Analyse sémiologique de la femme dans la publicité Jordanienne

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Analysesémiologiquedela
femmedanslapublicité
Jordanienne
ARTICLE·JANUARY2013
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SamiraMohammedMouta…
HashemiteUniversity
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Moukatil Samira. “ Analyse sémiologique de la femme dans la publicité jordanienne. »
NOM : Moutakil
Prénom : Samira
Centre de Langues
Université Hachémite/Jordanie
[email protected]
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Revue Le Didiga, n°8 du 1er semestre 2013
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Moukatil Samira. “ Analyse sémiologique de la femme dans la publicité jordanienne. »
ANALYSE SEMIOLOGIQUE DE LA FEMME DANS LA PUBLICITE
JORDANIENNE
RESUME
La publicité a une grande influence sur les gens car elle porte plusieurs
significations ; elle tire sa signification de la vie quotidienne qu’elle
reflète d’ailleurs. À travers elle, nous pouvons comprendre une culture.
Selon des matériaux spécifiques, le monde de la publicité relève du
concret et de l’abstrait. Il entretient un grand lien avec la vie réelle dont
il donne une forme d’illusion. Dans ce projet de mise en code, le culturel
et le social revêtent une importance certaine. J'ai choisi trois publicités
jordaniennes où la femme est présente et j’ai fait une analyse détaillée de
chaque niveau sémiotique, y cherchant le dénoté et le connoté, au service
de l’étude de la réalité dont la pièce publicitaire émane. J'ai noté les
différents aspects : culturels, sociaux et religieux, en trois étapes: des
publicités, l’analyse sémiotique de chacune d’elles, les résultats. Il est
important d'avoir un background et des connaissances du pays de
provenance de la publicité repérée, afin de la comprendre.
Mots clés : la culture, la femme, la publicité.
ABSTRACT
The advertisinghas a great influenceon peoplebecause itcarriesmany
meanings, it draws its meaning from everyday life and reflects it and
through it we can understand a culture. The advertising world is the
concrete and abstract according to specific materials because it is a great
link between it and the life which it draws the direction of the source
and especially for all that is culturally and socially. I chose three
Jordanian commercials where we see the presence of the wife and I made
a detailed analysis on each semiotic level, seeking denoted, connoted the
meaning and effect while connecting to the reality of where it comes
from. I noted the different aspects, cultural, social and religious in three
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Moukatil Samira. “ Analyse sémiologique de la femme dans la publicité jordanienne. »
steps :with ads, semiotic analysis of each and results. It is important to
haveabackgroundand knowledge of thecountrywhere it came fromin
order tounderstand it.
Key words: culture, women, advertising
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Moukatil Samira. “ Analyse sémiologique de la femme dans la publicité jordanienne. »
INTRODUCTION
La sémiologie est la vie des signes. Depuis Saussure et même bien
avant la sémiotique s’est développée soit avec Platon, Locke, Peirce,
Hjelmslev, Barthes, Porcher, et Eco et bien d’autres. Ainsi, ces deux
termes, notons-le, sémiologie et sémiotique, sont apparus à la même
époque ; ils sont équivalents lorsqu’ils désignent cette science des signes
qui devient science des significations -la production du sens ou le sens
produit. Les deux termes sont donc presque synonymes : ils ont,
d’ailleurs, coexisté longtemps jusqu’à ce que chaque discipline se spécifie
en gardant cette équivalence (sémiologie de l’image, sémiotique visuelle).
Ils se sont cependant opposés en travaillant sur des objets ou des
domaines différents -sémiologie de l’image, sémiotique littéraire. Le mot
sémiotique a été utilisé par Greimas, qui s’est intéressé à la sémantique
structurale, à l’analyse littéraire avec l’Ecole Sémiotique de Paris, soit à
l’analyse du sens en langue et des signes ou valeur dénotée, autrement dit
à la sémantique et à l’analyse de la désignation (le sens dans le discours),
de la référence et aussi de la narrativité. Quelques notions ont été
empruntées à la linguistique mais la sémiologie a pu inventer ses propres
concepts et outils. Ainsi, l’un des outils les plus importants pour l’analyse
sémiologique, c’est le découpage en niveaux. La sémiologie à laquelle
nous nous référons, relève de ces différents aspects. Elle cherche à
discerner dans le ou les produits devant constituer l’objet de l’étude,
c’est-à-dire, le corpus à analyser, les invariances, à en décrire les
processus, en ayant pour objectif essentiel la compréhension de leur
fonctionnement en fonction de l’observation et de l’expérience. Les
divers objets analysés sont donc considérés comme formant chacun une
entité autonome qui, s’agençant aux autres, permettrait de dégager le
système d’ensemble. Comment analyser une image ? Quelles sont les
démarches à suivre ? D’où faut-il commencer et comment ? Quel modèle
suivre ?
Il existe deux niveaux, corollaires, sur lesquels repose l’analyse : le
niveau descriptif et le niveau interprétatif, convergeant au dégagement
des
angles
de
perception :
forme/figure,
signifiant/signifié,
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Moukatil Samira. “ Analyse sémiologique de la femme dans la publicité jordanienne. »
connoté/dénoté. On en décèlerait les sens supposés et leurs probables
effets sur l’opinion. La sémiologie est une science qui est apparue depuis
la fin du XIXème siècle avec deux linguistes bien connus ; Ferdinand de
Saussure (1857-1913) en Europe et Charles-Senders Peirce (1874-1913)
en Amérique.
Leurs préoccupations étaient les mêmes et chacun a développé une
théorie similaire qu’il a nommée différemment mais avait la même
étymologie : « sémiotikê », terme apparu avec Platon et désignant l’étude
des signes. Pour Saussure, c’était « sémiologie » et, pour Peirce,
« sémiotique ». Mais, des années plus tard, les deux termes se sont
différenciés et chacun traitait d’un domaine ; la sémiologie s’intéresse à
tout ce qui est visuel, à l’image, les symboles, les signes de tous types,
contrairement à la sémiotique qui était consacrée à l’étude des textes
littéraires, c’est-à-dire, tout ce qui est linguistique.
Ainsi, la sémiologie relève tant de la psychologie sociale que de la
psychologie générale, selon la définition que lui a donnée Saussure. Ce
faisant, l’image inscrit un fait social et inter-social. L’homme vit dans un
environnement qu’il ne cesse de transformer. Le résultat de ces
modifications constitue son milieu culturel, qui s’oppose au milieu
naturel, dont l’image tente de témoigner, plus ou moins
intentionnellement. Cette préoccupation ambivalente assurerait sa
complexité. C’est pourquoi, l’image nous échappe ; elle est polysémique
et un simple regard ne peut en aucun cas révéler ce qu’elle signifie. En
plus, nous ne pouvons la découvrir que par le biais d’une étude tant
détaillée que méticuleuse de ses éléments, constituants ou signes.
1-DEGAGEMENT D’UNE STRUCTURE
Comment analyser une image ? Quelles sont les démarches à suivre ?
Par où faut-il commencer et comment ? Ces questions se posent à chaque
fois qu’on se trouve en face d’une image. En ce qui me concerne, j’ai
choisi l’image publicitaire puisqu’elle est considérée comme le miroir de
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Moukatil Samira. “ Analyse sémiologique de la femme dans la publicité jordanienne. »
la société qui la diffuse ; elle nous permet de la connaître et la
comprendre.
Pour toute étude sémiologique, l’analyste commence par délimiter le
champ d’action. Il fixe son corpus et définit, avec précision, le texte
d’analyse. Ce peut être un seul programme, comme ce peut être constitué
de tout un ensemble ayant quelques aspects communs. Ainsi, mes images
sont liées entre elles par un trait repérable qui est la présence de la
femme dans toutes les publicités. L’objet compose à lui seul l’image,
l’objet ne saurait être à la fois lui-même et son propre contexte.
Mon article a l’objectif d’approfondir et de déterminer un aspect
d’analyse sémiologique de l’image publicitaire : la signification ou, plus
exactement, l’interprétation. Ainsi, ce sont les éléments qui mettent en
scène le produit, l’intègrent dans un contexte qu’ils investissent. Ils
traduisent également une densité de significations émotionnelles et
sociales. La distinction entre le concret et l’abstrait, la théorie et son
application, reste relative. De ce fait, la démarche raisonnée passe par
trois phases.
Les séries d’expériences induisent des propriétés que l’on considère
provisoirement comme vraies (axiomes) ; on en déduit logiquement
d’autres propriétés et relations ; lesquelles sont utilisées pour résoudre les
problèmes posés au départ et ceux qui peuvent se poser en cours
d’analyse. Le stade de vérification fait partie des applications, transforme
le circuit en "boucle".
2- L’ANALYSE
Que raconte l’image ? Comment l’image raconte-t-elle à son tour les
événements ? La publicité se compose de deux systèmes : l’un,
linguistique et l’autre, iconique. Je m’intéresse surtout à l’iconique. C’est
pourquoi, je ne traite pas du système linguistique. Comme nous le
mentionnions plus haut, Il existe deux niveaux, constituant une paire,
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Moukatil Samira. “ Analyse sémiologique de la femme dans la publicité jordanienne. »
sur lesquels repose l’analyse : le niveau descriptif et le niveau
interprétatif.
Durant l’analyse et pour l’interprétation de l’image, j’ai dégagé :
- les mécanismes du procès de signification
- l’opposition signification explicite/implicite
- l’étude, l’analyse et la description de la dénotation/connotation
- l’analyse du discours iconique : la fonction grammaticale des signes,
la position de l’énonciateur par rapport à l’énoncé.
2-1 Étapes de l’analyse
1- la description consiste à dégager tous les éléments composant
l’icône, les organiser, ensuite, en /sa/ et <sé>.
2- l’analyse après le dégagement des unités : on associe chaque
élément à un sens, le dénoté et le connoté, et on le met en rapport avec
les autres unités de l’image.
Forme/figure
Signifiant/Signifié
Dénoté
Signifiant/Signifié
dénoté
Hypothèse
de sens
Effet
de
sens
Le signe ou la forme représente le référent, soit en le représentant,
soit en faisant allusion, soit en faisant représenter une partie, de telle
façon que la relation se présente sous forme de symbole. L’homogénéité
du sens se traduit dans la façon d’organiser la relation entre les unités
tout en sachant que l’image fonctionne globalement.
Le corpus est analysé avec une hypothèse ou règle méthodologique
qui consiste à le décrire en recherchant son fonctionnement, c’est-à-dire,
en émettant l’hypothèse qu’il s’agit d’un système, d’une structure ;
hypothèse qui reste à vérifier et qui permet de dégager deux grandes
classes de possibilités de codification et, partant, de fonctionnement du
corpus : celle de deux types de structures : l’une, dite ferme, l’autre, dite
souple. On a procédé de la même manière pour tous le corpus, sachant
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que chaque image possède sa propre structure interne qui diffère des
autres. Cette méthode a ses exigences et ses étapes que nous allons
présenter ; mais il faut également préciser l’autre objectif, plus
sémantique, et culturel.
La réflexion porte sur la méthode d’analyse retenue, sur les
procédures mises en œuvre ; car la sémiologie doit s’interroger sur ses
présupposés, sur sa propre démarche, être consciente que ses résultats
dépendent très largement de la théorie et de la méthode à laquelle
appartient le modèle d’explication et que le point de vue choisi constitue
et détermine l’étude elle-même.
2-2 La démarche globale d’analyse et de l’interprétation
Pour pouvoir analyser avec méthode, de façon à la fois globale et
précise, en évitant de tomber dans toutes sortes de simplifications
nécessairement réductrices, il s’avère indispensable de distinguer des
niveaux et de procéder progressivement en allant des niveaux et des
degrés les plus simples ou les plus évidents vers les plus complexes.
Puisque les images visuelles, on l’a vu, ne sont pas toujours
représentatives de quelque chose que l’on appelle le référent analogique ;
tout objet pouvant revêtir une valeur symbolique, qu’il soit naturel
(pierres, métaux, arbres, fleurs, animaux, etc.) ou qu’il soit abstrait (forme
géométrique, couleur, etc.).
On peut donc distinguer trois stades d’analyse : dégager, classer puis
interpréter ainsi que plusieurs strates. L’apparition des êtres humains
dans les publicités, ces dernières années en Jordanie, constitue à la fois un
acte référentiel et une description" et, plus exactement, "un cas de nom
propre"1. La présence d’êtres humains dans le visuel, contrairement aux
monuments, induit le fait que rien n’est plus résistant que la nature
humaine.
2-3 Les caractéristiques de l’image et sa structure
1
ECO, Umberto, Ouv. Cité, p.118.
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Moukatil Samira. “ Analyse sémiologique de la femme dans la publicité jordanienne. »
La publicité fait appel à la mise en contexte. Elle présente aussi les
rapports homme/femme : supériorité de l’homme et infériorité de la
femme (pub.1) ; ceci nous emmène à la place de la femme dans les
publicités jordaniennes et, surtout, dans la société où elle tient un rôle
second, elle est en retrait (pub.2)) ou en bas de l’échelle sociale (pub.1).
Mais avec l’évolution elle commence à avoir une place plus ou moins
égale à l’homme.
Publicité n°1
P.1
Signe
iconique
Sa indiciel
Sé dénoté
Hyp.
sens 1
de
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Personnes
Objet
Visage
de
femme voilée
Homme
Luth
Keffieh
Habit
traditionnel
Bijoux
Musulmane
Supériorité
Montre
Temps
Regardons à la publicité n°1 ; on y trouve une présence « féminine » et
« masculine » ; l’homme ici tient un rôle d’artiste : quelqu’un qui est
entrain de faire la cour à une femme en jouant du luth. Quand
l’Occidental fait la cour à une femme, il se met dans la rue au bas de sa
fenêtre ; on en déduit qu’il donne à la femme une certaine supériorité car
il la désire et la veut pour lui ; or elle est difficile à obtenir. Il supplie
donc pour qu’elle accepte et descende quand il se met à genoux pour
demander sa main. Par contre, chez l’oriental, c’est le contraire : il la veut
mais ne veut pas dépasser cette idée de supériorité par rapport à la
femme ; aussi il n’est pas prêt à faire des concessions pour l’obtenir car
elle est inférieure à lui.
La femme ici est un « objet, quelque chose » que l’homme désire et il
recourt à la musique pour lui exprimer son attirance et ses sentiments et
attirer son attention vers lui. Il est bien connu que les chants de musique
montent et ne descendent pas mais l’image ici représente bien l’état
d’esprit de l’homme oriental et expose sa vision de la femme dans la
société concernée : un être au bas de l’échelle. De plus, l’image des deux
montres signifie que, pour atteindre la femme, il faut pouvoir lui offrir ce
dont elle a envie.
Ainsi, cette publicité représente un homme oriental, romantique. Et
même quand il doit faire l’effort d’oublier sa différence d’avec la femme
pour obtenir ce qu’il désire d’elle, il accentue, fût-ce inconsciemment, sa
supériorité.
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L’image se découpe en deux et en diagonale, c’est-à-dire, elle
représente deux parties distinctes et presque opposées l’une à l’autre ;
l’homme occupe la partie supérieure, la plus importante dans l’image,
celle qui attire l’attention puisqu’on commence toujours de droite à
gauche et du haut en bas et même au niveau des couleurs, c’est la partie la
plus éclairée, il est donc mis en avant par cette clarté alors que la femme
se trouvant dans la partie inférieure avec des couleurs foncées, cette
partie sombre connote un rideau qui, dans la tradition orientale, sépare
les hommes des femmes. L’effet de sens de cette image est cet esprit
oriental qui ne met jamais l’homme en position d’infériorité, surtout, pas
vis-à-vis de la femme.
Publicité n°2
P.2
Signe
Sa indiciel
Sé dénoté
Hyp.
de
Hyp.
de
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iconique
Personne
Habit
Traditionnel
Personne
Habit
moderne
Enfant
Femme
Mère
Homme
Père
Garçon
Fils
sens 1
Tradit
ion
sens 2
Amalgame
Moder
nité
Aveni
r
Appareil
Ordinateur
Technol
ogie
Distan
Temps
ce
Cette image représente une famille unie à un moment de la journée
devant l’ordinateur. Le père est entrain d’enseigner à son fils. La mère
regarde et suit ce qui se passe, le père transmet un savoir à son fils qui
commande.
Il s’agirait d’une famille moderne d’orient. Ici, Le discernement
hérité de l’observation de l’image porterait à faire croire que c’est un
monde d’hommes, le statut de la femme, lui, semble être passif et second,
sa présence se serait réduite à son absence ; elle n’aurait pas une présence
participative, telle un décor esthétique, inerte, pour meubler l’espace.
Au niveau dénoté, c’est une famille typique jordanienne, à l’exception
qu’elle ne dispose que d’un enfant : 3 membres, le père qui est le chef, le
fils qui assure la descendance, la femme qui vient en soutien, juste pour
les seconder. C’est que de notoriété ordinaire, une famille jordanienne
se compose d’au moins 3 enfants. Ici, on n’en a qu’un, un garçon, de
surcroît. Ainsi, cette image véhiculerait la vision phallocrate de la société
décrite.
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Moukatil Samira. “ Analyse sémiologique de la femme dans la publicité jordanienne. »
Dans ce message, la banque évoque la tranquillité d’esprit et offre à ses
clients un monde meilleur pour la prospérité familiale, d’où quelque
chose de magnifique. C’est un moment de détente et de complicité entre
le père et son fils. Contrairement aux deux autres publicités, cette
dernière promouvrait la liberté et l’ouverture à la modernité : la femme
ne se couvre pas les cheveux.
Cette image représente une famille unie à un moment de la journée,
devant l’ordinateur. Le père est entrain d’enseigner à son fils. La mère
regarde, avec une passivité approbatrice, ce qui se passe à l’écran ; le père
transmet un savoir à son fils qui qui commande.
Publicité n°3
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P.3
Signe
iconique
Personnes
Nourrit
ure
Sa indiciel
Sé dénoté
Femme
voilée
Fille
Mère
Fille
Plateau
Hyp.
de
sens 1
Lien
Avenir
Tradition
Hyp.
de
sens 2
Transmissi
on
Gâteau
x
2 boîtes
Huile
Quant à la publicité n°3, puisqu’il n’y a pas de présence masculine, la
femme est au centre de l’image ; elle tient son rôle de mère qui consiste à
faire la cuisine. On remarque que le rôle de la femme consiste à seconder
l’homme ou à accomplir les tâches ménagères quand elle n’est pas désirée.
Par ailleurs, le connoté de cette image est justement dans cette femme au
foyer qui inculque à sa fille l’art culinaire qui est, par excellence, le
premier rôle de la femme orientale.
L’image, contrairement à son essence d’être le reflet de l’extérieur, est,
pour nous, à la fois, aspect (expression) et contenu. Ici, en tant que
substance, l’image est matière et forme. De ce fait, la signification s’en
dévoile au fur et à mesure qu’on la scrute ; l’expression et le contenu
étant liés, à l’exemple de l’esprit et du corps. L’image suggère, donc, du
sens aux sensations visuelles.
L’image est le lien entre le concret et l’abstrait, ou bien, elle entretient
un lien avec le concret. Elle puise des deux mondes concret et abstrait, les
matières et les bases pour sa construction. Il y a un grand lien entre
l’image et la vie ou la réalité quotidienne. Cette réalité peut être tirée de
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la vie religieuse et des histoires qui se racontent, en tout cas, l’image
représente la vérité, elle est l’amalgame de l’artistique et du réel,
inséparables, dans ce contexte. Creuset de vraisemblance, donc, elle est
révélatrice de sens caché. Ainsi, la structure est plus importante et
significative que la construction/composition ?
Nos images représentent implicitement la réalité tout en essayant de
garder cette influence ; elles exposent et mettent en avant des moments
quotidiens et des objets et produits familiers aux personnes. Ainsi, les
images sont construites en dénoté ou en connoté mais elles sont très
riches en connotations et très variées dans la façon d’exposer les messages
à transmettre. De ce fait, les images ont une très grande capacité
d’influencer puisqu’elles se basent sur la réalité pour déconstruire et
construire en même temps. De plus, l’imagination joue un rôle important
dans le fait d’assembler des données contradictoires ou, tout au moins,
disparates. En d’autres termes, la lecture interprétative d’une image
sollicite, chez le spectateur-analyste, un sens aigu de l’imagination, le
poussant à se référer à l’expérience qui est sienne, à partir du temps et de
l’espace qui déterminent son existence quotidienne, inhérente à la
sociologie locale.
On a l’image unique et l’image composée. La 1ère est toute simple
pour la comprendre, il suffit de la comprendre seule sans avoir recours à
autre chose car elle tient à l’intérieur d’elle-même ses propres composants
pour la construire. Quant à la 2ème, elle est attachée au contexte et à la
composition. Elle est composée de plusieurs images et chacune d’entre
elles est une image à elle seule qui la différencie des autres. Ainsi, on a
l’image seule et l’image globale, image limitée et l’image illimitée.
L’image commence par représenter analogiquement les choses puis se
développe et représente un paysage, un être puis un fait réel concret puis
abstrait puis va encore plus loin pour représenter un événement de la vie
puis dépasse ce stade pour raconter une histoire et évolue dans l’espace et
le temps à travers les époques. Puis, elle dépasse l’espace et le temps pour
devenir un exemple valable à tout moment.
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3-L’ISLAM ET L’IMAGE
On pourra s’étonner du fait que notre corpus jordanien, donc arabe,
soit constitué de publicités contenant des images puisque beaucoup
pensent le monde arabe comme iconoclaste ; c’est pourquoi je donne
quelques remarques concernant l’image et le monde arabo-musulman.
Le musulman a un rapport important avec la photographie ou le
dessin figuratif, apparemment, en contradiction avec ce qui est considéré
comme texte sacré, le Coran. Peut-on réellement confirmer qu’il existe
un anti-iconisme dans l’islam ?
Selon des idées reçues, dans le milieu arabo-musulman, la
représentation de la figure d’un être humain (dessin ou photo) est
interdite par la religion. Dans le Coran, il existe un seul passage qui
interdit les idoles, et, par conséquent, toute traduction par l’image d’un
thème religieux : selon le Hadith, dans les propos du Prophète
Mohammed (Mahomet), on lit bien : « Gardez-vous de représenter le
seigneur ou la créature2 ; ne peignez que les arbres, les fleurs, les objets
inanimés car au jour du jugement les êtres représentés viendront
réclamer une âme à l’artiste, qui, impuissant à les satisfaire subira les
tourments du feu éternel »3. Ainsi, dans une composition où l’élément
corporel n’est pas présent, il suffit plus ou moins de lui substituer, soit des
formes purement abstraites, soit des formes corporelles transposées dans
l’abstrait4.
Il conviendra de s’en souvenir au moment de l’interprétation des
icones puisque même des images qui ne représentent pas de l’humain
peuvent y référer – ce qui confirme ce que nous avons dit dans le
2
Souligné par moi.
3 Hadith est le récit, mais dans la religion musulmane il est la tradition orale des
paroles de Mohammed (Mahomet), il est une source de la législation coranique.
4
KANDINSKY, Wassily, Du spirituel dans l’art et dans la peinture en particulier,
p.126.
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Moukatil Samira. “ Analyse sémiologique de la femme dans la publicité jordanienne. »
chapitre précédent concernant le fait que les images peuvent être
strictement analogiques (devenir symboliques ou connotées).
Il faut donc constater cet interdit de la représentation proche de celle
de la Bible, du même que dans la Bible où toute représentation iconique
pour l’idolâtrie est interdite : Tu ne feras point d’image taillée ni aucune
représentation des choses qui sont en haut du ciel, ici bas sur terre ou
dans les eaux au-dessous de la terre, Tu ne feras aucune sculpture ou
représentation d’êtres créés5.
En fait plus qu’une théologie de l’image, on trouve dans le Coran un
interdit de l’idolâtrie : ô ! Croyants, le vin, les jeux du hasard, les idoles et
les flèches divinatoires sont des abominations inventées par Satan;
abstenez-vous en et vous serez heureux6. Pourtant, j’ai constaté que
l’influence du monde contemporain non islamique joue, en particulier,
dans la publicité puisque des figurations y apparaissent et les icones
d’humains augmentent même au fil des années comme je l’ai montré dans
l’analyse des images ci-dessus.
CONCLUSION
Le domaine de la publicité a connu un grand changement dans le
Moyen-Orient et ces changements viennent du fait de l’expansion des
médias. Ainsi, la consommation des images s’est développée, surtout, avec
la parabole qui a envahi tous les foyers et l’icône fait partie de la vie
quotidienne. On est confronté chaque jour et même quelques fois agressé
par tous types de signes : image publicitaire, panneaux, affiches,
vêtements, couleurs, pancartes, mimiques, etc. Notre esprit ou notre
mémoire fait la sélection de ce qui l’intéresse et ce qui est en relation
avec son besoin quotidien. C’est pourquoi, les publicistes essaient à
chaque fois de chercher quelque chose de fort et d’agressif pour attirer et
5Bible, Exode XX, 4.
6Coran, Seurat 5, ‘‘Latable’’, Verset 90 : jä ‘ajjohallaïna
‘ämanö’innamälamrewalmajsirewa l’ansäbewa l’azlämeamalenrizsen min
amalissajtanifaztanibühelaallakemteflihüna.
131
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Moukatil Samira. “ Analyse sémiologique de la femme dans la publicité jordanienne. »
retenir le regard et, par la même occasion, s’incruster dans l’inconscient
et le subconscient de l’individu pour le pousser, par la suite, à la
consommation. Ces trois images s’dressent au public jordanien qui n’est
pas habitué à ce type de scène dans sa vie de tous les jours. Sans l’ombre
d’un doute, ces scènes font rêver plus d’un. Au début, la publicité visait à
être simple et accessible à tout le monde et, surtout, facile à comprendre,
mais, avec le temps, elle a commencé à se compliquer jusqu’au point
qu’elle est devenue abstraite et dépasse l’imagination du spectateur.
Parfois, elle frise l’absurde car, quelques fois, on ne trouve aucun rapport
entre le produit et la publicité. Dans les trois publicités, le rôle de la
femme est second, dans la 1ère et la 2ème images, l’homme est mis en avant
et dans la 3ème image, l’homme est complètement absent car cette activité
est unique aux femmes. Faire vendre cet idéal de liberté et de modernité
alors que la réalité est tout autre chose, bien entendu, le rôle primordial
d’une publicité est de faire rêver, de pousser la population à désirer et,
par là, à acquérir le produit présenté par la publicité. Le symbolique porte
donc au-delà de la signification, voir il est loin de la réalité concrète et
cette dernière est belle et bien présente dans les 3 images mais en
connoté et non en dénoté, on ne peut la comprendre qu’en faisant appel à
l’effet de sens et à ce qui est caché pour les yeux. Il est des publicités qui
suivent les interdits ; la morale, la religion, les mœurs et la politique du
pays et oublient complètement de représenter le produit comme je l’ai
démontré avec échantillon de 3 publicités. De ce fait, pour lire l’image, il
faut que le spectateur-analyste soit très cultivé et ait connaissance des
éléments socio-culturels afférents. Le spectateur doit comprendre,
analyser et mettre les éléments en relation avant d’arriver à la
signification et au sens caché et le plus important ici c’est de supposer.
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Moukatil Samira. “ Analyse sémiologique de la femme dans la publicité jordanienne. »
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