Journal Identification = VIR Article Identification = 0541 Date: December 13, 2013 Time: 4:23 pm
revue
l’ensemble des filières animales est estimé à 17 % du
chiffre d’affaire dans les pays développés [1]. Ces infec-
tions ont également un impact sur la sécurité alimentaire
des produits et sur le bien-être des animaux. Les stratégies
de contrôle des maladies incluent des mesures prophylac-
tiques (pratiques d’élevage, vaccination), réglementaires
(contrôles de la circulation des animaux) et/ou curatives
(traitements sanitaires et antibiotiques). Ces mesures sont
parfois coûteuses à mettre en place et rencontrent des
limites, comme l’apparition sur le long terme d’agents
pathogènes résistants aux traitements antibiotiques. Les
stratégies vaccinales sont encore peu développées en raison
de l’importance des coûts de production et de la diffi-
culté technique de mise en place de telles stratégies par les
éleveurs. Une méthode alternative consiste à sélectionner
des animaux naturellement résistants aux maladies infec-
tieuses. En effet, l’origine génétique des différences de
résistance à de nombreux agents infectieux a été démontrée
dans les populations d’animaux d’élevage [2]. Cette variabi-
lité génétique a été exploitée avec succès dans des schémas
de sélection pour la résistance à divers types d’agents patho-
gènes, conventionnels (virus, bactéries et parasites) ou non
(prions). Les perspectives d’amélioration de la résistance
par sélection sont donc prometteuses, d’autant que la mon-
tée en puissance des outils génomiques est susceptible de
faciliter sa mise en œuvre pour des caractères complexes
comme la résistance aux maladies et d’améliorer son effi-
cacité.
Comme les filières animales terrestres, la pisciculture doit
faire face à des maladies infectieuses qui affectent toutes
les espèces d’élevage, marines ou d’eau douce. Le déve-
loppement des vaccins a connu de remarquables succès,
en particulier contre des maladies bactériennes, condui-
sant à une réduction spectaculaire de l’utilisation des
antibiotiques dans les élevages industriels de saumon en
Norvège et en Écosse. En revanche, les vaccins prévenant
les maladies virales n’ont souvent donné que des résultats
en demi-teinte. Ils sont souvent coûteux et particulièrement
difficiles à administrer lorsque la protection associée néces-
site l’injection individuelle à de très jeunes animaux. Les
vaccins élaborés à partir de virus atténués sont générale-
ment efficaces mais non dénués de risques. Les vaccins
à ADN semblent dans ce contexte plus adaptés puisqu’ils
sont particulièrement efficaces, notamment chez les salmo-
nidés [3]. Leur utilisation demeure toutefois expérimentale
et se heurte à la perception négative des OGM par les
consommateurs et les médias. Ainsi, le développement de
stratégies de sélection exploitant les résistances naturelles
apparaît comme une alternative intéressante pour l’élevage
piscicole.
Dans cette perspective, un nombre croissant de travaux
vise à caractériser les bases génétiques de la résistance aux
agents pathogènes chez les poissons. Au-delà des retom-
bées finalisées (sélection de cheptels plus résistants), ces
travaux ont aussi pour objectif de comprendre l’origine de
la variabilité individuelle de résistance et d’identifier les
mécanismes sous-jacents. La comparaison d’individus ou
de groupes de résistance contrastée (sensibles/résistants)
facilite souvent les investigations, comme l’illustrent de
fac¸on remarquable les avancées obtenues avec les lignées
consanguines de souris [4]. L’utilisation de ces lignées a,
entre autres, permis la mise en évidence des facteurs de
restriction aux rétrovirus murins [5]. Dans les espèces où
les outils fonctionnels disponibles pour l’étude des méca-
nismes immunitaires sont encore peu développés, cette
approche permet en outre de développer des analyses sans a
priori permettant la mise en évidence de mécanismes poten-
tiellement nouveaux propres à l’espèce étudiée (et non pas
l’étude par extrapolation de mécanismes décrits chez les
espèces les plus étudiées).
Après un bref rappel des méthodes de description de la
variabilité génétique de la résistance aux maladies, nous
illustrerons cette démarche en présentant les avancées
récentes obtenues dans la description des mécanismes de
résistance virale chez un poisson téléostéen, la truite arc-
en-ciel (Oncorhynchus mykiss). Notre modèle d’étude est la
septicémie hémorragique virale, une des principales mala-
dies de cette espèce.
Méthodes de description des bases
génétiques de la résistance
aux maladies chez les poissons
téléostéens
Mise en évidence de la variabilité génétique
de la résistance aux maladies chez les poissons
Comme dans les autres espèces d’élevage, la variabilité
génétique de la résistance aux maladies chez les poissons
a d’abord été décrite grâce aux méthodes classiques de la
génétique quantitative. Ces méthodes incluent la comparai-
son de performances entre des populations ou des souches
d’histoire ou d’origine géographique différentes, la compa-
raison de groupes d’individus apparentés issus d’une même
population, et la mesure des réponses obtenues après des
sélections expérimentales [6].
Les premiers travaux ont souvent cherché à démon-
trer l’existence d’un contrôle génétique de la résistance
par comparaison des performances de populations dis-
tinctes. Parfois fructueuse, cette approche est néanmoins
compliquée chez les poissons par l’absence assez géné-
rale d’information sur la différenciation génétique entre
les groupes testés (la notion de souches ou populations
est souvent incertaine) et par le fait que les performances
sont, au moins au départ, évaluées dans des environnements
Virologie, Vol 17, n◦6, novembre-décembre 2013 427
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