O. Pellet, F. Cotton, I. Morelec, C. Peker, G. Loubet, A. Bonmartin Place de l’imagerie morphologique et fonctionnelle dans l’exploration du cancer colo-rectal. O. Pellet1,2, F. Cotton1, I. Morelec2, C. Peker2, G.Loubet2, A. Bonmartin2 1 Service de Radiologie Service de Médecine Nucléaire Centre Hospitalier Lyon Sud - 69495 Pierre Bénite Cedex 2 Résumé Dans l’exploration du cancer colo-rectal l’endoscopie demeure la référence mais cet examen n’est pas anodin et peut être incomplet. En raison de sa faible sensibilité le lavement baryté n’a plus sa place. Le colo scanner représente une alternative diagnostique intéressante en raison de sa performance et de sa facilité d’accès et d’exécution. Le TEP au 18FDG occupe une place déterminante dans le suivi évolutif des cancers colo-rectaux opérés. Son association avec un scanner (TEP-TDM) devrait améliorer sa fiabilité diagnostique et augmenter ses indications. Cancer colo-rectal / Imagerie morphologique / Imagerie fonctionnelle PROBLÉMATIQUE !Les cancers colo-rectaux sont les cancers les plus fréquemment rencontrés dans le monde tout âge et sexe confondus. En France on en dénombre près de 35 000 nouveaux cas par an et ils sont responsables de plus de 14 000 décès. La France, comme tous les autres pays de l’Europe de l’Ouest, l’Australie et les USA est un pays à risque élevé de la maladie. L’âge moyen au moment du diagnostic est de 70 ans. Le taux de survie à 5 ans est de 40% tous stades confondus. Le taux d’incidence de la maladie a augmenté jusque dans les années 90 mais tend maintenant à se stabiliser. On est donc en présence d’une pathologie fréquente, se développant dans un pays à risque élevé, détectée à un âge relativement jeune et dotée d’un pronostic correct.Tout doit donc être mis en œuvre pour assurer son diagnostic précoce, la survie étant directement liée au stade de développement de la maladie cancéreuse. MOYENS DIAGNOSTIQUES !Autrefois exclusivement constitués par l’endoscopie et les méthodes radiologiques conventionnelles [1] (la- Correspondance : Olivier Pellet Service de Médecine Nucléaire - Centre Hospitalier Lyon Sud - 69495 Pierre Bénite Cedex Médecine Nucléaire - Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2005 - vol.29 - n°2 61 Place de l'imagerie morphologique et fonctionnelle dans l'exploration du cancer colo-rectal vement en simple ou double contraste) l’avènement des nouvelles techniques scannographiques a modifié les choses. faible de 44 à 89 %. Actuellement elle ne garde que de très rares indications. La tomodensitométrie L’endoscopie !C’est la méthode diagnostique de référence [2] car elle seule visualise la lésion et apporte la preuve de sa malignité par la biopsie qu’elle permet de réaliser dans le même temps. Cet examen présente cependant certains inconvénients. Il peut être incomplet dans 2 à 30% des cas [3,4,5]. Il expose à des complications dont les plus graves sont représentées par la perforation et nécessite une anesthésie générale avec les risques et les contraintes inhérentes à cet acte. La radiologie conventionnelle !Historiquement le lavement en simple contraste a été le premier moyen diagnostique du cancer colo-rectal. Il consistait à remplir le colon avec un produit de contraste radio -opaque de type baryte fluide ou hydrosoluble. Le processus tumoral n’était pas visualisé mais on observait à sa place un défaut localisé de remplissage de la lumière digestive donnant la classique image Figur en "trognon de pomme". (F iguree 1 1). Il s’agissait donc d’une imagerie en négatif de la tumeur. La technique a été améliorée avec le lavement baryté en double contraste [6]. Après administration première d’une fine couche de baryte on insufflait le colon avec de l’air sous pression afin de déplisser la lumière colique et d’obtenir une mucographie. Jusqu’aux progrès récents de l’endoscopie, le lavement baryté en double contraste est longtemps resté la technique diagnostique de référence. Cependant de nombreux inconvénients le caractérisaient. Si la mucographie procurait une séméiologie radiologique plus fine, elle ne fournissait elle aussi qu’une imagerie en négatif de la tumeur. Elle exposait par ailleurs à des complications et s’avérait surtout très opérateur et patient dépendante avec une sensibilité très 62 !C’est elle qui constitue les bases de la nouvelle imagerie diagnostique du cancer colo-rectal grâce aux avancées technologiques majeures dont elle a bénéficié ces dernières années [7,8,9,10]. Initialement incrémentale, puis spiralée, la technique scannographique est maintenant de type multi-coupes. Grâce aux multiples détecteurs dont sont équipés les anneaux des scanners de dernière génération (TDM multibarrettes) un volume très important est acquis en un temps très bref (un body scanner dans le contexte de l’urgence peut être réalisé en moins de 20 secondes).Les coupes ainsi obtenues sont de très faible épaisseur pouvant descendre jusqu’à 0.75 mm. L’acquisition étant de type volumique des reconstructions peuvent alors être réalisées dans tous les plans de l’espace à partir de ces coupes natives. Ces deux derniers éléments facilitent grandement l’interprétation radiologique. Ces avancées technologiques ont été appliquées à l’imagerie du cancer colo-rectal donnant naissance au coloscanner.A la différence des techniques radiologiques conventionnelles cette imagerie en coupes fournit une imagerie positive de la lésion .Celle ci est directement visualisée sous la forme d’une image tissulaire pariétale à développement endo et extra luminal plus ou moins marqué selon l’imporFigur es 2,3 tance de la néoplasie (F igures 2,3). La TDM visualise aussi les éléments de voisinage : péritoine, graisse mésentérique bordante, vaisseaux , structures digestives et urinaires... et permet ainsi d’apprécier leur éventuel envahissement. De la même manière il permet de détecter la présence de métastases à distance : ganglionnaires, pulmonaires, hépatiques, osseuses, surrénaliennes, cutanées…En un même examen le diagnostic positif et le bilan d’extension sont donc réalisa- Médecine Nucléaire - bles permettant ainsi d’établir d’emblée une stratégie thérapeutique. Ce colo-scanner peut être réalisé à l’air ou plus volontiers à l’eau [11,12]. Dans les deux cas on obtient une distension colique facilitée par l’administration préalable d’un anti-spasmodique. L’injection concomitante d’un produit de contraste intra-veineux augmente le contraste spontané tumeur-paroi digestive. L’acquisition de coupes très fines et les reconstructions multi-planaires réalisables en post-traitement permettent alors une analyse fine du relief muqueux digestif et la détection de lésions tumorales. Par ailleurs on dispose de nombreux procédés de traitement d’images avec la possibilité notamment de réaliser une colonoscopie virtuelle associant à la visualisation de la paroi colique une notion dynamique par l’animation des images. La validation de ces méthodes est en cours par des travaux prospectifs. En l’absence du résultat définitif de ces séries le coloscanner à l’eau est actuellement réservé aux échecs de la colonoscopie (exploration incomplète), aux contrindications de celle-ci liées à l’âge ou au terrain du patient et enfin à la recherche d’un primitif recto-colique devant la découverte de métastases hépatiques sur une TDM motivée par des signes digestifs et généraux. Cependant le souci de prévention de cette néoplasie pourrait dans l’avenir repositionner le colo-scanner. En effet, en raison de son innocuité et de sa facilité d’accès et de réalisation, cette technique pourrait peut-être trouver sa place dans la surveillance des sujets à risques (néoplasies familiales, maladie de Lynch…) à la recherche de polypes bien que l’on sache que le seuil de détection en TDM de ces derniers soit encore de 10 mm. De la même manière le colo-scanner à l’eau pourrait être proposé chez les patients présentant un hémocult ® positif [13,14]. La colo-IRM !Méthode prometteuse, la colo-IRM est en cours de développement [15]. Basée également sur l’acquisition de coupes fines et sur les reconstructions Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2005 - vol.29 - n°2 O. Pellet, F. Cotton, I. Morelec, C. Peker, G. Loubet, A. Bonmartin Figure 1 Lavement baryté en double contraste et aux hydrosolubles : image de stop tumoral sur le transverse et le sigmoïde Double and single contrast barium enema : left and transverse colon cancer. Figure 2 Colo-scanner à l’eau : tumeur colique droite Water enema CT : right colon cancer - Figure 3 Colo-scanner à l’eau : cancer colique gauche. Coupe transverse et reconstruction coronale Water enema CT : left colon cancer ; axial and coronal views Médecine Nucléaire - Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2005 - vol.29 - n°2 63 Place de l'imagerie morphologique et fonctionnelle dans l'exploration du cancer colo-rectal multi-planaires, la colo-IRM présente quelques avantages (liés à ses propriétés physiques) sur la TDM [16,17,18]. En effet, en jouant sur le contraste spontané ou induit par les agents paramagnétiques, elle permet non seulement l'analyse de la paroi digestive mais également de l'atmosphère péridigestive. Ceci étant particulièrement intéressant pour juger de l'envahisse- ment de la graisse mésentérique périFigur tumorale (F iguree 4 4) et des mésos (notamment dans le cancer du rectum). En revanche, à la différence de la TDM qui est une méthode de qualité relativement constante, la colo-IRM est très dépendante du patient, de la machine et des séquences utilisées rendant sa qualité et ses résultats plus aléatoires. cès encore limité à cette technique en raison d’un parc restreint de machines ne permet pas de la proposer en routine dans cette indication. Par ailleurs la mise sur le marché de machines mixtes TEP-TDM va certainement modifier la place de cette imagerie métabolique dans la stratégie diagnostique. En effet l’association d’une imagerie fonctionnelle sensible à une imagerie morphologique paraît très prometteuse en termes de précision et fiabilité diagnostiques grâce à la fusion de ces images TEP et TDM. CONCLUSION Figure 4 - Colo-IRM : tumeur de la face antérieure du rectum MR colonography : rectum cancer L’échographie !La découverte au cours d’une échographie percutanée de processus tumoraux est anecdotique et sous-entend que la lésion est très volumineuse. En revanche elle est utile dans le bilan d’extension à la recherche de métastases. L’échographie endo-rectale occupe quant à elle une place de choix dans le cancer rectal permettant notamment l’analyse des différentes couches pariétales à la recherche d’envahissement ou d’adénopathies. LA TEP au 18FDG !Reposant sur l’hyper métabolisme des processus néoplasiques, la TEP au 18 FDG visualise les zones de haute con- 64 sommation glucidique tumorales sous la forme de foyers hyperfixants sur Figur l’examen scintigraphique (F iguree 5 5). En raison de sa très bonne sensibilité et de sa haute résolution en contraste cette nouvelle technique d’imagerie occupe maintenant une place importante dans le cancer colo-rectal [19,20,21,22]. Elle joue un rôle primordial dans le suivi évolutif de la maladie notamment dans la recherche de récidive [23] et tout particulièrement devant une ascension isolée de l’ACE avec une imagerie conventionnelle négative. Elle permet de juger l'efficacité d'une chimiothérapie sur les métastases hépatiques notamment [24,25,26]. Elle est également très utile pour différentier une fibrose post radique d’une récidive tumorale. Sa place dans le bilan d’extension de la maladie et notamment dans le bilan préopératoire à la recherche de contrindications à la chirurgie (métastases à distance) est certainement de première importance. Cependant, l’ac- Médecine Nucléaire - !Si l’endoscopie demeure l’examen de référence dans le cancer colo-rectal grâce aux biopsies réalisables dans le même temps, le colo-scanner et particulièrement celui à l'eau semblerait être une alternative diagnostique intéressante. Son innocuité, sa facilité d’accès et de réalisation le rendent attractif et s’il est actuellement principalement réservé aux échecs de la coloscopie il est probable qu’il trouve dans l’avenir d’autres indications. Parmi celles-ci, si la technique et la lecture des images continuent à progresser, la surveillance voire le dépistage du cancer colo-rectal dans les populations à risque et chez les patients présentant un hémocult ® positif pourraient être envisagés. Enfin la TEP-TDM, associant la sensibilité de l’imagerie fonctionnelle à la précision de l’imagerie morphologique est une technique efficace réservée actuellement au suivi évolutif de la maladie mais qui verra ses indications croître avec le nombre de machines, notamment dans le bilan d’extension initial du cancer colo-rectal. Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2005 - vol.29 - n°2 O. Pellet, F. Cotton, I. Morelec, C. Peker, G. Loubet, A. Bonmartin Figure 5 - Colo-scanner à l’eau : cancer colique droit Correspondance sur le TEP : foyer hyper fixant Right colon cancer : PET and CT images Morphological and functional imaging of the colo-rectal cancer In colorectal cancer detection, colonoscopy is the benchmark but this exam can be risky and sometimes incomplete. Because of its low sensibility baryum enema is obsolete. CT colonography is a good diagnostic alternative because it is easily accessible and applicable. FDG PET is an important process in the post operative follow-up of colorectal cancer patients. Its combination with CT (CT- PET) scan should improve its diagnostic accuracy and increase its indications. Colorectal cancer / Morphological imaging / Functional imaging RÉFÉRENCES 1. Rex DK,Rahmani EY,Haseman JH et al.Relative Sensitivity of Colonoscopy and Barium Enema for Detection of Colorectal Cancer in Clinical Practice. Gastroenterology 1997;112:17-23. 2. VanDerWerken BS,Wu WC. 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