (fig. 5). Ces résultats montrent que les parcelles ont des rythmes de développement différents au débourrement et durant la période de végétation. Ces deux séquences ne sont pas régies par les mêmes paramètres environnementaux: l’influence des paramètres du terroir varie en cours de saison. Une parcelle prompte à débourrer mais recevant peu de radiations risque de perdre cet avantage et se développer plus lentement durant la saison. Par exemple, la région d’Anières, une des premières au débourrement (fig. 5) probablement à cause de sa proximité avec le lac Léman, a perdu son avance à la floraison par son exposition NO. Développement phénologique et qualité des moûts Le taux de sucre (°Oe) a été principalement influencé par la date de débourrement, la charge en raisin, la date de floraison et la RU des sols à raison de 30, 13, 6 et 4 % de la variance (total 53 %). Il y a une charge-seuil au-delà de laquelle une teneur élevée en sucre ne peut être atteinte (fig. 6a). Le retard est important à partir d’environ 1,2 kg/m2, conformément aux conclusions de Murisier et al. (2004b) décrivant une baisse de qualité liée à des rendements élevés si le rapport feuille-fruit est trop faible. Les parcelles avec une date de débour- rement précoce ont aussi montré une bonne avance en termes de teneur en sucre (fig. 6b). Si la date de débourrement est trop tardive, les plantes ont de la peine à compenser ce retard, même si la charge est peu importante. Si l’exposition est peu favorable, le débourrement doit donc intervenir suffisamment tôt pour pouvoir obtenir une teneur en sucre élevée. La teneur en anthocyanes a été influencée par les mêmes facteurs que pour le sucre. Notons que toutes les parcelles de l’étude se situent dans un climat adapté pour la culture de la vigne (Tonietto et Carbonneau 2004). Utilisation de parcelles existantes pour analyser la composante climatique du terroir Les résultats montrent que l’observation d’un nombre élevé de parcelles existantes et non initialement implantées pour la recherche permet l’appréciation des conditions climatiques locales, ceci malgré une surface relativement importante, d’altitude assez homogène et malgré l’influence de l’homme. Le nombre de parcelles par zone, variant de 4 à 10, paraît suffisant pour différencier ces zones statistiquement. La variabilité entre les parcelles d’une zone était inférieure à celle qui existait entre les zones. Le choix du Gamaret, dérivé d’un seul clone, a permis de limiter la variabilité des plantes. Un grand nombre d’organes a dû toutefois être observé pour pouvoir déterminer de manière assez précise le stade phénologique des plantes. L’effet du millésime a pu être réduit par l’observation de trois saisons différentes. Les parcelles les plus tardives et les plus précoces ont été les mêmes durant les trois années. 92 92 b) a) 90 Degrés Oechslé 90 Degrés Oechslé ! 88 86 84 88 86 84 82 0,4 0,6 0,8 1,0 1,2 1,4 Rendement (kg/m2) 1,6 1,8 2,0 82 102 103 104 105 106 107 108 Date de débourrement (jours Julien) Figure 6 | Teneur en sucre (° Oechslé) en fonction de a) la charge moyenne et b) la date de débourrement. Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (5) : 288–295, 2010 293 Viticulture | Facteurs environnementaux et phénologie de la vigne dans le canton de Genève Conclusions • La combinaison de facteurs observés sur le terrain et obtenus par calcul à partir de modèles numériques de terrain permet la caractérisation climatique du vignoble genevois. Malgré la variabilité induite par les parcelles, il est possible de former des zones géographiques ayant des comportements similaires. • Les parcelles et zones de l’étude peuvent être discriminées en fonction de leur date de débourrement et par la longueur des périodes débourrement-floraison et floraison-véraison. Les facteurs d’influence ne sont pas les mêmes pour ces différentes périodes de développement. • Un débourrement rapide est favorisé par une grande quantité de radiations à la fin de l’hiver, une exposition S ou SE, des sols à réserve en eau moyenne à faible, se réchauffant rapidement, et par la proximité du lac. • Le raccourcissement de la période débourrementfloraison ou floraison-véraison est principalement favorisé par une radiation potentielle élevée, une densité élevée, des sols peu profonds (faible RU), une basse altitude et un débourrement ou une floraison précoces. • Une parcelle débourrant tôt mais moins bien exposée peut perdre son avance mais présenter malgré tout une teneur en sucre importante. Une parcelle à débourrement très tardif parvient difficilement à combler son retard, avec comme conséquence un déficit dans l’accumulation des sucres. • La diversité des potentiels de précocité et de dynamique en cours de saison des différentes zones du canton de Genève offre des possibilités variées pour le choix du couple porte-greffe/cépage et le type de production. • L’approche géostatistique basée sur l’observation de paramètres simples d’un grand nombre de parcelles semble prometteuse pour évaluer les différences climatiques, même pour une région à faible variation en termes d’altitude. n Remerciements Nous remercions sincèrement tous les viticulteurs qui ont mis à disposition leurs parcelles, toutes les personnes ayant participé aux récoltes, ainsi qu’Annabelle Annex pour les travaux d’analyse en laboratoire. Ce travail a été soutenu par la Haute école spécialisée de Suisse occidentale – projet SAGEX 17706 – et par le Canton de Genève. ▪ Jones G. V., Nelson P. & Snead N., 2004. Modeling Viticultural Landscapes: A GIS Analysis of the Terroir Potential in the Umpqua Valley of Oregon. GeoScience Canada 31 (4), 167–178. ▪ Kumar L., Skidmore A. K. & Knowles E., 1997. Modelling topographic variation in solar radiation in a GIS environment. Int. J. Geographical Information Science 11, 475–497. ▪ Lebon E., Dumas V. & Morlat R., 1996. Réponses de la vigne à différentes situations pédoclimatiques du vignoble d’Alsace. Revue française d’Œnologie 156, 22–25. ▪ Murisier F., Briguet C., Letessier I., Pythoud K. & Zufferey V., 2004a. Etude des terroirs viticoles vaudois. Revue suisse Vitic., Arboric., Hortic. 36, 1–20. ▪ Murisier F., Ferretti M. & Zufferey V., 2004b. Essais de limitation de rendement sur Merlot au Tessin. Effets sur la qualité des raisins et des vins. Revue suisse Vitic., Arboric., Hortic. 36 (3), 149–154. ▪ Stone P. J., Sorensen I. B. & Jamieson P. D., 1999. Effect of soil temperature on phenology, canopy development, biomass and yield of maize in a cool-temperate climate. Field Crops Research 63 (2), 169–78. ▪ Tesic D., Woolley D. J., Hewett E. W. & Martin D. J., 2002. Environmental effect on cv Cabernet Sauvignon (Vitis Vinifera L.) grown in Hawkes Bay, New Zealand. 1. Phenology and characterization of viticultural environments. Australian Journal of Grape and Wine Research 8, 15–26. ▪ Tonietto J. & Carbonneau A., 2004. A multicriteria climatic classification system for grape-growing regions worldwide. Agricultural and Forest Meteorology 124 (1-2), 81–97. ▪ Van Leeuwen C., Friant P., Chone X., Tregoat O., Koundouras S. & Dubourdieu D., 2004. Influence of climate, soil and cultivar on terroir. American Journal of Enology and Viticulture 55 (3), 207–217. Bibliographie ▪ Barbeau G., Bournand S., Champenois R., Bouvet M. H., Blin A. & Cosneau M., 2004. 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Climate influences on grapevine phenology, grape composition, and wine production and quality for Bordeaux, France. American Journal of Enology and Viticulture 51, 249–261. 294 Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (5) : 288–295, 2010 Key words: phenology, mesoclimate, PCA, precocity potential, GIS, terroir. Analyse der Umweltfaktoren, welche die Phänologie der Rebe im Kanton Genf beeinflussen Zahlreiche Terroirstudien wurden bis heute durchgeführt aber nur wenige beschreiben ausführlich die lokalen bodenkundlichen und klimatischen Bedingungen, welche das Frühreifepotenzial der Rebe beeinflussen. Ziele dieser Arbeit waren (i) die Beschreibung der Parameter, die ein Terroir charakterisieren (Boden, Klima und Topografie), die Phänologie der Pflanzen beeinflussen und (ii) die Untersuchung ob die Beobachtungen einer grossen Anzahl von Parzellen eine umfassende Beschreibung, trotz grosser Variabilität, ermöglicht. Die Ergebnisse zeigen, dass die 49 untersuchten Gamaret Parzellen sich bezüglich des Austriebverhaltens und des Wachstums während der Vegetationsperiode voneinander unterscheiden. Der Einfluss der topografischen und bodenkundlichen Faktoren, war während der zwei Messperioden unterschiedlich und varierte auch im Laufe der Wachstumsperiode. Von numerischen Modellen abgeleitete Bodenparameter, wie die potenzielle Strahlung, scheinen für die Einschätzung der Frühreife einer Parzelle vielversprechend zu sein. Die Beobachtung einer grossen Anzahl von Praxisparzellen scheint für die Einschätzung des Frühreifepotentials, trotz unvermeidbarer Variabilität, ein taugliches Mittel zu sein. Riassunto Impact of environmental factors on the phenological vine development in the Geneva canton Terroir studies are common nowadays but few have used precise pedoclimatic measures for evaluating precocity potential. This work aimed (i) to assess the effect of terroir main parameters (soil, climate and topography) influencing phenological vine development and (ii) to evaluate the accuracy of a geostatistic approach using a high number of existing plots (higher variability) to analyze the terroir parameters’ impact. Results showed that the plots had different development timing for budbreak and during growing season. Both periods were not influenced by the same pedoclimatic parameters. This emphasizes that the influence of these parameters can vary during the growing season. Some parameters derived from a digital elevation mode, like modelized incoming radiations, seem promising for estimating the precocity potential of the different zones. Finally, the results showed that the observation of numerous vineyards of the practice is convenient to define terroir main factors, despite natural variability or human influence. Zusammenfassung Summary Facteurs environnementaux et phénologie de la vigne dans le canton de Genève | Viticulture Analisi dei fattori ambientali che influenzano la fenologia della vite nel cantone di Ginevra Numerosi studi sul terroir sono stati condotti finora, ma pochi descrivono accuratamente le condizioni pedologiche e climatiche locali che possono influenzare la precocità della vite. Gli obiettivi di questo studio consistono (i) nel descrivere i principali parametri del terroir (suolo, clima e topografia) che influenzano lo sviluppo fenologico della vite, e (ii) nel valutare se l’osservazione di un gran numero di appezzamenti è adatta per la caratterizzazione del terroir, nonostante una variabilità considerevole. I risultati mostrano che i 49 appezzamenti di Gamaret studiati si differenziano per quanto riguarda la data di germogliamento e la durata delle fasi di crescita vegetativa. I fattori topografici e pedologici che influenzano questi due periodi non sono identici e variano durante la stagione. Alcuni parametri derivati da modelli numerici utilizzati in campo, come la radiazione potenziale, sembrano promettenti per valutare il potenziale di precocità di un appezzamento. Infine, l’osservazione di un gran numero di appezzamenti è adatta per la caratterizzazione del potenziale di precocità, nonostante un’elevata variabilità naturale o indotta dall’uomo. Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (5) : 288–295, 2010 295 IMPACT OF PEDOCLIMATICAL CONDITIONS ON THE PRECOCITY POTENTIAL OF VINEYARDS IN THE CANTON OF GENEVA (SWITZERLAND) S. Burgos(1), S. Almendros(1), E. Fortier (1) (1) Oenological school of Changins, University of Applied Sciences of south-western Switzerland Rte de Duillier, CH-1260 Nyon Switzerland [email protected] ABSTRACT Terroir studies are common nowadays but few have used precise pedoclimatic measures in order to evaluate the precocity potential. The objectives of this work were (i) to assess the effect of main terroir parameters (soil, climate and topography) influencing the phenological development of the vine, and (ii) to evaluate a geostatistic approach by using a high number of already existing plots (higher variability) to analyze the terroir parameters’ impact. The results showed that the plots presented a different development concerning budbreak and concerning the speed of development during the growing season. These two components are not influenced by the same parameters. This emphasizes that the influence of the different terroir parameters can vary during the growing season. Some parameters derived from a digital elevation mode, like modelized incoming radiations, seem promising for estimating the precocity potential of the different zones. Finally, the results showed that the observation of a large quantity of already existing vineyards not intended for research is adapted to define the main factors of the terroir, despite natural variability or human influence. KEYWORD Phenology–meso-climate – PCA – precocity potential – GIS INTRODUCTION A lot of terroir studies have been made all around the world. The aim is usually the estimation of the viticultural potential in order to advise the growers. A lot of these studies focus on the soil and the geology (Bodin and Morlat, 2003). Others include also the plant and the climate (Murisier et al., 2004, Barbeau et al., 2004, Lebon et al., 1996). It is generally agreed that the climate is one of the most important factors influencing the potential of precocity of a plot (Jones and Davis, 2000). The study of local climatic conditions is generally difficult due to a low density of meteorological stations. Moreover, precise soil information is often limited as well. The following study was performed in the canton of Geneva (SW of Switzerland), where an extensive soil survey had previously been done (1360 ha of vineyards) (Dakhel et al., 2007). The objectives were (i) to describe the main terroir parameters (soil, climate and topography) influencing the phenological development of the vine (precocity potential), and (ii) to estimate the possibility of using already existing plots (higher variability) to analyze the terroir parameters’ impact. MATERIALS AND METHODS The results presented in this paper are the 3 year-averages (2007-09) of data, collected on 49 plots of Gamaret grafted on 3309C, older than 8 years, mostly Guyot trained, and representative of the whole of Geneva’s vineyard. Each plot contained four rows of 30 plants. Plants were treated according to the integrated production. Topography, soil type, soil temperature (2, 20 and 50 cm deep), available water (AW, depending on clay and stone content, and depth of the soil), and geology were assessed for each plot. Slope, geographic exposure, exposure to the north winds (joran (NW) or bise (NE)) and potential radiation were derived from a 5 meter digital elevation model (DEM, spatial analyst, Arcview 9.2). Plant density and foliar surface were noted, date of budbreak, flowering and veraison (BBCH 09, 65 and 85 respectively) were recorded by the observation of 100 organs chosen on representative plants. A plant was considered at a given phenological stage when 50 % of the organs reached this stage. All bunches of three representative and consecutive plants of the plots were harvested and weighted separately to estimate the load. Two hundred grains were harvested on the same day analyzed with a Grapescan (FT120, FOSS electric). Sugar, acidity, pH and anthocyanin were assessed. Principal component analyses (PCA) and Bayesian information criterion (BIC) were performed to select parameters which sorted out the plots in relation to the vine phenology and the quality of the must. These parameters were then used in multiple linear regression stepwise models. The different proposed models were tested and chosen according to their biological significance. The canton of Geneva was divided in 8 geographic zones (Ani (n=8), Cho (n=4), Dar (n=8), Lul(n=10), Pei(n=5), Sat(n=8), Sor(n=6)). The measurements on the plots were averaged for each zone. The zones were then plot as supplementary qualitative variable on the PCA individual factor map. ANOVA and Tukey HSD tests were also performed to compare the different zones. Statistical analyses were performed using the package FactoMineR, Leaps, lattice and stats of the 2.10.1 version of R (© 2009 The R Foundation for Statistical Computing, ISBN 3-900051-07-0). RESULTS AND DISCUSSION Vine phenological development The PCA performed on the phenological parameters of the vine showed two main principal dimensions (Fig. 1a and 1b). The first dimension (57.9% of the variance) was strongly correlated to the length of the period between budbreak and flowering (r=-0.91) and between flowering and veraison (r=0.79). The second dimension (30.1 % of the variance) was mostly correlated to the date of budbreak (r=0.87). A good distribution of the different plots was obtained, reflecting the high variability of the development of the vine. a) b) Fig. 1: Principal composant analyzis (PCA) of the gamaret plots (n=49) A) individual map, violet : geographical zones, blue : plots. B) variable factor map, black : discriminant variables, blue: supplementary variables. The multivariate regression analysis of the first dimension (Fig. 1b) showed that the length of the period budbreak-flowering was influenced by the radiation between April and June, the plant density, the altitude and the date of budbreak, explaining respectively 29, 18, 18 and 4 % of the variance (total 69%). Simulated radiation seems to be a better indicator than the slope because it integrates slope and exposure. Indeed, parameters which integrated several single parameters like available water (soil depth and clay content) or potential radiation (exposure and slope) are more often present in the regression models. Those integrating parameters were also well-correlated with plant development in other studies (Murisier, 2004). The plots with an important amount of radiation between April and June, high plant density, low elevation and early budbeak showed the fastest development from budbreak to flowering. For instance, the zones Lul and Pei received a significantly larger amount of solar radiation between April and June with more than 4.95 105 Wh m-2 compared with a mean of 4.7 105 Wh m-2, explaining their fastest development (Fig. 2a). Among all possible models given by the stepwise regression with a lower explained variance, a lot contained also the average of the soil temperature minimum at 20 cm or a lower exposure to the north-east wind as explicative factors. This shows the importance of the soil type. The number of days between flowering and veraison (Fig. 2b) was influenced by the plant density, the incoming radiation between July and September, the available water and the date of flowering explaining respectively 29, 11, 5 and 3 % of the variance (total 48%). The earlyflowering plots, with high density, shallow soils (small AW) and a high incoming summer radiation showed the fastest development. All the factors which allow en increase in radiation and temperature are favorable to fast vegetation development, which is consistent with other studies (Lebon et al., 1996). The multivariate analyses of the second dimension of the PCA (Fig. 1b) showed that the main factors influencing the date of budbreak were the available water, the potential radiation from January to March, the exposure to NW wind and the elevation, explaining 9, 6, 4 and 2% of the variance respectively (total 21%). The regression models are not as good as for the first dimension. The earliest plots at budbreak were to be found on a steep slope or were exposed S or SE and were located on soil with a moderate available water capacity. The plots located on heavy soils, exposed N and with high elevation showed a significantly (p < 0.05) delayed budbreak of 3 days. This is the characteristic of the zone Cho which is significantly later at budbreak (Fig. 3a). Also, the differences in the plants phenological development by zones tended to be less important at the veraison (Fig. 3c) than at the budbreak and flowering (Fig. 3a and b). Fig 2. Difference between the length of the period a) budbreak-flowering and b) flowering-veraison for each zone compared to the mean average of the 49 plots. Fig 3. Difference between period of a) budbreak b) flowering and c) veraison for each zone compared to the mean average of the 49 plots. These results showed that the plots presented a different development pattern concerning budbreak and concerning the speed of development during the growing season. These two differentiation components are not influenced by the same parameters. This emphasizes that the influence of the different terroir parameters can vary during the growing season. Some early plots at budbreak receiving a lower amount of radiation can, however, lose their advantage by a slower development. For instance, the zone of Ani, which was among the earliest at budbreak (Fig. 3a) probably because of its proximity to the Geneva lake, lost its advance (Fig. 3b) because of its north-west exposure. Effect of phenology on the quality of the must The sugar content expressed in Oechsle degrees was mostly influenced by the date of budbreak, the grape load (kg m-2), the date of flowering and the available water capacity of the soil explaining 30, 13, 6 and 4% of the variance respectively (total 53%). There is a maximum yield over which high sugar content might not be reached (Fig. 4a). When the load gets past about 1.2 kg m-2, it is difficult to obtain enough sugar. The plots with early budbreak showed a good maturity (Fig. 4b), even if the exposure was not the best (data not shown). If the budbreak is too late, it is difficult for the plant to overcome this delay despite a reduced load. If the exposure is not optimal, the date of budbreak should be early enough to keep an opportunity of high sugar maturity. Anthocyanine content was also influenced by the same factors as those for sugar content. Fig. 4 Degrees Oeschle as function of a) the mean load of 3 plants per m2 and b) budbreak. Using already existing parcels for complete terroir analyses The results showed that the observation of an elevated number of already existing plots can be used to study local effect of the climate and so, even if the study area is spatially limited and presents low relief variability. The number of plots for each zone varied from 4 to 10. This seems to be sufficient to compare the zones with an accurate statistical precision. The high degree of variability of the different plots inside a zone is still smaller than the variability between the zones. The choice of gamaret, a variety derived from one clone, is a good tool to reduce the plants variability. Moreover it is necessary to measure a great number of organs for the phenological stadium in order to get enough precision. The effect of the annual climate could be removed by observing 3 different seasons. However, the earliest and latest plots were generally the same over the 3 years. CONCLUSIONS The results presented here show that the parameters influencing the plant at budbreak, and the length of the period budbreak-flowering and flowering-veraison are not the same. The potential radiation and the exposition to the north winds play an important role during the vegetative plant development. The combination between observed variable and data derived from a digital elevation model allows the classification of the different zones in a vineyard, despite the variability of the plots. This variability can however be taken as an opportunity to produce a wide varieties of wine by choosing an adapted couple variety-rootstock specific to a given plot. It might be also possible to extrapolate these results on other zones or adjacent plots. This kind of terroir studies can be useful for advising viticulturists on several decisions. A geostatistic approach with a lot of plots but quite simple parameters seems to be a promising tool to evaluate the environmental differences, even in a region with quite low variability in altitude. This is important in a period of climate evolution (Jones and Davis, 2000). ACKNOWLEDGMENTS We are grateful to all people who worked principally during the harvest, to Irene for the laboratory analyses and all the growers who kindly allowed us the use of their vineyards. We also thank Elayne Wehrlin for her linguistic support. BIBLIOGRAPHY Barbeau G., Bournand S., Champenois R., Bouvet M.H., Blin A. and Cosneau M. 2004. The behaviour of four red grapevine varieties of Val de Loire according to climatic variables. Journal International des Sciences de la Vigne et du Vin, 38, 35-40. Bodin F. and Morlat R. 2003. Characterizing a vine terroir by combining a pedological field model and a survey of the vine growers in the Anjou region (France). Journal International des Sciences de la Vigne et du Vin, 37, 199-211. Dakhel N., Docourt M., Schwarz J-J. and Burgos S. 2007. Carte des sols viticoles genevois. Report of study. Site internet : http://etat.geneve.ch/geoportail/geovit/. Jones G.V. and Davis R.E. 2000. Climate influences on grapevine phenology, grape composition, and wine production and quality for Bordeaux, France. American Journal of Enology and Viticulture, 51, 249-261. Lebon E., Dumas V. and Morlat R. 1996. Réponses de la vigne à différentes situations pédoclimatiques du vignoble d'Alsace. Revue Française d'Oenologie, 156, 22-25. Murisier F., Briguet C., Letessier I., Pythoud K. and Zufferey V. 2004. Etude des terroirs viticoles vaudois. Revue suisse Vitic.Arboric.Hortic., 36, 1-20. Van Leeuwen C., Gaudillere J.P. and Tregoat O. 2001. The assessment of vine water uptake conditions by C-13/C-12 discrimination in grape sugar. Journal International des Sciences de la Vigne et du Vin, 35, 195-205. V i t i c u l t u r e Enherbement du vignoble genevois : bilan et perspectives Elisabeth FORTIER, Tal SHANI et Stéphane BURGOS, Ecole d’ingénieurs de Changins, 1260 Nyon Renseignements : S. Burgos, e-mail : [email protected], tél. +41 22 363 40 50 L’enherbement du vignoble genevois est de plus en plus courant. Mais quelle est sa composition ? Introduction La mise en place d’une couverture végétale dans les vignobles est une pratique de plus en plus courante. En France, 33 % des surfaces viticoles sont enherbés, avec un maximum de 85 % pour la région alsacienne (Grosman et Bourgouin, 2009). En Suisse, la région romande emboite tranquillement le pas à la Suisse alémanique et au Tessin. Ce choix est justifié par différents motifs, d’ordre écologique (biodiversité), agronomique (lutte contre l’érosion) et législatif (paiements directs). Les vignerons sont ainsi confrontés à une nouvelle problématique : gérer avec efficacité cette flore spontanée. Pour cela, il est nécessaire de connaître les caractéris- 96 tiques de cet enherbement cohabitant avec la vigne (Delabays et al. 2009). Un premier inventaire de la végétation des vignes en Suisse romande a été effectué en 2004 par Clavien et Delabays (2006) sur une très grande superficie, allant de Genève au Valais, avec des conditions géo-pédo-climatiques très variables. En complément à cette première étude, un relevé botanique de 59 parcelles du vignoble genevois a été effectué en 2008 et 2009. Ces relevés ont pour objectif de répertorier les plantes présentes dans l’environnement genevois, en mettant l’accent sur les espèces dominantes et leur spectre biologique et écologique, tout en reliant les techniques d’entretien du sol au type de couverture végétale. Cette étude s’est accompagnée Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (2): 96–103, 2010 d’une réflexion sur la possibilité de mettre en valeur l’enherbement selon des critères de biodiversité dans le cadre des prestations écologiques requises (PER). Enfin, dans une optique de protection des sols, une discussion sur les possibilités d’enherbement des parcelles désherbées est amorcée. Résumé Enherbement du vignoble genevois : bilan et perspectives | Viticulture Matériel et méthodes L’étude porte sur 59 parcelles (51 enherbées et 8 désherbées chimiquement) bien réparties sur l’ensemble du vignoble (fig. 1). Toutes font partie d’un réseau de recherche sur la caractérisation du potentiel climatique du terroir genevois mené par l’Ecole d’Ingénieurs de Changins (EIC). Les 59 parcelles sont plantées de gamaret ou de gamay sur porte-greffe 3309c, sans restriction quant au mode de conduite et d’entretien du sol. Les parcelles étant établies depuis plus de 8 ans, elles sont censées avoir atteint le niveau d’équilibre en termes de diversité et de dominance des espèces, en partant du principe que la gestion a été constante au cours de ces années. Les relevés floristiques ont été effectués sur une longueur de 10 m au centre de la parcelle, représentant entre 10 et 25 m2 selon la largeur de l’interligne. A l’exception de quelques parcelles, deux relevés ont été fait, en novembre 2008 et juin 2009, de manière à couvrir tout le spectre de la végétation. Les espèces ont été identifiées à partir du Nouveau Binz (Aeschiman et Burdet, 1994), du Flora Helvetica (Lauber et Wagner, 1998) et du Flora Vegetativa (Eggenberg et Möhl, Au cours des dernières années, le vignoble genevois a considérablement modifié ses habitudes en matière d’entretien du sol : l’enherbement est devenu une pratique courante. Cet article dresse l’état des lieux de l’enherbement du canton et lance une réflexion sur les possibilités d’amélioration. Il démontre que la flore du vignoble est diversifiée mais dominée par quelques espèces typiques des prairies grasses. Le nombre de fauches ne semble pas avoir d’influence sur cette composition. Quelques petits efforts supplémentaires permettraient de considérer la majorité des parcelles enherbées comme surface de compensation écologique, avantage non négligeable pour les vignerons bénéficiant des paiements directs. Pour les parcelles désherbées étudiées, 50 % pourraient être enherbées sans risque trop important. 2008). La dominance, c’est-à-dire la surface occupée par chaque espèce, a été estimée à l’aide de l’échelle de Londo (Londo, 1976), puis convertie en pourcentage et appelée «recouvrement relatif» (tabl. 1). Le recouvrement relatif indique donc la proportion de la surface occupée par une espèce par rapport à l’ensemble de la surface couverte par la végétation. Cette mesure de recouvrement relatif permet de mieux comprendre la répartition des plantes selon différents critères (type biologique et groupe écologique), obtenus à partir du Flora Helvetica (Lauber et Wagner, 1998). Les valeurs de richesse spécifique sont obtenues en additionnant le nombre d’espèces présentes sur une parcelle. Une enquête auprès des vignerons a permis de rassembler des informations sur le nombre de fauches et la vigueur des parcelles. ! Figure 1 | Répartition des relevés botaniques dans les vignes du canton de Genève. Tableau 1 | Conversion de l’échelle de Londo en pourcentage de recouvrement. Echelle de Londo Recouvrement relatif (%) 0,1 0,2 0,4 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 2 4 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (2): 96–103, 2010 97 Viticulture | Enherbement du vignoble genevois : bilan et perspectives Résultats et discussion Inventaire floristique Richesse spécifique Les parcelles enherbées comptent entre 5 et 37 espèces différentes (moyenne 17), tandis que les parcelles désherbées en comptent entre 2 et 25 (moyenne 9) en incluant les plantes présentes sous les ceps (fig. 2). Au total, 104 espèces différentes ont été recensées. La largeur relative de l’enherbement influence significativement la richesse de la parcelle : plus la bande enherbée occupe une proportion importante de la surface, plus le nombre d’espèces relevées est grand. Le nombre de fauches des parcelles enherbées n’a pas influencé la richesse (données non présentées). Les plantes présentes dans les parcelles désherbées ont 25 Surface enherbée a 15 a 26 –40% A 41 –55% a > 55% Grande moyenne 10 B 5 0 Enherbé Désherbé Figure 2 | Richesse spécifique selon le type d’entretien du sol. Les lettres différentes indiquent que les valeurs se distinguent significativement (P < 0,05). Fréquence et dominance des espèces dans l’interligne Le nombre d’espèces relevé peut paraître impressionnant et témoigner d’une très grande variabilité de l’enherbement du vignoble genevois. Toutefois, l’étude des plantes colonisant l’interligne démontre que ce n’est pas le cas. Les espèces présentes dans un nombre élevé de parcelles sont peu nombreuses (fig. 3). Au contraire, une grande majorité d’espèces n’apparait que dans peu de relevés : près de 50 plantes différentes ne sont apparues que dans 1 à 4 relevés. Comme le mentionnent Clavien et Delabays (2006), cette distribution s’explique principalement par des conditions défavorables au développement des plantes dues aux nombreuses perturbations humaines. Ainsi, seules des espèces bien adaptées aux conditions culturales actuelles de la vigne se rencontrent régulièrement dans les parcelles. Parmi les plantes peu communes, mentionnons la présence à quelques reprises de la picride fausse vipérine (Picris echioides), espèce vulnérable en Suisse (risque élevé d’extinction) selon la Liste Rouge des fougères et plantes à fleurs menacées de Suisse (fig. 4). Les quelques espèces fréquemment retrouvées occupent une superficie au sol relativement importante (tabl. 2). Ainsi, l’ivraie vivace (Lolium perenne) était présente dans plus de 9 parcelles enherbées sur 10, y occupant en moyenne plus du tiers de la surface. Cette 0 0 Nombre d’occurrence 50 – 51 10 45 – 49 10 40 – 44 20 35 – 39 20 30 – 34 30 25 – 29 30 20 – 24 40 15 – 19 40 10 – 14 50 5–9 50 1–4 DE 60 1–4 Nombre d’espèces EN 60 5–8 20 Nombre d’espèces relevées < 26% b échappé au traitement herbicide ou sont capables d’un développement très rapide leur permettant de croitre entre 2 traitements. L’étude des spectres biologiques et écologiques des plantes relevées renseignera davantage sur les types de plante favorisés par le mode d’entretien du sol. Nombre d’occurrence Figure 3 | Fréquence des espèces pour les vignes enherbées (EN) et désherbées (DE). La fréquence correspond au nombre de parcelles dans lesquelles une même plante a été relevée. 98 Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (2): 96–103, 2010 Enherbement du vignoble genevois : bilan et perspectives | Viticulture Tableau 2 | Principales espèces présentes dans les vignes enherbées (EN) et désherbées (DE) et leur recouvrement relatif. EN Fréquence (%) Pissenlit (Taraxacum officinale) Figure 4 | Picris echioides : espèce vulnérable de Suisse présente dans quelques vignobles du canton situés à l’est du lac Léman (crédit photographique : Stemonitis). espèce peut ainsi être qualifiée de dominante dans le vignoble genevois enherbé, à l’instar des vignobles de la Suisse romande (Clavien et Delabays, 2006). En conditions désherbées, des résultats similaires, et sans grande surprise, sont obtenus avec le liseron des champs (Convolvulus arvensis). Types de végétation L’analyse du recouvrement relatif des plantes de l’interligne permet de mieux comprendre la répartition des plantes selon différents critères. Parmi ces critères, le type biologique de Raunkier (Raunkier, 1934), permet de regrouper les plantes selon leur stratégie de survie pendant l’hiver. Ainsi, dans le vignoble genevois, un enherbement permanent favorise principalement le développement d’hémicryptophytes (h ; fig. 5). Les hémicryptophytes sont des plantes pluriannuelles dont les bourgeons sont situés au niveau du sol ou juste audessous du sol (ex. ivraie vivace et pissenlit). Ce type biologique, fort utile pour la protection des sols contre l’érosion, est largement représenté par des graminées. Dans les parcelles désherbées, on retrouve une plus 100,0 12,0 Trèfle rampant (Trifolium repens) 94,1 9,5 Ivraie vivace (Lolium perenne) 92,2 33,9 Grand plantain (Plantago major) 64,7 3,3 Pâturin annuel (Poa annua) 64,7 7,6 Véronique de Perse (Veronica persica) 62,7 1,2 Liseron des champs (Convolvulus arvensis) 60,8 2,2 Plantain lancéolé (Plantago lanceolata) 52,9 3,8 Pâturin des prés (Poa pratensis) 51,0 16,7 Pâquerette (Bellis perennis) 49,0 1,2 DE Fréquence (%) Recouvrement relatif (%) Liseron des champs (Convolvulus arvensis) 75,0 53,8 Véronique de Perse (Veronica persica) 75,0 18,0 Séneçon commun (Senecio vulgaris) 75,0 11,0 Pâturin annuel (Poa annua) 50,0 30,9 Vergerette du Canada (Conyza canadensis) 25,0 5,3 Le recouvrement relatif en italique signifie que ce recouvrement n’est pas dans les plus importants. forte proportion de géophytes (g) et de thérophytehémicryptophytes (u). Ces plantes survivent durant l’hiver soit avec des bourgeons complètement cachés sous la terre (ex. ail des vignes et liseron des champs), soit par le biais de graines et / ou de bourgeons au niveau du sol (ex. pâturin annuel et véronique de Perse). Ces plantes sont adaptées à leur environnement : elles ! EN Recouvrement relatif (%) Recouvrement relatif (%) DE 90 90 80 80 70 70 60 60 50 50 40 40 30 30 20 20 10 10 0 0 h u t g Type biologique de Raunkier i h u t g i Type biologique de Raunkier Figure 5 | Spectre biologique (type biologique de Raunkier) des espèces selon le recouvrement relatif pour les vignes enherbées (EN) et désherbées (DE). h : hémicryptophyte ; u : thérophyte-hémicryptophyte ; t : thérophyte ; g : géophyte ; i : phanérophyte sempervirent. Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (2): 96–103, 2010 99 Viticulture | Enherbement du vignoble genevois : bilan et perspectives complètent leur cycle rapidement et / ou ne sont pas exposées aux traitements. Elles ont un effet incertain et irrégulier sur la protection des sols, puisque leur présence est aléatoire et / ou de courte période. Un autre critère utilisé pour caractériser le type de végétation est le groupe écologique, c’est-à-dire le milieu de prédilection des espèces. Les surfaces enherbées montrent une large dominance de plantes de prairies grasses (G ; fig. 6), qui regroupe les espèces peu nombreuses liées aux prairies fertilisées. Cette constatation, ainsi que le type biologique prédominant relevé, confirme que l’enherbement obtenu dans le vignoble genevois est caractéristique d’une prairie grasse. Quant aux surfaces désherbées chimiquement, elles comportent une très grande majorité de plantes dites rudérales (R ; fig. 6). Ce groupe, un peu large et mal défini, comprend les plantes occupant les terrains laissés ouverts mais non cultivés, ainsi que les compagnes des plantes cultivées, les mauvaises herbes. Toutes ces observations confirment celles obtenues par Clavien (2005) pour les vignobles de la Suisse romande. Encore une fois, l’intensité du fauchage, entre 1 et 5 passages par saison, n’a eu aucun impact sur le spectre biologique ou sur le groupe écologique de la flore présente (données non présentées). Encourager l’enherbement Delabays et al. (2009) ont résumé les différentes directives concernant la prise en compte des éléments floris- tiques en viticulture. Parmi celles-ci, l’Ordonnance sur les Paiements Directs (OPD) permet de considérer la surface enherbée comme surface de compensation écologique (SCE). En effet, une «surface viticole présentant une biodiversité naturelle» (SVBN) peut être comptabilisée comme SCE. La SVBN doit posséder une végétation naturelle sur au moins 50 % de sa surface. De plus, la part totale de graminées de prairies grasses (principalement Lolium perenne, Poa pratensis, Festuca rubra, Agropyron repens) et pissenlit (Taraxacum officinale) ne doit pas dépasser 66 % de la surface enherbée. Un enherbement naturel et varié est donc très intéressant pour atteindre la surface minimale en SCE nécessaire à l’obtention des paiements directs (3,5 ou 7 % de la SAU selon le cas), mais cet avantage est encore peu connu et exploité. Abstraction faite des autres conditions à remplir pour obtenir la mention SVBN, seules 17 parcelles sur les 59 recensées dans le vignoble genevois pourraient obtenir ce titre (fig. 7). Pour les vignes dites larges (interrang supérieur à 1,4 m), 16 parcelles pourraient être considérées comme SVBN. Ce chiffre pourrait être augmenté à 24 si certaines parcelles élargissaient la bande enherbée pour atteindre 50 % de la surface viticole. De plus, comme le montre la figure 2, l’augmentation du nombre d’espèce est significative avec un enherbement de plus de 55 %. Elargir l’enherbement permettrait sans doute d’améliorer la composition botanique et de qualifier davantage de parcelles en SVBN. Il faut cependant tou- Recouvrement relatif (%) EN DE 100 100 90 90 80 80 70 70 60 60 50 50 40 40 30 30 20 20 10 10 0 0 G R H S F Groupe écologique G R H Groupe écologique Figure 6 | Groupe écologique des espèces selon le recouvrement relatif pour les vignes enherbées (EN) et désherbées (DE). G : plante de prairie grasse ; R : plante rudérale ; H : plante de marais ; S : plante de prairie sèche ; F : plante forestière. 100 Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (2): 96–103, 2010 S F Enherbement du vignoble genevois : bilan et perspectives | Viticulture Vignes étroites (< 1,4 m) Vignes larges (>1,4 m) Désherbé 1 3 4 16 9 Enherbé à plus de 50 % mais composition botanique inadéquate 15 18 Parcelle potentiellement SVBN Enherbé à moins de 50 % 8 3 2 6 Bonne composition botanique 1 Composition botanique inadéquate Figure 7 | Nombre de parcelles pouvant potentiellement être nommées Surfaces Viticoles à Biodiversité Naturelle (SVBN) et raisons de la disqualification des autres parcelles. jours considérer les risques de concurrence hydrique avec la vigne. Dans le cas des vignes étroites (interrang < 1,4 m), une seule parcelle pourrait être SVBN (fig. 7). En effet, en culture étroite, la surface enherbée est limitée et la composition botanique souvent inadéquate. Un enherbement sur plus de 50 % de la surface viticole permettrait d’améliorer la richesse botanique mais serait techniquement plus difficile. La majorité des parcelles ne pourraient obtenir la mention SVBN en raison de leur composition botanique inadéquate, ce qui est peu surprenant. En effet, comme démontré plus tôt, la gestion actuelle de l’enherbement favorise principalement une petite palette de plantes de prairies fertilisées (tabl. 2 et fig. 6). Ces plantes dominantes ne sont pas nécessairement celles qui sont souhaitées. Le maximum autorisé de 66 % de plantes de prairies grasses, selon la définition de la SVBN, est ainsi rapidement atteint. Une modification des périodes et des techniques d’entretien pourrait peut-être changer la composition botanique. Le nombre de fauches ne semble toutefois pas influencer la richesse botanique. De nombreuses questions et hypothèses demeurent quant à la gestion adéquate de l’enherbement pour obtenir une composition optimale. Toutefois, l’effort initial d’enherber ne doit pas être négligé : même si la composition n’est pas toujours celle souhaitée d’un point de vue biodiversité, la simple présence d’herbe permanente est essentielle pour protéger le sol. Enherber les vignes désherbées ? L’enherbement a de nombreux avantages par rapport au sol : il améliore la structure, la portance, la vie microbienne, etc. L’enherbement joue aussi un rôle primordial pour limiter les phénomènes érosifs (fig. 8). L’in- fluence d’une couverture herbeuse sur la protection du sol dépend de son interaction avec les autres facteurs (pentes, pluviométrie, etc.) et de sa proportion, c’est-à-dire la surface de sol occupée. Dans les vignes enherbées, la surface recouverte de végétation atteint en moyenne 45 %, variant de 17 à 68 % de la surface totale. Pour les vignes de moins de 1,4 m de largeur, cette proportion atteint 33 % de la surface, et 53 % pour les vignes de plus de 1,4 m de largeur. Dans le cas des parcelles désherbées, une réflexion doit être menée quant à la possibilité de les enherber. La principale restriction est la réserve en eau du sol. Celle-ci doit être suffisamment grande pour alimenter à la fois la vigne et l’herbe. Pour s’en assurer, il s’agit de calculer la réserve utile en eau (RU) potentielle du sol, en mm (Letessier et Fermond, 2004). Toutefois, la présence d’une grande réserve en eau ne signifie pas nécessairement que la vigne sera capable de l’utiliser. ! Figure 8 | Erosion d’une vigne désherbée : des moyens doivent être pris afin de limiter ce phénomène. Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (2): 96–103, 2010 101 Viticulture | Enherbement du vignoble genevois : bilan et perspectives Une limitation de la croissance du système racinaire (hydromorphie, tassement, etc.) peut diminuer la capacité de la plante à puiser cette eau. En outre, la présence d’un écoulement souterrain peut augmenter la RU, a priori très faible, et fausser les estimations. L’observation de la vigueur de la vigne est une technique simple pour évaluer le bon fonctionnement du système racinaire et l’approvisionnement suffisant en eau. Lorsque la croissance du système racinaire peut être directement évaluée (creuse d’un profil), on obtient une mesure de RU dite réelle. Dans ce cas, la limite a été estimée, dans le canton de Vaud, à plus de 150 mm pour ne pas avoir de concurrence hydrique (Zufferey et Murisier, 2004). Ainsi, sur les 8 parcelles actuellement désherbées, 4 pourraient être enherbées d’une manière permanente sans trop de risques (tabl. 3). Les parcelles A à F possèdent toutes une grande réserve en eau potentielle, mais la vigueur de la vigne varie. Les parcelles A et B Tableau 3 | Possibilités d’enherbement des 8 parcelles désherbées du réseau en fonction de la réserve en eau (RU) et de la vigueur de la vigne. Parcelle Pente (%) RU potentielle Vigne Recomman dation (mm) vigoureuse ? A 1 165 oui Enherbement permanent B 1 149 oui Enherbement permanent C 15 184 moyen Enherbement permanent, à surveiller D 0 146 moyen Enherbement permanent, à surveiller E 0 160 non Enherbement temporaire maîtrisé F 2 153 non Enherbement temporaire maîtrisé G 30 Enherbement temporaire maîtrisé H 40 Enherbement temporaire maîtrisé Bibliographie ▪ Aeschiman D. & Burdet H. M., 1994. Flore de la Suisse et des territoires limitrophes, le nouveau Binz. Edition du Griffon, Neuchâtel, 640 p. ▪ Clavien Y., 2005. La végétation des vignes de Suisse romande. Rapport de stage, Agroscope Changins-Wädenswil, 14 p. ▪ Clavien Y. & Delabays N., 2006. Inventaire floristique des vignes de Suisse romande: connaître la flore pour mieux la gérer. Revue suisse Vitic., Arboric., Hortic. 38 (6), 335 – 341. ▪ Delabays N., Wirth J. & Vaz C., 2009. Nouveaux enjeux dans la gestion de la flore des vignobles. Revue suisse Vitic., Arboric., Hortic. 41 (4), 207 – 211. 102 sont vigoureuses : l’enherbement y est conseillé. Les parcelles C et D pourraient être enherbées, en surveillant activement les répercussions sur la vigne, puisque la vigueur y est moyenne. Une RU similaire est présente dans les parcelles E et F, mais le manque de vigueur risque d’être accentué par un enherbement permanent. Une présence temporaire et maîtrisée d’herbe serait possible. Enfin, les parcelles G et H étant en vigne basse, non-mécanisé et avec une pente de 30 – 40 %, il serait difficile de gérer un enherbement permanent nécessitant des fauches. Un enherbement temporaire maîtrisé (passage plus tardif durant la saison avec un herbicide de contact plutôt que systémique), un ensemencement à partir d’espèces sélectionnée (ex. orge des rats) ou un paillage pourraient y être possibles. Conclusions • La flore du vignoble genevois est diversifiée, mais dominée par quelques espèces occupant une grande superficie. • La gestion actuelle de l’enherbement favorise les plantes de prairies grasses. • Le nombre de fauches ne semble pas influencer la richesse ou le type de plantes. • Le tiers des parcelles enherbées peuvent être considérées comme «surface viticole présentant une biodiversité naturelle» (SVBN), car l’enherbement occupe une surface suffisante et sa composition botanique est adéquate, mais cette proportion pourrait être augmentée. • Des efforts doivent encore être faits pour promouvoir l’enherbement : parmi les parcelles désherbées du réseau, 50 % pourraient être enherbées sans n craindre de concurrence hydrique trop forte. ▪ Eggenberg S. & Möhl A., 2008. Flora Vegetativa. Edition Rossolis, Berne, 680 p. ▪ Grosman J. & Bourgouin B., 2009. Entretien des sols viticoles. Adresse: http://www.belchim.com/pdf/IT/2feb/BCP%20-%20Bologne_%20 2009_01_23_Grosman.pdf [20 novembre 2009]. ▪ Lauber K. & Wagner G., 1998. Flora Helvetica - Flore illustrée de Suisse. Editions Paul Haupt, Berne, 1616 p. ▪ Letessier I. & Fermond C., 2004. Etude des terroirs viticoles vaudois. 2. Caractérisation des sols. Revue suisse Vitic., Arboric., Hortic. 36 (4), 4 – 10. Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (2): 96–103, 2010 Key words: vineyards, grass cover, botanical composition. Begrünung des Genfers Weinberg: Charakterisierung und Perspektiven In den letzten Jahren haben sich die Gewohnheiten im Genfer Weinanbau bezüglich der Bodennutzung stark verändert: eine Begrünung zwischen den Zeilen ist häufig geworden. In diesem Artikel wird eine Bestandsaufnahme der aktuellen Bodenbedeckung im Kanton gemacht und ausserdem werden einige Verbesserungsvorschläge lanciert. Es zeigt sich, dass die Flora des Genfer Weinberges zwar vielfältig ist, aber von einigen typischen Fettwiesearten, die eine grosse Fläche bedecken, dominiert wird. Die Anzahl der Mähungen scheint keinen Einfluss auf diese Zusammensetzung zu haben. Mit wenig zusätzlicher Mühe könnte die Mehrheit der Parzellen als ökologische Ausgleichflächen (OAU) betrachtet werden. Dies wäre ein nicht unwesentlicher Vorteil für die Weinbauern, die Direktzahlungen erhalten. Von den untersuchten unbegrünten Parzellen könnten 50 % ohne besonderes Risiko begrünt werden: folglich sind noch einige Anstrengungen zu machen um die Begrünung zu fördern. ▪ Londo G., 1976. The decimal scale for relevés of permanent quadrats. Vegetatio. 33, 61 – 64. ▪ Raunkier R., 1934. The Life Form of Plants and Statistical Geography. The Clarendon Press, Oxford, UK. ▪ Zufferey V. & Murisier F., 2004. Etude des terroirs viticoles vaudois: comportement de la vigne en fonction des conditions pédo-climatiques. Agroscope Changins-Wädenswil, 221 p. Riassunto Grass cover of Geneva vineyards: analysis and perspectives In the past few years, the Geneva vineyard has significantly changed its soil management practice: permanent grass cover has become a common practice. This article provides a detailed analysis of the grass cover in the canton of Geneva and launches a discussion on opportunities for improvement. It demonstrates that the flora of the vineyard is diverse but dominated by a few species typical of fertilized meadows, occupying a large area. The frequency of mowing does not seem to influence the flora composition. With some small extra effort, the majority of vineyards could be considered as ecological compensation areas, a good advantage for vine growers qualifying for direct payments. For the weeded plots in this study, 50 % could be covered with permanent grass without too much risk. Therefore, there is still much to be done to promote permanent grass cover. Zusammenfassung Summary Enherbement du vignoble genevois : bilan et perspectives | Viticulture Inerbimento del vigneto ginevrino: stato attuale e proposte di miglioramento Negli ultimi anni, il vigneto ginevrino ha notevolmente cambiato le sue abitudini per quanto riguarda la modalità di manutenzione del suolo: l’inerbimento è diventato una pratica comune. Questo articolo descrive lo stato attuale dei luoghi d’inerbimentotraccia una panoramica sulla gestione dell’inerbimento nel cantone e avvia lancia una riflessione sulle possibilità di miglioramento. Si è d Esso imostrato dimostra che la flora del vigneto è diversificata, ma dominata da alcune specie tipiche dei prati grassi che occupano una vasta superficie. Il numero di sfalci sembra non avere effetti su questa composizione. Con qualche piccolo sforzo supplementare, la maggior parte degli delle appezzamenti parcelle inerbiti inerbite potrebbe essere considerata come Superficie di Compensazione Ecologica (SCE), vantaggio non trascurabile per i viticoltori beneficiari dei Pagamenti Diretti. In questo studio, il 50 % degli appezzamenti diserbati potrebbe essere inerbito senza troppi correre rischi troppo importanti: vi sono quindi ancora diversi sforzi da compiere per promuovere l’inerbimento! Remerciements Nous remercions tous les viticulteurs qui ont mis à disposition leurs parcelles, ainsi que Nathalie Dakhel et Nicolas Delabays pour leurs précieux commentaires. Revue suisse Viticulture, Arboriculture, Horticulture | Vol 42 (2): 96–103, 2010 103