En Angleterre, c'est en 1992 qu'a été atteint le pic de mortalité [15],
alors qu'en Espagne le pic de mortalité ne semble pas avoir été
atteint [16]. Aux Etats-Unis, les données du programme SEER ont
permis de mettre en évidence un déclin des taux de mortalité dès
1991 parmi la population blanche alors que dans la population noire
la mortalité n'a diminué qu'à partir de 1993 [17]. Plusieurs raisons
ont été avancées pour expliquer cette diminution dans les pays
développés comme des facteurs alimentaires [18] ou environne-
mentaux [19], mais le principal effet semble être lié aux progrès
thérapeutiques et au dépistage individuel par le PSA. A l'heure
actuelle, on ne dispose que de données populationnelles pour déter-
miner la part de chacun de ces facteurs dans la baisse récente de la
mortalité. OLIVER a montré que la diminution de la mortalité obser-
vée en Angleterre, pays où le dépistage est peu répandu était simi-
laire à celle observée aux USA [15] où le dépistage est plus large-
ment répandu, ce qui tendrait à limiter la part du dépistage dans la
baisse de la mortalité. Pour PERRON, on ne peut pas attribuer la
diminution de la mortalité au Canada aux effets du dépistage [20],
mai plus récemment, FEUER [17] et CHU [21] ont montré que la bais-
se de la mortalité pouvait être en grande partie portée au crédit de
l'avance au diagnostic apportée par l'utilisation du PSA.
Dans tous les cas, seuls les essais randomisés multicentriques de
grande ampleur actuellement en cours aux USA et en Europe [22]
pourront tenter d'estimer la part de l'usage intensif du PSA dans la
baisse récente de la mortalité liée au cancer de prostate, mais les
premiers résultats ne sont pas attendus avant 2005 voire 2008 [23].
CONCLUSION
Le cancer de prostate est un cancer en augmentation constante en
France sur les 20 dernières années alors que la mortalité a com-
mencé à diminuer sur la période récente. Les études en popula-
tion générale permettent d'en mesurer les variations, mais pas
d'en connaître la cause (dépistage, amélioration des traitements
…). Les études randomisées sur une grande échelle portant sur le
dépistage devraient apporter un élément de réponse. Cependant,
beaucoup de nouveau cas de cancers pour un nombre plus modé-
ré de décès signifie un nombre important de personnes malades
nécessitant des soins et une surveillance prolongée. Or, nous
manquons d'informations sur ces pratiques de soins et sur le poids
économique de ces malades pour mesurer l'ampleur du problème
posé. Les études en population générale peuvent amener ce type
d'information.
Collaborations : Ce travail à été réalisé grâce aux données collec-
tées par les registres membre du réseau Français des registres de
Cancer (Francim) et le CépiDc qui recense les causes de Décès
Membres du groupe de travail urologie : J. Estève (Service de Bio-
statistiques Lyon-Sud), F. Menegoz (Registre des cancers de l’Isè-
re), B. Tretarre (Registre des cancers de l’Hérault), AV. Guizard
(Registre des cancers de la Manche), J. Macé-Lesec’h ( Registre
des cancers du Calvados), J. Peng (Registre des cancers de la
Somme ), A. Buémi (Registre des cancers du Haut-Rhin), M. Velten
(Registre des cancers du Bas-Rhin), E. Jougla (INSERM, CépiDc),
P. Arveux (Registre des cancers du Doubs), E. Michel (INSERM,
CépiDc)
Remerciements : Cette étude a été financée par l'ARC.
Nous voulons dédier cet article à la mémoire de Paul Schaffer,
pionnier du réseau, sans qui ce travail n'aurait pu se faire.
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