MCP-1 (monocyte chemotactic protein) (17). Les interleukines
sont produites par le muscle lisse en culture incubé avec, par
exemple, du sérum de patient asthmatique, de l’interleukine
1ß, du TNFαet/ou de l’interféron γ. L’interleukine 1ß est une
des principales cytokines pro-inflammatoires. Elle augmente la
synthèse de nombreuses molécules : cytokines, molécules
d’adhésion, enzymes comme la cyclo-oxygénase 2, récepteurs
comme le récepteur B2 de la bradykinine. L’interleukine 6
induit non seulement la maturation des lymphocytes B et la
synthèse d’immunoglobulines, mais aussi l’activation et la dif-
férenciation des lymphocytes T. L’interleukine 8 active les
lymphocytes T et attire les neutrophiles. Le GM-CSF active et
augmente la survie des polynucléaires neutrophiles et éosino-
philes. RANTES a un rôle attractant sur les éosinophiles, les
neutrophiles et, comme MCP-1, sur les monocytes.
La part de la production de cytokines revenant au muscle lisse
sur l’ensemble des cytokines synthétisées dans l’asthme est
difficile à mesurer. Cependant, les études rapportées ci-dessus
suggèrent que le muscle lisse bronchique est susceptible de
potentialiser la réponse inflammatoire des cytokines pro-
inflammatoires comme l’interleukine 1ß, le TNFαou l’interfé-
ron γ.
Synthèse de facteurs de croissance du muscle lisse
Le remodelage des voies aériennes est un des éléments impor-
tants de l’obstruction dans l’asthme. Le muscle lisse est sus-
ceptible de subir des changements structuraux comprenant une
hyperplasie et une hypertrophie en réponse à des médiateurs de
l’inflammation comme l’histamine, l’endothéline, la tryptase
libérée par les mastocytes, des cytokines, des facteurs de crois-
sance, notamment le facteur de croissance dérivé des pla-
quettes (PDGF), le facteur de croissance épidermique (EGF) et
les facteurs de croissance “insuline-like” (IGF-1 et IGF-2).
Certains de ces facteurs de croissance, comme l’IGF-2 ou le
PDGF, peuvent être synthétisés par le muscle lisse lui-même
potentialisant ainsi sa propre croissance (18). La synthèse de
facteurs de croissance, notamment par le muscle lisse, est une
des cibles potentielles de thérapeutiques visant à réduire
l’hypertrophie et l’hyperplasie du muscle lisse bronchique.
Expression de molécules d’adhésion
Les cellules inflammatoires sont attirées dans la paroi bron-
chique par des facteurs chémotactiques produits par les cel-
lules épithéliales, les mastocytes, les polynucléaires éosino-
philes et, comme nous l’avons vu précédemment, les cellules
musculaires lisses. Celles-ci expriment à leur surface des
molécules d’adhésion spécifiques des lymphocytes T, le CD44
et l’ICAM-1 (intracellular adhesion molecule 1). L’expression
de ces molécules, induite par l’interféron γou le TNFα, permet
la fixation des lymphocytes T sur les cellules musculaires
lisses lors de l’inflammation (19). L’interaction entre lympho-
cyte et muscle lisse bronchique pourrait être un facteur déter-
minant d’entretien de l’inflammation, de l’hyperréactivité
bronchique et de la prolifération du muscle lisse. Il a été mon-
tré, par exemple, que les lymphocytes T pouvaient augmenter
la synthèse d’ADN par les cellules musculaires lisses.
Synthèse de prostaglandines
L’interleukine 1ß induit l’expression d’une cyclo-oxygénase de
type 2 (COX 2) dans les cellules musculaire lisses et, par
conséquent, la formation de prostaglandines relaxantes PGE2 et
PGI2, mais aussi contractantes PGF2α, PGD2 et TxA2 (20). La
PGE2 pourrait avoir un rôle important, mais qui reste à définir.
Elle est susceptible d’avoir un effet anti-inflammatoire car elle
inhibe la dégranulation des mastocytes, l’activation des éosino-
philes et la production d’IgE par les lymphocytes. Inhalée, elle
protège vis-à-vis de plusieurs agents bronchoconstricteurs.
Cependant, en augmentant la concentration d’AMPc intracellu-
laire, elle pourrait participer à la désensibilisation hétérologue
des récepteurs ß2-adrénergiques, induite par des médiateurs de
l’inflammation comme l’interleukine 1ß (21).
CONCLUSION
La mise en évidence de nouvelles propriétés du muscle lisse
bronchique le positionne comme un acteur essentiel de
l’hyperréactivité bronchique caractéristique de l’asthme. On le
savait capable de se contracter et de réduire ainsi le calibre
bronchique. Les mécanismes de cette contraction sont de
mieux en mieux connus et permettent d’envisager de nouvelles
voies de recherche thérapeutique. Par ailleurs, il est sujet à un
remodelage conduisant à une hypertrophie et à une hyperplasie
lors de l’asthme chronique, participant à l’obstruction et à
l’hyperréactivité bronchiques. Les mécanismes de ce remodelage
commencent à être démembrés et pourraient également consti-
tuer des cibles pharmacologiques. Enfin, il a été récemment
démontré que le muscle lisse peut participer activement à la
réaction inflammatoire. Cette cellule contractile peut mainte-
nant être considérée comme une cellule inflammatoire à part
entière. La découverte des mécanismes impliqués dans la régu-
lation des fonctions de synthèse du muscle lisse pourrait four-
nir de nouvelles cibles thérapeutiques dans l’asthme. ■
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La Lettre du Pneumologue - n° 2 - décembre 1998