La lettre de l’AMG juillet-août 2013 – numéro 6
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Lors de la campagne qui a abouti à l’adoption de la
nouvelle Constitution, en octobre 2012, on a beau-
coup parlé du nucléaire, de la fiscalité, des transports,
de la mobilité, du logement, des institutions, de la
fumée et des chiens dangereux.
On a en revanche peu parlé de la santé et des soins.
Pourtant, la Constitution entrée en vigueur le 1er juin
dernier – date symbolique – consacre pas moins de
sept articles importants à ces domaines.
Les articles 171 à 177, intégrés dans le grand chapitre
consacré aux tâches de l’Etat, assigne à ce dernier un
certain nombre de devoirs dans ce domaine, au pro-
fit de la population.
Il garantit en premier lieu l’accès pour tous au sys-
tème de santé ainsi qu’aux soins. D’aucuns auraient
souhaité, dans un premier temps, parler de «droit à la
santé», expression certes belle et généreuse, mais im-
possible à réaliser concrètement, tant nous sommes
inégaux devant la maladie.
L’Etat assume également la responsabilité de la pla-
nification sanitaire – dont il répond devant la Confé-
dération – afin de satisfaire les besoins en matière de
médecine hospitalière, ambulatoire, à domicile et en
EMS.
La garantie des droits des patients est également –
et c’est une nouveauté – garantie dans notre charte
fondamentale.
Pour la première fois, il est fait mention de la pro-
motion de la santé et des mesures de prévention en
veillant notamment à réduire l’impact des facteurs en-
vironnementaux et sociaux aux conséquences néfastes
pour la santé.
En encourageant les acteurs du système de santé à
se coordonner et à collaborer, le texte inscrit ferme-
ment le principe des nécessaires échanges, en particu-
lier entre le secteur public et le secteur privé.
Le rôle des professionnels de santé est également
rappelé et constitue la base légale nécessaire pour tout
futur texte de loi les concernant.
Nouveauté importante dans ce cadre, la reconnais-
sance de l’action des «proches aidants», appelés
aussi sous d’autres cieux «tiers aidants». Ces per-
sonnes, qui aident un proche ou un parent, permet-
tent à ce dernier de rester à domicile plus longtemps
et représentent un appui important pour l’ensemble
de la communauté. Il était nécessaire de reconnaître
leur rôle et de fixer la base légale qui permettra en-
suite des initiatives visant à saluer leur importance et
à développer des façons de mieux les intégrer.
Il sied également de saluer une nouveauté importante:
la garantie du libre choix du professionnel de santé.
Le libre choix est déjà rappelé dans les dispositions de
la LAMal, mais c’est la première fois qu’une Consti-
tution cantonale l’inscrit comme principe fondamen-
tal. Compte tenu de nombreuses initiatives prises par
des assureurs afin de limiter ce libre choix, parfois en
mettant les assurés sous des pressions intolérables ou
en ne mentionnant pas explicitement cette restriction,
la portée de cet article n’est pas que symbolique et
constitue une définition plus précise de ce droit fon-
damental des patients.
Enfin, contrairement à ce qui a été répété à l’envi du-
rant la campagne, de façon simplement mensongère,
l’interdiction de fumer dans les lieux publics et
celle des chiens dangereux ont été maintenues dans
notre charte fondamentale.
Certes, les puristes, et ce à juste titre, continueront de
penser que ces éléments ne sont pas de rang constitu-
tionnel et que les dispositions des articles 171 à 175
auraient constitué une base légale suffisante pour lé-
giférer en la matière.
Mais, compte tenu de la sensibilité émotionnelle très
forte liées à ces deux principes, il a été jugé plus sage
de réinscrire, d’une façon plus lisible, ces dispositions
dans la Constitution.
En conclusion, de façon épurée, cohérente, équilibrée
et bien écrite, la Constitution du 14 octobre 2012 per-
met à l’Etat de maintenir et de développer un système
de santé et une offre de soins pour tous, dans le cadre
d’une collaboration de tous les acteurs, privés et pu-
blics, et pour le bien de la population de notre canton.
Jean-Marc Guinchard
Ancien constituant
La santé et les soins dans la nouvelle
Constitution