
CMAJ, le 5
avril
2016, 188(6)
Un résumé des recommandations se trouve dans
l’encadré 2 et un résumé clinique se trouve dans
l’annexe 2 (disponible à l’adresse www.cmaj.ca/
lookup/suppl/doi:10.1503/cmaj.151421/-/DC1). Pour
ses recommandations, le Groupe d’étude a cherché à
trouver le juste équilibre entre les avantages et
inconvénients potentiels du dépistage du cancer du
poumon, en jaugeant les avantages attendus d’une
détection précoce de la maladie à l’aune des
inconvénients que sont le surdiagnostic et les procédures
complémentaires invasives.
Ces recommandations s’appliquent aux adultes âgés
de 18 ans et plus chez lesquels un cancer du poumon
n’est pas suspecté. Ces recommandations ne
s’appliquent pas aux personnes ayant des antécédents de
cancer du poumon ni à celles qui présentent des signes
ou des symptômes de cancer du poumon.
Avantages du dépistage
La revue systématique réalisée pour le Groupe d’étude
comprenait 33 études sur le dépistage du cancer du
poumon. En tout, 13 études à répartition aléatoire
contrôlées ont été menées pour étudier les avantages du
dépistage12, et 7 études de faible qualité ont permis de
comparer le dépistage par radiographie thoracique (avec
ou sans examen cytologique des expectorations) à
l’absence de dépistage ou au dépistage moins intensif
(p. ex. dépistage par radiographie thoracique à
intervalles plus longs ou suggestion de la radiographie
thoracique). Ces études ont révélé des avantages minces
sur le plan de la détection précoce de la maladie. Le
dépistage par radiographie thoracique a permis de
détecter plus de cas de cancer du poumon au stade
précoce et moins de cas de cancer du poumon au stade
avancé, comparativement à ce qui a été observé dans les
groupes recevant les soins habituels. Toutefois, ce type
de dépistage n’a pas permis de réduire la mortalité liée
au cancer du poumon (risque relatif [RR] : 0,99;
intervalle de confiance [IC] à 95 % : 0,92-1,07]) ni la
mortalité toutes causes confondues (RR : 0,98, IC à
95 % : 0,96-1,00), comparativement à ce qui a été
observé dans les groupes recevant les soins habituels12.
Dans le cadre de trois études de faible qualité, le
dépistage annuel par TDM à faible dose a été comparé à
l’absence de dépistage ou aux soins habituels. Aucune
différence n’a été observée sur le plan de la mortalité
liée au cancer (RR : 1,30; IC à 95 % : 0,81-2,11) ou de
la mortalité toutes causes confondues (RR : 1,38; IC à
95 % : 0,86-2,22) après 5 ans ou moins de suivi12. Une
recherche récente dans la documentation publiée a
révélé une étude à répartition aléatoire15 associée à des
résultats intérimaires sur le dépistage précoce du cancer
du poumon par TDM multi-coupe à faible dose
(comparativement à l’absence de dépistage) en
Allemagne après 5 ans de suivi. L’ajout de ces
nouveaux résultats à l’analyse de la mortalité toutes
causes confondues n’a pas modifié les résultats de façon
significative (RR : 1,20; IC à 95 % : 0,83-1,73).
Deux études visant à comparer la TDM à faible dose
à la radiographie thoracique ont également été trouvées.
Bien que le dépistage par radiographie thoracique ne
fasse pas partie des soins habituels au Canada, ces
études ont été incluses dans l’analyse des données
probantes parce que des études précédentes n’avaient
révélé aucune différence sur le plan de la mortalité entre
les groupes « radiographie thoracique » et les groupes
« soins habituels ». Une des études comprenait des
résultats liés à la mortalité (National Lung Screening
Trial)6.
Les chercheurs de l’étude intitulée National Lung
Screening Trial (étude à répartition aléatoire contrôlée
de qualité supérieure) ont conclu à une réduction de la
mortalité liée au cancer du poumon de l’ordre de 15 %
(RR : 0,85; IC à 95 % : 0,75-0,96) et à une réduction de
la mortalité toutes causes confondues de l’ordre de 6 %
(RR : 0,94; IC à 95 % : 0,88-1,00) associées au
dépistage par TDM à faible dose, comparativement au
dépistage par radiographie thoracique après un suivi de
6,5 ans16. Autrement dit, soumettre 1 000 personnes à
3 tests de dépistage par TDM à faible dose à intervalles
d’un an permet de prévenir trois décès des suites du
cancer du poumon, comparativement au dépistage par
radiographie thoracique (nombre nécessaire pour le
dépistage = 322). Le dépistage par TDM à faible dose a
permis de réduire le risque absolu de mortalité liée au
cancer du poumon de 0,31 % et de mortalité toutes
causes confondues de 0,46 %12. La TDM à faible dose
a également permis de détecter un nombre
significativement plus élevé de cas de cancer du
poumon au stade précoce (8 cas de plus par
1 000 personnes soumises au dépistage) et un nombre
significativement moins élevé de cas de cancer du
poumon au stade avancé (4 cas de moins par 1 000
personnes soumises au dépistage), comparativement à la
radiographie thoracique. Les résultats de la deuxième
étude17 visant à comparer la TDM à faible dose à la
radiographie thoracique n’ont pas été regroupés avec les
résultats de l’étude National Lung Screening Trial dans
la revue systématique en raison de l’incompatibilité de
leur période de suivi (≤ 12 mois), du nombre insuffisant
d’événements déclarés (cancers du poumon) et de
l’absence de déclaration des résultats liés à la
mortalité12.
Les données probantes tirées de quatre études n’ont
révélé aucune différence significative sur le plan du taux
d’abandon du tabagisme entre les groupes soumis au
dépistage (TDM à faible dose ou radiographie
thoracique) et les groupes témoins12. Le risque de biais
de ces études n’était pas clair étant donné que ce résultat
est auto-déclaré.
Inconvénients du dépistage
Les inconvénients du dépistage et des procédures
complémentaires invasives son tirés de 31 études, dont
de nombreuses étaient des études d’observation12. Les
principaux inconvénients comprenaient les faux
Encadré 2 : Résumé des recommandations pour les cliniciens et les
responsables des politiques
Ces recommandations s’appliquent aux adultes âgés de 18 ans et plus chez lesquels un
cancer du poumon n’est pas suspecté. Ces recommandations ne s’appliquent pas aux
adultes ayant des antécédents de cancer du poumon ni à celles qui présentent des signes
ou des symptômes de cancer du poumon.
Nous recommandons de procéder au dépistage annuel du cancer du poumon par
tomodensitométrie (TDM) à faible dose pendant une période maximale de 3 années
consécutives chez les adultes âgés de 55 à 74 ans qui ont des antécédents de tabagisme d’au
moins 30 paquets-année, qui fument encore ou qui ont cessé de fumer il y a moins de 15 ans.
Le dépistage doit être pratiqué dans un établissement de soins de santé dont le personnel
possède l’expertise dans le diagnostic précoce et le traitement du cancer du poumon
(Recommandation faible, données probantes de faible qualité).
Nous ne recommandons pas de procéder au dépistage par TDM à faible dose chez les autres
adultes, quel que soit leur âge, leurs antécédents de tabagisme et autres facteurs de risque de
cancer du poumon (Recommandation forte, données probantes de très faible qualité).
Nous recommandons que la radiographie thoracique, avec ou sans examen cytologique des
expectorations, ne soit pas utilisée pour le dépistage du cancer du poumon (Recommandation
forte, données probantes de faible qualité).