LES MYSTERES DE L’EAU… L’eau est avec l’air que nous respirons, le plus précieux des patrimoines de l’humanité. Depuis les temps les plus anciens les sources, les fleuves, les océans, la pluie et la rosée tout comme les déluges et les tempêtes, ont engendré dans toutes les parties du monde des mythes aussi nombreux que divers. Mais pourquoi cette vénération pour cette molécule qui n’est pas une rareté absolue dans l’Univers puisqu’on la rencontre sous forme de vapeur ou de glace en des lieux variés de la galaxie ou du système solaire. En fait ce qui est exceptionnel, c’est l’eau à l’état liquide et la Terre est le seul endroit de l’Univers où on sait qu’elle existe sous cette forme. Pourquoi subsiste-t-elle là et si rarement ailleurs sous forme liquide. De plus l’eau est un prodigieux solvant qui permet une chimie complexe aux éléments qui s’y trouvent dissous. Elle s’est enfin montrée indispensable { l’apparition de la vie. Les origines de l’eau sur la Terre. L’eau peut se former naturellement dans des régions variées de l’Univers { partir de ses constituants, l’hydrogène (H) et l’oxygène (o) . L’hydrogène représente plus de 70% de la masse de l’Univers visible, alors que l’oxygène n’en représente que 1%. Mais la présence de ces atomes ne suffit pas pour permettre l’existence de l’eau : il faut des conditions particulières pour favoriser sa formation et sa survie. D’une manière générale, la formation de molécules d’eau nécessite une forte densité et une température pas trop élevée. Chacun sait qu’il existe trois états de la matière : solide, liquide et gazeuse. La molécule d’eau est la seule qui nous apparaisse familièrement sous ces trois états. Mais l’eau du Cosmos existe-t-elle sous forme liquide ? Cet état nécessite une plage étroite de température et une pression pas trop faible. Seules les planètes et leurs satellites offrent de telles conditions. En dehors de celles-ci, c’est donc de la glace ou de la vapeur d’eau que l’on trouvera dans le Cosmos. Vapeur d’eau et glace se rencontrent dans les mêmes zones interstellaires et circumstellaires, mais aussi à l’intérieur des systèmes planétaires formés ou en formation. Cette glace, souvent mélangée { d’autres substances (silicates et ammoniaque, etc…), forme des particules solides dont la taille s’étend du 0,1 micromètre (poussières interstellaires) à quelques milliers de kilomètres (satellites de Jupiter), en passant par quelques dizaines de kilomètres (noyaux des comètes). La glace se sublime (passé de l’état solide { gazeux) rapidement, de sorte qu’on ne la rencontre dans les poussières interstellaires qu’au dessus de la température de 100 K (-173°C). Mais alors comment l’eau est-elle arrivée sur notre planète et pourquoi y est-elle restée ? Pour le comprendre, on peut imaginer que formées { partir d’un matériau solide essentiellement sec, les planètes terrestres ont ensuite été bombardées par une multitude de noyaux de comètes qui, on l’a déj{ dit, sont faits de glace. Formés { l’extérieur du système solaire, ils auraient ensuite été projetés vers l’intérieur par les perturbations gravitationnelles des planètes géantes, en particulier Jupiter et Saturne. Ainsi Venus, la Terre et Mars, auraient reçu des quantités équivalentes de noyaux cométaires. Cependant, { cette origine purement cométaire de l’eau, les scientifiques préfèrent actuellement une autre explication. La nébuleuse serait passée par une phase initiale très chaude où tout le matériau initial des poussières se serait évaporé. Ensuite, le refroidissement progressif de cette vapeur aurait conduit à la condensation de nouveaux grains solides, dont la composition serait fonction de la distance au Soleil. On a pu ainsi montrer qu’{ la distance d’une unité astronomique (1 UA - distance de la Terre au Soleil), se sont condensés, non pas de l’eau, mais des minéraux bien connus comme des silicates hydratés, où la molécule d’eau participe { la formule chimique. Ces nouveaux grains de poussières se sont ensuite agglomérés les uns aux autres, pour former des corps de taille kilométrique. Des traces de tels impacts sont visibles sur la Lune. Leur accrétion rapide permet alors la libération de l’eau sous forme de vapeur { la surface de la planète, soit au moment de l’impact, soit plus tard par dégazage volcanique. Pour la Terre, la suite est facile à reconstituer. Sa surface se refroidit à une température où l’eau se condense sous forme liquide, bien au-dessus de 0°C. Le gaz carbonique, très abondant dans l’atmosphère primitive de la Terre, se dissout dans cette eau, puis précipite sous forme de carbonate de calcium. Il disparait ainsi progressivement de l’atmosphère. L’important effet de serre qu’il provoquait, diminue et la température de la Terre s’équilibre { un niveau plus frais, voisin de celui que nous connaissons actuellement. Ainsi nous avons le privilège de connaitre l’eau { l’état liquide. Placée un peu plus près du Soleil, { 0,95 UA au lieu de 1 UA, par suite d’un ralentissement fortuit de sa course, la Terre recevrait 10% d’énergie solaire en plus et alors elle s’échaufferait et connaitrait le sort de Vénus par effet de serre divergent. De même, placée un peu plus loin du Soleil (environ 1,03 UA), elle connaitrait une glaciation que rien ne pourrait freiner, a l’instar de Mars, les océans gelant jusqu’au fond. Par analogie avec des étoiles de même type, nous savons que le Soleil augmente son énergie de 1% en 100 millions d’années. Dans 1 milliard d’années il aura augmenté son énergie de 10% et l’eau liquide disparaitra de la Terre. Ce problème n’est cependant pas le plus urgent que l’humanité aura { résoudre pour survivre sur sa planète bleue. La structure de l’eau L’eau, qui a-t-il de plus simple, serait-on tenté de dire ? Pourtant ce liquide que nous connaissons si bien, est en réalité fort complexe et est encore de nos jours imparfaitement compris. L’eau est dotée de propriétés physico-chimiques, qui en font sa spécificité sous-jacente à ses propriétés. Présente en abondance Presque partout sur le globe, l’eau détermine en grande partie les paysages et les climats. Elle est souvent synonyme de vie ; l’eau est en effet une composante essentielle de la structure et du métabolisme de tous les être vivants. Ce rôle biologique primordial n’est certainement pas dû au hasard, mais tient à ses exceptionnelles propriétés physiques et chimiques. Par exemple une propriété importante est l’effet hydrophobe, c’est-à-dire le fait que les groupements hydrocarbonés CH ont tendance à être rejetés par les molécules d’eau. Cet effet est responsable, en grade partie, des structures spatiales complexes que représentent les protéines, l’AND, les bicouches lipidiques des membranes cellulaires, lesquelles seraient instables en l’absence d’eau ; et l’on peut dire sans risquer de se tromper, que cet effet a dû jouer un rôle déterminant dans l’apparition de la vie sur Terre. Ce n’est qu’au XVIIIème siècle qu’a été établie que la molécule d’eau était constituée de deux atomes d’hydrogène et d’un d’oxygène, ce qui donne la formule H2O. Disons que cet assemblage de molécules fait que l’oxygène est chargé négativement et les hydrogènes positivement. Il s’ensuit un fort déséquilibre électrique (ou moment dipolaire électrique), qui va être responsable du fort pouvoir dissolvant de l’eau vis-àvis des cristaux ioniques comme certains sels, acides ou bases. Mais la clé de bien des propriétés de l’eau réside dans les liaisons que la molécule va pouvoir réaliser avec ses voisines. Plusieurs cas de figures seraient alors à évoquer, mais { l’heure actuelle il n’y a pas de concordance absolue entre eux et il faudra sans doute attendre encore quelques années pour avoir une idée très précise des différents évènements. L’eau liquide et l’apparition de la vie sur Terre Notre planète Terre s’est formée il y a environ 4 milliards d’années et le premier milliard a été probablement le siège de phénomènes géologiques très importants avec des températures très élevées, des manifestations volcaniques inimaginables aujourd’hui, un bombardement cométaire et ultra-violet créant des conditions climatiques cataclysmiques mais heureusement propres à la création de molécules organiques nécessaires { l’apparition d’organismes animés donc de vie. Durant plus de deux milliards d’années, cette vie va se développer dans l’eau liquide car il n’y a pas d’oxygène dans l’atmosphère terrestre donc pas de couche d’ozone protectrice contre les uv. L’oxygène va se former progressivement grâce { l’apparition de végétaux aquatiques qui de part leur métabolisme, vont absorber le CO2 et rejeter dans l’atmosphère cet oxygène, lequel va élaborer progressivement la couche d’ozone qui va permettre { la vie de s’exprimer hors de l’eau liquide. Les premiers à émerger, ont été bien sur, les végétaux puis enfin les animaux. Notons bien toutefois que l’oxygène, et cel{ peut paraitre un paradoxe, est un poison pour la vie, il ne sert à rien dans la constitution d’un organisme. La preuve en est que la vie est apparue sans oxygène et que de plus les produits oxygénés (comme par exemple l’eau oxygénée) servent à détruire des organismes vivants, car ils n’ont pas le matériel enzymatique nécessaire pour détruire les produits oxygénés. En revanche l’oxygène sert, dans la vie animale, à oxyder les molécules résultant du métabolisme cellulaire afin qu’elles puissent être polarisées et éliminées par les reins ou estérifiées et éliminées par les poumons. L’être humain se compose { environ 60% d’eau liquide, ce qui correspond à 42 litres de liquide pour un poids de 70 kg. Cette proportion doit rester stable pour que les fonctions essentielles de l’organisme, puissent se dérouler normalement. L’eau liquide, très bon solvant, va servir { transporter jusqu’aux cellules les éléments nutritifs dont elle a besoin, et va en retour se charger des produits du métabolisme cellulaire, pour les conduire vers les organes servant à leur élimination. Ainsi tout un processus est mis en œuvre pour maintenir constante la quantité d’eau corporelle. Un léger déficit va déclencher la sensation de soif, grâce à des récepteurs, situés dans les vaisseaux sanguins et dans le cœur, eux-mêmes sensibles à des déficits de volume ou de pression. D’autres récepteurs situés dans l’hypothalamus vont eux être sensibles à une variation de la concentration en sel dans le sang. De plus le signal de soif fait intervenir certaines hormones, dont l’hormone antidiurétique (ADH) qui va inciter les reins { éliminer moins d’eau. Nous voyons ainsi que l’organisme sait combine l’eau liquide lui est précieuse, car il a mis en œuvre toute une batterie de garde-fous pour l’économiser. Chez les végétaux on observera des mécanismes identiques visant à une économie souvent drastique de l’eau, car les végétaux n’ont pas la possibilité de se déplacer pour aller chercher ailleurs l’eau qui leur fait défaut { un endroit donné. Les êtres unicellulaires enfin vont développer un mécanisme de survie en cas de manque d’eau, en se déshydratant totalement, ce qui arrête leur métabolisme cellulaire, et en élaborant une coque autour d’eux, totalement imperméable { tout échange, ce qui va leur permettre de subsister jusqu’{ l’apparition de nouvelles conditions favorables. Enfin l’importance vitale de l’eau pour l’organisme est démontrée par le fait que l’on meurt de soif après quelques jours de privation d’eau, tandis que l’on peut survivre jusqu’{ 70 jours sans prendre de nourriture solide, si l’on peut boire suffisamment. Le cycle de l’eau et le climat Depuis des siècles, le cycle de l’eau sur notre planète, a mobilisé les esprits et nombre de chercheurs. Facette essentielle de la vie sur Terre, les échanges permanents d’eau dans l’hydrosphère (l’évaporation, les précipitations et les écoulements), partie terrestre de ce cycle, ont longtemps motivé l’intérêt des spécialistes, mais aujourd’hui la partie atmosphérique connait, elle aussi son heure de gloire { une époque où l’on cherche { optimiser les méthodes d’irrigation ou d’exploitation. Le cycle de l’eau comporte deux parties principales. La partie terrestre est représentée par tout ce qui concerne l’écoulement et le stockage des eaux sur la terre et dans les océans. La partie atmosphérique du cycle est assurée par les transports d’eau dans l’atmosphère, principalement sous forme de vapeur. Sur Terre, l’eau est répartie sous toutes ses formes : liquide, solide ou vapeur. Elle est répartie dans cinq réservoirs interconnectés dont l’ensemble constitue l’hydrosphère. Les océans représentent le plus important de ces réservoirs soit 97% de l’hydrosphère, suivis par les dépôts de glace ou de neige soit 3%, principalement localisés aux pôles. Quant { l’atmosphère, elle ne renferme qu’un cent-millième du contenu en eau du système climatique. Ceci peut sembler étonnant : l’abondance des précipitations, leur influence sur le climat et les ressources hydrologiques, paraissent en effet totalement hors de proportion avec la quantité minime d’eau présente dans l’atmosphère { un instant donné. Ce qui varie beaucoup c’est la durée de séjour de l’eau dans chacun des réservoirs. Ainsi la durée de séjour de l’eau est en moyenne de neuf jours dans l’atmosphère, alors qu’elle atteint plusieurs milliers d’années dans les glaces polaires ou les océans. De plus ces réservoirs sont l’objet de transferts incessants de vastes quantités d’eau au sein du système climatique. En fait, on peut considérer que tout part de l’océan et que tout y revient d’une manière ou d’une autre. La quantité d’eau dans l’atmosphère varie en fonction de la latitude et de la longitude du lieu, mais aussi et surtout en fonction de l’altitude. Plus de 50% de la vapeur d’eau est confinée sous une enveloppe correspondant à 1500 mètres (soit 850 millibars) et plus de 90% de l’eau précipitable se trouvent { des altitudes inférieures à 5600 mètres (soit 500 millibars). Le variations saisonnières de la quantité d’eau en fonction de l’altitude sont parallèles aux variations de températures correspondantes, et sont donc plus prononcées dans l’hémisphère nord que dans le sud. Enfin pour mieux appréhender le mécanisme des précipitations, il convient de comprendre les mouvements des masses d’eau atmosphériques, c’est-à-dire les processus d’écoulement aérien. Ni l‘intensité, ni la direction de ces mouvements, sont uniformes : leur intensité au-dessus des océans est nettement supérieure, ce qui se traduit par un transfert de la vapeur d’eau vers les continents. Es interactions entre branche atmosphérique et terrestre de l’hydrosphère permettent de maintenir l’état de quasi équilibre du système climatique. Toutefois un déséquilibre prolongé entraine occasionnellement des conditions de sécheresse ou d’inondation. Bien entendu, l’énergie du rayonnement solaire, est le moteur principal de la circulation de l’eau. Cette énergie solaire est partiellement redistribuée au sein du système climatique par l’intermédiaire des transitions de phase, subies par l’eau, dans la branche atmosphérique du cycle de l’eau. De plus, le rôle de la vapeur d’eau et des nuages dans les processus de réflexion, d’absorption et d’émission des rayonnements solaires et terrestres, font du cycle de l’eau, un des facteurs clés, dans la dynamique du climat. Conclusion Si toutes les facettes de l’eau sur notre Terre n’ont pas été abordées dans ce court exposé, c’est qu’elles sont très nombreuses et surtout encore mal connues. L’intérêt de cet exposé est d’essayer de montrer que c’est au fait exceptionnel dans l’Univers, de pouvoir disposer d’eau liquide sur notre planète que l’on doit la vie et donc notre existence, et que ce bien précieux doit être préservé au maximum de nos moyens, même si en fin de compte on sait que ce bien disparaitra avec notre système solaire, mais ceci ce ne sera pas avant 5 { 6 milliards d’années, alors en attendant, tachons d’en profiter un maximum, avec pas mal de circonspection. Robert Drouhault