les araignées en verger - RMT Biodiversité et Agriculture

N° 35
septembre 2013
Les araignées
en verger
Les araignées, ordre des Araneae, classe des Arachnides, sont des arthropodes qui se distinguent,
au sein de leur embranchement, par le fait qu’ils possèdent quatre paires de pattes, qu’ils n’ont
ni ailes ni antennes, et que leurs yeux sont simples (ocelles) et non composés. Plus de 40 000
espèces d’araignées sont décrites à travers le monde dont 1 600 environ en France.
En verger, on peut trouver plus de quarante espèces selon les conditions pédoclimatiques et les
cultures. Leur abondance moyenne est de 50 à 150 individus par m², mais ce nombre peut-être
dix fois plus important à certains moments de l’année. L’utilité des araignées est avérée en verger
car ce sont pour la plupart des prédateurs insectivores chassant une grande variété de ravageurs.
Point
sur
le
sur
le Point
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Les Araignées
Le cycle de développement des araignées comprend plu-
sieurs stades. Après l’éclosion des œufs dans un cocon de
ponte, s’en suit un stade juvénile durant lequel les jeunes
araignées ont un comportement grégaire même en dehors
du cocon. Dans la famille des Lycosidae, les araignées juvé-
niles restent accrochées par centaines sur l’abdomen de la
mère, qui se déplace ainsi avec sa progéniture.
Après une à deux mues, et lorsqu’elles sont capables de se
nourrir seules, les jeunes araignées se dispersent et com-
mencent alors le stade adulte solitaire. Durant cette phase, les
araignées sont carnivores et se nourrissent de proies vivantes.
La dispersion peut avoir lieu, soit par voie terrestre, soit
par essaimage aérien, notamment à l’automne. Ce phéno-
mène produit ce que l’on appelle les « fils de la Vierge »
ou « ballooning ». Il est connu surtout dans la famille des
Linyphiidae, mais la plupart sont également capables de dis-
persion aérienne à l’état juvénile.
En Europe, la durée du cycle biologique est de 1 à 2 ans et celle-
ci dépend essentiellement de la température et de la disponibi-
lité en proies potentielles pour les juvéniles et les adultes.
HabitatBiologie
Les araignées occupent quasiment tous les milieux ter-
restres. La variété des modes de chasse fait qu’elles peuvent
être retrouvées dans toutes les strates et toutes les zones
de la végétation : sur les arbres au niveau du tronc, des
branches, des rameaux et du feuillage, sur le sol au niveau
de la strate herbacée et à différentes hauteurs selon le type
de végétation. Il est à noter que la répartition des espèces
entre araignées du sol et araignées de la frondaison est as-
sez nette. Certaines familles ne se trouvent exclusivement
qu’au sol (Lycosidae, Zodariidae), d’autres moins exclusive-
ment (Linyphiidae, Gnaphosidae).
Sur arbre fruitier, les espèces appartenant aux familles
Anyphaenidae, Philodromidae et Clubionidae sont locali-
sées au niveau de l’écorce, alors que d’autres, Theridiidae et
Araneidae, qui peuvent hiverner au niveau des écorces, vont
chasser avec de petites toiles au niveau des feuilles.
Les espèces que l’on rencontre sur les arbres fruitiers sont
similaires à celles qui sont présentes dans les habitats voi-
sins, arborés ou arbustifs et à feuillage caduc en particulier.
Dans certains cas, il peut y avoir un changement d’habitat
entre les adultes et les juvéniles, et il a été observé en verger
de pommier que certaines espèces (des genres Neottiura,
Tetragnatha et Xysticus) migrent depuis le sol vers la fron-
daison entre le printemps et l’automne.
Toile en tube
Segestridae
Myriapodes,
forficules,
coléoptères,
fourmis
Toile en nappe Cicadelles,
diptères,
coléoptères
Toile géométrique Pucerons ailés,
coléoptères,
petits hyménoptères
Toile en réseau Pucerons ailés,
coléoptères
Errantes nocturnes
Pucerons,
larves de lépidoptères
Errantes diurnes
Affût ou affût-errance
Pucerons,
cicadelles
Hyménoptères,
lépidoptères (larves et adultes)
pucerons
Linyphidae
Salticidae
Thomisidae
Philodromidae
Theridiidae
Dictynidae
Clubionidae
Anyphaenidae
Araneidae
Araneidae - h : 50 cm
(insectes volants)
Araneidae (Argiope) - h : 20 cm
(diptères, cicadelles,
pucerons)
Agelenidae - h : 0 à 30 cm
(orthoptères, cicadelles)
Thomisidae
(insectes divers)
Sparassidae
Linyphiidae, toile en dôme (feuilles mortes,
collemboles, cicadelles)
Lycosidae au sol
(collemboles, larves d’insectes)
Diversité des familles et espèces d’araignées observables sur pommier et
proies potentielles (d’après Marc 1999)
La communauté des araignées prédatrices s’organise selon différents
niveaux à l’intérieur du milieu prairial permettant aux espèces de par-
tager la ressource en insectes. Entre parenthèses, sont indiquées les proies
potentiellement consommées (d’après Fischesser et Dupuis)
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Régime alimentaire
Comment les observer ?
Comment les préserver ?
Les araignées sont très polyphages, mais peuvent être clas-
sées en différents groupes selon leur stratégie de chasse :
r Araignées qui ne tissent pas de toile pour capturer leur
proie: elles chassent « à courre » ou « à l’affût ».
r Araignées qui construisent des toiles pour capturer leur
proie: on trouve des familles qui construisent des toiles
tubulaires, d’autres des toiles irrégulières et encore, bien
entendu, des toiles géométriques planes.
De par leur présence tout au long de l’année, les araignées ont
la capacité de consommer les ravageurs des vergers dès leur
émergence ou leur arrivée, et ce avant la phase de multipli-
cation de ces ravageurs. Elles peuvent ainsi avoir un impact
important sur la régulation des populations de bioagres-
seurs. C’est le cas par exemple du puceron cendré du pom-
mier que certaines espèces d’araignées consomment à un
stade précoce (fondatrice) au tout début du printemps. Ces
araignées, telles que Anyphaena accentuata (Anyphaenidae)
et Philodromus sp. (Philodromidae), hivernent à l’état juvé-
nile au niveau des branches et de l’écorce du tronc.
Quant aux araignées du sol, elles consomment essentielle-
ment des collemboles, mais également des Diptères et des
Lépidoptères. Le carpocapse et la tordeuse orientale du pê-
cher font ainsi partie des proies des Lycosidae, aussi bien au
printemps, probablement sur des adultes émergents, qu’à
l’automne sur des larves à la recherche d’un abri pour leur
diapause. Pour ces ravageurs, en plus de leur action directe
par prédation, la présence des araignées dans la frondaison
perturbe le comportement des larves qui fuient et quittent
le feuillage en se laissant tomber au sol où elles finissent par
mourir ou se faire manger.
Enfin, les araignées consomment également d’autres in-
sectes auxiliaires et font preuve de cannibalisme, ce qui
peut altérer le contrôle biologique, mais peu de travaux
permettent de se prononcer sur ce point. Il est par ailleurs
intéressant de noter que les abeilles entrent dans le régime
alimentaire des Thomisidae et Oxyopidae.
Différentes méthodes de capture et d’observation doivent
être combinées, si l’on souhaite étudier l’ensemble de la
diversité de la communauté des araignées d’un milieu sans
introduire de biais. Toutefois, il est possible de se limiter à
une seule technique de capture si l’on souhaite cibler davan-
tage un habitat ou une proie particulière. On peut citer :
r pour les araignées du sol : pots Barber, capture manuelle,
r pour les araignées des arbres : frappage du feuillage,
bandes pièges cartonnées sur branches et tronc.
Il est rare de pouvoir identifier les araignées jusqu’à l’es-
pèce et, bien souvent, on se contente d’une détermination
jusqu’à la famille, ce qui est déjà suffisamment informatif.
Les individus sont conservés dans de l’éthanol à 70 % afin
de garder la souplesse des organes.
Les araignées font partie des arthropodes les plus vulné-
rables aux produits phytosanitaires. Elles sont sensibles en
premier lieu aux traitements insecticides, notamment ceux
à base de matières actives non spécifiques, telles que les
organophosphorés, les pyréthrinoïdes et les carbamates
(exemple diméthoate, deltaméthrine). Cette sensibilité
dépend de l’espèce d’araignée, en liaison avec sa biologie
et sa répartition dans la végétation, ainsi que du mode et
du moment de l’application. On sait que les araignées qui
chassent « à courre » sont plus affectées que celles construi-
sant des toiles. Toutefois, ces dernières sont touchées par
les pulvérisations lorsqu’elles ré-ingurgitent quotidienne-
ment leur toile avant d’en tisser une nouvelle. Des effets
indirects sont également observés comme la diminution de
la ressource en proies, et la destruction de la qualité de leur
habitat par l’utilisation d’herbicides.
De manière générale, l’augmentation du pourcentage d’ha-
bitats semi-naturels joue positivement sur la richesse spé-
cifique et l’effet favorable se fait ressentir jusqu’à 3 000 m
selon les espèces. C’est essentiellement la qualité de l’habi-
tat (structure, microclimat) et sa gestion qui vont influencer
l’abondance et la diversité des araignées. L’impact du pay-
sage sur la communauté des araignées dépendrait davan-
tage de leur capacité de dispersion et de leur spécialisation
pour un type d’habitat.
En ce qui concerne les araignées du sol, chaque famille pos-
sède son microhabitat et la diversité des espèces serait plutôt
liée à la richesse en espèces de plantes du couvert végétal.
Pour les Lycosidae, l’abondance augmente avec celle de la
densité de la couverture herbacée et sa complexité structu-
rale. Elle augmente également avec l’abondance de proies,
notamment les collemboles.
Les araignées de la frondaison, quant à elles, sont affec-
tées de manière contrastée par l’isolement des vergers de
la végétation boisée, car certaines espèces sont favorisées
par l’isolement, alors que d’autres sont plutôt défavorisées.
Parmi les mesures de gestion favorables, on peut donc citer :
r La réduction au maximum tous les produits phytosani-
taires et notamment les insecticides les plus toxiques.
r La réduction de la taille des parcelles et du travail du sol.
r La limitation du broyage de l’enherbement (araignées du sol).
r La pose expérimentale de paillages (paille, trèfle) a été
montrée favorable sur la densité des araignées. Son applica-
tion à grande échelle est cependant difficile.
r La préservation et la mise en place d’habitats non cultivés en
bordure de champs. Même si certains travaux ne confirment
pas toujours l’effet positif de ces habitats dans l’augmentation
de l'abondance des araignées dans les parcelles, les haies pluris-
tratifiées semblent être un moyen prometteur pour préserver
la communauté des araignées de la frondaison. La présence de
zones enherbées gérées de façon extensive serait quant à elle,
utile aux araignées du sol. L’efficacité de ces aménagements vis
à vis du contrôle biologique reste à étudier.
Les Araignées en verger
Dictynidae
Description
Petite taille : 5 mm maximum, pattes fines sans épines, présence
d’un calamistrum (constitué d’une bande de poils en crochet sur la
4e patte observable à la loupe binoculaire) associé à un cribellum
(plaque-filière située en avant des autres filières et distribuant la soie
calamistrée)
Habitat
branches/feuilles dans la frondaison des arbres
Mode de chasse / proies
Toiles irrégulières, calamistrées et très adhésives
L’araignée se tient sous sa toile qui forme un toit sur elle. Certaines
tissent leur toile dans une feuille légèrement enroulée.
Elles capturent des espèces rampantes, marcheuses ou volant mal
telle que les pucerons ailés
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Dictynidae
Segestridae
Gnaphosidae
Clubionidae -Miturgidae
Thomisidae
Identification à la loupe binoculaire nécessaire
Occupant la strate arborée
Occupant le sol et/ou la strate herbacée
Tissant une toile
Diurne
Nocturne
Quelques familles et espèces dominantes en verger
Légende
Patte I
Patte II
Patte III
Patte IV
Tarse
Pédipalpes
Chélicères
Yeux
Filières
Céphalothorax
Abdomen
Métatarse
Tibia
Patelle
Fémur
Trochanter + Hanche
Éléments anatomiques pour l’observation des araignées
calamistrum
cribellum
sur Les Araignées
le Point
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Dictynidae
Description
Petite taille : 5 mm maximum, pattes fines sans épines, présence
d’un calamistrum (constitué d’une bande de poils en crochet sur la
4e patte observable à la loupe binoculaire) associé à un cribellum
(plaque-filière située en avant des autres filières et distribuant la soie
calamistrée)
Habitat
branches/feuilles dans la frondaison des arbres
Mode de chasse / proies
Toiles irrégulières, calamistrées et très adhésives
L’araignée se tient sous sa toile qui forme un toit sur elle. Certaines
tissent leur toile dans une feuille légèrement enroulée.
Elles capturent des espèces rampantes, marcheuses ou volant mal
telle que les pucerons ailés
Segestriidae
Description
Corps allongé et grosses chélicères. À la diérence de la plupart des
araignées, cette famille possède six yeux au lieu de huit.
Les pattes III sont tenues parallèles aux I et II. Le principal genre ren-
contré en verger est Segestria sp.
Habitat
Tronc, fissures de rochers ou trous de murs
Mode de chasse / proies
Toiles en tube débouchant par une collerette d’une douzaine de fils
rayonnants. L’araignée se tient à l’aut près de l’entrée du tube et
se précipite sur la proie qui touche un des fils. Elles capturent des
espèces rampantes, ou marcheuses à développement lent, telles que
les myriapodes, forficules, coléoptères et fourmis
Gnaphosidae
Description
Corps allongé et pattes puissantes. Elles possèdent des filières lon-
gues et cylindriques et largement espacées à la base (loupe binocu-
laire). Chez la plupart les yeux médians postérieurs sont ovales.
Habitat
Au niveau du sol, restant pendant le jour à l’abri sous des pierres
dans des loges de soie. Certaines espèces vivent dans les arbres et
les arbustes.
Mode de chasse / proies
Elles chassent en errant la nuit et ne construisent pas de toile.
Quelques espèces sont diurnes.
Clubionidae-
Miturgidae
Description
Elles ressemblent aux Gnaphosidae mais elles possèdent des filières
coniques et jointives à la base (loupe binoculaire).
Habitat
Au niveau du sol dans la végétation basse et sous des pierres ainsi
que dans la frondaison des arbres pour certaines espèces, sur le feuil-
lage ou sous les écorces. Dans la journée elles se cachent dans des
loges de soie.
Mode de chasse / proies
Elles ne construisent pas de toile, ce sont des chasseuses errantes
nocturnes. Dans la frondaison, elles capturent des pucerons et des
larves de lépidoptère. Lespèce Chiracanthium mildei (Miturgidae)
consomme des carpocapses de la pomme.
Thomisidae
Description
Allure de crabe, elles peuvent marcher de côté. Elles possèdent des
pattes antérieures I et II plus longues que les pattes postérieures III et
IV. Leurs yeux sont disposés sur un front tronqué (loupe binoculaire).
Habitat
Au niveau de la frondaison et du sol selon les genres (Xysticus sp et
Oxyptila sp se trouvent le plus souvent au sol).
Mode de chasse / proies
Elles chassent à l’aut sans construire de toile. Certaines espèces
peuvent modifier leur couleur en quelques jours pour se rendre invi-
sibles sur leur support. Elles consomment des hyménoptères (dont
les pollinisateurs sur les fleurs), des lépidoptères et des pucerons.
Dictynidae
Segestridae
Gnaphosidae
Clubionidae -Miturgidae
Thomisidae
Dictynidae
Segestridae
Gnaphosidae
Clubionidae -Miturgidae
Thomisidae
Dictynidae
Segestridae
Gnaphosidae
Clubionidae -Miturgidae
Thomisidae
Dictynidae
Segestridae
Gnaphosidae
Clubionidae -Miturgidae
Thomisidae
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