19
1. La diversité
des plantes fourragères
Les espèces fourragères cultivées, très nombreuses, ont été
repérées dans les milieux naturels parce qu’elles étaient bien
consommées par le bétail, puis elles ont été sélectionnées
génétiquement sur différents caractères. Elles appartiennent
principalement à deux familles botaniques : les graminées
ou Poaceae (herbacées) et les légumineuses (herbacées et
ligneuses) (encadré 1.1).
Dans la nature, les graminées sont moins diversifiées que les légumi-
neuses ; on trouve environ 10 000 espèces de graminées et 17 000 espèces
de légumineuses. Les graminées recouvrent des surfaces beaucoup plus
importantes que les légumineuses, ont des productions de biomasse
plus élevées et sont plus largement cultivées, notamment pour établir
des prairies. Certains genres intéressants appartiennent à d’autres
familles et conviennent à des milieux particuliers ; c’est le cas du cactus
(famille des Cactaceae) pour les régions sèches, des Atriplex (famille
des Chenopodiaceae) pour les terres arides un peu salinisées, des
Artemisia (famille des Asteraceae), arbrisseaux adaptés aux steppes
arides, et de certains arbres et arbustes de diverses autres familles
(Meliaceae, Rhamnaceae, Capparidaceae, etc.).
La sélection génétique a porté sur leur adaptation à différents milieux
(température, alimentation en eau, sol), leur résistance aux maladies
ou à des ravageurs, leur capacité de production assurant des biomasses
élevées (herbe à éléphant), leur productivité et leur production de
semences. Elle a également considéré la valeur alimentaire, notam-
ment des graminées, et aussi, dans une moindre mesure, des légu-
mineuses (luzernes). Les espèces ont été croisées naturellement ou
artificiellement (hybrides), puis cultivées avec plus ou moins d’intrants
(engrais, traitements phytosanitaires) ; actuellement, certaines espèces
sont améliorées par de nouvelles techniques génétiques.
Les caractères physiologiques, comme la résistance à la sécheresse ou
au gel, et les caractères morphologiques, comme le port des plantes
herbacées (cespiteux, dressé, gazonnant), la proportion entre feuille
et tige, sont aussi des critères de sélection et de choix. Par exemple, la
nature et l’importance des tissus de soutien sont différentes selon la
Les cultures fourragères
20
forme de la plante, ce qui se répercute sur sa valeur alimentaire. Cette
diversité d’architecture végétale se retrouve également chez les arbres
fourragers dont les rameaux, les feuilles, les fleurs et les fruits ont une
accessibilité, une préhensibilité et une appétence variables selon les
espèces animales.
La durée du cycle végétatif et la pérennité sont des critères majeurs
pour classer les plantes fourragères. On tient compte aussi des modes
de reproduction, par voies sexuée, végétative ou apomictique, car ces
critères déterminent les conditions et les coûts d’installation, puis la
stabilité génétique à long terme. Les espèces annuelles s’intègrent
facilement dans des assolements agricoles classiques. En revanche, les
espèces pérennes demandent d’autres modalités d’organisation. La
longévité de ces cultures dépend aussi beaucoup de la bonne adaptation
aux conditions de milieu et des modalités d’exploitation et d’entretien.
Les graminées
La famille des Gramineae (ou Poaceae) tient une place considérable
dans l’alimentation des hommes – puisqu’elle compte presque toutes
les céréales – et dans celle des animaux – les plantes herbacées les
plus communes dans les pâturages étant des graminées. Les céréales,
domestiquées dès le début de l’agriculture, ont permis l’essor des
grandes civilisations. Elles sont devenues des sources importantes de
matières premières pour l’alimentation des animaux domestiques dans
les systèmes intensifiés.
Les graminées usuelles sont parvenues à un degré d’évolution avancé,
qui se traduit par la miniaturisation des pièces florales et la spéciali-
sation des espèces à des environnements très variés. Les 9 700 espèces
connues se répartissent dans presque tous les écosystèmes terrestres
de la planète.
Les graminées peuvent être annuelles ou vivaces, selon la durée du
cycle de développement :
les annuelles ne se développent qu’au cours de la saison des pluies
et ensuite la plante entière se dessèche et meurt ; le maintien de
l’espèce d’une année sur l’autre exige la formation de graines mûres,
processus qui peut être entravé par l’exploitation intense du végétal ;
les vivaces (ou pérennes) persistent plusieurs années consécutives
grâce à leurs racines et leurs bourgeons latéraux situés le plus souvent
au ras du sol dans les zones tropicales.
1. La diversité des plantes fourragères
21
Les graminées présentent en zones tropicales des types morpholo-
giques différents (uniculmaire, cespiteux, gazonnant) dont la distinc-
tion permet de comprendre les dynamiques de croissance et les types
d’utilisation :
les graminées uniculmaires (figure 1.1) ne forment pas de touffes
ou de rosettes. Elles ont un seul chaume qui peut se ramifier dans sa
partie aérienne ;
Encadré 1.1. Rappel des caractéristiques des plantes
Les caractères biologiques
La morphologie de la plante : uniculmaire, cespiteux (pluriculmaire) et
gazonnant (stolonifère, plus rarement rhizomateux).
Le cycle de végétation : annuel (durée du cycle), pérenne (durée de la
culture).
Le type de plante, ce qui détermine la famille : principalement les grami-
nées et les légumineuses.
Le mode de reproduction : par semis, par resemis naturel, par voie végé-
tative (boutures, stolons, éclats de souche).
La régularité de la croissance végétale : saisonnée ou constante.
L’adaptation au milieu.
La rusticité et la résilience aux aléas climatiques : résistance à la sécheresse
et tolérance à l’engorgement, à l’ombrage.
Les besoins en eau, la tolérance à la sécheresse.
Les besoins en température, éventuellement la tolérance aux températures
fraîches, aux gelées.
Les besoins d’ensoleillement.
Les types de sols : la texture, le pH, la fertilité.
La tolérance à des stress induits par les pratiques ou les incidents de ges-
tion : surpâturage, feu, défaut de fertilisation ou d’irrigation.
Les caractères agronomiques
La facilité de mise en place et d’entretien : semis ou plantations, besoins
éventuels en rhizobium.
La compétitivité par rapport aux adventices.
L’aptitude à l’association avec d’autres plantes.
La résistance aux maladies et parasites.
La tenue au pâturage, la capacité de repousse, les refus, la reprise après
la coupe.
Les qualités fourragères
L’aptitude à être consommée : l’appétibilité, l’ingestibilité.
La valeur nutritive : teneurs en énergie, azote, minéraux.
La plasticité aux modes d’exploitation.
Les cultures fourragères
22
les graminées cespiteuses (figure 1.2) sont caractérisées par une
croissance des talles en touffes très nombreuses, en taches, en plages
ou en grandes étendues. La plupart de ces espèces produisent des
graines viables et sont multipliées par semis. Elles offrent l’avantage
de résister particulièrement bien aux incendies et à la sécheresse grâce
à la superposition de gaines foliaires qui protègent les bourgeons.
La plupart des espèces cespiteuses sont particulièrement bien adap-
tées à la zone intertropicale. Les principales sont Panicum maximum
(photo 1.1), Andropogon gayanus, Hyparrhenia rufa, Pennisetum
purpureum (photo 1.4) ;
les graminées gazonnantes sont caractérisées par une croissance de
type prostré avec des stolons ou des rhizomes qui assurent la reproduc-
tion végétative, leur donnant un port étalé et leur permettant une colo-
nisation horizontale par plaques (figure 1.3). Il se forme ainsi un gazon
dense et feutré, mais relativement peu résistant aux incendies. La plu-
part des espèces, qui produisent peu ou pas de semences viables et se
propagent essentiellement par voie végétative, constituent l’essentiel
des pâturages de la zone humide. Les plus courantes sont Brachiaria
humidicola (photo 1.3), Brachiaria mutica, Cynodon dactylon, Digitaria
decumbens, Stenotaphrum secundatum. Certains genres produisent
également des graines comme les Brachiaria et plus particulièrement
B. ruziziensis (photo 1.2)
Photo 1.1.
Panicum maximum cultivarHamil, graminée cespiteuse de haute taille,
à touffes avec des feuilles larges, Burkina Faso. (©B.Toutain)
1. La diversité des plantes fourragères
23
Photo 1.2.
Culture de Brachiaria ruziziensis à proximité
de Bobo Dioulasso au Burkina Faso. (©B.Toutain)
Photo 1.3.
Brachiaria humidicola (Koronivia grass), graminée gazonnante, stolonifère
à port étalé, associée à Desmodium ovalifolium, Guyane française.
(©H. D. Klein)
1 / 12 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !