UNIVERSITE TOULOUSE LE MIRAIL
E.S.A.V
MASTER 2 ARTS DU SPECTACLE ET MÉDIAS
PARCOURS IMAGE ET TEXTE
AUX FRONTIÈRES DU THÉÂTRE
ET DE LA PEINTURE
Etude sur les tableaux vivants de Claudie Gagnon
Mémoire présenté par Mariette Bouillet
Sous la direction de Arnaud Rykner
-2009-
C’est par l’art qu’on se dérobe le plus sûrement au monde,
et c’est par l’art qu’on se lie le plus sûrement à lui.
Goethe
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INTRODUCTION
En décembre 2008, Nathalie de Blois, la commissaire de l’exposition C’est arrivé près de chez
vous L’art actuel à Québec, invita l’artiste Claudie Gagnon à investir la rotonde néo-classique du
pavillon Gérard Morisset du Musée national des beaux-arts du Québec afin qu’elle produise et
présente un nouveau spectacle de tableaux vivants. Depuis sa résidence au Studio Cormier
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à
Montréal en 1995 s’opéra dans sa pratique ce passage déterminant de l’art-objet et de
l’installation à sa première création de tableaux vivants, cette invitation au terme de laquelle deux
des tableaux vivants présentés furent achetés par le musée
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marquait assurément une forme de
reconnaissance officielle d’une des plus importantes institutions culturelles québécoises de cet art
jusqu’alors plutôt gratifié de la reconnaissance publique des institutions théâtrales: Le Carrefour
international de Théâtre de Québec et Le Festival de théâtre des Amériques de Montréal. Une
double reconnaissance qui révèle clairement l’ambiguïté d’un art qui ne se situe ni tout à fait du côté
du théâtre, ni tout à fait du côté des beaux-arts mais à la croisée des deux.
Depuis va le vent quand il ne souffle pas?, son premier spectacle au Studio Cormier, à
Dindons et limaces créé dernièrement pour le musée, on distingue une permanence dans ses choix de
lieux sont présentés ses spectacles, des lieux réels et non des espaces culturels destinés à la
diffusion de formes théâtrales (un atelier d’artiste, une église abandonnée, un appartement bourgeois
en ruine, une salle de réception, un ancien bar-restaurant). Si ce choix s’ancre dans sa pratique
antérieure et parallèle de l’installation in-situ, il correspond d’autre part à une formule de «mise en
salle» particulière que l’artiste envisage comme une sorte de «fusion improbable entre le salon dix-
huitièmiste et le cabaret populaire québécois des années «pré-télévision».
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»
De la même façon qu’à la fin du XVIII
e
siècle, la préceptrice des enfants du Duc D’Orléans, la
Comtesse de Genlis «fi[t] faire (…) un petit théâtre portatif, que l’on plaçait dans la salle à manger,
et sur lequel on exécutait des tableaux historiques
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», de la même façon Claudie Gagnon construit des
petites scènes provisoires qu’elle installe d’un lieu à un autre et devant lesquelles elle dispose des
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Constituant l'un des rares exemples d'ateliers d'artistes au Québec, ce studio a été conçu et réalisé par l'ingénieur-
architecte québécois Ernest Cormier; il servait à la fois d'atelier pour la réalisation de ses travaux artistiques, de lieu de
rencontre pour ses amis et de logement temporaire. Acquis en 1941 par le Gouvernement du Québec, il a servi d'atelier
de sculpture aux élèves de l'École des Beaux-Arts de Montréal. Restauré à son état original en 1986, il est à présent mis
à la disposition d’artistes en arts-visuels par le Conseil des arts et des lettres du Québec.
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Le Musée national des beaux-arts du Québec est par ailleurs déjà acquéreur de l’une de ses installations.
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C. Gagnon entretien écrit avec Mariette Bouillet. Mai 2008.
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Comtesse de Genlis, Mémoires inédits […] sur le dix-huitième et la Révolution française depuis 1756 jusqu’à nos jours,
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e
éd., Paris, Ladvocat, t.III, 1825, p.156.
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